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Restitution
de texte : Alain Cabello Jeudi 15 juillet 2010. Je
vous restitue l'intégralité de ce premier volume provenant
du remarquable site de Remacle, enrichi de la numérotation des
pages rendue particulièrement récurrente par la présence
de la version grecque du texte que je ne communique pas, de la mise
en place de liens hypertexts permettant de se déplacer aisément
et des entrées utiles vers les différents dictionnaires
du CFDRM de Paris.
Je tenterai également de faciliter
l'identification rapide des pages intéressant l'histoire
du massage. (Attention, des substitutions de lettres
dues à l'utilisation des logiciels de traitement de textes
s'y sont glissées.)
Ce 1er volume se compose de 6 livres : Livre
1 ; Livre
2 ; Livre
3 ; Livre
4 ; Livre
5 et enfin le Livre
6 qui est celui qui traite de la friction.
L'explication de
planche est à la fin du 6ème
livre, page 570. Voir.
Tome 1 : Livre 1 bas
du livre
Page 1
Oribase.
Collection médicale.
A JULIEN.
____
LIVRE PREMIER.
[DES ALIMENTS.]
1 Empereur Julien, j'ai achevé, suivant
votre désir, pendant notre séjour dans
les Gaules occidentales, l'abrégé que
Votre Divinité m'avait commandé et que
j'ai tiré uniquement des écrits de Galien. 2.
Après avoir loué cette collection, vous
me commandâtes un second travail, celui de rechercher
et de rassembler ce qu'il y a de
Page 2 plus important dans les meilleurs
médecins et tout ce qui contribue à atteindre
le but de la médecine; je me décidai volontiers
à faire ce travail autant que j'en étais
capable, persuadé qu'une pareille collection
serait très utile, puisque les lecteurs pourraient
y trouver rapidement ce qui, dans chaque cas, convient
aux malades. 3. Jugeant qu'il est superflu et même
tout à fait absurde de répéter
plusieurs fois la même chose, en puisant chez
les auteurs qui ont le mieux écrit, et chez ceux
qui n'ont pas composé leurs ouvrages avec le
même soin, je prendrai uniquement dans les meilleurs
écrivains, n'omettant rien des matériaux
qui m'étaient fournis autrefois par Galien seul, coordonnant mon ouvrage d'après
la considération que cet auteur l'emporte sur
tous ceux qui ont traité le même sujet,
parce qu'il se sert des méthodes et des définitions
les plus exactes, attendu qu'il suit les principes et
les opinions hippocratiques. J'adopterai ici l'ordre
suivant : je rassemblerai d'abord ce qui concerne la
matière de l'hygiène et de la thérapeutique,
ensuite ce qui a
Page 3 été dit sur la nature
et la structure de l'homme, puis ce qui regarde la conservation
de la santé et le rétablissement des forces
chez les malades, après cela ce qui tient à
la doctrine du diagnostic et du pronostic; enfin je
traiterai de la guérison des maladies et des
symptômes, en un mot de ce qui est contre nature;
je commencerai par les propriétés des
aliments.
1. DES BONNES ET DES MAUVAISES QUALITÉS
DES CÉRÉALES. (Tiré de Galien.)
1 Non seulement quand on arrive en pays étranger
et qu'on est obligé de manger quelque chose d'inaccoutumé,
mais aussi dans son propre pays, il convient de s'assurer
préalablement de la nature des aliments, soit
en les humectant simplement avec de l'eau, sans recourir
à la coction, soit en les faisant en même
temps bouillir ou torréfier; car tous les grains
qui se gonflent, perdent rapidement la dureté
et la sécheresse qu'ils avaient auparavant, et
deviennent plus mous et plus humides, sont les meilleurs;
ceux, au contraire, qui conservent leur volume et leur
dureté primitifs, ne valent pas autant ; car
ils sont difficiles à digérer, essentiellement
terreux; par conséquent ils ont de la peine à
se transformer en sang. 2. On éprouvera de la
même manière les amandes, les noix, les
noisettes et les châtaignes ; est-il nécessaire
de parler aussi de l'orge mondée ? Mais les enfants
eux-mêmes le savent : celle qui se gonfle rapidement
est la meilleure, et celle qui pendant longtemps garde
un petit volume est mauvaise. 3. Certaines céréales
ne se gonflent pas du tout quand on les fait bouillir;
elles sont appelées dures par quelques anciens
Grecs. 4. Toutes celles qui, sous un petit volume, ont
le plus de substance, pourvu que cette substance soit
épaisse et visqueuse, contiennent les meilleurs
sucs et nourrissent le mieux; mais elles ne traversent
pas facilement les intestins; celles, au contraire,
qui ont une substance spongieuse, molle, et qui contiennent
beaucoup de parties analogues au son, passent plus facilement,
mais nourrissent moins; il est clair que, parmi ces
dernières, toutes celles qui ont une odeur désagréable
et quelque mauvais goût, renferment toutes de
mauvaises humeurs et sont difficiles à digérer.
5. Vous reconnaîtrez que les céréales
ont beaucoup de substance sous un petit volume, à
leur poids quand on les pèse à la balance,
et à la quantité de farine qu'elles fournissent;
car les grains qui ont une substance compacte donnent
beaucoup de farine sous un petit volume. 6. Ainsi les
froments dont la substance est dense et compacte (ce
qu'on reconnaît à la difficulté
de les broyer avec les dents) donnent plus de nourriture
sous un petit volume; ils sont de couleur jaune; ceux,
au contraire, qui sont facilement écrasés
par les dents, et qui, après être écrasés,
offrent une apparence rare et spongieuse, fournissent
peu d'aliment sous un grand volume. 7. Les orges les
plus belles sont blanches après être mondées
; elles ont de la densité et du poids autant
que l'orge peut en avoir; les orges exactement remplies
et dont l'écorce est tendue sont meilleures que
celles qui sont maigres et ridées. 8. Cette remarque
ne s'applique pas seulement aux orges, mais tous les
grains bien remplis et dont l'écorce est tendue
sont les meilleurs, le moins qu'ils n'aient par hasard
un volume excédant de beaucoup leur volume naturel,
et qu'ils ne soient en même temps trop mous et
trop spongieux; ces grains, sachez-le, contiennent une
humeur excrémentitielle ; ils sont inférieurs
aux précédents ; par conséquent
il ne faut pas s'en servir [immédiatement] après
les avoir récoltés ; mais on les déposera
dans des endroits secs et on les abandonnera longtemps
à eux-mêmes, afin qu'une partie de l'humeur
excrémentielle se perde par l'évaporation,
et une autre par la coction, jusqu'à ce qu'étant
séchés, ils se resserrent dans une juste
mesure. 9. Les grains qu'on conserve très longtemps
finissent par se détériorer; ils sont
arrivés à cet état lorsqu'ils laissent
échapper une espèce de poussière
fine quand on les divise. 10. L'ivraie croît en
abondance avec le froment; dans l'orge on en trouve
peu, mais beaucoup d'égilope ; dans les lentilles,
il se forme par la transformation de la plante elle-même
de la pisaille et des sécurigères, qui
sont de petites graines dures, rondes et impropres à
l'alimentation; de même dans l'ers on trouve le
gaillet et l'orobanche. 11. Les graines que je viens
d'énumérer sont tout à fait mauvaises;
quant à la plante qu'on appelle mélampyre,
il est vrai qu'elle prend aussi naissance par la transformation
du froment, mais elle n'est pas à beaucoup près
aussi mauvaise que l'ivraie. 12. De semblables métamorphoses
se font également pour les autres grains; aussi
ne faut-il pas négliger de purifier tous ceux
qu'on destine à servir d'aliment; car, il faut
le reconnaître, si nous ne sentons pas le dommage
qu'elles nous causent chaque jour, parce qu'il est peu
marqué, ce dommage , s'additionnant pendant un
long espace de temps, finira par devenir sensible.13.
Sachez que les céréales propres à
être emmagasinées sont celles qui se dessèchent
avant de pourrir. 14. On appellerait avec raison petit
froment le petit épeautre, car ce dernier ressemble
au froment par sa couleur, sa densité et son
degré de chaleur. 15. Il y a plusieurs autres
céréales semblables qui ne sont pas tout
à fait de la même espèce que celles
que nous venons d'énumérer; quelques-unes
tiennent le milieu entre l'orge et le petit épeautre
ou entre le froment et le petit épeautre; d'autres
se rapprochent beaucoup du grand épeautre, de
l'orge, du petit épeautre ou du froment; il y
en a d'autres encore qui ressemblent au grand millet
ou au petit millet; les uns portent des noms simples,
comme la graine qu'on appelle en Italie sitanium, les
autres des noms composés, comme celle qu'on nomme
en Cappadoce orge nue et celle qui, en Bithynie, a reçu
le nom d'épeautre-froment.
2. DU FROMENT.
(Tiré du 1er livre d'Athénée.
)
1. Parmi les céréales, celles
qui ont les propriétés nutritives les
plus prononcées sont les froments ; ils différent
entre eux en ce qu'ils réchauffent ou humectent
plus ou moins suivant les espèces, le soi qui
les produit, la constitution des saisons et de l'air,
enfin suivant la durée d'emmagasinage. 2. On
distingue les froments, selon les espèces, en
sitaniques et farineux, et en sémidalites; les
sitaniques sont légers, d'une consistance spongieuse
et blancs; car ils sont bien élaborés,
et la substance terreuse qu'ils contiennent est suffisamment
distribuée et dissoute par leur propre coction;
aussi donnent-ils une nourriture toute préparée,
qui se digère bien, et qui, en général,
se transforme aisément; de plus cette nourriture
s'assimile facilement et s'échappe promptement
par la perspiration, mais elle est moins abondante et
de moindre qualité que celle fournie par les
sémidalites, et elle est plus favorable au développement
de la santé qu'à celui de la force. 3.
Le froment sémidalite est plus lourd que le sitanique;
il est compact, jaune, transparent et difficile à
digérer; mais il distribue une matière
nutritive abondante qui se perd difficilement par la
perspiration; en général, il est plus
favorable au développement de la force qu'à
celui de la santé. 4. Considérés
d'après les lieux où on les récolte,
les froments produits par des terrains secs et maigres
diffèrent de ceux qui poussent dans les terrains
fertiles et gras; car les premiers, formés d'une
matière moins abondante, plus légère
et plus ténue, sont, il est vrai, facilement
élaborés et transformés, mais ils
donnent moins d'aliment; à cette espèce
appartiennent les froments produits par les terrains
qu'on appelle brûlés ; car le froment,
étant semé sur un sol où l'on a
incendié des bois, devient blanc, spongieux et
sitanique, à cause du peu de substance grasse
et d'aliment que contiennent les cendres. 5. Les froments
qui poussent dans les terrains fertiles et gras, y trouvant
une nourriture abondante et ferme, sont compactes ,
pesants et très nutritifs; les plaines bien exposées
aux vents et au soleil produisent aussi des froments
de bonne qualité et beaucoup plus nutritifs.
6. Eu égard aux localités, les froments
semés dans un pays très froid et exposé
à la neige diffèrent de ceux qui poussent
dans un pays chaud; car ceux que produisent les pays
froids sont plus élaborés et composés
de particules ténues; tels sont les sitaniques
: comme, chez eux, la force [assimilatrice] se concentre,
et qu'ils reçoivent une nourriture peu abondante,
que cette nourriture leur arrive peu à peu et
qu'elle subit une coction prolongée, peut-être
la substance terreuse qu'ils renferment est plus élaborée
et plus divisée; voilà pourquoi ces froments
sont légers et se résolvent en farine
fine. 7. Nous avons ouï dire aussi que les froments
d'été sont également légers,
et que ceux produits par les pays exposés à
la neige leur ressemblent. 8. Les froments semés
dans les pays chauds reçoivent une nourriture
abondante et compacte, mais moins divisée et
moins élaborée. 9. Les froments qui croissent
dans les marais sont peu nourrissants et légers;
ils font un sang mauvais et réchauffent moins
le corps. 10 Les sols humides produisent également
des froments peu nourrissants et faibles; il paraît
que, par une transformation complète du genre,
ils se changent en ivraie par suite de la surabondance
d'eau. 11. Les froments récoltés dans
des terrains ombragés et pleins d'arbres fournissent
plus d'excréments que de substance utile. 12.
Les froments diffèrent entre eux eu égard
à la constitution des saisons et à celle
de l'atmosphère; eu égard aux saisons,
soit que leur succession se fasse d'une manière
tempérée et égale, tant sous le
rapport du froid et de la chaleur que sous celui des
pluies et de la sécheresse, car alors le froment
est bien nourri et d'un volume convenable; soit, au
contraire, que les changements de saisons se fassent
intempestivement, d'une manière démesurée
et inégale; dans ce cas, en effet, le froment
devient maigre et peu nourri; eu égard à
l'atmosphère, les froments ne se ressemblent
pas si l'air est serein, bien éclairé
par le soleil, et bien rafraîchi par les vents
dans le temps convenable, ou si, au contraire, il est
nébuleux, mal réchauffé par le
soleil, et si, de plus, il tombe souvent de petites
pluies lorsque la saison est déjà chaude
et que le grain est presque arrivé à sa
maturité; car alors il périt par la rouille.
13. De même, vers le temps où les épis
se remplissent, s'il souffle des vents lourds, secs
et chauds, et que les vents appelés brûlants
soufflent avec force et longtemps, ces vents brûlent
et dessèchent les épis, d'où il
résulte que le froment est peu nourri. 14. D'après
la durée de l'emmagasinage, le froment nouveau
diffère du vieux et de celui qui tient le milieu
entre les deux; car le froment nouveau fournit beaucoup
de suc crémeux par la coction, est flatulent
et nutritif; le vieux, au contraire, fournit moins de
cette espèce de suc; il est sec et peu nourrissant;
mais celui qui tient le milieu, eu égard à
la durée de l'emmagasinage, le tient également
sous les autres rapports.
3. DE L'USAGE DES VIANDES D'APRES LES SAISONS.
1 Le cochon est très mauvais après
le printemps jusqu'au coucher automnal des Pléiades;
depuis cette époque jusqu'au printemps il est
très bon. 2. La chèvre est mauvaise en
hiver; au printemps elle commence à devenir meilleure
jusqu'au coucher d'Arcture. 3. Le mouton est également
très mauvais en hiver; il s'engraisse après
l'équinoxe jusqu'au solstice d'été;
quant au boeuf, il s'engraisse lorsque l'herbe monte
en graine, vers la fin du printemps, et pendant tout
l'été. 4. Parmi les oiseaux, les meilleurs
en hiver sont ceux qui viennent [dans nos pays] pendant
cette saison, par exemple le merle, la grive et le ramier;
le coq de bruyère est bon en automne ; il en
est de même de la tête noire, de la rubiette
et du bruant ; c'est aussi dans ce temps que les cailles
ont le plus de graisse. 5. Les poules ne se portent
pas trop bien en hiver, surtout quand le vent est au
sud; la tourterelle est bonne en automne. 6. Parmi les
poissons, quelques-uns doivent être préférés
pendant le frai, comme la salicoque, la langouste, et
les mollusques, par exemple le calmar et la seiche;
d'autres quand ils commencent à couver leurs
oeufs, comme les muges ; mais quand ils ont une grande
quantité d'oeufs ils sont maigres et peu nutritifs,
et plus encore après le frai. 7. C'est après
le coucher d'Arcture que le thon est le plus gras; en
été il est moins bon.
4. DU FROMENT BOUILLI.
(Tiré de Galien.)
1. Le froment bouilli est un mets lourd et
difficile à digérer; mais, si on le digère
lorsqu'il est ainsi préparé, il a une
grande puissance, il nourrit fortement et donne une
force considérable à ceux qui le mangent.
5. DE L'ALICA.
1. L'alica, qui est une espèce de froment,
est très nourrissant et contient des humeurs
visqueuses, soit qu'on le mange après l'avoir
fait bouillir dans de l'eau seule, avec du vin miellé,
du vin d'un goût sucré ou du vin astringent
(car chacun de ces liquides doit être employé
suivant les circonstances), soit qu'on y mêle,
en remuant, de l'huile et du sel; quelquefois on y ajoute
aussi du vinaigre, et les médecins disent que
l'alica ainsi assaisonné est de l'alica préparé
à la ptisane. 2. Le pain fait d'alica est également
très nourrissant, mais il ne passe pas aussi
facilement qu'un autre.
6. DE L'AMIDON.
1. L'amidon se fait avec du froment; il a
la vertu d'effacer les aspérités, car
il n'a ni astringence, ni âcreté appréciables.
2. Il est semblable par ses qualités aux pains
lavés, mais il donne moins de nourriture, et
il ne développe pas de chaleur.
7. DES GÂTEAUX FAITS AVEC LA FARINE.
1. Les fritures se font uniquement avec l'huile;
on verse l'huile dans une poêle placée
sur un feu qui ne fume pas; quand cette huile est chaude,
on verse dedans la farine de froment délayée
dans beaucoup d'eau; par la cuisson dans l'huile, cette
farine se prend et s'épaissit promptement comme
du fromage nouveau; alors les cuisiniers retournent
le gâteau de façon que la partie supérieure
devienne inférieure et touche à la poêle,
et que la partie inférieure, qui est suffisamment
cuite, soit ramenée à la surface de l'huile
; quand la partie inférieure est prise, ils retournent
de nouveau deux ou trois fois le gâteau jusqu'à
ce qu'il leur semble cuit également de tous les
côtés. 2. Il est évident que ce
mets contient des humeurs épaisses, qu'il resserre
le ventre, et qu'il engendre des humeurs crues; voilà
pourquoi on y ajoute quelquefois tantôt du miel,
tantôt du sel marin ; ces fritures constitueraient
déjà une espèce de gâteau
au même titre que ces autres gâteaux improvisés
que font les gens de la campagne ou les pauvres de la
ville. 3. Certes les fritures sans ferment qu'on cuit
dans un four entouré de feu, dont on les ôte
ensuite pour les jeter immédiatement dans du
miel chaud afin de les en imbiber complètement,
sont également une espèce de gâteau;
il en est de même de toutes les fritures qu'on
prépare au moyen d'itria, avec du miel; il y
a deux espèces d'itria, les meilleures sont appelées
rhymmata, les plus mauvaises lagana. 4. Par conséquent,
tous les mets qu'on compose avec ces itria, ou avec
de la farine sémidalite, contiennent des humeurs
épaisses, passent difficilement, obstruent les
conduits de l'aliment qui sont dans le foie, augmentent
le volume de la rate, lorsqu'elle est affaiblie, enfin
engendrent des calculs dans les reins ; mais ils sont
très nourrissants si on les digère bien,
et s'ils se transforment exactement en sang. 5. Ceux
qu'on prépare avec du miel ont des propriétés
mixtes, puisque le miel lui-même contient des
humeurs ténues et atténue tout ce qu'il
touche ; en conséquence, les gâteaux qui
ont absorbé une plus grande quantité de
miel pendant leur préparation, et qui ont été
cuits pendant plus longtemps, passent naturellement
plus vite, engendrent des humeurs qui participent au
ténu et à l'épais, et sont plus
favorables au foie, aux reins et à la rate, que
les gâteaux préparés sans miel,
pourvu toutefois que ces organes soient sains; si, au
contraire, ils commencent à s'obstruer, ou s'ils
sont affectés soit d'inflammation, soit de squirrhe,
les gâteaux avec du miel ne sont pas moins nuisibles
que les autres, quelquefois même ils le sont plus
encore, surtout ceux dont la farine est très
visqueuse; mais les mets ainsi préparés
ne causent aucun dommage à la poitrine et au
poumon. 6. Comme il y a dans mon pays beaucoup de gens
qui font bouillir de la farine de froment avec du lait,
il est bon de savoir que ce mets est du genre de ceux
qui se collent aux voies alimentaires. 7. Tous les mets
de ce genre, bien qu'ils contiennent de bonnes humeurs
et qu'ils soient nourrissants, sont nuisibles à
ceux qui en usent constamment, parce qu'ils causent
des obstructions au foie, et qu'ils engendrent des calculs
dans les reins.
8. DU PAIN DE FROMENT.
1. Le pain le plus favorable à la santé
d'un homme qui n'est pas jeune et qui ne se fatigue
pas est celui qui contient beaucoup de ferment, et aussi
beaucoup de sel, qui a été longtemps trituré
et manipulé, et qu'on a cuit dans un four chauffé
de tous côtés à une chaleur modérée.
2. Le goût vous servira à juger de l'excès
du ferment ou du sel; car il est mauvais que le goût
soit désagréablement affecté par
la trop grande proportion de ces ingrédients.
3. Ceux qui ont imaginé de préparer le
pain lavé ont inventé un mets peu nourrissant,
mais qui prévient, autant qu'il est possible,
les dangers de l'obstruction; en effet, ce pain n'a
rien d'épais, ni de visqueux; il est plutôt
aérien que terreux; on reconnaît sa légèreté
par le poids, et parce qu'il ne va pas au fond de l'eau,
mais qu'il surnage comme du liège. 4. Les meilleurs
pains sont ceux qu'on cuit dans un four chauffé
de tous côtés; viennent ensuite les pains
cuits dans un four chauffé par le bas seulement,
pourvu qu'ils soient préparés de la même
manière que les premiers; car ils leur sont inférieurs,
parce qu'ils ne sont pas également cuits à
l'intérieur. 5. Les pains cuits sur le gril ou
dans les cendres chaudes sont tous mauvais, parce qu'ils
sont inégalement cuits; en effet, leur extérieur
est rôti outre mesure, tandis que l'intérieur
est cru. 6. Après le pain de froment, le meilleur
est celui de grand épeautre, si cet épeautre
est de bonne qualité; après ces derniers
le pain de petit épeautre occupe le second rang.
9. DU PAIN.
(Tiré du XXXe livre d'Athénée.)
