Chronique n°1
Vie Parisienne,
la place du massage dans la sexualité.
Par
Alain
Cabello-Mosnier. P/O le CFDRM
Libre de droits non commerciaux.
Rédigé
à Paris le : jeudi 17 janvier
2013
Revue
: La vie Parisienne ou le challenge d'un masseur.
Mais
qu'est-ce qui fait qu'un masseur
dirigeant un des rares instituts de massage
de relaxation à Paris qui soit
tenu par un professionnel masculin qui de plus est chercheur
en massage,
puisse accepter de paraître dans la revue la Vie
parisienne sans être happé à
cette thématique des corps
sur papier ?
Car
enfin, le Massage-Français
fait tout pour se dissocier de la sexualité,
(ce n'est pas du tantrique), la Vie
parisienne fait du sexe son sujet ;
je suis un ayatollah du massage et mon éthique au quotidien
est monastique alors que beaucoup ne voit dans le massage
que son versant érotissant
que je comprends mais je remarque à peine ;
l'Institut alain cabello dispense un Massage-Français
de très grande qualité pouvant aller jusqu'à
6h d'affilée sur la même personne, la revue
dans laquelle je pourrais m'exprimer devrait donc nécessairement
être de contenu... Et pourtant, j'adore l'idée
de m'adresser aux lecteur(rice)s de la Vie
parisienne, mais pourquoi ? La détestation
viscérale de la hiérarchisation des genres
par la sexualité.
Et puis, le diocèse
de Paris a bien installé une Chapelle Sainte
Rita dans le quartier de Pigalle, c'est bien parce que
les gens qu'il y trouve valent mieux que l'image qu'on
en a ...
Ceux
qui y touchent et ceux qui n'y toucheraient pas !
La
question liminaire qu'il faudrait se poser c'est, « Un
lectorat abonné à une revue à contenu
sexuel est-il pour autant addict à la sexualité ? »
Je considère que si c'est l'espèce qui
explore à sa façon les possibilités
de la reproduction, c'est bien la nature-même
du vivant et de ses stratégies de duplication
qui fait du sexe sous toutes ses formes une addiction.
En un mot, c'est le vivant le responsable, pas l'espèce.
Pourquoi persiste-t-on à ne voir le sexe que
dans les supports qui nous rassure de voir ? Pas un
seul interstice de la vie ne dispose pas d'une part
d'exhibition permanente de la sexualité, la mode,
l'art du maquillage, les boites de nuits, la chaleur
de la peau, les odeurs... Posons maintenant la question
à l'envers. Un lectorat abonné
à une revue « sans contenu sexuel »
est-il pour autant sans sexualité ? Y pense-t-il
moins que ceux ou celles lisant la Vie
parisienne ? Et surtout,
ce dernier, lecteur ou lectrice scoptophile
(voyeur)
ne lirait-il donc que cela ? Des absorbeurs sans
discontinue de sexe ?
On voit bien que c'est par trop binaire pour
être vrai. Simone de Beauvoir
disait du manichéisme, dans Le deuxième
sexe Ed. Gallimard 1949, tome 2 , page 490
"Le manichéisme rassure l'esprit en supprimant
l'angoisse du choix..." Ne pas choisir, voilà le rêve
contrôlé de la stabilité du vivant
devenant le cauchemar de celui ou de celle qui veut
que sa vie lui appartienne le plus possible. Je
pense vraiment que ce que le cerveau prend est valable
quel que soit le support. Un avis reste un contenu.
Ne pas écrire dans la Vie
parisienne à cause
de ce qu'elle est « revient à ne pas
la lire pour ce qu'elle n'est pas », une
diseuse de contenu dont l'objet serait contraire à
ce que l'esprit nous suggère ou plutôt
ce qu'on souhaite lui suggérer pour des raisons
de convenances sociale. C'est la permanente dichotomie qui existe et que je rencontre
dans mon travail de masseur intervenant
sur des corps nus lors
de ce Massage-Français globaliste
dans lequel le sexe et l'anus peuvent
être massés, c'est-à-dire le moment de séparation
entre le pulsionnel qui exige assouvissement
et le cérébral qui mesure, coordonne et oriente la raison raisonnable. Toute construction sociale implique
des montages comportementaux qui aboutissent à
des contraintes de groupe. La pulsion dit « je veux tout, tout de suite
et maintenant » et le cerveau partenaire
de cet ensemble humain lui répond « Oui,
mais attention aux conséquences. ».
La sexualité est une
inter-réfraction de soi entre le
perçu et l'admis. Plus l'espèce se complexifie, plus
elle doit faire d'allées et venues entre les
trois cerveaux qui se superposent dans un crâne
humain, le reptilien, ancêtre
de l'ère où nous étions des reptiles,
le mammalien qui est celui des mammifères et le
néo-cortex qui constituent
la dernière couche de l'encéphale organisé
chez l'homo sapiens sapiens. La pulsion
se doit de communiquer avec la raison qui elle-même
se doit d'écouter ses instincts.
Qu'elle serait donc la conséquence
d'écrire ou de lire une revue abordant le sexe
dans ses pages ? Pauvreté de la nature ou
du lecteur ? Et si la Vie
parisienne faisait anthropologiquement partie intégrante d'un système
plus grand qui serait la résultante de la place
de la sexualité aujourd'hui chez l'homme, à
ce stade de son évolution sociale ? Où
est mon corps ? Que faire avec la sexualité,
la mienne et celle des autres ? Jusqu'où
aller et pourquoi ? Bingo, c'est exactement l'objet
de mes recherches en tant que masseur.