1. Les pains légers sont peu propres
à être réduits en crème et
peu nourrissants, parce que la cuisson attaque et évapore
davantage la partie nutritive; c'est aussi pour cela
que les mets appelés itria et lagana sont peu
propres à être réduits en crème.
2. Par la même raison, parmi les pains propres
à être réduits en crème,
ceux qui sont fortement cuits nourrissent moins que
les autres; il en est de même du pain cuit deux
fois; car, après l'avoir légèrement
cuit, on le réduit de nouveau en farine par la
trituration; ensuite il subit une seconde manipulation
et une seconde cuisson; pénétré
d'abord par la chaleur et rendu un peu diffluent, ce
pain le devient beaucoup plus encore, et se dissout
beaucoup plus par la seconde manipulation; une grande
partie de sa substance se consume ensuite par la seconde
cuisson; ce qui en reste devient léger, spongieux,
ténu, et se distribue facilement dans le corps.
3. Il est clair que le pain chaud et frais est plus
nourrissant que celui qui est froid et rassis, car sa
chaleur favorise la digestion.
10. DE L'ORGE.
(Tiré de Galien.)
1 Le froment échauffe évidemment;
l'orge, au contraire, a quelque chose de refroidissant
de quelque manière qu'on la prépare, soit
qu'on en fabrique des pains, soit qu'on la fasse bouillir
après l'avoir mondée, soit qu'on en prépare
de l'alphiton; elle engendre aussi une humeur détersive.
2. Le pain d'orge, parce qu'il ne contient rien de glutineux,
est plus friable, non seulement que le pain de froment,
mais que celui de grand épeautre, et surtout
que celui de petit épeautre; il est clair, par
conséquent, qu'il donne peu de nourriture au
corps.
11. DE L'ORGE.
(Tiré du XXXe livre d'Athénée.)
1. L'orge nue et sans écorce fournit
beaucoup de suc crémeux et de principe nutritif;
elle se rapproche plus du froment que les autres espèces.
2. Après elle vient l'orge à deux rangées
de grains, qui contient moins de matières impures
que les orges rougeâtres à une seule rangée.
12. DE L'ALPHITON ET DE LA MAZA.
(Tiré de Galien.)
1. Ces mets fournissent une nourriture peu
abondante, insuffisante pour ceux qui prennent de l'exercice,
suffisante pour ceux qui n'en font pas. 2. Sous le rapport
des propriétés nutritives, la maza diffère
autant du pain d'orge que ce dernier diffère
du pain de froment; elle se digère moins facilement
que le pain d'orge et remplit davantage le ventre de
flatuosités; si elle séjourne longtemps
dans les intestins, elle y cause du trouble. 3. Si elle
a été fortement triturée et mélangée,
elle passe plus facilement; si on y ajoute du miel,
cela fait qu'elle excite plus vite encore le ventre
à rejeter les excréments.
13. DU PETIT ET DU GRAND ÉPEAUTRE.
1 Le pain fait de grand épeautre est
le meilleur après celui de froment, du moins
si le grand épeautre est de bonne qualité;
après lui les pains de petit épeautre
tiennent le second rang; mais, si le grand épeautre
est de mauvaise qualité, les pains de petit épeautre
ne sont nullement inférieurs aux premiers. 2.
Si le petit épeautre est très bon, le
pain qu'on fait avec lui, pourvu qu'il soit chaud, vaut
beaucoup mieux que celui de grand épeautre; rassis
il devient tellement inférieur au pain de grand
épeautre, que, si on le mange après un
ou deux jours, ou, à plus forte raison, après
plusieurs jours de cuisson, on croit avoir de la terre
glaise dans l'estomac ; quand il est encore chaud, il
est recherché même par les habitants des
villes, qui le mangent avec un certain fromage du pays
appelé fromage au lait aigre. 3. Ce pain, dis-je,
lorsqu'il est chaud, n'est pas seulement recherché
par les paysans, mais aussi par les habitants des villes.
4. Celui qui a déjà trois ou quatre jours,
est, même pour les paysans, plus désagréable
à manger, plus difficile à digérer,
et traverse plus lentement le ventre, inconvénient
dont le pain chaud est exempt; dans ce cas, il nourrit
suffisamment, en sorte qu'il n'est pas de beaucoup inférieur
au pain de ménage fait avec du froment. 5. Le
grain du petit épeautre est revêtu d'une
pellicule comme le grand épeautre et l'orge;
ce n'est qu'après l'avoir mondé qu'on
en fait du pain ou qu'on s'en sert à tout autre
usage; après l'avoir fait bouillir dans l'eau,
on le mange aussi avec la sauce appelée par les
paysans apothermon, en y ajoutant du vin doux cuit;
quelquefois aussi on le mange avec du sel. 6. Le grand
épeautre de qualité supérieure,
s'il est bien mondé, fournit ce qu'on appelle
le tragos, dont beaucoup de gens font usage lorsqu'il
a été bouilli avec de l'eau; ils jettent
ensuite l'eau et versent dessus du vin nouveau cuit,
du vin d'un goût sucré ou du vin miellé;
on y ajoute aussi des pignons macérés
clans l'eau jusqu'à ce qu'ils se soient gonflés
considérablement.
14. DE L'AVOINE.
1. L'avoine sert à la nourriture du
bétail et non à celle de l'homme, à
moins qu'on ne soit forcé par la famine à
en faire du pain; mais, lorsqu'il n'y a pas de famine,
on la mange après l'avoir fait bouillir dans
de l'eau, avec du vin d'un goût sucré,
du vin nouveau cuit ou du vin miellé, de la même
manière que le petit épeautre. 2. Ainsi
que ce dernier, l'avoine est pourvue d'une chaleur assez
considérable, quoiqu'elle ne soit pas dure comme
le petit épeautre; aussi donne-t-elle moins de
nourriture; du reste, le pain d'avoine est désagréable;
mais il ne resserre ni ne relâche le ventre.
15. DU PETIT MILLET ET DU GRAND MILLET, QU'ON
APPELLE AUSSI MELINE.
1. Quelquefois on fait aussi du pain avec
ces graines, quand il y a disette des céréales
dont nous venons de parler; mais ce pain est peu nourrissant
et froid; il est friable et cassant; aussi n'est-il
pas étonnant qu'il dessèche le ventre
relâché. 2. Dans la campagne, on fait bouillir
la farine de millet, et on y mêle ensuite, pour
la manger, de la graisse de porc ou de l'huile. 3. Le
petit millet est, sous tous les rapports, meilleur que
le grand, car il est plus agréable au goût,
moins difficile à digérer, il resserre
moins le ventre et il nourrit davantage. 4. Les paysans
mangent aussi quelquefois la farine de millet après
l'avoir fait bouillir avec du lait, de la même
manière que la farine de froment ; évidemment
ce mets est d'autant meilleur à manger, que le
lait est supérieur à ces grains, aussi
bien sous le rapport de la grande bonté des sucs
que sous tous les autres.
16. DU RIZ.
1. On emploie cette céréale
pour resserrer le ventre, mais elle est plus difficile
à digérer que l'alica et nourrit moins.
17. DES LENTILLES.
1. Leur écorce est astringente, mais
ce qu'on appelle leur chair contient des humeurs épaisses;
elle est terreuse et possède des propriétés
un peu âpres, propriétés dont l'écorce
jouit au suprême degré; mais le suc que
les lentilles contiennent est le contraire de l'astringent;
voilà pourquoi on peut préparer avec elles
une boisson qui relâche le ventre, si on les fait
bouillir dans de l'eau, et qu'on donne cette eau à
boire, en l'assaisonnant avec du sel ou du garon et
en y ajoutant de l'huile. 2. Bouillies deux fois, comme
nous l'avons déjà dit, les lentilles ont
des propriétés opposées à
celles de la décoction, car elles arrêtent
les flux de ventre et donnent du ton à l'orifice
de l'estomac, aux intestins et à tout le ventre.
3. Les lentilles privées d'écorce perdent
l'astringence prononcée qu'elles avaient et deviennent
alors plus nourrissantes, puisqu'elles contiennent des
humeurs épaisses et qu'elles passent lentement;
mais elles ne tarissent pas les fluxions vers les intestins,
comme les lentilles non écorcées; c'est,
en outre, un mets qui contient de mauvaises humeurs
et qui engendre l'humeur atrabilaire. 4. Les lentilles
obscurcissent aussi la vue quand l'oeil est en bon état,
en le desséchant outre mesure; mais elles sont
utiles quand l'oeil est dans l'état contraire.
18. DES FÈVES.
1. On prépare la purée de fèves
soit seule, soit avec de l'orge mondée ; ce dernier
mets donne un certain embonpoint, mais la chair n'est
pas ferme comme celle que donne le porc; elle est plutôt
un peu molle; la purée est flatulente, de quelque
manière qu'on la prépare. 2. Les fèves
n'ont pas une substance compacte et pesante, mais spongieuse
et légère, et elles ont quelque chose
de détersif de même que l'orge mondée.
3. Quoique la purée de fèves soit déjà
un mets flatulent, les fèves bouillies et mangées
entières donnent encore plus de vents. 4. Torréfiées,
elles cessent d'être flatulentes, mais elles deviennent
plus difficiles à digérer, ont de la peine
à passer, et distribuent comme aliment une humeur
épaisse. 5. Si on les mange vertes, avant qu'elles
soient mûres et séchées, elles produisent
le même effet que tous les autres fruits qu'on
mange avant la maturité, c'est-à-dire
qu'elles donnent au corps un aliment assez humide.
19. DES POIS GRECS.
1. Les pois grecs ressemblent un peu aux fèves,
quant à leur substance considérée
en général, et on les mange de la même
manière; mais ils en diffèrent sous ces
deux rapports : d'abord ils ne sont pas flatulents comme
les fèves, et ensuite ils n'ont pas de propriété
détersive; aussi traversent-ils plus difficilement
le ventre que les fèves.
20. DES POIS CHICHES.
1. Les pois chiches ne sont ni moins flatulents
ni moins nourrissants que les fèves, mais ils
excitent les désirs vénériens en
même temps qu'ils engendrent du sperme. 2. Ils
possèdent une vertu détersive plus forte
que les fèves; elle est si prononcée,
qu'une certaine espèce broie manifestement les
calculs qui se forment dans les reins ; ce sont les
pois chiches noirs et petits; on les appelle béliers;
ce qu'il y a de mieux dans ce cas, c'est d'en boire
seulement la décoction après les avoir
fait bouillir dans de l'eau. 3. Les pois chiches verts
contiennent une humeur excrémentielle comme toutes
les autres graines vertes; de même les pois chiches
torréfiés cessent d'être flatulents,
mais ils deviennent moins digestibles et plus resserrants;
ils fournissent moins d'aliment au corps.
21. DES LUPINS.
1. Le lupin est d'une substance dure et terreuse;
il engendre donc nécessairement une humeur épaisse
; si cette humeur n'est pas bien élaborée
dans les veines, il y aura accumulation de l'humeur
appelée proprement crue. 2. Adouci par l'ébullition,
le lupin devient mangeable comme les substances sans
qualité sensible, et cette ressemblance fait
qu'il n'active ni ne retient les évacuations
alvines.
22. DU FENUGREC, QU'ON APPELLE AUSSI CORNE
DE BOEUF.
1. Il relâche le ventre, si on le mange
au commencement du repas avec du garon; on le mange
également avec du vinaigre et du garon; ou avec
du vin, du garon et de l'huile; quelques-uns le mangent
aussi avec du pain; alors il ne cause pas de mal de
tête, comme celui qu'on prend avec du garon. 2.
On mange aussi le fenugrec avant qu'il n'ait fructifié,
avec du vinaigre et du garon; d'autres versent dessus
de l'huile et le mangent avec du pain; pris de cette
manière, il cause de la céphalalgie. 3.
La décoction de fenugrec bue avec du miel peut
faire évacuer toutes les humeurs nuisibles qui
se trouvent dans les intestins; comme le fenugrec jouit
aussi d'une vertu détersive, il provoque les
déjections intestinales.
23. DES PHASÈLES ET DES GESSES À
FLEUR JAUNÂTRE.
1. On mange également ces légumes
comme le fenugrec, avant les autres mets, pour relâcher
le ventre; dans ce cas, on les fait macérer dans
de l'eau jusqu'à ce qu'ils poussent des racines
, après quoi on les trempe dans du garon ; ils
ont une humeur plus nourrissante que celle du fenugrec,
pourvu qu'ils ne soient pas distribués dans le
corps avant d'être convenablement digérés.
2. Ces légumes tiennent en quelque sorte le milieu
entre les aliments qui renferment une bonne humeur et
ceux qui en contiennent une mauvaise, entre ceux qui
se digèrent facilement et ceux qui se digèrent
difficilement, entre ceux qui passent vite et ceux qui
passent lentement, entre les flatulents et ceux qui
ne le sont pas, entre ceux qui nourrissent peu et ceux
qui nourrissent beaucoup, car ils n'ont aucune propriété
active.
24. DES GESSES.
1. On mange les gesses comme la purée
de lentilles à l'orge mondée. 2. Elles
contiennent une humeur qui a les mêmes propriétés,
mais qui est d'une consistance plus épaisse que
celle des gesses à fleurs jaunâtres et
des phasèles : c'est pour cela même que
les gesses ordinaires sont en quelque sorte plus nourrissantes
que ces dernières.
25. DES GESSES CHICHES.
1. Les gesses chiches sont semblables aux
gesses ordinaires; aussi les emploie-t-on exactement
de la même façon ; elles ont les mêmes
propriétés, à cette exception près
que les gesses chiches sont plus dures et plus difficiles
à cuire, et par conséquent plus difficiles
à digérer que les gesses ordinaires. 2.
Dans mon pays, on trouve dans les céréales
une graine sauvage, dure et ronde, plus petite que l'ers,
et qu'on appelle raxow avec un x (arachos), [pour la
distinguer des gesses chiches désignées
sous le nom d'rakow avec un k (aracos) ; ] on jette
l'arachos après l'avoir trié de même
que la securigère.
26. DES HARICOTS OU PHASÉOLES.
1. Les haricots sont appelés par quelques-uns
gousses, par d'autres phaséoles. 2. Ils relâchent
plus le ventre que les pois grecs, mais ils sont moins
flatulents ; ils sont nourrissants.
27. DE L'ERS.
1. Dans les grandes famines, on mange quelquefois
de l'ers par nécessité; l'ers blanc est
moins nauséabond que celui qui tient du jaune
ou du jaune pâle. 2. Si on le fait bouillir deux
fois et qu'on le fasse tremper plusieurs fois dans l'eau,
il perd ce qu'il a de désagréable, mais
il dépose en même temps ses propriétés
détersives et incisives; aussi ne reste-t-il
plus que la partie terreuse de sa substance, qui constitue
alors un aliment desséchant sans amertume appréciable.
28. DU SÉSAME ET DE L'ÉRYSIMON.
1. La graine de sésame est grasse,
aussi devient-elle bientôt huileuse lorsqu'on
la conserve : c'est pourquoi elle rassasie vite ceux
qui la mangent, retourne l'orifice de l'estomac, se
digère lentement et donne un aliment gras au
corps; comme elle contient une humeur épaisse,
elle ne passe pas rapidement non plus. 2. Sous le rapport
de la substance, l'érysimon est en quelque sorte
de la même espèce que le sésame,
mais il est plus désagréable à
manger, donne moins d'aliment au corps, et il est plus
mauvais sous tous les rapports ; tous deux sont d'un
tempérament chaud et donnent par conséquent
de la soif.
29. DE LA GRAINE DE PAVOT.
1. La graine du pavot cultivé est bonne
comme assaisonnement, si on en saupoudre le pain; mais
la graine blanchâtre est meilleure que la noirâtre;
elle jouit d'une propriété refroidissante
: c'est pourquoi elle fait dormir; et même, si
on en prend trop, elle fait tomber dans la cataphora,
et elle se digère difficilement; elle arrête
encore l'expectoration des matières que la toux
fait ordinairement rejeter de la poitrine et du poumon.
2. De plus elle convient à ceux qui ont une descente
d'humeurs ténues de la tête, mais elle
donne au corps un aliment peu abondant.
30. DE LA GRAINE DE LIN.
1. La graine de lin est mauvaise pour l'orifice
de l'estomac et difficile à digérer; elle
donne peu d'aliment au corps, n'a rien qui relâche
le ventre, mais elle possède une légère
vertu diurétique, surtout si elle est torréfiée.
31. DE L'ORMIN.
1. On l'emploie après l'avoir torréfié,
réduit en farine par la trituration et mélangé
avec du miel ; mais il contient peu de matière
nutritive.
32. DU CHANVRE.
1. La graine de chanvre est difficile à
digérer et mauvaise pour l'orifice de l'estomac
; elle cause de la céphalalgie, contient de mauvaises
humeurs, mais elle échauffe fortement.
33. DE LA GRAINE DU GATILIER.
1. La graine du gatilier passe pour réprimer
les désirs vénériens; elle donne
peu de nourriture au corps; celle qu'elle donne dessèche,
refroidit et est presque complètement exempte
de flatuosités; pour toutes ces causes, la graine
du gatilier convient à ceux qui veulent vivre
chastement.
34. DU JARSEAU ET DE LA VESCE.
1. Ces graines ressemblent, par leur forme,
aux lentilles; on en mange en cas de famine, et surtout
dans le printemps, quand elles sont encore vertes, comme
les pois chiches et les fèves. 2. Elles ne sont
pas seulement désagréables au goût,
mais encore difficiles à digérer; elles
resserrent le ventre, contiennent de mauvaises humeurs,
et engendrent l'humeur atrabilaire.
35. DE LA COURGE.
1. La courge bien bouillie n'a aucune qualité
appréciable au goût; elle admet naturellement
plusieurs modes de préparations, parce qu'elle
tient le milieu entre les extrêmes; ainsi, considérée
en elle-même, la courge donne au corps une nourriture
humide et froide, par conséquent peu abondante;
elle traverse facilement le ventre, parce que sa substance
est glissante; elle ne se digère pas trop mal,
lorsqu'elle ne se corrompt pas dans l'estomac avant
[la digestion]. 2. Torréfiée ou frite
dans la poêle, elle perd une grande partie de
son humidité propre; mais ce qui reste de sa
substance n'acquiert aucune propriété
active; il en est de même, si on la prépare
avec la sauce simple ; on se trouve très bien
de l'accommoder avec l'origan, à cause de sa
qualité aqueuse. 3. Quelques personnes conservent
la courge pour l'hiver, après en avoir ôté
les graines, et fait sécher ce qu'on peut appeler
sa chair; mais, ainsi préparée, elle ressemble
plutôt à tout autre chose qu'à de
la courge; car elle n'a plus de suc et devient sèche
comme de vieux souliers.
36. DES PASTÈQUES.
1. Par nature les pastèques sont un
peu froides et pourvues d'une humidité abondante,
mais elles ont quelque chose de détersif; voilà
pourquoi elles poussent aux urines et passent plus facilement
par le bas que les courges et les melons. 2. Leurs graines
sont plus détersives encore que ce qu'on peut
appeler leur chair, mais elles engendrent des humeurs
nuisibles dans le corps, surtout si elles ne sont pas
bien digérées; dans ce cas, elles causent
habituellement le choléra; car la pastèque
peut produire le vomissement, même avant qu'elle
ne se soit corrompue [dans l'estomac], et, si on en
mange abondamment, elle excitera à coup sûr
des vomissements, à moins qu'on ne prenne après
elle quelque mets qui contienne de bonnes humeurs.
37. DES MELONS.
1. Les melons sont moins humides que les pastèques,
ils ont moins de mauvaises humeurs, poussent moins aux
urines, passent moins facilement par le bas, et n'ont
pas, comme elles, la faculté d'exciter le vomissement.
2. Quoiqu'ils soient de beaucoup inférieurs aux
fruits d'arrière-saison favorables à l'orifice
de l'estomac, ils ne sont pas aussi nuisibles à
cette partie que les pastèques.
38. DES CONCOMBRES.
1. Ils ont quelque chose de diurétique
aussi bien que les pastèques, mais moins qu'eux.
2. Pour ceux qui les digèrent bien, les concombres
engendrent, quand on en mange beaucoup à la fois
et longtemps de suite, une humeur froide et démesurément
épaisse, laquelle ne saurait subir facilement,
pendant la coction qui se fait dans les veines, la transformation
en sang de bonne qualité.
39. DES FIGUES.
1. Les figues possèdent les propriétés
communes non seulement à tous les fruits de l'arrière-saison,
mais à tous ceux qu'on appelle fruits d'été;
elles ne sauraient échapper non plus à
l'inconvénient d'engendrer des humeurs de mauvaise
nature, quoiqu'elles participent moins à cette
propriété que tous les autres fruits d'été.
2. Elles ont l'avantage de traverser rapidement les
intestins et de parcourir facilement tout le corps,
car elles ont une faculté détersive assez
notable. 3. Tous les fruits d'arrière-saison
donnent peu d'aliment au corps, mais les figues ont
cet inconvénient moins que tous les autres; cependant
les figues, comme les fèves, ne produisent pas
une chair compacte et ferme, mais tant soit peu spongieuse;
il est vrai qu'elles remplissent aussi le ventre de
flatuosités, mais la rapidité de leur
passage fait que ces flatuosités ne persistent
pas longtemps. 4. Les figues parfaitement mûres
causent à peine quelque dommage; il en est de
même pour les figues sèches qui ont beaucoup
d'avantages, quoiqu'elles aient quelque inconvénient
pour ceux qui en usent abondamment, car elles forment
un sang qui n'est pas tout à fait de bonne qualité
; voilà pourquoi elles entraînent à
leur suite une multitude de poux. 5. Elles jouissent
d'une faculté atténuante et incisive qui
excite le ventre à évacuer les excréments,
et qui purge les reins; elles sont nuisibles au foie
et à la rate, quand ces organes sont enflammés;
il en est de même des figues fraîches, non
qu'elles possèdent une faculté particulière,
mais parce qu'elles rentrent dans la règle commune
à tous les aliments et à toutes les boissons
d'un goût sucré; mais, quand les organes
susdits sont affectés d'obstruction ou de squirrhe,
les figues sèches prises toutes seules ne leur
font ni bien ni mal; elles leur font, au contraire,
un bien notable, si on les mêle aux médicaments
incisifs et détersifs. 6. Ceux qui mangent les
figues fraîches ou sèches avec des aliments
incrassants se font un mal considérable.
40. DES FIGUES.
(Tiré de Rufus.)
1. Les figues sont meilleures que les autres
fruits d'arrière-saison, cependant elles ont
aussi quelque inconvénient. 2. Les figues sèches
peuvent nourrir suffisamment le corps; aussi les anciens
les donnaient-ils à manger aux athlètes.
3. Pythagore fut le premier qui changea cette alimentation,
en faisant manger de la viande à Eurymène
de Samos; c'est ainsi que ce régime a été
modifié.
41. DU RAISIN.
(Tiré de Galien).
1. Les figues et les raisins sont, pour ainsi
dire, à la tête des fruits d'arrière-saison;
car ils nourrissent plus que tous les fruits d'été
et ne sont guère capables d'engendrer des humeurs
viciées, surtout quand ils sont bien mûrs;
seulement la chair qu'ils forment n'est pas ferme et
dense, mais spongieuse et humide; voilà pourquoi
l'embonpoint qu'ils produisent disparaît rapidement.
2. Les raisins nourrissent moins que les figues; leur
plus grand avantage c'est de passer vite; pour cette
raison ils font beaucoup de mal, si par hasard ils sont
retenus, inconvénient que n'ont pas les figues
mûres; car, lors même qu'il n'en passe pas
beaucoup et qu'elles sont bien digérées
dans l'estomac, elles fournissent au corps un aliment
irréprochable. 3. Les raisins ne possèdent
ni l'un ni l'autre de ces avantages, car, ils ne se
digèrent pas facilement, s'ils sont retenus;
et, pendant la distribution qui se fait dans le foie
et dans les veines, ils engendrent une humeur crue qui
ne se change pas facilement en sang. 4. Le raisin passe
plus vite encore, si on avale les grains sans pépins,
car les pépins sont astringents, se digèrent
mal et ne s'assimilent pas. 5. Parmi les raisins mis
en réserve, celui qu'on conserve dans le marc
de raisins renforce l'estomac affaibli et excite à
manger ceux qui n'ont point d'appétit ; mais
il ne passe pas et porte à la tête, si
on en mange beaucoup; celui qu'on conserve dans du vin
nouveau cause encore plus facilement de la céphalalgie
que le premier; celui qu'on conserve par la suspension
ne porte pas à la tète, et ne resserre
ni ne relâche le ventre; il est plus facile à
digérer que les autres raisins mis en réserve.
6. Les raisins sucrés contiennent une humeur
un peu chaude; aussi causent-ils de la soif; les raisins
âpres et acides ont un suc froid; les raisins
vineux tiennent le milieu entre le chaud et le froid;
les raisins sucrés relâchent le ventre,
surtout quand ils sont aqueux; les raisins acides et
âpres ne sont pas seulement mauvais sous ce rapport
[c'est-à-dire parce qu'ils resserrent le ventre],
mais aussi sous celui de la coction qui se fait dans
l'estomac. 7. La manière la plus exempte d'inconvénients
de manger les raisins, c'est de les choisir quand ils
sont naturellement charnus et qu'ils sont très
mûrs, et d'en user modérément, soit
qu'il aient acquis cette maturité sur le cep,
soit que la suspension leur ait donné ce qui
leur manquait sous ce rapport; la seconde manière
est de prendre des raisins aqueux sans qualité
acide ou âpre, qu'on peut manger en grande quantité
pour relâcher le ventre. Quelques-uns boivent
aussi du vin nouveau dans le même but, surtout
celui qui a un goût très sucré,
car il relâche très fortement le ventre;
celui, au contraire, qu'on tire des raisins âpres
ou acides est le plus mauvais sous tous les rapports.
La liqueur provenant de la macération du marc
de raisins est t diurétique et porte à
la tête.
42. DES RAISINS SECS.
1. Les raisins secs âpres sont d'un
tempérament plutôt froid; de même,
les raisins secs sucrés sont plutôt chauds.
2. Ceux qui sont âpres renforcent l'orifice de
l'estomac et resserrent le ventre : il est clair que
les raisins fortement âpres ont ces mêmes
propriétés à un degré plus
fort. 3. Les raisins secs sucrés procurent une
constitution en quelque sorte moyenne, car ils n'affaiblissent
pas l'orifice de l'estomac et ne relâchent pas
non plus le ventre d'une manière appréciable;
ils sont toujours doués d'une faculté
tempérante et modérément détersive,
en sorte que, par ces deux qualités, ils émoussent
les pincements légers à l'orifice de l'estomac;
mais quant aux pincements plus forts, il est clair qu'ils
ont besoin de remèdes plus efficaces. 4. Parmi
les raisins secs, les meilleurs sont ceux qui sont un
peu gras et ont la partie qu'on peut appeler écorce,
mince. 5. Quelques personnes, et elles ont raison, ôtent
les pépins des grands raisins secs et sucrés,
par exemple des scybélitiques, avant de les manger;
cette espèce de raisins secs a aussi la peau
épaisse et dure, si on les conserve longtemps,
et il faut les macérer dans l'eau avant de les
manger; les pépins s'enlèvent aussi plus
facilement par ce procédé. 6. Il y a d'autres
raisins secs qui ont les propriétés contraires
de ceux dont nous venons de parler, puisqu'ils sont
âpres et petits et n'ont pas du tout de pépins.
7. L'aliment que les raisins secs distribuent au corps
est, sous le rapport de la qualité, semblable
à celui que lui donneraient les raisins frais
eux-mêmes; mais, pour la quantité, celui
qu'on tire des raisins secs, gras et doux, est plus
abondant que l'aliment fourni par les raisins âpres
et qui ne sont pas gras. 8. Les raisins secs sont aussi
meilleurs pour l'orifice de l'estomac que les figues
sèches.
43. DES SYCAMINS, QU'ON APPELLE AUSSI MÛRES.
1. Si les mûres arrivent dans un estomac
pur, et si on les prend avant les autres mets; elles
passent très rapidement et frayent la route aux
autres aliments; si, au contraire, on les prend après
d'autres mets ou si elles trouvent une humeur viciée
dans l'estomac, elles se corrompent très rapidement,
et leur corruption est d'une espèce toute particulière
et inexprimable, de même que celle des courges;
car, bien que ce soient les fruits d'été
les plus innocents , toutes deux ont, si elles ne passent
pas vite, une corruption de mauvaise nature de même
que les pastèques; toutefois, ces dernières
ne font pas non plus grand mal quand elles passent vite.
2. Le temps opportun pour manger les mûres ainsi
que les pastèques, c'est quand le corps de l'estomac
est sec et chaud, car alors le foie a nécessairement
les mêmes qualités. 3. Les mûres
sont aussi douées d'une légère
astringence; elles humectent toujours, mais ne refroidissent
pas dans toutes les circonstances, à moins qu'on
ne les prenne froides; elles donnent très peu
d'aliment au corps, ainsi que les pastèques.
44. DES FRUITS DE LA RONCE.
1. Les mourons sont plus astringents que les
mûres, et, si on en mange souvent, ils donnent
de la céphalalgie; chez quelques individus l'orifice
de l'estomac en est aussi affecté; voilà
pourquoi il faut bien laver ce fruit avant de se hasarder
à le manger, précaution qu'il ne faut
pas du tout négliger non plus pour les mûres;
les mourons ne relâchent pas le ventre, ils le
resserrent plutôt.
45. DU FRUIT DE L'ÉGLANTIER.
1. Le fruit de l'églantier est un peu
plus astringent que celui de la ronce; aussi resserre-t-il
plus fortement le ventre, mais il donne peu de nourriture
au corps.
46. DES BAIES DE GENÉVRIER.
1. Les baies de genévrier sont légèrement
sucrées et encore plus légèrement
astringentes, mais elles sont aromatiques, et il est
clair qu'elles échauffent à cause de l'âcreté
dont elles sont douées. 2. Elles donnent peu
de nourriture au corps, et, si on en mange beaucoup,
elles causent des pincements à l'orifice de l'estomac,
échauffent la tête et y causent de la douleur;
elles poussent modérément aux urines.
48. DES PÊCHES.
1. Le suc de ces fruits et ce qu'on peut appeler
leur chair se cor rompent facilement et sont tout à
fait mauvais; par conséquent il ne faut pas en
manger après les autres mets, comme quelques-uns
ont la coutume de le faire, car elles se corrompent
en surnageant [dans l'estomac], et corrompent en même
temps les autres aliments.
48. DES ABRICOTS ET DES ABRICOTINS.
1. Ces fruits appartiennent aussi au genre
des pêches, mais ils en diffèrent un peu
en ce qu'ils sont meilleurs, car ils ne se corrompent
ni ne s'aigrissent comme elles dans l'estomac; ils paraissent
en général plus agréables au goût;
c'est pourquoi ils sont aussi plus favorables à
l'orifice de l'estomac. 2. Nous avons déjà
dit auparavant que ces fruits nourrissent peu. 3. Les
abricotins sont meilleurs que les abricots.
49. DES POMMES.
1. Les pommes astringentes ont une humeur
froide et terreuse, tandis que les pommes aigres en
ont une froide mais ténue; les pommes sucrées
ont un tempérament moyen qui se rapproche du
chaud; de même les pommes tout à fait fades,
et pour ainsi dire aqueuses, se rapprochent plutôt
du froid. 2. Les pommes astringentes retiennent évidemment
les évacuations alvines ; les pommes aigres,
si elles trouvent une humeur épaisse dans le
ventre, la divisent et la font descendre; de cette manière
elles rendent les excréments humides, mais, si
elles trouvent le ventre pur, elles le resserrent plutôt;
les pommes sucrées sont mieux absorbées.
3. Quant aux pommes fades, qui ne sont pas agréables
au goût, qui ne donnent pas de force au ventre
et ne le resserrent pas non plus, on a raison de les
estimer peu, et on les jette aux cochons. 4. Celles
qu'on met de côté après les avoir
laissées bien mûrir sur l'arbre deviennent,
souvent très utiles dans les maladies , soit
qu'on les enduise de pâte pour les cuire modérément
dans les cendres chaudes, soit qu'on les fasse bien
bouillir dans la vapeur d'eau chaude. 5. Il faut les
donner immédiatement après le repas, quelquefois
avec du pain pour renforcer le ventre et l'orifice de
l'estomac à ceux qui manquent d'appétit,
qui digèrent lentement, qui sont sujets aux vomissements,
à la diarrhée et à la dysenterie.
6. Les pommes fortement âpres se prêtent
bien à cet usage, car elles gardent une astringence
modérée, si on les prépare comme
je viens de le dire, tandis que les pommes faiblement
âpres perdent toute leur astringence par cette
préparation et de-viennent semblables par là
aux pommes naturellement aqueuses.
50. DES COINGS ET DES POIRES À COING.
1. Ces fruits ont cela de particulier, si
on les compare aux autres pommes, qu'ils sont doués
d'une astringence plus forte et que leur gelée
peut se conserver, si on veut la mettre en réserve
après l'avoir fait bouillir avec du miel, tandis
que la gelée des autres pommes s'aigrit si on
la conserve, parce qu'elle contient beaucoup d'humeur
froide. 2. La gelée des poires à coing
se conserve mieux; et même elle dure plusieurs
années; dans ce cas, elle présente à
l'ouverture du vase une croûte épaisse,
comme il s'en forme souvent aussi une sur le miel et
sur quelques autres substances; il ne faut pas toucher
à cette croûte, si on veut que la gelée
mise en réserve se conserve longtemps sans subir
de changement. 3. La gelée de coings ronds est
moins agréable et plus fortement astringente,
en sorte qu'elle peut aussi quelquefois être utile
pour renforcer le ventre affaibli â un degré
très-prononcé.
51. DES POIRES ET DES GRENADES.
1. Si l'on applique aux poires et aux grenades
tout ce que j'ai dit des pommes, on n'aura plus besoin
d'un nouveau chapitre particulier sur ce sujet. 2. Les
grenades donnent très peu de nourriture au corps,
tandis que les poires, et surtout les grandes, qu'on
appelle chez nous menates, ont quelque chose de nutritif.
52. DES NÈFLES ET DES SORBES.
1. Ces fruits sont tous deux astringents,
mais les nèfles le sont beaucoup plus que les
sorbes; voilà pourquoi les nèfles constituent
un mets très utile quand le ventre est relâché
; mais les sorbes sont plus agréables à
manger. 2. Il est clair qu'il faut user de tons ces
fruits en petite quantité, et non en abondance,
comme des figues et des raisins.
53. DES DATTES.
1. Certaines dattes sont sèches et
astringentes, comme les dattes d'Égypte; certaines
autres sont molles, humides et sucrées, comme
celles qu'on appelle caryotes (dattes-noix); les meilleures
de cette dernière espèce croissent à
Jéricho clans la partie de la Syrie ap2 pelée
Palestine. 2. Entre ces deux espèces toutes les
autres tiennent le milieu, et sont plus ou moins humides
ou sèches, sucrées ou astringentes; quand
les extrêmes seront trouvés, il vous sera
très facile de déterminer toutes les espèces
intermédiaires; nous avons, en effet, montré
que les humeurs sucrées sont nourrissantes, et
que les humeurs âpres sont favorables à
l'orifice de l'estomac et resserrent le ventre. 3. Toutes
les dattes sont difficiles à digérer et
causent de la céphalalgie, si on en mange beaucoup;
quelques-unes déterminent en outre une sensation
de pincement à l'orifice de l'estomac. 4. L'humeur
qu'elles distribuent dans le corps est toujours épaisse,
et, de plus, elle présente quelque chose de visqueux,
si les dattes sont grasses; lorsqu'il y a quelque principe
sucré mêlé à cette humeur,
elle obstrue en peu de temps le foie; quand cet organe
est enflammé et affecté de squirrhe, il
éprouve un grand dommage, si on mange de cette
espèce de dattes; après le foie c'est
la rate qui est atteinte et obstruée.
54. DES OLIVES.
1. Ces fruits donnent très peu de nourriture
au corps, surtout ceux qui ont mûri sur l'arbre
; tandis que ces derniers contiennent une humeur grasse,
les olives appelées halmades ou colymbades renferment
une humeur astringente; voilà pourquoi elles
renforcent aussi l'orifice de l'estomac et excitent
l'appétit. 2. Parmi ces dernières, les
plus propres à cet effet sont celles qu'on conserve
dans du vinaigre.
55. DES NOIX ET DES NOISETTES.
1. Les noix aussi bien que les noisettes ne
donnent pas beaucoup de nourriture au corps, cependant
la noisette en contient davantage; toutes les deux sont
douées d'une faculté modérément
astringente, qui fait place avec le temps à une
propriété huileuse. 2. La noix verte n'a
pas de qualité astringente ni huileuse bien appréciable,
mais elle est en quelque sorte fade et aqueuse. 3. La
noix se digère plus facilement que la noisette;
elle est plus favorable à l'orifice de l'estomac,
surtout si on la mange avec des figues sèches.
4. La noix fraîche est évidemment plus
propre à relâcher le ventre que ne l'est
la noix sèche ; cependant, si on trempe une noix
sèche dans l'eau et qu'on la pèle, elle
devient semblable à la noix verte quant aux propriétés.
56. DES AMANDES.
1. Dans ces fruits c'est la faculté
atténuante et détersive qui domine; quelques-unes
possèdent à un tel degré la propriété
de diviser les humeurs épaisses et visqueuses,
qu'on ne saurait les manger à cause de leur amertume.
2. Les amandes sont aussi douées d'une propriété
huileuse et grasse comme les noix; elles donnent peu
de nourriture au corps.
57. DES PISTACHES.
1. Ces fruits nourrissent très peu,
mais ils sont propres à renforcer le foie, car
ils sont doués de propriétés: légèrement
amères et astringentes.
58. DES PRUNES.
1. Les prunes donnent très peu de nourriture
au corps, mais elles conviennent quand on se propose
d'humecter et de refroidir modérément
le ventre; elles sont également utiles après
être séchées. 2. Les meilleures
sont celles qui croissent à Damas.
59. DES JUJUBES.
1. Ces fruits sont mangés par les femmes
ou par les enfants en jouant, mais ils sont peu nourrissants
et difficiles à digérer; ils ne sont pas
non plus favorables à l'orifice de l'estomac.
2. Il est clair qu'ils donnent très peu de nourriture
au corps.
60. DES CAROUBES.
1. Les caroubes contiennent un mauvais suc;
elles sont bilieuses, difficiles à digérer
et ne passent même pas rapidement.
61. DES CÂPRES.
1. Les câpres ont des propriétés
pénétrantes, et, pour cette raison, elles
donnent très peu de nourriture au corps. 2. Salées
et trempées dans l'eau assez longtemps pour qu'elles
perdent toutes les propriétés qu'elles
tenaient du sel, les câpres donnent peu de nourriture,
il est vrai, mais enlèvent le phlegme contenu
dans le ventre et résolvent l'obstruction des
viscères, quand on les mange avant les autres
mets avec du vinaigre miellé, ou de l'huile et
du vinaigre.
62. DES SYCOMORES.
1. On trouve cette plante à Alexandrie;
elle porte un fruit semblable à la figue ; ce
fruit n'a aucune âcreté, il est, au contraire,
doué d'un goût légèrement
sucré; il est, en quelque sorte, un peu refroidissant
et humide.
Page 72
63. DU FRUIT DE LA PERSÉE.
1. La persée se rencontre également
à Alexandrie, et on raconte que son fruit est
si pernicieux en Perse qu'il tue ceux qui en usent,
mais qu'il est devenu bon à manger après
avoir été transporté en Égypte,
où on le mange comme les poires et les pommes.
64. DU CITRON.
1. Ce fruit est composé de trois parties
: la partie acide qui est au milieu, la partie qui entoure
celle-là et qu'on peut appeler sa chair, enfin
l'enveloppe qui le recouvre à l'extérieur.
2. Cette dernière partie est parfumée
et aromatique, mais elle est difficile à digérer;
cependant elle favorise la digestion, si on en use comme
médicament,
Page 73
et, prise en petite quantité, elle
renforce l'orifice de l'estomac. 3. On emploie la partie
aigre et impropre à l'alimentation pour la jeter
dans le vinaigre afin de le rendre plus aigre encore.
4. La partie moyenne qui donne de la nourriture au corps
est difficile à digérer.
65. DES PLANTES SAUVAGES.
1. Outre qu'elles donnent peu de nourriture
au corps, ces plantes contiennent toutes de mauvaises
humeurs, et quelques-unes d'entre elles nuisent à
l'orifice de l'estomac; il faut en excepter les plantes
épineuses, au moment où elles sortent
de terre.
Fin du livre
1er
Entête
du livre 1er.
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Tome 1 : Livre 2 bas
du livre
Page 74
1. DE LA LAITUE.
[Tiré de Galien].
1. Toutes
les herbes potagères produisant du sang en petite
quantité et composé d'humeurs mauvaises,
la laitue n'en produit pas beaucoup non plus; mais celui
qu'elle donne n'est pas entièrement formé
d'humeurs mauvaises; ainsi elle contient une humeur
humide et froide, mais elle ne produit pas d'humeurs
mauvaises, comme je viens de le dire.
2. DES ENDIVES.
1. Les endives
ont des propriétés semblables à
celles de la laitue; mais elles lui sont inférieures,
tant sous les rapports du goût, que sous celui
des autres qualités dont nous avons parlé
à propos de la laitue.
3. DE LA MAUVE.
1. La mauve
a quelque chose de visqueux, qualité dont la
laitue est privée; il est évident qu'elle
ne saurait être rangée parmi les mets refroidissants.
2. Ce légume traverse facilement le ventre, surtout
si on en mange abondamment avec de l'huile et du garon;
il jouit d'une propriété digestible moyenne.
4. DE LA BETTE.
1. II existe
certainement dans la bette un suc détersif, qui
excite aussi les excrétions alvines et cause
quelquefois des pincements à l'orifice de l'estomac;
aussi est-ce un mets nuisible pour cette partie, si
on en mange beaucoup. 2. Elle fournit peu de nourriture ainsi que
les antres herbes potagères, mais elle convient
dans les obstructions du foie, surtout si on la prend
avec de la moutarde ou du vinaigre; elle est bonne aussi
pour ceux qui ont la rate légèrement enflée.
5. DU CHOU.
1. Le jus
du chou a quelque chose de purgatif; mais sa substance
elle-même, parce qu'elle dessèche, resserre
plutôt le ventre qu'elle ne l'excite aux déjections.
2.
Or le chou dessèche de la même manière
que les lentilles cuites : c'est pourquoi il obscurcit
la vue, à moins que tout l'oeil ne soit par hasard
plus humide que dans l'état naturel. 3. Cependant
le chou n'est pas un mets qui possède une humeur
de bonne qualité comme la laitue; mais il fournit
un jus mauvais et d'odeur désagréable.
6. DE LA BLITE ET DE L'ARROCHE.
1. La blite
et l'arroche sont, parmi les herbes potagères,
les plus aqueuses et les plus dépourvues, pour
ainsi dire, de toute qualité. 2. Il a déjà
été dit que de semblables herbes ont une
certaine tendance à passer facilement, surtout
si elles joignent à l'humidité quelque
chose qui facilite leur glissement; cependant cette
tendance vers le bas n'est pas bien forte, parce qu'elles
ne sont douées d'aucune propriété
âcre et nitreuse. 3. Il est évident qu'elles donnent très
peu de nourriture au corps.