J'écris dans une revue qui affiche
la couleur sur un métier, « masseur »,
et les diverses techniques
ou pratique
« massages » qui demandent que soit établit
leur spectre des couleurs de la sexualité que
l'on rencontre lors d'une séance.
Le massage implique une intéraction entre deux
personnes et un mécanisme économique qui
le comptabilise. Il n'y a pas de raison d'avoir
peur d'un format qui pose la question du corps lorsque
l'on en fait son métier et ce, quel que soit
l'aboutissement.
Le toucher est un proto-massage, ainsi, tout ce qui passe par lui en devient
invariablement un.
Le toucher est un proto-massage, ainsi, tout ce qui passe par lui en devient
invariablement un. C'est juste son élaboration
qui change. C'est ce que je cherche à faire comprendre
à chacun d'entre-nous et particulièrement
aux praticien(ne)s du massage au sein de ce Centre de recherche sur les
massage
sur lequel je travaille. Il n'y a plus de raison de
séparer les professionnel(le)s du sexe, engeance annoncée de la profession,
des masseur(se)s
établit, eux-mêmes distingués entre
ceux exerçant à domicile ou chez eux de
ceux installés en institut comme moi mais immédiatement
disqualifiés par les kinésithérapeutes
dont la profession s'est abusivement octroyée
le terme de massage et de masseur. Un anulingus,
une caresse contiennent autant de matière massante que
des années de formation en shiatsu,
c'est juste le prisme qui change et dont la multiplicité
des facettes décuples les possibilités
de perceptions.
Pour être masseur il suffit juste d'être vivant et d'aimer
toucher l'autre, la différenciation des genres
se fera par la spécificité de ce toucher
et non par la stigmatisation des pratiques. En horizontalisant
les pouvoirs, en abandonnant la pyramide des échanges
pour celle du dialogue avec les corps par le corps s'établit
ainsi la dialectique du vivant.
Par exemple en Massage-Français organique
nous massons tout, le sexe est travaillé par acupression,
le sphincter anal sera massé par l'introduction
de la première phalange afin de mettre la génitalité des formes à égale distance
des organes. Vous vous rappelez que dans mon premier
papier, je vous parlais de la nécessité
de ne pas réduire le sexe à sa fonction
génitale ou urinaire sans quoi nous serions dans
une sorte de posture anti-corporelle ? Ca ne signifie
pas que l'amour, le sexe, affectif ou prostitutionnel soient la négation de l'autre, ils
cohabitent en chacun d'entre-nous sous la forme que
la conscience, l'éducation et/ou la culture veulent
bien nous les proposer mais en Massage-Français, la valeur
sera celle de la conductivité des organes. Si
la Révolution française a fait de nous
des hommes devenus des citoyens libres et égaux
en droit, alors notre corps doit à son tour entamer
sa mue et exiger l'égalité des organes
au bénéfice du corps comme du massage.
La sur-représentation du pénis-monarque
comme omniprésent, omniscient et omnipotent est
un marqueur inconscient de la position de tel organe
par rapport à tel autre sur le corps tout en
révélant ses déséqulibres.
Le corps n'a pas de centre et le sexe ne peut être
son axe.
Le corps nu couché dans la sexualité tel que le propose la Vie
Parisienne est le même
que celui qui s'exprime en massage. Des gens sont nus, massé(e)s des
heures et la finalité est à 98% la même
alors-même que je ne la pratique
pas. Je m'explique. Le corps a ses propres exigences
que l'éducation complique mais qu'une séance
re-libère. Quelle que soit la finalité
du massage,
prostitutionnelle ou se suffisant de sa seule technique
rencontre l'invariable mécanique du désir.
L'homme ou la femme qui s'ouvre sous les d'un tiers
détenteur supposé des règles sacrée
de l'érotisme.
Le Massage-Français déconstruit à chaque séance
cette dynamique pour n'en retenir que l'implication
politique, social du corps. C'est du féminisme
et du masculinisme
appliqué au massage. Les gens se couchent devant moi mais moi je
me lève devant eux, et leurs yeux refermés
sur ces instants rares dans la vie d'un homme m'oblige
descendre avec eux dans le pays de leur propre sensations. Masseurs ou masseuses sont des Arianes du voyage, des guides qui
décident eux-même de la longueur du fil
permettant à Thésée mythologique d'affronter le Minotaure
gigantesque qui circule dans l'imagination de chacun.
Le sexe fait peur autant qu'il fascine et peu d'entre-nous
savent aller à sa rencontre sans détruire.
L'art du massage c'est l'art d'être deux et de le
rester en acceptant d'avoir comme ciel au-dessus de
soi la présence bienveillante de l'autre, guide
attentif de ce qu'en réalité je découvre
avec lui. Je suis ton alter-égo, je suis ton
masseur(se) d'un soir.
La Vie parisienne est un
des yeux d'Argos parmi cent autres, un monde possible
dans l'imaginaire de chacun(e). C'est une manière
de chevaucher le corps, celui d'un homme,
d'une femme,
d'un(e) transexuel(le), d'un(e) homosexuel(le)
en le donnant en pâture à d'autres dans
les tentures papiers d'une revue. Et bien le massage
est ici, dissimulé mais bien présent et
c'est à cela que sert, un chercheur en massage
au CFDRM
de Paris.
Jeudi 17 janvier 2013 Cabello
Alain |