7. DU POURPIER.
1. Comme
aliment, le pourpier nourrit peu et la nourriture qu'il
donne est humide, froide et visqueuse; comme médicament,
il guérit l'agacement des dents, parce qu'il
est visqueux sans être mordant.
8. DE LA PATIENCE.
1. La patience
est semblable à la bette cultivée, tant
sous le rapport du goût que sous celui des propriétés;
mais, comme la bette est plus agréable que la
patience, en général on mange plutôt
la première.
9. DE LA PATIENCE SAUVAGE.
1. Personne
ne mangera la patience ordinaire crue pas plus que la
bette; mais, à la campagne, on mange crue la
patience sauvage; elle est beaucoup moins nourrissante
encore que la patience ordinaire.
10. DE LA MORELLE.
1. Parmi
les herbes qu'on mange, je n'en connais aucune qui soit
douée d'une astringence aussi forte que la morelle;
ce n'est donc pas à tort que nous l'employons
rarement comme aliment, mais habituellement comme médicament;
car elle agit efficacement quand on a besoin d'un refroidissement
qui resserre.
11. DES PLANTES ÉPINEUSES.
1. Beaucoup
de paysans mangent les plantes épineuses quand
elles viennent de sortir de terre. 2. Ainsi que toutes
les herbes, elles sont très peu nourrissantes,
et la nourriture qu'elles fournissent est ténue
et aqueuse; les plantes épineuses sont donc modérément
favorables à l'orifice de l'estomac. 3. Du nombre
de ces plantes sont: la cardousse, le carthame laineux,
l'épine blanche, le chardon à foulon,
le carthame, l'astragale, l'atragis et l'artichaut,
qu'on estime plus qu'il ne le mérite. 4. Ce dernier
aliment fournit des humeurs mauvaises, surtout quand
il a déjà commencé à se
durcir; car alors il contient une assez grande quantité
d'humeur bilieuse, et toute sa substance est plus ou
moins ligneuse, de sorte qu'elle engendre des humeurs
atrabilaires; mais le jus que contient l'artichaut fournit
une humeur ténue de la nature de la bile amère
; il est donc préférable de l'adoucir
par la coction avant de le manger.
12. DU MACERON, DE LA BERLE, DU SMYRNIUM
ET DU CÉLERI.
1. Toutes
ces plantes sont diurétiques; celle qu'on mange
le plus habituellement est le céleri, parce qu'il
est plus agréable et plus favorable à
l'orifice de l'estomac que les autres. 2. Le smyrnium est
beaucoup plus âcre et plus chaud que le céleri,
le maceron et la berle. 3. Les autres plantes [c'est-à-dire
le smyrnium et le céleri] se mangent aussi bien
crues que cuites; mais on ne mange le maceron et la
berle que cuits, car ces légumes se montrent
désagréables quand ils sont crus. 4. Quelques-uns
mangent aussi le céleri et le smyrnium en les
mêlant aux feuilles de laitue; car la laitue,
étant une herbe assez fade et qui contient en
outre une humeur froide, devient à la fois plus
agréable et plus profitable quand on y ajoute
quelque chose d'âcre.
13. DE LA ROQUETTE.
1. Ce légume
échauffe manifestement, aussi n'est-il pas facile
de le manger seul sans le mêler aux feuilles de
laitue. 2. On admet encore qu'il engendre du sperme
et qu'il excite les désirs vénériens.
3.
Il cause aussi de la céphalalgie, surtout si
on le mange tout seul.
14. DE L'ORTIE.
1. L'ortie
a les propriétés des substances dont les
molécules sont ténues; aussi n'est-ce
pas sans cause que personne ne l'emploie comme aliment,
tandis qu'elle est utile comme mets accessoire et comme
médicament, puisqu'elle relâche le ventre.
15. DU GINGIDIUM ET DE L'AIGUILLETTE.
1. Le gingidium
est semblable à l'aiguillette et il est éminemment
favorable à l'orifice de l'estomac, qu'on le
mange cru ou cuit; mais il ne supporte pas une cuisson
prolongée et il est doué d'une astringence
et d'une amertume assez manifeste.
16. DU BASILIC.
1. Le basilic
renferme de très mauvaises humeurs; aussi, renchérissant
sur la vérité, on raconte que, si, après
l'avoir broyé, on le jette dans un pot nouveau,
il engendre très rapidement en peu de jours des
scorpions; il est encore nuisible à l'orifice
de l'estomac.
17. DES TIGES COMESTIBLES.
1. La tige
du chou dessèche moins fortement que le chou
lui-même, tandis que, pour les autres herbes potagères,
la tige dessèche plus fortement que les feuilles.
2.
Il existe un autre genre de tiges comestibles, lesquelles
appartiennent à des plantes frutescentes, comme
le houx frelon, le fragon racémeux et le buisson
ardent; il y en a encore d'autres différentes
de ces dernières, dont une espèce est
appelée asperge royale, une autre, asperge des
marais; de même la tige de couleuvrée en
constitue une autre espèce. 3. Toutes sont favorables
à l'orifice de l'estomac, poussent aux urines
et contiennent peu de matière nutritive.
18. DU NAVET ou BUNIAS.
1. Je serais
étonné que le navet nourrît moins
qu'aucune des plantes du même genre; mais il distribue
dans le corps une humeur plus épaisse qu'il ne
faut; si donc on en mange en grande quantité,
il y aura accumulation d'humeur crue. 2. Bouilli deux fois,
il devient très bon; si on le prend moins cuit,
il devient difficile à digérer, flatulent
et nuisible à l'orifice de l'estomac; quelquefois
aussi il cause des pincements dans cette partie.
19. DU GOUET.
1. On mange
la racine du gouet comme le navet; mais, dans quelques
pays, elle devient plus âcre [que de coutume],
de manière à se rapprocher de la racine
de serpentaire; dans ce cas, il faut la faire bouillir
deux fois avant de la manger; à Cyrène,
au contraire, elle est très peu médicamenteuse
et très peu âcre, de telle sorte qu'elle
est même préférable au navet. 2. Il est
évident que cette dernière espèce
convient mieux quand il s'agit de nourrir, tandis que
l'espèce âcre est meilleure pour expulser
les crachats de la poitrine et du poumon. 3. On mange
la racine du gouet bouillie, avec de la moutarde ou
du vinaigre, en l'assaisonnant d'huile et de garon.
4.
Il est clair que la nourriture qu'elle distribue au
corps est assez épaisse, comme celle que fournit
le navet.
20. DE LA SERPENTAIRE.
1. Après
avoir fait bouillir deux ou trois fois la racine de
serpentaire, afin qu'elle perde ce qu'elle a de médicamenteux,
nous la donnons quelquefois à manger, quand nous
avons besoin d'un agent qui provoque fortement l'expulsion
des crachats de la poitrine et du poumon.
21. DE L'ASPHODÈLE.
1. Quand
on prépare cette racine, comme les lupins, elle
perd la plus grande partie de son amertume ; je sais
toutefois que, dans des cas de famine, on est à
peine parvenu à la rendre mangeable par des coctions
et des macérations réitérées
dans l'eau douce. 2. Ses propriétés sont désobstruantes
et incisives, comme celles de la serpentaire.
22. DU VACCET.
1. On mange
les racines du vaccet, et quelquefois aussi, au printemps,
ses tiges; elles ont des propriétés amères
et âpres qui leur donnent la faculté d'exciter
l'appétit quand l'orifice de l'estomac est affaibli.
2.
Les racines ne sont pas contraires à ceux qui
veulent expulser quelques crachats de la poitrine ou
du poumon, bien que leur substance soit plus ou moins
épaisse et visqueuse; mais cette épaisseur
est contrebalancée par leur amertume, qui exerce
naturellement une action incisive sur les humeurs visqueuses
et épaisses: dans ce cas, il est préférable
de les manger dans du vinaigre, avec de l'huile et du
garon; car elles deviennent ainsi plus agréables,
moins flatulentes, plus nutritives et plus faciles à
digérer. 3. Quelques personnes qui avaient mangé
beaucoup d'oignons de vaccet s'aperçurent clairement
qu'elles avaient plus de sperme [qu'auparavant] et qu'elles
devenaient plus disposées à l'acte générateur.
23. DE LA CAROTTE, DU DAUCUS ET DU CARVI.
1. On mange
également les racines de ces plantes; elles sont,
il est vrai, moins nutritives que les navets et les
gouets de Cyrène, mais elles échauffent
manifesteraient et trahissent quelque chose d'aromatique.
2.
Comme les autres racines, elles sont difficiles à
digérer; mais elles poussent aux urines, et,
si on en use avec excès, elles engendrent des
humeurs assez mauvaises; cependant le carvi donne de
meilleures humeurs que la carotte. 3. Quelques-uns appellent
daucus la carotte sauvage, laquelle pousse plus fortement
aux urines [que l'autre], a un goût plus médicamenteux
et nécessite une coction prolongée, si
on veut la manger.
24. DES TRUFFES.
1. Les truffes
n'ont aucune qualité appréciable; on les
emploie donc comme excipient d'assaisonnements, ainsi
que les autres mets qu'on appelle mets sans qualité
et d'une saveur aqueuse. 2. Toutes ces substances ont cela de commun
qu'elles distribuent dans le corps une nourriture qui
n'échauffe point, mais qui est légèrement
froide; quant à l'épaisseur, cette nourriture
est conforme à celle du mets qu'on a pris ; la
nourriture que fournit la truffe est plutôt épaisse,
tandis que celle des autres mets est plutôt humide
et subtile dans la même proportion que les mets
eux-mêmes.
25. DES CHAMPIGNONS.
1. Parmi
les champignons, les bolets, quand ils sont bien cuits
dans l'eau, se rapprochent des mets sans qualité
apparente. 2. La nourriture qu'ils fournissent est pituiteuse
et froide, et, si on en mange abondamment, elle produit
des humeurs mauvaises. 3. Ce sont là les champignons les plus
innocents, les amanites occupent le second rang; quant
aux autres, il est plus prudent de ne pas y toucher
du tout; car beaucoup de gens en sont morts.
26. DU RADIS.
1. Le radis
a des vertus atténuantes; en même temps,
il échauffe manifestement; car les qualités
âcres y prédominent.
27. DES OIGNONS, DES POIREAUX, DE L'AIL
ET DU POIREAU DE VIGNES.
1. Ces plantes
ont une propriété très âcre,
et, conformément à cette propriété,
elles échauffent le corps, atténuent les
humeurs épaisses qu'il contient et divisent les
humeurs visqueuses. 2. Bouillies deux ou trois fois, elles perdent
leur âcreté; mais elles n'en continuent
pas moins d'atténuer et donnent très peu
de nourriture au corps, tandis que, avant la cuisson,
elles n'en donnaient pas du tout. 3. Les poireaux de
vigne diffèrent autant des poireaux ordinaires
que, parmi les autres plantes du même genre, les
plantes sauvages diffèrent des espèces
cultivées. 4. Il faut éviter de manger habituellement
des substances âcres, quelles qu'elles soient,
surtout quand la personne qui en use est plutôt
bilieuse qu'autrement; car de semblables aliments conviennent
uniquement à ceux qui ont une accumulation d'humeur
pituiteuse ou d'humeur crue, épaisse et visqueuse.
28. DE LA NOURRITURE TIRÉE DES ANIMAUX.
1. Toutes
les parties des animaux ne possèdent pas les
mêmes propriétés; mais leur chair,
quand elle est bien digérée, engendre
un sang excellent, surtout celle des animaux doués
d'humeurs de bonne nature, des cochons, par exemple,
tandis que les parties nerveuses produisent plutôt
du sang pituiteux. 2. La viande de porc est, parmi tous les mets,
ce qu'il y a de plus nutritif. 3. Le boeuf, il est
vrai, donne aussi une nourriture assez abondante et
qui ne se perd pas aisément par la perspiration
; mais il produit du sang plus épais qu'il ne
convient; et quelqu'un qui a, par nature, un tempérament
atrabilaire, sera pris de quelque maladie dépendant
de la bile noire, s'il en mange beaucoup. 4. Autant
le boeuf surpasse le porc par l'épaisseur de
toute sa substance, autant le porc l'emporte sur le
boeuf par la viscosité de sa chair; mais le porc
est d'une digestion beaucoup plus facile. 5. Le veau
est d'une plus facile digestion que le boeuf; il en
est de même des jeunes boucs comparés aux
chèvres; car, bien qu'elle soit d'un tempérament
moins sec que le boeuf, la chèvre, si on la compare
au porc, en diffère très notablement.
6. Les petits porcs nous fournissent une nourriture
d'autant plus imprégnée d'humeurs excrémentitielles,
qu'ils ont plus d'humidité que les grands porcs;
il s'ensuit naturellement qu'ils sont également
moins nourrissants. 7. Les agneaux ont aussi la chair pituiteuse
et très humide; mais celle du mouton est également
plus ou moins imprégnée d'humeurs excrémentitielles
et mauvaises; celle de la chèvre contient aussi
de mauvaises humeurs, et de plus elle est âcre.
8.
La chair de bouc est la plus mauvaise, tant sous le
rapport de la bonté des humeurs, que sous celui
de la facilité de la digestion; après
elle vient la chair de bélier et ensuite celle
de taureau. 9. Chez tous ces animaux, la chair des individus
châtrés est préférable; mais
celle des animaux âgés est ce qu'il y a
de plus mauvais, tant sous le rapport de la facilité
de la digestion, que sous celui de la bonté des
humeurs et de l'abondance de la nourriture; de sorte
que, chez les cochons eux-mêmes, bien que ces
animaux aient un tempérament humide, la chair
des individus âgés est fibreuse, sèche
et, par suite, difficile à digérer. 10 La viande
de lièvre produit également du sang plus
ou moins épais; mais, pour la bonté des
humeurs, elle est préférable à
celle du boeuf et du mouton. 11. La viande de cerf n'est ni moins imprégnée
de mauvaises humeurs, ni moins dure, ni moins difficile
à digérer. 12. La chair des ânes sauvages, du moins
celle des individus de bonne complexion et jeunes, se
rapproche de celle des cerfs; quelques personnes mangent
aussi la chair des ânes domestiques, quand ils
sont devenus vieux, ce qui constitue un mets fortement
imprégné d'humeurs mauvaises, difficile
à digérer, nuisible à l'orifice
de l'estomac, et, en outre, désagréable
ainsi que la chair des chevaux et des chameaux; ceux
qui mangent de ces viandes ressemblent eux-mêmes
aux ânes, tant par le corps que par l'âme.
13.
Quelques-uns mangent également la chair des ours,
et, ce qui est encore pis, celle des lions et des léopards.
14.
Quant aux chiens, est-il nécessaire de dire que,
chez quelques peuples, on mange les sujets jeunes et
gras, surtout quand ils sont châtrés, et
qu'il en est de même pour les panthères?
15.
Dans mon pays, les chasseurs mangent également
en automne la chair de renard. 16. Il faut savoir
que les animaux, qui ont besoin de paître l'herbe
haute, comme les boeufs , deviennent maigres et s'imprègnent
d'humeurs mauvaises en hiver et au commencement du printemps,
tandis qu'ils se montrent évidemment plus gras
et imprégnés d'humeurs meilleures dans
une saison plus avancée, quand l'herbe devient
grande, épaisse et monte en graine; ceux, au
contraire, qui peuvent se nourrir d'herbe courte, comme
les moutons, sont meilleurs au commencement et au milieu
du printemps; les chèvres, enfin, sont préférables
au commencement et au milieu de l'été,
quand les jeunes pousses des arbrisseaux sont le plus
abondantes, car c'est là leur nourriture habituelle.
29. DES ESCARGOTS.
1. Les escargots ont la chair dure et, par
conséquent, difficile à digérer;
mais, si on la digère, elle nourrit fortement.
2. Ils ont, ainsi que les testacés, un suc qui
relâche le ventre : aussi, se sert-on du bouillon
qu'on obtient en les assaisonnant avec de l'huile, du
garon et du vin, pour faciliter l'évacuation
de ce qui est contenu dans les intestins. 3. Si, au
contraire, on veut seulement employer la chair de cet
animal comme un mets nourrissant, on la fera bouillir
d'abord avec de l'eau, on la mettra ensuite dans de
l'autre eau, dans laquelle on la fera de nouveau bouillir;
après cela, on l'assaisonnera et on la fera bouillir
pour la troisième fois, jusqu'à ce qu'elle
devienne complètement tremblante ; ainsi préparée,
elle resserrera le ventre, mais elle fournira une nourriture
abondante au corps.
30. DES EXTRÉMITÉS DES QUADRUPÈDES.
1. Les pieds
des petits porcs sont un mets très convenable,
quand on les jette dans de l'orge mondée en ébullition.
2.
Toutes les extrémités du corps ont très
peu de graisse et très peu de substance charnue,
tandis que le genre nerveux et cutané y prédomine;
cependant ces nerfs et cette peau ne sont pas identiques
avec les substances analogues qui se trouvent dans le
reste du corps, car la peau et les nerfs sont plus exercés
dans les extrémités [qu'ailleurs]. 3. Il résulte
de cette prédominance de peau et de nerfs que
les extrémités sont plus visqueuses [que
les autres parties]; car tout nerf et toute peau se
transforment en une substance visqueuse par la coction;
il est donc naturel qu'elles donnent moins de nourriture
au corps tandis qu'elles traversent plus aisément
les intestins à cause de leur viscosité.
4.
Les pieds de cochon sont meilleurs que le museau, et
celui-ci est préférable aux oreilles;
car ces dernières sont uniquement composées
de peau et de cartilage; or le cartilage est complètement
indigestible chez les animaux adultes, tandis que, chez
ceux qui sont encore dans la période de croissance,
il se digère, pourvu qu'on le broie bien dans
la bouche, et donne peu de nourriture au corps. 5. Appliquez
ce qu'on vient de dire, dans la même proportion,
aux autres animaux; car, autant leur chair le cède
à celle des cochons, sous le rapport de la bonté
de la nourriture, autant, chez eux, les extrémités
sont inférieures à celles des cochons.
31. DE LA LANGUE DES QUADRUPÈDES.
1. Cette
partie a une substance particulière plus spongieuse
et plus exsangue que la chair car la chair proprement
dite est formée par les muscles, surtout par
leur partie moyenne.
32. DES GLANDES.
1. Les glandes,
par leur nature, s'éloignent autant de la langue
que celle-ci s'éloigne des chairs. 2. C'est
une propriété commune à toutes
les glandes d'être agréables et de se morceler
quand elles sont préparées pour le repas
; mais celles des mamelles offrent en outre, quand elles
contiennent du lait, quelque chose de la douceur de
ce liquide; et c'est précisément pour
cela que ces glandes, lorsqu'elles sont pleines de lait,
surtout celles des truies, constituent un mets très
recherché des gourmets. 3. La nourriture
que donnent les glandes, quand elles sont bien digérées,
se rapproche de celle que fournissent les chairs; mais,
quand elles sont moins complètement assimilées,
elles produisent des humeurs crues ou pituiteuses. 4. Quoique
les testicules appartiennent au genre des glandes, ils
ne contiennent pas des humeurs aussi bonnes que les
glandes des mamelles; ils ont, au contraire, une certaine
odeur repoussante, car ils trahissent la nature du sperme
qu'ils fabriquent, comme les reins trahissent celle
de l'urine; ils sont aussi beaucoup plus difficiles
à digérer [que les autres glandes], du
moins les testicules des animaux qui marchent; car ceux
des coqs engraissés sont agréables et
donnent une bonne nourriture au corps.
33. DES REINS.
1. Les reins
sont évidemment imprégnés de mauvaises
humeurs et difficiles à digérer.
34. DES TESTICULES.
1. Les testicules
de tous les quadrupèdes sont difficiles à
digérer et imprégnés d'humeurs
mauvaises; mais, quand ils sont bien digérés,
ils nourrissent bien; il n'y a que les testicules des
coqs qui soient agréables et excellents sous
tous les rapports, surtout ceux des coqs engraissés.
35. DE LA CERVELLE.
1. Toute
cervelle est un mets plus ou moins pituiteux, imprégné
d'humeurs mauvaises, passant lentement, difficile à
digérer et assez fortement nuisible à
l'orifice de l'estomac. 2. Induits en erreur par sa mollesse, quelques-uns
la donnent aux malades, bien qu'à ses autres
qualités elle ajoute celle d'exciter du dégoût.
3.
Comme elle contient des humeurs épaisses et excrémentitielles,
elle devient meilleure quand on l'assaisonne avec des
ingrédients incisifs et échauffants; cependant,
quand elle est bien digérée, elle donne
au corps une nourriture abondante.
36. DE LA MOELLE DES OS.
1. La moelle
des os est plus douce, plus agréable et plus
grasse que la cervelle; si donc on les goûte comparativement,
on croira même que la cervelle a quelque chose
d'âpre. 2. Ainsi que la cervelle, la moelle est un
aliment qui excite le dégoût, quand on
en mange beaucoup; cependant, si elle est bien digérée,
elle donne également une nourriture suffisante.
37. DE LA MOELLE ÉPINIÈRE.
1. La moelle
épinière contient très peu de graisse;
aussi échappe-t-elle à l'inconvénient
de causer du dégoût, et, si elle est bien
digérée, elle donne une nourriture assez
abondante au corps.
38. DE LA GRAISSE MOLLE ET DE LA GRAISSE
COMPACTE.
1.
Ces deux substances sont peu nourrissantes; elles servent
plutôt d'assaisonnement [naturel] pour les viandes
qui nous nourrissent.
39. DES VISCÈRES DES QUADRUPÈDES.
1. Le foie
de tous les animaux contient des humeurs épaisses,
se digère difficilement et passe lentement. 2. Le meilleur
foie, non seulement quant au goût, mais aussi
sous les autres rapports, est celui qu'on appelle sycoton;
il a reçu ce nom, parce qu'il doit ses qualités
distinctives à cette circonstance qu'on donne
beaucoup de figues sèches à l'animal destiné
à être tué. 3. On applique surtout
ce procédé aux porcs, parce que les viscères
de cet animal sont beaucoup plus agréables que
ceux des autres animaux. 4. Parmi les autres viscères, la rate
n'est pas même agréable au goût;
car elle offre une âpreté fortement prononcée,
et on a raison de la regarder comme imprégnée
d'humeurs mauvaises, puisqu'elle produit du sang atrabilaire.
5.
Le poumon, étant moins dense que les deux viscères
susdits, est d'autant plus facile à digérer;
il est de beaucoup inférieur au foie, quant à
la faculté nutritive, et la nourriture qu'il
donne au corps est plus pituiteuse. 6 Le coeur est une
chair fibreuse et dure, quant à sa substance;
aussi se digère-t-il difficilement et passe-t-il
lentement; mais, si le cœur est bien digéré,
il donne au corps une nourriture assez abondante et
non imprégnée d'humeurs mauvaises.
40. DE L'ESTOMAC, DE LA MATRICE ET DES
INTESTINS DES QUADRUPÈDES.
1. Ces parties
sont plus dures que les chairs ; il s'ensuit que, même
pas du sang proprement dit, mais quelque chose de plus
froid et de plus cru ; elle a besoin d'un temps plus
prolongé pour se transformer en bon sang, après
avoir été bien assimilée.
41. DE LA DIFFÉRENCE ENTRE LES ANIMAUX
SAUVAGES ET LES ANIMAUX DOMESTIQUES.
1. Le tempérament
des animaux domestiques est plus humide que celui des
animaux sauvages; [la chair] des animaux sauvages est
plus ou moins dure et contient ou très peu, ou
point du tout de graisse; aussi elle résiste
à la putréfaction pendant un plus grand
nombre de jours que celle des animaux à l'état
domestique, ou qui ont mené une vie paresseuse.
2.
Il est clair que la nourriture tirée des animaux
sauvages est à peu près destituée
de matières excrémentitielles, tandis
que celle fournie par les animaux domestiques et paresseux
en est imprégnée.
42. DE LA NOURRITURE TIRÉE DES OISEAUX.
1. Les oiseaux
sont tous peu nourrissants, si on les compare aux quadrupèdes
et surtout aux cochons; mais la chair des oiseaux est
plus facile à digérer, surtout celle de
la perdrix, du coq de bruyère, du pigeon et du
coq. 2. La chair des grives, des merles et des petits
oiseaux, parmi lesquels il faut ranger les moineaux
domestiques, est plus dure que celle des oiseaux que
nous venons d'énumérer; la chair de la
tourterelle, du ramier et du canard, est encore plus
dure que celle de ces derniers. 3. La chair de faisan
est semblable à celle des poules, tant sous le
rapport de la digestion, que sous celui de la nutrition;
mais elle lui est supérieure, par le plaisir
qu'elle donne quand on la mange. 4. La chair de paon
est plus dure, plus difficile à digérer
et plus fibreuse que celles dont nous avons déjà
parlé. 5. En général, il faut savoir
que, chez tous les oiseaux, aussi bien que chez les
quadrupèdes, la chair des animaux qui sont encore
en croissance est beaucoup meilleure que celle des individus
sur le déclin de l'âge, que celle des animaux
tout à fait jeunes est également mauvaise,
mais d'une manière opposée à celle
des animaux âgés; car la chair des animaux
âgés est dure, nerveuse, par cela même
difficile à digérer, et donne peu de nourriture
au corps, tandis que celle des individus tout à
fait jeunes est muqueuse et humide, et, pour cette raison,
imprégnée de matières excrémentitielles;
mais elle traverse plus facilement les intestins.
43. DES OIES ET DES AUTRUCHES.
1. La chair
de ces animaux est imprégnée de matières
excrémentitielles, et elle est beaucoup plus
difficile à digérer que celle des oiseaux
dont nous venons de parler; mais leurs ailes ne sont
pas plus mauvaises que celles des autres; en effet,
chez plusieurs oiseaux, et surtout chez ceux qui sont
petits et ont la chair dure, la substance des ailes
est fibreuse et dure; chez quelques-uns même,
toute la chair possède ces qualités, par
exemple celle des grues; car on mange aussi ces oiseaux,
après les avoir conservés pendant quelques
jours. 2. Les oiseaux appelés outardes tiennent,
en quelque sorte, par leur chair, le milieu entre les
grues et les oies.
44. DES VISCÈRES DES OISEAUX.
1. Les estomacs
des oiseaux sont mangeables et nutritifs, et ceux de
quelques-uns, par exemple des oies, sont agréables;
en second lieu viennent ceux des poules engraissées.
2.
De même que, chez les cochons, le foie sycoton
est rendu d'avance agréable, pendant la vie,
par l'usage alimentaire des figues sèches, de
même on obtient ce résultat chez les oies,
en humectant de petit lait leurs aliments, de manière
à rendre leur foie, non seulement très
agréable, mais aussi très nutritif, à
l'imprégner d'excellentes humeurs et à
lui faire traverser assez facilement les intestins ;
il se comporte alors de la même manière,
par rapport à la digestion stomacale. 3. Les ailes
des oies sont également aptes à être
bien digérées et à nourrir; mais
celles des poules le sont encore plus, cependant celles
des animaux vieux et maigres sont les plus mauvaises
et celles des individus jeunes et bien nourris les meilleures.
4.
Les testicules des coqs sont également excellents,
surtout ceux des coqs engraissés et encore plus
ceux des individus pour lesquels on a mêlé
les aliments avec du petit lait; car ceux-là
contiennent de bons sucs, sont nutritifs et se digèrent
très facilement. 5. Quelques-uns louent à tort l'estomac
de l'autruche comme un médicament digestif; d'autres
louent encore beaucoup plus celui du labbe ; mais ces
organes ne se digèrent pas facilement eux-mêmes
et ils ne constituent pas non plus un médicament
propre à faciliter la digestion des autres aliments.
45. DES OEUFS.
1. Ceux
des poules et des faisans sont les meilleurs, ceux des
oies et des autruches sont moins bons. 2. Les oeufs frais
sont également meilleurs que les vieux, et ceux
qui sont peu cuits sont préférables à
ceux qui le sont beaucoup. 3. Les meilleurs donc, pour nourrir le corps,
sont les oeufs à demi-durs ; les oeufs mous nourrissent
moins, mais ils descendent plus facilement; les oeufs
durs sont difficiles à digérer, traversent
lentement les intestins et distribuent dans le corps
une nourriture épaisse. 4. Les oeufs cuits
sous la cendre chaude passent encore plus lentement
que ces derniers et contiennent des humeurs encore plus
épaisses. 5. Ceux qu'on laisse épaissir dans une
poêle, et qu'on appelle, pour cela même,
oeufs à la poêle, donnent une nourriture
très mauvaise sous tous les rapports. 6. Ceux
qu'on appelle pochés sont meilleurs que les oeufs
durs et les oeufs cuits sous la cendre; on les prépare
en les humectant avec de l'huile, du garon et un peu
de vin, ensuite on met le vase [qui les contient] dans
un pot renfermant de l'eau chaude, on ferme exactement
ce pot avec un couvercle et on met du feu dessous, jusqu'à
ce qu'ils soient parvenus à une consistance moyenne,
car ceux qui se sont trop épaissis deviennent
semblables aux oeufs durs et aux oeufs cuits sous la
cendre. 7. Il faut tâcher de saisir la même
consistance moyenne pour les oeufs qu'on verse d'en
haut sur un plat et ne pas leur permettre de s'épaissir
complètement, mais ôter le plat du feu
pendant qu'ils sont encore en gelée.
46. DU MUGE.
1. La chair
des muges qui vivent dans l'eau bourbeuse et sale est
imprégnée de matières excrémentitielles
et très muqueuse; mais celle des muges vivant
dans la mer pure est excellente; ceux qui vivent dans
les lacs, et surtout dans les petits lacs, sont mauvais,
et ils le sont encore davantage, quand l'eau est stagnante
et n'a pas d'écoulement. 2. Parmi les muges
qui naissent dans les rivières, ceux des rivières
à courant fort et rapide sont les meilleurs ;
mais ceux des rivières qui forment des lacs ne
sont pas bons. 3. Le goût pourra vous servir aussi à
reconnaître la meilleure espèce de muge,
car la chair de cette espèce est plus ou moins
piquante et agréable et n'a pas de graisse, tandis
que les muges gras et d'un goût peu prononcé
sont moins bons à manger, se digèrent
moins bien, nuisent à l'orifice de l'estomac
et contiennent de mauvaises humeurs; voilà pourquoi
on les assaisonne aussi avec de l'origan.
47. DU BAR.
1. Le bar
est un poisson de haute mer; or l'aliment que nous donne
ce poisson, ainsi que celui fourni par les autres poissons,
se prête plutôt à engendrer un sang
d'une consistance assez tenue que celui que nous devons
aux quadrupèdes ; il ne nourrit donc pas très
fortement et se dissipe rapidement par la perspiration.
48. DU ROUGET.
1. Le rouget
est aussi un poisson de haute mer; mais il a une chair
plus dure peut-être que celle de tous les poissons
de même nature, et elle est sans cohésion;
si donc on la digère bien, elle nourrit plus
que celle des autres poissons. 2. Les rougets deviennent
excellents, d'abord par leur séjour dans la mer
pure, ainsi que tous les autres poissons, et au moins
autant par leur nourriture. 3. Ceux donc qui mangent de petites crabes
ont l'odeur et le goût mauvais, se digèrent
difficilement et contiennent des humeurs mauvaises ;
on les reconnaîtra avant de les manger, en leur
ouvrant le ventre, et pendant qu'on les mange, dès
le premier abord, par leur odeur et leur goût.
49. DES POISSONS ROCHEUX.
1. On regarde
le scare comme le meilleur de ces poissons, sous le
rapport du goût; viennent ensuite les tourdes
et les merles, et après eux les girelles, les
boulereaux et les perches. 2. La nourriture qu'ils fournissent est non
seulement facile à digérer, mais aussi
très favorable à la santé du corps
de l'homme, parce qu'ils produisent du sang de consistance
moyenne.
50. DES LOCHES DE MER.
1. La loche
est un poisson des côtes, du nombre de ceux qui
restent toujours petits; celle qui habite les côtes
sablonneuses ou les falaises rocheuses est excellente,
sous le rapport du goût, de la digestion, et aussi
bien pour la bonté que pour la facile distribution
des humeurs; mais celle qu'on prend à l'embouchure
des rivières ou dans l'eau de mer stagnante n'est
ni facile à digérer, ni imprégnée
d'humeurs de bonne qualité. 2. Si l'eau est en
outre bourbeuse, ou si c'est une rivière qui
entraîne les immondices d'une ville, la loche
qui s'y tient sera très mauvaise; il en est de
même de tous les autres poissons qui habitent
de pareilles eaux. 3. La chair des loches, bien qu'elle soit plus
dure que celle des poissons rocheux, est plus molle
que celle des rougets; aussi le corps de ceux qui en
usent reçoit une nourriture nui est en raison
de ses propriétés.
51. DES POISSONS À CHAIR MOLLE,
À PROPOS DE QUOI ON TROUVE AUSSI LA PRÉPARATION
DE LA SAUCE BLANCHE.
1 Si les
motelles prennent une bonne nourriture et vivent dans
la mer pure, elles ont une chair tout aussi bonne que
les poissons rocheux; si, au contraire, elles prennent
de mauvais aliments et vivent dans quelque eau mélangée,
elles ne perdent pas, il est vrai, la mollesse de leur
chair, mais elles prennent de la graisse, ce qui fait
qu'elles ne restent plus aussi agréables [qu'auparavant]
et qu'elles distribuent dans le corps une nourriture
plus chargée de matières excrémentitielles.
2.
Ainsi que je viens de le dire, il faut se rappeler,
comme une règle commune à tous les poissons,
qu'ils deviennent très mauvais à l'embouchure
des rivières qui servent de déversoir
aux latrines, aux bains, aux cuisines et à la
lessive des vêtements ou du linge. 3. On trouvera
aussi très mauvaise la chair d'une murène
qui vit dans de l'eau semblable. 4. La sole est plus
molle, plus agréable à et meilleure, sous
tous les rapports, que le flet. 5. Les lézards
marins tiennent en quelque sorte le milieu entre les
poissons à chair molle et ceux à chair
dure. 6. Le meilleur assaisonnement de tous ces poissons,
pour en faciliter la digestion, est la sauce blanche,
qui se prépare de la manière suivante
: après avoir jeté sur le poisson de l'eau
en abondance, on y verse de l'huile en quantité
suffisante avec un peu d'aneth et de poireau; ensuite
on cuit les poissons à demi et on ajoute du sel
ce qu'il en faut pour que la sauce n'ait pas un goût
trop salé; cet assaisonnement est bon aussi pour
les gens maladifs. 7. La nourriture retirée de tous les
poissons susdits convient à ceux qui ne prennent
point d'exercice, qui mènent une vie oisive,
aux gens faibles et maladifs; mais ceux qui prennent
de l'exercice ont besoin d'aliments plus nutritifs.
8.
Il a été souvent répété
que les aliments mous et sans cohésion sont les
meilleurs pour la santé, parce que, entre tous,
ils contiennent les humeurs les meilleures; or il n'y
a pas de moyen plus sûr pour arriver à
la santé que la bonté des humeurs.
52. DES POISSONS A CHAIR DURE.
1. Tout
le monde s'aperçoit facilement, en mangeant les
vives et les grondins, qu'ils ont la chair dure. 2. Les gades
ont également la chair dure, excepté celui
que les Romains appellent galaxias et qui est un poisson
très estimé et tendre, quoiqu'il appartienne
au genre des gades. 3. Les scorpènes, les maquereaux bâtards,
les orphes et les rougets appartiennent aussi aux poissons
à chair dure. 4. Les poissons à chair dure constituent
un mets dont il est plus difficile de triompher que
des poissons à chair molle, cela est évident;
en effet, la digestion qui a lieu dans l'estomac, la
sanguification qui se fait dans le foie et dans les
veines, et l'assimilation qui s'opère clans chacune
des parties, pendant la nutrition, sont faciles pour
les substances molles, et difficiles pour les substances
dures. 5. L'humeur produite par les poissons à
chair dure est épaisse, tandis que celle qu'on
doit aux poissons à chair molle est plutôt
ténue.
53. DES TESTACÉS.
1. On appelle
testacés les buccins, les pourpres, les huîtres,
les cames et tous les autres animaux semblables, parce
que leur tégument extérieur ressemble
à une tuile. 2. Tous ces animaux ont cela de commun que
leur chair contient un liquide salé qui relâche
le ventre; ce qu'il y a de propre à chaque espèce
consiste dans les divers degrés de cette propriété,
tant sous le rapport de la qualité que sous celui
de la quantité ; ainsi, de tous les testacés,
les huîtres ont la chair la plus molle, tandis
que les petites cames, les pourpres, les buccins, et
les autres animaux semblables, ont la chair dure; il
est donc naturel que les premiers relâchent davantage
le ventre en donnant moins de nourriture au corps, tandis
que les testacés à chair dure sont plus
difficiles à digérer, mais nourrissent
davantage. 3. Comme la chair des testacés à
chair dure est difficile à digérer, et
qu'aussi elle se corrompt difficilement, nous jugeons
souvent à propos de les donner à ceux
dont les aliments se corrompent dans l'estomac à
cause des humeurs mauvaises, que ces humeurs affluent
vers l'estomac, en venant du foie, ou qu'elles soient
contenues dans les tuniques de l'estomac même.
4.
Les testacés produisent, en grande quantité,
l'humeur appelée crue, mais ceux qui ont plutôt
la chair molle engendrent en outre du flegme. 5. De même
donc que la chair de ces animaux, quand elle a déposé
son liquide salé, a non seulement la propriété
de se corrompre difficilement, mais aussi celle de resserrer
le ventre; de même on relâchera fortement
le ventre, si on boit le liquide qu'elles ont déposé;
mais, dans ce dernier cas, le corps n'en retirera aucune
nourriture.
54. DES CRUSTACÉS.
1. Les homards,
les pouparts, les crabes, les langoustes, les salicoques
et tous les autres animaux qui sont couverts d'une coquille
mince, mais semblable, pour la dureté, à
celle des testacés, contiennent une quantité
assez notable de liquide salé, quoiqu'ils en
contiennent moins que les testacés. 2. Tous
les crustacés ont la chair dure, et, par cela
même, ils sont difficiles à digérer,
mais ils sont nourrissants, dans le cas où on
les a fait bouillir préalablement dans de l'eau
potable. 3. Leur chair resserre le ventre comme celle
des huîtres, quand elle a déposé,
par une coction préalable, son liquide salé
dans l'eau, comme je viens de le dire. 4. Enfin, leur chair
se corrompt difficilement, comme celle des testacés
à chair dure.
55. DES MOLLUSQUES.
1. On appelle
mollusques les animaux qui n'ont point d'écailles
et dont la peau n'est ni rugueuse, ni semblable à
une tuile, mais molle comme celle de l'homme : cette
classe est formée par les poulpes, les seiches
et tous les autres animaux qui leur ressemblent. 2. Ces animaux
sont, il est vrai, mous au toucher, mais leur chair
est dure, ils se digèrent difficilement et contiennent
dans leur intérieur du liquide salé en
petite quantité; cependant, si on les digère,
ils donnent une nourriture assez abondante au corps:
ils produisent donc aussi l'humeur crue en grande quantité.
56. DES SÉLACIENS.
1. La peau
de ces animaux est rugueuse et luisante pendant la nuit
: voilà pourquoi quelques-uns font dériver
leur nom des mots grecs selas «lueur» et
echein «avoir.» 2. Parmi eux, la torpille et la pastenague
ont la chair molle et en même temps agréable,
relâchant modérément le ventre,
se digérant assez facilement et nourrissant modérément
comme tous les autres animaux à chair molle.
3.
C'est une propriété commune à presque
tous ces animaux, que les parties voisines de la queue
sont plus charnues que celles du milieu; ceci s'applique
surtout aux torpilles; car les parties moyennes de ces
animaux semblent contenir une espèce de cartilage
tremblotant. 4. Les raies, les raies lisses, les anges et
tous les animaux semblables sont plus durs, plus difficiles
à digérer, et donnent plus de nourriture
au corps que la torpille et la pastenague.
57. DES GRANDS ANIMAUX MARINS.
1. Les phoques,
les baleines, les dauphins, les marteaux, les grands
thons, de plus, les chiens, de mer, et tous les autres
animaux semblables, appartiennent à cette classe;
ils ont la chair dure et imprégnée d'humeurs
mauvaises et de matières excrémentitielles;
voilà pourquoi on s'en sert après les
avoir salés.
58. DES ALIMENTS FOURNIS PAR LES ANIMAUX
AQUATIQUES.
[Tiré de Xénocrate].
1. On a
approprié la classe des animaux nageurs, comme
un jouet alimentaire, aux jouissances de la bonne chère;
mais elle est aussi d'une grande utilité pour
le régime de santé. 2. Les poissons diffèrent
selon leur composition élémentaire; car
les uns ont la chair dure et les autres l'ont molle;
aux poissons à chair dure appartiennent les pagels,
les dentés, les soles et les poissons larges,
comme les flets et les barbues; aux poissons à
chair molle, les tourdes, les merles, les boulereaux
et les espèces semblables, dont la chair se dissipe
facilement par la perspiration; les motelles, les merlans
(?) et les corbs tiennent le milieu entre ces deux groupes.
3.
On distingue encore les poissons en poissons rocheux
et en poissons de haute mer; les derniers sont plus
nourrissants; mais ceux qu'on trouve près des
bords du rivage, ou de l'embouchure des canaux, sont
imprégnés d'humeurs mauvaises et désagréables
au goût. 4. Les mers elles-mêmes sont aussi une
cause de différence, puisque les poissons de
la mer Adriatique ont des qualités moyennes,
tandis que ceux de la mer Tyrrhénienne ont un
goût exquis. 5. Au printemps, la plupart des poissons sont
aussi meilleurs que dans les autres saisons, à
cause du frai, par exemple, les rougets; mais les pagels
et les dentés sont meilleurs pendant l'été;
en automne, il faut rejeter les merlus noirs, comme
étant imprégnés d'humeurs mauvaises,
tandis que, dans cette saison, les muges et les bars
sont plus6 délicats qu'en tout autre temps. 6. Quant
à la taille, les poissons petits et jeunes se
corrompent facilement, mais ceux d'une grandeur démesurée
sont imprégnés d'humeurs mauvaises, durs
et nuisibles à l'orifice de l'estomac; ceux de
taille moyenne possèdent, pour ainsi dire, une
faculté moyenne de se distribuer dans le corps.
7.
Les poissons diffèrent aussi eu égard
à leurs parties; la queue, qui est leur organe
de mouvement, est bien exercée, bien nourrissante
et délicate; leur ventre, qui est graisseux,
surnage dans l'estomac, et active les excrétions;
la chair de leur dos est dure; la tête de tous
les poissons, étant salée et graisseuse,
nourrit mal et se distribue difficilement dans le corps;
mais celle du myre, du pagel et surtout du rouget, est
très facilement rejetée par les excrétions.
8.
Quant à la préparation, les poissons grillés
sont plus nourrissants que les autres, mais ils passent
difficilement; les poissons bouillis, au contraire,
sont peu nourrissants, mais passent très facilement.
9.
Les poissons de mer sont agréables au goût,
favorables à l'orifice de l'estomac, et se distribuent
très facilement dans le corps; ils produisent
une chair molle et pétrie d'humidité;
ils donnent une belle couleur, parce qu'ils produisent
du sang et qu'ils relâchent le ventre; tandis
que les poissons de rivières et de lacs nuisent
à l'orifice de l'estomac, produisent des éléments
grossiers, et sont difficilement rejetés par
les excrétions; quelques-uns ne sont pas inférieurs
aux poissons de mer, par exemple le bolty du Nil,, la
perche du Rhin et le bar du Tibre, lequel est pointillé.
10.
L'Anion et un lac dans le pays de Falerne produisent
également un poisson de la même espèce;
car le séjour dans ces eaux le rend succulent
et agréable au goût. 11. Il faut préférer
à tous les autres poissons ceux qui n'ont point
de mauvaise odeur, qui [ne] sont [pas] très gras,
qui sont succulents et de taille moyenne. 12. Les
poissons se divisent en poissons nageurs, en poissons
cartilagineux, en mollusques et en testacés,
dont les propriétés sont les suivantes.
13.
Le nonnat est un poisson très-petit, qui vit
par bandes, et qu'on prépare dans le plat. 14. Les
squales-renards, les dorades, les aloses (ces dernières
se retirent de la haute mer dans les rivières)
et le silure ne sont ni succulents, ni favorables à
l'orifice de l'estomac; ils se digèrent difficilement
et nourrissent peu. 15. L'acarne a le corps dur, se corrompt difficilement,
n'est ni favorable à l'orifice de l'estomac,
ni succulent. 16. Les orphies, au museau cornu, sont nuisibles
à l'orifice de l'estomac, ne sont pas succulentes,
nourrissent mal et se corrompent facilement. 17. Les
bogues, les girelles, les maquereaux bâtards,
que quelques-uns appellent [en grec] lézards,
les serrans écriture et tous ceux qui sont propres
à être frits dans la poêle, sont
agréables au goût, mais non favorables
à l'orifice de l'estomac, se corrompent facilement,
surnagent dans l'estomac et nourrissent mal. 18. Le serran
commun est agréable au goût, resserre le
ventre; il est d'une structure compacte et nourrit bien;
il excite aux plaisirs vénériens, en provoquant
des érections, si on boit du vin dans lequel
il a été étouffé. 19. Le thranis
ou espadon est énorme; on le coupe par morceaux
; il est d'un goût désagréable,
sans cohésion, difficile à assimiler,
nourrit fortement et a une mauvaise odeur; voilà
pourquoi on le mange avec de la moutarde, ou sur le
plat; le meilleur morceau est le bas-ventre. 20. Le thon
et la thonine, le cogniol, le grand thon, le thon d'une
année et le maquereau ne sont pas favorables
à l'orifice de l'estomac, ils sont imprégnés
d'humeurs mauvaises, engendrent des flatuosités,
sont sans cohésion, sont difficilement rejetés
par les excrétions et nourrissent bien; le plus
tendre est le thon d'une année, tandis que le
cogniol a un goût désagréable et
n'est pas succulent; après lui vient la thonine;
mais le thon est difficile à digérer.
21.
Les dorées à petite tête, les élacatènes,
les poissons volants, les uranoscopes, les chiens de
mer, les requins et les poissons qui leur ressemblent
sont imprégnés d'humeurs mauvaises, ont
une odeur désagréable, et produisent des
matières inutiles et filantes; mais ils sont
recherchés par les amateurs de bonne chère.
22.
Les sarguets, les oblades, les sars sont favorables
à l'orifice de l'estomac, succulents, se distribuent
facilement dans le corps, nourrissent bien et s'échappent
facilement par les excrétions. 23. Les saupes de
la haute mer sont piquantes, agréables au goût,
et se corrompent difficilement; elles sont succulentes,
passent difficilement, nourrissent bien et s'échappent
facilement par les excrétions; celles des côtes,
au contraire, ont la chair dure, fournissent du jus
de mauvaise qualité et sont désagréables
au goût. 24. Les soles et les flets ont la chair dure
et se corrompent difficilement: ils sont succulents
et s'échappent aisément par les excrétions.
25.
Le hibou marin, de même que le bar (car ces deux
poissons se ressemblent sous tous les rapports) possèdent
ces propriétés à un moindre degré,
mais ils sont préférables au spare. 26. L'esturgeon
est favorable à l'orifice de l'estomac, donne
un jus sucré, nourrit bien et s'échappe
facilement par les excrétions. 27. Le merlus noir
ou mazéas est assez délicat; il est sans
cohésion, peu compacte, agréable au goût,
mais il se digère difficilement; il nourrit bien
et s'échappe aisément par les excrétions.
28.
Le muge de la haute mer est excellent, d'un goût
agréable et piquant; il ne le cède pas
au bar et traverse facilement les intestins; quand ce
poisson a nagé dans des fleuves limpides et purs,
il perd sa dureté marine pour devenir délicat
par l'effet du mélange de l'eau douce; celui
qu'on trouve dans les lacs troubles et dont l'eau est
stagnante a une odeur assez mauvaise, et se distribue
très difficilement dans le corps, puisqu'il s'engraisse
par l'action de la vase, qui prive sa chair de tout
mouvement; quand il grandit, il durcit. 29. Quelques-uns
appellent aussi le muge, poisson flottant. 30. Le flétan
macrolépidote et la barbue sont des poissons
larges; la barbue est ferme et se corrompt difficilement;
si elle est grande, il faut la conserver pendant un
jour avant de la faire bouillir, parce qu'elle s'assimile
difficilement et qu'elle nourrit fortement; le flétan
macrolépidote donne un mauvais jus, n'est pas
favorable à l'orifice de l'estomac, se corrompt
difficilement et s'échappe aisément par
les excrétions. 31. Les tourdes, les merles et les boulereaux
ont la chair molle, sont succulents, se dissipent facilement
par la perspiration, nourrissent mal et provoquent les
excrétions alvines. 32. Le coraxus a la chair dure, surtout quand
il est devenu grand; il a une mauvaise odeur, se distribue
difficilement dans le corps, est agréable au
goût; il est loin de fournir de mauvais matériaux
[pour la nutrition]; les petits sont les plus agréables.
33.
Le bar subit des changements, car il devient d'autant
plus dur qu'il grandit davantage; le meilleur est celui
de deux mois; il est favorable à l'orifice de
l'estomac, succulent, a la chair délicate, donne
un jus sucré, nourrit bien, se distribue facilement
dans le corps et s'échappe facilement par les
excrétions. 34. Nous avons parlé jusqu'ici du bar
de haute mer; mais celui qu'on élève dans
les viviers a des propriétés contraires
; il en est de même pour les autres poissons;
car ceux qui sont enfermés ont le goût
désagréable. 35. Le bar de rivière, qui s'engage dans
des eaux très froides, en quittant la mer, est
agréable au goût et délicat; mais
celui qui se transporte dans des lacs bourbeux et peu
profonds prend un goût désagréable
en s'engraissant. 36. La motelle n'est pas piquante, contient
de bonnes humeurs, se distribue difficilement dans le
corps, traverse aisément les intestins et nourrit
bien. 37. Les scorpènes ont la chair dure et
contiennent de mauvaises humeurs, aussi ont-elles besoin
d'assaisonnements; elles activent les excrétions.
38.
Le corb est agréable au goût, succulent,
se distribue facilement dans le corps, ne nourrit pas
très fortement et s'échappe aisément
par les excrétions. 39. Le scare est agréable au goût,
se dissipe difficilement par la perspiration, se corrompt
aisément et relâche le ventre; mais celui
qu'on a pris récemment et qui n'a pas été
enfermé dans les réservoirs a beaucoup
de viscères, est agréable au goût,
surnage dans l'estomac et se corrompt facilement. 40. Le denté,
quoiqu'il ait la chair dure, ne manque pas de délicatesse;
il contient de bonnes humeurs, se distribue facilement
dans le corps, est doué de propriétés
nutritives moyennes et s'échappe aisément
par les excrétions. 41. Le rouget est le plus célèbre
des poissons; il est favorable à l'orifice de
l'estomac, imprégné de bonnes humeurs,
agréable au goût, formé de chair
lamelleuse; il se corrompt difficilement et est doué
de propriétés moyennes eu égard
aux excrétions. 42. Le rouget de la haute mer diffère
du rouget rocheux par l'éclat de feu que jette
sa couleur de cinabre et d'or; de plus, il porte une
barbe; les rougets des côtes sont inférieurs
aux précédents. 43. Le pagel a la chair dure, se corrompt difficilement
et ne s'échappe pas aisément par les excrétions.
44.
La dorade a la chair blanche, solide, compacte, imprégnée
de bonnes humeurs, se distribue facilement dans le corps,
nourrit bien et s'échappe assez promptement par
les excrétions. 45. Le congre n'est ni agréable au goût,
ni imprégné d'humeurs mauvaises; il se
digère assez bien, nourrit bien et est irréprohable,
sous le rapport des excrétions.
DES ORTIES.
46. Les
orties ou acalèphes sont agréables au
goût, mais elles font beaucoup de mal à
l'orifice de l'estomac; les orties grillées conviennent
mieux que les orties bouillies; elles relâchent
le ventre. 47. Celles qui s'attachent aux cailloux du rivage
sont plus diurétiques, après avoir été
nettoyées, resserrées et contractées
en les saupoudrant d'une quantité de sel si petite,
qu'elles sont encore assez bonnes à manger. 48. Coagulées
en les faisant rôtir à une broche ou à
un petit bâton sur des charbons de mauve ou de
sarments, de façon à ce qu'elles soient
manifestement renflées, assaisonnées avec
du vin d'un goût sucré, ou du vin miellé,
pour relever en quelque sorte leur goût, elles
se digèrent facilement et s'échappent
aisément par les excrétions. 49. Celles
qu'on fait bouillir dans du vin d'un goût sucré
et de l'huile, en les assaisonnant d'une manière
convenable, restent glissantes et filantes; mais, parce
qu'elles causent de la plénitude, et se digèrent
mal, elles relâchent davantage le ventre.
DES TESTACÉS.
50. Les
meilleurs glands sont ceux qu'on prend dans l'été;
les glands qui naissent dans les endroits où
il y a un mélange d'eau douce sont bons à
manger; ils sont aussi nourrissants et sucrés;
mais ceux qui vivent sur les rochers le sont encore
plus que les autres; car ils sont très agréables,
nourrissent bien, s'écrasent facilement, sont
très succulents, servent à relâcher
le ventre, sont favorables à l'orifice de l'estomac,
ont un bon goût, sont délicats et poussent
aux urines; le jus des glands, si on le prend tel qu'il
est, résiste à toute altération,
mais leur bottillon relâche le ventre. 51. Les
glands qui ne vivent pas sur les rochers sont âcres,
ont un goût de drogues et poussent plus fortement
aux excrétions alvines qu'aux urines. 52. Les
glycymarides sont préférables aux cames
rugueuses, mais elles sont inférieures aux pélorides;
elles causent des tiraillements à l'orifice de
l'estomac; leur partie charnue est dure, mais non dépourvue
de propriétés nutritives ; les glycymarides
sont plus diurétiques que les pélorides.
53.
Grillées ou bouillies les glycymarides deviennent
dures; mais, si on les fait bouillir et qu'on les assaisonne,
elles ont un goût agréable. 54. Il y
a aussi diverses espèces de pélorides
et de cames; ainsi celles qui sont rondes et de couleur
variée, par exemple celles qu'on trouve à
Dicéarchie dans le lac Lucrin et dans le port
d'Alexandrie sont excellentes, car elles ont un goût
sucré et sont succulentes. 55. Celles qui vivent
au-dessus de Pharos, du Diocos et de la jetée
qui joint l'île [au continent] sont oblongues,
âpres, et ressemblent à des glands de chêne,
puisqu'elles portent un calice épineux comme
les fruits du chêne grec; ces dernières
sont blanches, dures et âcres. 56. Les peignes les
plus estimés sont ceux qui sont grands, excavés
et de couleur noirâtre; leurs meilleures saisons
sont le printemps et l'été; car alors
ils grandissent, surtout en même temps que la
lune. 57. Ceux de Mytilène surpassent tous
les autres par leur grandeur, leur nature et la bonté
de leur jus. 58. Le golfe d'Ionie, du côté de
l'Illyrie et de Salone, ainsi que le Latium, en produisent
de semblables. 59. Il en est de même pour Chios, pour
un grand nombre des îles, et pour Alexandrie.
60.
Le Pont en produit aussi beaucoup; mais ceux-là
sont petits et ont de la peine à grandir. 61. Les
peignes noirs sont sucrés et plus faciles à
digérer que les huîtres; quand on les mange
avec du vinaigre et du silphium, ils relâchent
le ventre, parce qu'ils sont doués d'un goût
légèrement sucré, qu'ils perdent
quand on les flambe. 62. De la même manière, les peignes
gris relâchent le ventre, qu'ils soient vieux
[c'est-à-dire salés] ou frais. 63. Les
peignes de couleur de buis poussent légèrement
aux urines, et ils ne se corrompent point facilement
comme les huîtres. 64. Bouillis ils valent mieux pour relâcher
le ventre que grillés; mais, grillés,
ils ont moins de jus et s'échappent difficilement
par les excrétions. 65. Il faut admettre que ces peignes ont moins
d'inconvénient quand on les fait griller dans
leurs coquilles ; alors, ils nourrissent mieux et relâchent
moins le ventre. 66. Grillés, ces peignes prennent un
meilleur goût, si on les arrose de vin pur; ils
sont alors agréables à manger, faciles
à digérer et préférables
à ceux qu'on cuit dans leur coquille. 67. Salés,
ils ne relâchent pas le ventre et conservent leur
goût sucré naturel, malgré leur
séjour dans l'eau salée; mais ils poussent
aux urines. 68. Les peignes blancs et larges ont un goût
assez sucré, mais ils sont durs. 69. Les
peignes roux ont une mauvaise odeur et poussent aux
urines. 70. Les peignes de couleur variée tiennent
le milieu [ entre les autres espèces], et ceux
qui ont la couleur du fard, si on les donne tels qu'ils
sont, sont difficiles à digérer, mais
poussent aux urines. 71. L'usage alimentaire des peignes convient
à ceux qui ont dans la vessie des ulcères
sordides et recouverts d'escarres, parce qu'ils les
nettoient. 72. Les buccins sont plus durs que la pourpre;
ils sont différents d'après leur grandeur
et d'après leurs parties; ils ont trois ordres
de propriétés, celles de la coquille,
celles du cou et celles du mécon (c'est-à-dire
du foie); cette dernière partie est cassante
et rappelle la chair de poisson; elle resserre le ventre,
surtout si elle est grillée; bouillie, elle a
plutôt des propriétés contraires.
73.
Le cou des buccins relâche le ventre, mais il
est difficile à digérer et il faut le
corriger avec de la moutarde, du vinaigre, du silphium
ou du poivre, quand on le mange. 74. Leur eau relâche
le ventre, si on la prend chaude; lorsqu'on la fait
bouillir avec le mécon, elle prend une couleur
rougeâtre et devient bourbeuse. 75. Les buccins bouillis
tout entiers resserrent plutôt le ventre et excitent
la soif. 76. Quelques personnes les écrasent après
les avoir fait bouillir, et les assaisonnent de la même
manière que les orties ; alors ils prennent un
goût agréable. 77. Quand [le croissant de] la lune est tourné
vers l'Orient, ils sont remplis, tandis qu'ils sont
maigres en été. 78. Les grandes pourpres sont plus ou moins
dures, et leurs parties présentent des différences
assez notables; car leur cou est difficile à
s'assimiler, à passer par les selles et à
se corrompre; il est favorable à l'orifice de
l'estomac, est peu succulent, et on a de la peine à
le diviser par la mastication; leur fond ou mécon
est mou, s'assimile facilement, excite les excrétions
alvines, a un goût de poisson assez prononcé,
pousse aux urines, provoque les sueurs et fait couler
la salive; si on en prend beaucoup, il produit le choléra,
ainsi que des nausées, et fait surnager des humeurs
noires dans l'estomac. 79. Les colulies ou coryphies sont de tous les
animaux de leur genre, c'est-à-dire des turbinés,
ceux dont l'usage alimentaire est le plus convenable,
qu'elles soient crues ou préparées, c'est-à-dire
bouillies ou grillées. 80. Elles laissent échapper un jus d'un
goût agréable, favorable à l'orifice
de l'estomac, relâchant le ventre, d'une saveur
sucrée et poussant aux urines comme celui des
limaçons peu charnus. 81. Elles donnent aussi une bonne odeur à
la bouche, mais elles ne conviennent pas à ceux
qui veulent boire du vin. 82. Bouillies elles sont nourrissantes; mais
grillées elles sont dures; leur mécon
resserre plus ou moins le ventre, comme celui des buccins.
83.
Les limaçons sont durs et s'assimilent difficilement;
il en existe diverses espèces : une de forme
allongée, dans laquelle on souffle comme dans
une trompette, et une autre de forme ronde, qu'on emploie
pour transvaser l'huile. 84. Parmi ces limaçons, ceux d'une, grandeur
démesurée ne peuvent pas se manger, à
cause de leur mauvaise odeur, de leur dureté,
de la propriété qu'ils ont de produire
le choléra, de l'abondance de leur chair et de
leur ressemblance avec les grands animaux marins; quant
aux petits, ils séduisent quelques personnes,
assaisonnés avec de l'oxymel ou des légumes
verts, ou de la rue et du vinaigre poivré. 85. Les
limaçons de cinq doigts qui ont le fond plus
pointu que les autres et qu'on appelle hélices
ou porte-rayons sont moins charnus que les autres; mais
ils causent de la plénitude et surnagent dans
l'estomac; cependant, si on les humecte préalablement
avec du silphium et du vinaigre, ils deviennent meilleurs
à manger et conviennent pour relâcher le
ventre. 86. Tous les limaçons marins ont le cou
d'un goût assez sucré; ils sont sans cohésion
et succulents, se corrompent difficilement et sont légers,
en comparaison des limaçons terrestres; car ils
agissent plus fortement sur les excrétions et
les amollissent davantage; ils ont une meilleure odeur
et leur fond est favorable à l'orifice de l'estomac.
87.
Les limaçons se digèrent difficilement
et désobstruent, quand on les mange avec du vinaigre
et du silphium, ou avec de la moutarde, ou enfin dans
leur bouillon. 88. Les bernicles sont petites; dans quelques
cas, elles sont assez grandes pour ne pas paraître
très différentes des huîtres; les
plus grandes se trouvent dans l'Inde, pays où
toutes les autres choses sont également grandes.
89.
Du reste, les bernicles sont dures et peu succulentes;
elles s'assimilent difficilement et ne passent pas aisément
par les excrétions; bouillies et assaisonnées
elles prennent un goût agréable. 90. Les
grandes moules sont salées et de mauvaise odeur;
on les corrige avec du silphium, de la rue et du vinaigre;
elles relâchent le ventre, sont diurétiques,
n'ont pas le goût agréable, se digèrent
difficilement, causent des obstructions, produisent
du sang épais et de la pituite, surtout les moules
fraîches; aussi, faut-il triompher de ces mauvaises
qualités avec des assaisonnements âcres,
comme la moutarde, la roquette et le cresson. 91. Grillées,
elles traversent difficilement les intestins, causent
beaucoup de soif et sont lourdes; bouillies, écrasées
et assaisonnées, elles ont une odeur moins mauvaise
et produisent le même effet que les coquillages
turbinés. 92. Les petites moules sont plus rondes que
les grandes, mais elles sont plus petites et rugueuses;
elles ont une coquille mince, des chairs plus molles,
dont le goût est plus sucré; elles excellent
par leurs humeurs. 93. Ces mêmes coquillages nourrissent
moins que les grandes moules, causent des picotements
à la bouche et à la gorge, rongent les
organes de la déglutition, rendent la voix rugueuse,
ou l'éteignent, quand on en mange beaucoup, et
causent de la toux sèche et de l'enrouement.
94.
Les moules qu'on trouve dans le sable ou dans les fragments
de poteries, ainsi que celles qu'on prend sur les rochers
ou entre les. algues ne sont pas bonnes, parce qu'elles
sont âcres. 95. Les huîtres de haute mer sont rares
et sans valeur, parce que le soleil ne jette pas ses
regards sur elles; elles ont en outre une petite taille;
elles sont amères et ne sauraient être
mangées, parce qu'elles causent des picotements
à l'estomac; car l'huître aime à
habiter dans les eaux mélangées d'eau
douce qui font croître ses chairs, lesquelles
donnent alors un jus sucré; aussi les meilleures
se trouvent-elles en Égypte, à l'embouchure
du Nil. 96. A Éphèse, à l'entrée
du Caystre, on les met aussi dans des réservoirs
comme des semences, et elles y grandissent; pendant
le printemps elles se remplissent en grossissant d'une
humeur blanche et laiteuse; il en est de même
à Brindise, à Tarragone, à Narbonne,
à Dicéarchie dans le lac Lucrin, dans
les îles des Hirondelles, dans l'île de
Leucas, à Actium et dans les golfes de Libye.
97.
Pour les pélorides ou mélénides,
comme pour les huîtres, les meilleures se rencontrent
dans les endroits marécageux et dans la vase
bourbeuse où il y a un mélange d'eau douce;
celles du fond de la mer sont, au contraire, rares et
d'un goût assez désagréable ; on
peut les manger dans leur bouillon, pour relâcher
le ventre; elles se digèrent bien et agissent
modérément sur les évacuations
alvines. 98. Les jambonneaux convenables, sous le rapport
des localités, sont les jambonneaux tendres et
nourrissants qu'on prend dans les bas-fonds et dans
les endroits où il y a un mélange d'eau
douce et non remuée par les flots; ils restent
mous, parce qu'ils ne sont point battus par les flots
et que leurs gardiens, qui vivent en communauté
d'aliments avec eux, font, en leur faveur, une bonne
chasse dans les eaux tranquilles et se cachent surtout
dans les endroits rocheux et vaseux. 99. Eu égard
à la grandeur, les petits jambonneaux sont plus
tendres que les grands. 100. Ceux qu'on prend dans le printemps et dans
l'été sont de beaucoup préférables
à ceux qu'on prend dans les autres saisons ;
car, outre qu'ils nourrissent bien, ils ont un goût
sucré; c'est, en effet, le moment où ils
viennent de naître. 101. Pour ce qui regarde la taille, ceux qui
ne sont pas trop grands sont les meilleurs; ceux de
grandeur moyenne ont la chair tendre, blanche et sucrée.
102.
Leur cou est dur, difficile à digérer
et à dépecer, et ne se corrompt pas aisément;
mais leur corps se corrompt plus facilement que leur
cou. 103. On les l'ait bouillir avec du vin d'un goût
sucré, de l'huile, du miel et aussi avec du vin;
on les mange encore bouillis dans de l'eau avec de la
moutarde, après qu'ils ont été
détachés de leurs parties testacées;
grillés, ils sont plus durs que bouillis, surtout
ceux qu'on a arrosés de vin; il vaut mieux les
préparer avec du silphium et du vinaigre, ou
de la moutarde. 104. La chair de ceux qu'on a fait macérer
dans du vin ou dans du vinaigre est plus tendre, mais
elle produit des flatuosités. 105. Les strombes
sont durs et s'assimilent difficilement, surtout ceux
qui sont plus grands que les haliotides; cependant,
ils sont avantageux, si on les prend avec de la moutarde
ou du silphium, après les avoir écrasés
dans du vinaigre. 106. Les solens, nominés aussi flûtes
ou roseaux, se distinguent en mâles (manches de
couteau) et femelles, lesquelles sont appelées
ongles (dails) ; ils présentent des différences
[eu égard au sexe]; en effet, les femelles sont
excellentes, poussent aux urines et humectent; on les
prépare après les avoir ouvertes. 107. Les
solens pourvus de dents à la partie antérieure
[de la coquille], de grande taille et munis de stries
noires sur un fond de couleur différente, sont
les mâles et ils causent un flux abondant d'urine.
108.
Ceux qu'on mange avec du sel et du vinaigre causent
le moins d'inconvénients; néanmoins, ils
sont mauvais et surnagent dans l'estomac; on prend les
solens préparés avec de l'huile et du
sel, pour exciter à boire, de la même manière
que les calmars. 109. Les solens très grands et très
épais sont très bons lorsqu'ils sont rôtis;
les individus très petits ont un goût sucré;
mais les femelles sont encore plus sucrées et
elles ont une couleur uniforme; leur meilleure saison
est l'été; à l'état de salaison,
les solens sont désagréables. 110. Les
ascidies se forment dans la vase et sur les côtes
couvertes d'algues; on les trouve parmi les algues,
les mousses et les lichens ; elles ressemblent à
une plante, à un champignon de mer. 111. Elles
communiquent aux mains un état qui ne disparaît
que difficilement en les nettoyant. 112. Ce sont surtout
les ascidies coriaces qui sont difficiles à digérer.
113.
Si on les donne avec de la rue, elles sont utiles à
ceux qui ont les reins et l'orifice de l'estomac malades,
qui sont affectés de ténesme ou de sciatique,
ainsi qu'à ceux qui souffrent du ventre supérieur.
114.
On les coupe par morceaux, on les lave et on les assaisonne
avec du silphium, de la rue, de l'eau salée et
du vinaigre, ou avec du vinaigre, du vin qui coule de
soi-même du pressoir, et de la menthe verte. 115. Les
meilleures se trouvent à Smyrne en Asie; mais
l'Égypte n'en produit pas du tout. 116. Les
tellines ou doloires relâchent le ventre; elles
naissent dans les endroits sablonneux et sur les côtes
battues par les flots. 117. Les tellines des rivières, par exemple
celles de l'Égypte, sont plus grandes et plus
succulentes que les autres. 118. Bouillies, elles sont douces, et le bouillon
qu'on en fait relâche le ventre. 119. On les saupoudre
de sel quand elles sont fermées, et elles attirent
l'humidité à travers la coquille; on les
lave avec de l'eau froide, et on les mange avec de l'huile,
du vinaigre et de la menthe, ou de la rue. 120. Pour
ceux qui veulent se relâcher le ventre, on les
prépare avec des légumes verts assaisonnés
simplement. 121. La meilleure saison pour les manger est
le printemps. 122. Parmi les cames, quelques-uns appellent
glycymarides, et d'autres conques, les espèces
rugueuses qui ont une forme allongée, mais moins
que celles d'Égypte, qui, de plus, ont à
leur ouverture des aspérités semblables
au calice des glands de chêne, et qui portent
des stries longitudinales formées par des éminences
d'une autre couleur que les autres parties. 123. Celles
qui ont un goût de mer, ayant la chair dure, sont
données aux gens faibles. 124. L'eau qu'elles
fournissent avant d'être lavées est favorable
à l'orifice de l'estomac, et peut servir à
relâcher le ventre et à pousser aux urines.
125.
A l'état de salaison, ces coquillages peuvent
affriander pendant qu'on les mange, surtout si on les
prend avec de la moutarde, ou du vinaigre et de la rue.
126.
Les cames lisses sont très différentes
des cames rugueuses; ce sont les espèces qui
ont une coquille large et transparente; elles se digèrent
facilement, nourrissent bien, contiennent de bonnes
humeurs, sont sucrées et ne sont pas trop réfractaires
pour l'orifice de l'estomac. 127. On les mange aussi bien avec du silphium
ou de la moutarde, que cuites sur le plat ou grillées;
le bouillon qu'on obtient, en les faisant cuire, relâche
le ventre. 128. Les glycymarides sont plus agréables
que les cames lisses, mais elles sont inférieures
aux pétoncles. 129. Les cames comme les pélorides présentent
des différences d'espèce d'après
les localités, les nuances de leur couleur et
leur forme; car celles du port d'Alexandrie sont les
meilleures, tandis que celles des environs du Diolcos,
de Pharos et de la jetée, sont rugueuses et allongées.
130.
Les animaux qu'on appelle oreilles (haliotides) naissent
sur les rochers; ils sont durs, difficiles à
digérer, ont un goût désagréable,
sont nuisibles à l'orifice de l'estomac et relâchent
le ventre. 131. On les mange frits dans la poêle,
car on ne saurait les rendre agréables d'une
autre manière. 132. Il y en a de grandes en Illyrie, dans le
golfe d'Ionie; on les mange avec du silphium, du vinaigre,
de la rue.
DES POISSONS SALÉS RESSEMBLANT AUX
GRANDS ANIMAUX MARINS.
133. En
général, les salaisons sont agréables
au goût, mais imprégnées d'humeurs
mauvaises; elles nuisent à l'orifice de l'estomac,
atténuent les humeurs et troublent fortement
le ventre. 134. Parmi les salaisons, les unes sont composées
de viande dure, d'autres sont molles, et de la nature
d'un liquide coagulé, d'autres sont d'une consistance
moyenne ; celles-ci sont charnues, celles-là
graisseuses ; il y en a de vieilles, d'âge moyen,
de nouvelles; les vieilles ont des propriétés
prononcées et les nouvelles des propriétés
faibles; celles d'un âge moyen tiennent le milieu
entre les deux; les salaisons extrêmement grasses
surnagent dans l'estomac; celles qui le sont moins nourrissent
davantage; quant aux autres salaisons, celles dont la
chair est dure se corrompent difficilement, celles qui
sont plutôt molles se corrompent facilement. 135. Les
cogniols ont un goût agréable et relâchent
le ventre ; les meilleurs sont ceux d'Espagne. 136. Le
petit thon naît chez les Scythes [c'est-à-dire
dans le Palus-Maeotis]; il est agréable au goût,
se corrompt vite et passe facilement par les excrétions.
137.
Le cybion est le jeune thon qui, revenant du Pont au
Palus-Maeotis, après [les] quarante jours, a
le goût agréable et contient de bonnes
humeurs. 138. Ce qu'on appelle salaison d'été
est agréable, nourrit bien et n'excite pas de
soif. 139. Le tritomon cybion se corrompt difficilement
et il est plus ferme que le cybion, tandis qu'il lui
ressemble sous les autres rapports. 140. L'orcyn est
un grand thon retournant vers le lac en bonne santé;
il est semblable au tritomon, si ce n'est qu'il se corrompt
encore plus difficilement; voilà pourquoi on
peut le laisser vieillir. 141. L'apolecton a moins de cohésion que
le tritomon, mais il lui est inférieur sous le
rapport du goût; il se distribue aisément
dans le corps et favorise la digestion. 142. Le
sarde est le thon allongé de l'Océan;
il a un goût agréable et plus piquant que
le cybion; il excite l'appétit et coule facilement
par les voies excrétoires. 143. Le maquereau
est d'un goût agréable, se corrompt difficilement
et donne de la soif; les meilleurs sont ceux de Parium.
144.
Les salaisons provenant des thons présentent
une grande différence entre elles ; car les unes
se distribuent aisément dans le corps, et d'autres
difficilement; ainsi leur cou constitue une salaison
incomplète; il est agréable au goût
et se corrompt difficilement, à cause de son
défaut de graisse; le meilleur est celui de Cumes.
145.
La panse des thons peut se manger quand elle est récemment
salée, car elle ne supporte pas une longue conservation;
elle est favorable à l'orifice de l'estomac,
autant qu'une salaison peut l'être, contient de
bonnes humeurs, se corrompt facilement et surnage dans
l'estomac, parce qu'elle est graisseuse. 146. Les
autres parties, qu'on appelle melandryes, à cause
de leur ressemblance avec les racines noires du chêne,
excitent l'appétit, si on y ajoute de la moutarde,
mais elles se corrompent plus difficilement que la panse,
à cause de leur défaut de graisse. 147. On
a l'habitude de réserver exclusivement le nom
de salaisons pour celles dont nous venons de parler,
quoique, dans les îles, on sale un grand nombre
de poissons, parmi lesquels il y en a d'un prix élevé;
quant aux rougets et aux pagels, ils sont durs; les
salaisons qu'on apporte de la Sintie sont, il est vrai,
faites avec de grands poissons, mais elles ne peuvent
pas être rangées parmi les salaisons marines
faites avec quelque recherche.
DES SALAISONS TIRÉES DES POISSONS
DE RIVIÈRES ET DE LACS.
148. Quant
aux poissons de rivières et de lacs susceptibles
d'être salés, le Nil produit, en fait de
poissons analogues aux grands animaux marins, les simes
et les pagels; à cause de leur excès de
graisse, on mange ces salaisons bouillies, avec de la
moutarde; si on en prend trop, elles surnageai dans
l'estomac. 149. Comme exemple de salaisons douées
de propriétés moyennes, on a les muges;
salées, après leur avoir fendu le dos
avec un couteau, elles sont appelées mendésiennes;
celles qu'on laisse intactes, halycates; et celles qu'on
sale dans des pots de terre, borées; on mange
aussi les dernières crues, après en avoir
détaché et arraché la peau. 150. Il
y a aussi des salaisons fourniespar les muges et appelées
acropastes; elles sont agréables, et on les mange
grillées comme les halycates et les mendésiennes.
151.
De même, les bolty du Nil salés sont appelés
héminères; ces poissons, qu'on mange aussi
grillés, forment une espèce de fruit de
saison, parce qu'on ne les trouve pas toujours, mais
qu'ils viennent aux approches de l'hiver. 152. On
sale encore quelques autres poissons très petits
qu'on mange crus; ces salaisons ne sont pas bonnes,
mais produisent une espèce spéciale d'éructation
nidoreuse ; on les mange avec des herbes potagères
âcres, et il faut bien en parler, pour que notre
traité soit complet; on appelle les unes coracidies,
les autres bondies, celles-ci colidies, celles-là
typhlinidies, d'autres, enfin, abramidies; toutes ces
salaisons peuvent être nuisibles à l'orifice
de l'estomac, se corrompent difficilement et relâchent
le ventre.
59. DU LAIT ET DU FROMAGE.
[Tiré de Galien].
1. Le lait
de vache est le plus épais et le plus gras ;
celui du chameau est le plus liquide et le moins gras;
après lui vient le lait de jument, et ensuite
celui d'ânesse; le lait de chèvre est de
consistance moyenne; celui de brebis est plus épais
que ce dernier. 2. Quant aux saisons de l'année, le
lait le plus liquide est celui qu'on trait après
que les animaux ont mis bas; il s'épaissit toujours
de plus en plus à mesure que la saison avance;
au milieu de l'été, il atteint la moyenne
de sa consistance naturelle; après cette époque,
il s'épaissit encore peu à peu, jusqu'à
ce qu'il se tarisse tout à fait; au printemps,
le lait est non seulement le plus aqueux, mais aussi
le plus abondant. 3. Le lait est un mélange de substances
contraires, de petit lait et de fromage ; il contient,
en outre, une troisième substance, l'humeur grasse,
plus abondante, comme je viens de le dire, dans le lait
de vache [que dans tout autre]; voilà pourquoi
ce lait sert à fabriquer ce qu'on appelle beurre.
4.
Le lait de brebis et celui de chèvre contiennent
également une certaine proportion de substance
grasse, mais en beaucoup moins grande quantité;
celui d'ânesse est le moins abondamment pourvu
de cette substance; aussi, arrive-t-il rarement que
ce lait se transforme en fromage dans l'estomac, quand
on le boit chaud aussitôt qu'il est sorti du pis;
lorsqu'on y ajoute du sel ou du miel, il ne peut pas
se coaguler et se transformer en fromage dans l'estomac.
5.
Les pâturages des animaux influent aussi beaucoup
sur la bonté du lait; car nous voyons clairement
que les animaux qui paissent de la scammonée
ou quelque espèce de tithymalle donnent un lait
purgatif; le lait sera donc certainement âcre,
acide ou. âpre, après de mauvais pâturages,
parce qu'il acquiert toujours la nature de l'herbe;
par conséquent, la nourriture des animaux, dont
nous vouions employer le lait comme aliment contenant
les humeurs les plus excellentes, ne doit être
en aucune manière ni âcre, ni acide, ni
âpre. 6. Certes, il n'est pas moins évident,
lors même que je ne le dirais pas, que l'animal
doit être à la fleur de l'âge et
irréprochable, quant à la complexion.
7.
Le lait nuit beaucoup aux dents et aux gencives, si
on en prend habituellement; car il produit dans les
gencives un excès d'humidité et il rend
les dents susceptibles de se gâter et de se ronger
facilement; il faut donc, après avoir pris du
lait, se laver la bouche avec du vin coupé d'eau;
il est encore préférable d'y ajouter aussi
du miel. 8. On décompose le lait en le chauffant,
en le coagulant avec de la présure ou de quelque
autre manière que ce soit; car, par l'opération
appelée schisis, on produit également
le même effet sans présure ; elle consiste
à verser de l'oxymel froid sur le lait, après
l'avoir fortement chauffé. 9. On décompose
encore le lait au moyen du vin miellé; quelquefois
aussi on le coagule sans rien y verser, en le plaçant
dans un vase contenant de l'eau très froide.
10.
On coagule aussi sans présure le lait qu'on trait
immédiatement après que les animaux ont
mis bas, en le chauffant quelques instants sur de la
cendre chaude; on appelle pyriate ou pyriephthe celui
qu'on a ainsi préparé. 11. De tous les fromages,
celui qui est un peu mou est préférable
à celui qui est plutôt dur; celui qui est
légèrement rare et spongieux vaut mieux
que celui qui est plutôt dense et compact. 12. Comme
le fromage tout à fait glutineux et le fromage
qui se casse en morceaux, de façon à paraître
rugueux, sont tous deux mauvais, celui qui tient le
milieu entre eux leur est préférable.
13.
Quant à la manière de distinguer les fromages
au goût, le meilleur de tous est celui qui n'a
aucune qualité prononcée, mais chez lequel
le goût sucré prédomine un peu sur
les autres qualités; celui dont la saveur est
assez agréable est meilleur que celui dont le
goût est désagréable, et celui qui
contient une quantité modérée de
sel vaut mieux que celui qui en contient beaucoup, ou
qui n'en contient pas du tout. 14. Après
avoir mangé le fromage, dont on a apprécié
les qualités comme il vient d'être dit,
on peut encore reconnaître aux éructations
lequel d'entre eux est le meilleur; en effet, le fromage
qui produit des éructations qui disparaissent
peu à peu est le meilleur; mais celui qui engendre
des éructations persistantes n'est pas bon; car
il est évident que ce dernier se transforme et
s'assimile difficilement.
60. DU LAIT AIGRE.
1. Le lait
aigre nuit à ceux dont les dents sont d'un tempérament
froid, en produisant ce qu'on appelle agacement. 2. L'estomac,
s'il est un peu froid, sera évidemment fatigué
aussi par le lait aigre et ne le digérera pas
bien non plus; mais, s'il est d'un tempérament
moyen, c'est à peine s'il le digère; cependant
il ne le laisse pas sans lui faire subir aucune espèce
de transformation ; si enfin l'estomac est plus chaud
qu'il ne convient, non seulement il n'éprouve
aucun inconvénient de l'usage du lait aigre,
mais il en retire même quelque profit. 3. Donc
le lait aigre est d'un tempérament froid et contient
des humeurs épaisses.
61. DE LA MANIÈRE DE BOIRE LE LAIT.
(Tiré de Rufus.)
[Se trouve dans le Ve livre du Régime,
au milieu.]
1. Celui
qui veut boire du lait doit s'abstenir des autres aliments
et boissons, jusqu'à ce que le lait soit digéré
et qu'il ait passé par le bas ; car, s'il s'y
mêlait même une parcelle d'une substance
quelconque, non seulement ce lait, mais aussi ce qu'on
aurait pris par-dessus, se corromprait de toute nécessité.
2.
Le mieux donc est de le prendre le matin, immédiatement
après qu'il est trait, de s'abstenir ensuite
d'aliments et de diminuer alors les exercices trop violents,
parce qu'il s'aigrit nécessairement, lorsqu'on
fait des efforts; il est préférable de
se promener doucement et, par intervalles, de se reposer
sans dormir; car, c'est le moyen de le faire passer
par le bas aussi vite que possible; quand la première
portion a passé, il faut en prendre une seconde,
et, quand cette dernière a également passé,
encore une autre. 3. Au commencement donc, le lait nous purge
avec avantage; en effet, les selles qu'il produit ne
contiennent pas beaucoup de matériaux empruntés
au reste du corps, mais elles se composent des matières
renfermées auparavant dans les intestins et de
ce qui, en même temps que ces matières
descendent, se détache des parties voisines;
mais, plus tard, le lait entre dans les veines, il nourrit
même très bien et ne passe plus par le
bas ; il resserre même le ventre. 4. Celui
donc qui boit du lait, en vue d'obtenir des évacuations
alvines, ne fera pas mal d'en prendre une quantité
assez considérable; mais celui qui en boit pour
se nourrir doit s'arrêter quand il a encore envie
d'en prendre, parce que c'est une oeuvre difficile d'en
conserver une grande quantité, et que le corps,
quand il est évacué, admet aussi les matières
crues; car le vide est très prompt à se
remplir. 5. Il convient donc de se modérer après
les évacuations, de passer au régime habituel,
quand on a atteint le but en vue duquel on a commencé
à boire du lait (or c'est surtout dans les maladies
chroniques de la poitrine, accompagnées de toux,
ainsi que dans les expectorations de matières
purulentes, qu'un usage assez prolongé du lait
est utile), et de ne revenir au lait qu'après
une année. 6. Contre les humeurs corrosives et contre
les extravasations d'humeurs, il faut boire le lait
mêlé avec du miel; car, de cette manière,
il relâche plus fortement le ventre, et il est
plus avantageux; on peut également y mêler
du vin nouveau cuit et du vin d'un goût sucré;
il agit également sur les évacuations
alvines quand on y mêle du sel, mais alors il
est plus désagréable à boire. 7. Contre
les dysenteries, les flux bilieux et, en général,
contre toutes les affections du jejunum, ainsi que contre
les fontes du corps qui se rassemblent dans le tube
intestinal, il convient de donner du lait bouilli. 8. Il faut
d'abord le faire bouillir peu et doucement, de façon
qu'une partie passe par les selles et que l'autre soit
retenue; plus tard, on le fera bouillir de plus en plus,
en évitant de le faire brûler, d'en faire
du fromage ou du petit lait. 9. La meilleure manière d'éviter
ces inconvénients est de le cuire doucement,
de le remuer constamment avec un rameau de férule
lisse et mince, et d'enlever, en raclant de tout côté,
avec une plume, les grumeaux qui se forment à
la surface, et d'ôter avec une éponge ce
qui pourrait s'attacher au pourtour de la casserole;
car c'est là souvent le point de départ
d'une corruption totale du lait. 10. Faites donc bouillir
le lait, comme je viens de le dire, jusqu'à ce
qu'il ait acquis une épaisseur uniforme et qu'il
soit plus sucré que le lait cru.
62. DU MEILLEUR MIEL.
(Tiré de Galien.)
1. Le meilleur
miel est celui qui est très sucré et très
piquant, de couleur jaune pâle, de consistance
ni épaisse, ni grumeleuse, ni liquide, mais visqueuse,
et formant un tout continu, de façon que, si
vous en enlevez une partie avec le doigt et que vous
le laissiez tomber, il coule vers le bas comme de la
glu, sans se rompre, ou sans se détacher du doigt
; tel est le miel de l'Hymette et de Thasos, et, en
général, le miel de l'Attique; après
lui vient celui des îles Cyclades; entre Pergame
et Élée il se fait aussi du miel excellent.
2.
Il paraît que les plantes sur les feuilles desquelles
le miel se rassemble contribuent en quelque chose à
ses bonnes ou mauvaises qualités : aussi acquiert-il
les meilleures qualités là où il
y a beaucoup de thym et de certaines autres herbes et
arbrisseaux d'un tempérament chaud et sec. 3. Pour
sophistiquer le miel, quelques-uns y ajoutent du thym;
soupçonnez d'être falsifié le miel
qui a une odeur apparente, car le meilleur miel attire,
il est vrai, l'âcreté du thym, mais il
ne s'imprègne ni de son odeur, ni de ce que son
goût a d'exagéré. 4. Si on lèche
du miel, on en retirera peu de nourriture, mais on se
relâchera plutôt le ventre ; si on en prend
davantage, il provoque ordinairement des vomissements.
5.
Bouilli sans eau, il n'est plus vomitif, comme avant,
et ne pousse plus au dehors les matières contenues
dans les intestins; il est, au contraire, distribué
dans le corps et donne de la nourriture; mais il active
moins le cours des urines que le miel cuit avec de l'eau;
toutefois, même quand il nourrit, il ne fournit
pas un aliment bien abondant. 6. Le miel convient aux vieillards et aux autres
personnes qui ont un tempérament froid; mais,
chez les individus d'un tempérament chaud, et
à la fleur de l'âge, il se transforme en
bile. 7. Sachez-le : quand le miel ne se change pas
d'abord en bile, nous en recueillons peu de matériaux
nutritifs; en sorte que, si cela lui arrive, il ne saurait
nourrir en aucune façon.
63. DU MEILLEUR MIEL.
(Tiré de Rufus.)
[Ce chapitre se trouve vers la fin du IIe
livre du traité intitulé Du régime,
c'est-à-dire dans le livre des Boissons.]
1. On loue
le miel de l'Attique, et il jouit de la plus grande
renommée ; toutes les autres espèces de
miel ne semblent donc rien en comparaison de lui; moi
je ne loue pas tout le miel qui vient de ce pays; je
suis même d'avis qu'ailleurs il y en a aussi qui
est doué de qualités éminentes;
par exemple, le miel de Marathon est très mauvais,
non seulement quand on le compare à celui du
mont Hymette, car celui-là est le meilleur, mais
il en existe encore d'autres espèces auxquelles
il est inférieur. 2. Le miel de Milet, d'Aphidne et de la Sicile
est mauvais aussi. 3. En dehors de l'Attique, le miel est bon
à Chios, à Syros, à Cythnos, à
Siphnos, dans plusieurs autres endroits des îles
Cyclades, en Sicile sur le mont Hyblée, en Crète,
et en Béotie près d'OEchalie.
64. DES METS QUI ONT DES QUALITÉS
MOYENNES.
(Tiré de Galien.)
1. On rencontre
certaines substances ayant des qualités moyennes
entre chaque espèce de différences que
j'ai dit exister dans les aliments; ainsi, entre les
mets à chair dure et ceux à chair molle,
on en trouvera qui tiennent le milieu, de sorte qu'ils
ne sont ni durs, ni mous; il en est de même pour
les atténuants et les incrassants, pour les échauffants
et les refroidissants, pour les désséchants
et les humectants. 2. Aux individus qui ont conservé sans
altération leur bon tempérament naturel
il convient d'user des substances qui ont une nature
semblable à la leur, tandis que ce n'est pas
l'usage alimentaire des semblables, mais celui des contraires,
qui est utile aux gens d'un tempérament mauvais,
qu'il soit primitif ou acquis après coup; car
les semblables conservent ce qui est naturellement irréprochable,
tandis que les contraires ramènent à leur
tempérament propre les parties mal tempérées.
65. DES ALIMENTS D'UNE CONSISTANCE LIQUIDE
OU SOLIDE.
1. Tous
les aliments d'une consistance un peu liquide donnent
au corps une nourriture peu abondante, qui s'évapore
et s'échappe rapidement par la perspiration,
de sorte que, bientôt après, on a de nouveau
besoin d'une nouvelle nourriture; les aliments durs
et terreux, au contraire, fournissent une nourriture
persistante et abondante qui ne s'échappe pas
facilement par la perspiration; si, en outre, ces aliments
ont quelque chose de glutineux, ils produisent tous
ces effets d'une manière encore beaucoup plus
apparente. 2. Évidemment, il n'est pas facile pour
de semblables aliments de se digérer, ni, à
plus forte raison, de se changer en sang ou de s'assimiler
aux parties solides de l'économie; s'il en est
ainsi, ils ne peuvent pas non plus nourrir rapidement;
mais, quand ils ont été domptés
par l'estomac et élaborés, ils donnent
une nourriture abondante au corps.
66. DE QUELLE MANIÈRE L'USAGE DES
POMMES OU DES POIRES ASTRINGENTES RELÂCHE LE VENTRE
CHEZ QUELQUES PERSONNES.
1. Il arrive
à certaines gens d'avoir le ventre relâché,
quand ils ont mangé des pommes astringentes,
lorsque, après avoir pris d'abord du fenugrec,
des radis, ou de la mauve, avec de l'huile et du garon,
ou, en général, des choses qui ont la
propriété de relâcher le ventre,
ils mangent ensuite une certaine quantité de
pommes, de poires, ou de grenades âpres ; le ventre
est même fortement relâché, quand
il est dans l'atonie, par l'usage des astringents qui,
dans ce cas, lui rendent de la force et l'excitent à
l'excrétion. 2. Mais, si on suit la méthode opposée,
c'est-à-dire si on prend d'abord des mets âpres,
et ensuite des mets laxatifs, il est évident
que ces mets seront, au contraire, retenus dans les
intestins; pour la même raison, si quelque autre
humeur retourne l'estomac, comme la bile pâle
le fait habituellement chez certaines gens , lorsqu'elle
est accumulée en grande quantité, et si,
dans cet état, on goûte des mets astringents,
on rejettera immédiatement par le bas l'humeur
qui incommodait. 3. Certain jeune homme donc ayant pris un jour
de la scammonée pour se purger, et, après
cinq heures écoulées sans aucune évacuation,
accusant de la gêne à l'orifice de l'estomac,
de la pression et de la pesanteur à cet organe
lui-même, devenant pâle et éprouvant
des angoisses à la suite de ces accidents, je
lui ordonnai de manger un petit morceau de pomme, de
grenade ou de poire astringente, et il n'en eut pas
plutôt avalé qu'il fut délivré
de ses incommodités par une déjection
alvine, abondante et subite. 4. Ceci démontre suffisamment que, chez
ceux qui ont l'orifice de l'estomac faible, le ventre
se relâche quand ils prennent par-dessus les premiers
alients quelque substance astringente.
67. DES PROPRIÉTÉS DES ALIMENTS.
(Tiré de Mnésithée d'Athènes.)
1. Toutes
les semences sont douées d'une propriété
commune dont il est nécessaire de parler : quand
elles sont de l'année précédente,
elles valent mieux pour donner de l'embonpoint, ou du
moins se digèrent mieux; tandis que les graines
plus vieilles sont légères, il est vrai,
mais nourrissent moins; celles qui ont moins de six
mois fournissent une nourriture lourde, muqueuse et
difficile à assimiler. 2. Presque tous les végétaux
participent, pour ainsi dire, à la propriété
suivante : tous ceux dont on mange surtout les racines
produisent une semence très peu comestible; mais,
par opposition, tous les végétaux dont
les semences nous fournissent de la nourriture ont des
racines incapables de servir à l'alimentation.
68. DES SOLIPÈDES.
1. Manger
des solipèdes, c'est agir tout à fait
comme les esclaves ; toutefois, les solipèdes
qui fournissent la chair la meilleure et la plus légère
sont, d'après l'avis des gens qui rôdent
dans l'Asie, les ânes sauvages, et, d'après
ce que nous en savons ici, les ânes les mieux
nourris; vient ensuite la chair du cheval; celle de
la mule est la plus détestable; la chair de tous
les chevaux sauvages est très mauvaise. 2. Partout,
lorsqu'il s'agit des solipèdes, la chair des
individus à la mamelle est la meilleure; le second
rang appartient à celle des animaux très
jeunes. 3. Les jeunes chèvres et les agneaux
à la mamelle sont, parmi les animaux à
sabots fendus, ceux dont la chair est, après
celle des poissons, la plus propre à rétablir
un embonpoint perdu par suite de maladie, car elle est
facile à digérer, nourrissante, et elle
humecte le ventre. 4. Il faut surtout rechercher, parmi
ces animaux, ceux qui ont été le plus
longtemps, après leur naissance, nourris avec
un lait abondant, et qui n'ont pas brouté beaucoup
de plantes dans les pâturages; car les chairs
de ces animaux sont tendres, à cause de leur
âge, et faciles à digérer, à
cause du lait dont ils ont été nourris.
5.
La chair des veaux et des petits porcs à la mamelle
ne le cède à aucune autre, sous le rapport
de la bonne odeur et du plaisir qu'elle donne, quand
on la mange; mais elle ne convient en aucune façon
aux malades ou aux convalescents, car le veau est assez
lourd, et la chair des petits porcs est extrêmement
humide et trouble le ventre. 6. Parmi les animaux qui ont cessé de
prendre du lait pour nourriture et qui ne se livrent
pas encore à l'accouplement, les porcs qui sont
parvenus à cette période de leur vie fournissent
la meilleure chair : car ils n'ont pas les qualités
humectantes que donne le lait, mais leur graisse naturelle
et la tendreté qu'ils doivent à leur âge
en fait un mets qui tient le milieu entre les deux extrêmes.
7.
Les autres animaux parvenus à l'âge où
ils peuvent être rangés dans cette classe
sont plus durs et plus difficiles à digérer
que ceux à la mamelle ; mais ils fournissent
une nourriture plus sèche, quand leur chair est
assimilée. 8. Les animaux entrés dans la période
suivante, qui font déjà usage de l'accouplement
et qui semblent être tout à fait parvenus
à la fleur de l'âge, conviennent aux individus
qui peuvent les digérer, et qui sont habitués
à la fatigue, ainsi qu'à ceux qui recherchent
la force que donne la viande. 9. Les animaux âgés fournissent
nécessairement un mets assez mauvais, parce que
les progrès de l'âge les font tomber dans
une condition toujours de plus en plus mauvaise; il
ne faut donc pas les manger à dessein, et, si
on y est obligé quelquefois, il faut les prendre
plutôt bouillis.10 La chair des petits chiens relâche
le ventre, mais elle n'a pas du tout la légèreté
que lui attribue le vulgaire, car elle est muqueuse
et glutineuse; toutefois, la meilleure est celle des
individus très jeunes. 11. La chair des renards et des ours est muqueuse;
mais, à une certaine époque de l'automne,
elle devient plus grasse et se surpasse elle-même.
12.
Les personnes qui ont mangé de la chair d'animaux
carnassiers, par exemple celle des loups, des lions,
et de toutes ces espèces d'animaux-là,
disent qu'elle est lourde, difficile à digérer
et qu'elle donne des coliques. 13. Les souris des
arbres ont la propriété de relâcher
le ventre et de nourrir peu; quant aux souris de maison,
aux tortues de montagne, aux lézards sauvages,
aux loirs et aux animaux semblables, on pourrait dire
que ceux qui les mangent ne son pas très-difficiles.
69. DES PROPRIÉTÉS DES ALIMENTS.
(Tiré de Philotime.)
1. En général,
les bouillies n'ont pas besoin d'une élaboration
très forte dans l'estomac; car les parties solides
ont été mêlées aux liquides,
elles se sont fondues, elles ont été réchauffées,
le tout a été cuit ensemble et a subi
une grande altération de ses propres molécules.
2.
Les enveloppes des graines distribuent clans le corps
une humeur très âpre qui produit beaucoup
de coliques et de flatuosités ; car on s'aperçoit,
en les mettant dans la bouche, qu'elles ont une propriété
très âpre, et, immédiatement après
qu'on les a mangées, on voit arriver les incommodités
dont il vient d'être question. 3. Les viandes présentent
les différences suivantes d'après l'état
des animaux eux-mêmes : les animaux voisins de
la jeunesse sont préférables à
ceux qui approchent de la vieillesse, ceux qui sont
plutôt charnus à ceux qui sont plutôt
maigres, ceux qui ont pris des aliments bien élaborés
à ceux qui ne sont pas dans ce cas ; ceux qui
sont un peu gras à ceux qui sont plutôt
maigres, et, chez ces derniers, il vaut mieux prendre
les parties charnues; ensuite, les animaux châtrés
sont préférables à ceux qui ne
le sont pas, et les femelles aux mâles, si l'état
des forces est le même. 4. Quant aux différentes parties du
corps des animaux, les jambes de derrière sont
plus dures et plus difficiles à assimiler que
celles de devant, les droites plus que les gauches,
et les pieds, surtout leur partie inférieure
[plus que les autres parties], le côté
intérieur des jambes plus que le côté
extérieur, et le dos plus que le ventre et la
poitrine; il existe la même relation entre les
parties intérieures et extérieures du
dos et des côtés. 5. Les poireaux bouillis
sont difficiles à assimiler; car ils deviennent
semblables à des courroies et sont difficilement
broyés dans la bouche; mais ils ne nuisent point
à l'élaboration ultérieure de la
nourriture; car nous ne voyons pas qu'ils causent aucune
indigestion. 6. Les poireaux crus sont plus faciles à
digérer, parce qu'ils sont plus mous et qu'ils
sont broyés dans la bouche. 7. La courge bouillie
avec du jus de viande se digère très vite
et parfaitement bien; celle qu'on coupe par petits morceaux
pour les faire bouillir ensuite ensemble, ce qui est
la manière la plus usitée de les préparer,
est plus difficile à assimiler que la première.
8.
De toutes les olives, les noires sont les plus grasses,
les plus difficiles à assimiler et les plus susceptibles
d'engendrer le choléra; elles donnent lieu à
des nausées persistantes, et produisent des selles
nombreuses et peu abondantes. 9. Celles qu'on appelle pyrallides produisent
du reste le même effet que les noires, mais à
un moindre degré, parce qu'elles contiennent
moins de graisse; cependant, ces deux espèces
distribuent dans le corps une humeur grasse, glutineuse
et de beaucoup d'âpreté ; par conséquent,
elles produiront l'humeur semblable à du jaune
d'oeuf. 10. Les olives conservées dans du vinaigre
sont, il est vrai, faciles à assimiler, mais
elles distribuent dans le corps une humeur acide. 11. Les
olives blanches sont moins difficiles à assimiler
que les précédentes, parce qu'on les conserve
dans de l'eau salée, mais elles distribuent dans
le corps des [humeurs douées de] propriétés
salées, amères et très âpres,
lesquelles engendrent à leur tour l'humeur semblable
au jaune d'oeuf. 12. Les olives écrasées s'assimilent,
à la vérité, mieux que les blanches,
mais elles distribuent dans le corps une humeur salée.
Fin du
livre 2
Entête du livre 2
Entête du livre 1er.
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Volume
: Livre 3 bas
du livre
Page 186
LIVRE III.
1. DU RÉGIME ATTÉNUANT ET
DU RÉGIME INCRASSANT.
[Tiré de Galien.]
Le régime atténuant désobstrue
les canaux étroits, enlève la partie visqueuse
des humeurs qui s'y était attachée, divise
et atténue les humeurs épaisses; mais,
si on en fait un usage excessif, il rendra le sang séreux,
ou l'imprégnera de bile amère ou, à
la longue, de bile noire ; car toutes les substances
atténuantes ont naturellement la propriété
de réchauffer fortement et de dessécher
: c'est là
Page 187 ce
qui donne lieu à la formation des calculs tophacés
dans les reins. Il faut donc éviter de manger
habituellement des choses acres quelles qu'elles soient,
surtout quand celui qui les mange est naturellement
un peu bilieux; en effet, de semblables aliments ne
conviennent qu'à ceux chez qui il y a déjà
accumulation d'humeur piiuiteuse ou d'humeur crue, épaisse
et visqueuse. Les maladies chroniques exigent si impérieusement,
pour la plupart, l'usage du régime atténuant,
qu'elles guérissent souvent par cet unique moyen;
et, dans les cas où on peut atteindre son but
en se servant du régime seul, il vaut mieux se
passer des médicaments : ainsi j'ai observé
beaucoup de maladies des reins et un assez grand nombre
de cas de goutte avec formation de tophi aux articulations,
qui furent soit complètement guéries par
un semblable régime, soit notablement amendées.
J'ai connu également un nombre assez considérable
de gens qui étaient habituellement éprouvés
par la dyspnée, et qui retirèrent un tel
avantage de ce traitement, qu'ils furent complètement
guéris, ou que leur maladie ne les tourmentait
plus que légèrement et à de longs
intervalles. Le régime atténuant fond
aussi les grosses rates et le foie affecté de
squirrhe; il guérit les épilepsies qui
sont encore légères et à leur début,
et amende notablement celles qui sont déjà
chroniques et enracinées. Or les substances qui
irritent et piquent douloureusement l'odorat et le goût
sont acres et atténuantes ; toutes les substances
nitreuses et toutes les substances amères ont
aussi quelque chose d'incisif. Cependant ces substances
exercent aussi une action très différente
selon qu'on les mange avec de l'oxymel, du vinaigre,
du sel ou de l'huile; car leurs propriétés
se fortifient par le vinaigre et l'oxymel, tandis qu'elles
s'affaiblissent par l'huile. Presque tous les mets atténuants
sont peut-être plus dignes du nom de médicaments
que de celui d'aliments, tandis que les mets qui engendrent
des humeurs épaisses et visqueuses sont très
nourrissants et produisent du bon sang, quand ils sont
bien élaborés dans l'estomac et dans le
foie, mais ils produisent des obstructions au foie et
à la rate, et, s'il existe en outre un petit
commence-ment d'inflammation aux viscères, ils
l'augmentent considérablement; ils augmentent
aussi les pneumatoses, les affections squirrheuses,
et, cela est également évident, ils accélèrent
la formation des abcès. Or il y a certaines substances
qui ont uniquement la propriété de contenir
des humeurs épaisses, comme la lentille cuite,
d'autres qui sont [uniquement] visqueuses, comme la
mauve, d'autres enfin qui ont ces deux qualités
à la fois, comme les testacés, et les
animaux qu'on appelle mollusques. Il est clair que le
régime atténuant, eu égard à
la conservation de la santé, est plus exempt
de danger que le régime incrassant; mais il ne
saurait produire de l'embonpoint ou de la force, parce
qu'il ne donne pas beaucoup d'aliment. Quelquefois aussi
il est nécessaire de toucher aux mets qui nourrissent
fortement et produisent des humeurs épaisses,
mais il faut le faire avec mesure et aux époques
où l'on éprouve un besoin évident.
Les gens qui peuvent prendre beaucoup d'exercice et
dormir aussi longtemps qu'ils veulent, et qui ont choisi
un genre de vie étranger aux affaires publiques,
mangeraient sans inconvénient des mets visqueux
et qui contiennent des humeurs épaisses, surtout
s'ils ne s'aperçoivent jamais d'aucun sentiment
de pesanteur ou de tension à l'hypocondre, après
en avoir pris beaucoup. Ceux, au contraire, qui, soit
à cause de leur âge, soit à cause
du défaut d'habitude, ne peuvent prendre de l'exercice
avant le repas, doivent tous s'abstenir de semblables
mets. Les individus tout à fait sédentaires
ne doivent pas même s'approcher des mets qui contiennent
des humeurs épaisses, car le plus grand mal pour
la conservation de la santé est le repos du corps
, et le. plus grand bien, sous ce rapport, est un exercice
modéré. Le plus sûr par conséquent,
c'est de se garder des mets visqueux et imprégnés
d'humeurs épaisses, du moins pour ceux qui n'ont
souci que de leur santé et qui ne courent pas
après l'embonpoint que recherchent les athlètes.
Les mets les plus irréprochables sont ceux qui
tiennent le milieu entre les atténuants et les
incrassants, parce qu'ils se trouvent placés
dans une juste mesure, qu'ils sont un terme moyen entre
les extrêmes, et qu'ils produisent un sang d'une
consistance moyenne; voilà donc ce qui constitue
pour notre corps la meilleure nourriture; la plus détestable
est celle qui renferme des humeurs mauvaises ; il faut
s'en abstenir toujours. On est d'avis que la variété
des mets est également très nuisible,
surtout si elle porte sur des mets de propriétés
opposées, parce qu'elle empêche la bonne
digestion des substances ingérées. Telles
sont à peu près les propriétés
générales [du régime atténuant
et du régime incrassant]; maintenant je vais
passer à la matière de ce régime.
2. ALIMENTS ATTENUANTS.
L'ail, les oignons, le cresson, les poireaux,
la moutarde, le poivre, le smyrnium, la pariétaire
d'Espagne, l'origan, la calaminthe,, la menthe, l'hysope,
le sisymbrium, le pouliot, le thym, le thymbre, si on
les mange frais; en effet, à l'état desséché,
ces plantes deviennent déjà des médicaments
et ne sont plus des aliments; car, en général,
tout ce qui tend à devenir sec est plus efficace
que ce qui est fleuri, et les plantes qui poussent sur
les collines, ou dans des endroits plus ou moins secs,
ont plus de vertu que celles qui croissent dans les
plaines, les jardins ou les marais. C'est donc d'après
cette règle commune qu'il faut porter un jugement
sur toutes les plantes. Après les espèces
susdites viennent les sui-vantes : la roquette, la berle,
le céleri, le persil, le basilic, les radis,
le chou, les bettes, la cardousse, le panicaut, l'ortie,
le fenouil, la coriandre, la rue, l'aneth, le laser
sermontain, le cumin, le fruit du câprier et du
térébenthinier, les graines de carvi,
d'anis, de faux amome, d'ammi, de daucus, de seseli,
de tordyliurn et celles de toutes les plantes odorantes,
âcres et douées d'une chaleur évidente.
Les graines de rue et de chanvre appartiennent aux substances
fortement atténuantes, et rentrent déjà
dans la classe des drogues. Parmi les céréales,
l'orge est la seule qui ne soit pas contraire au régime
atténuant; viennent ensuite les pains de froment
cuits au four chauffé de tous côtés,
mais il faut tâcher de s'abstenir des autres céréales,
à moins qu'on ne veuille, à de longs intervalles,
goûter quelques pois grecs ou quelques lentilles.
On trouvera, si on veut, des ressources abondantes et
inépuisables, pour composer des mets conformes
au régime atténuant, dans les poissons
de roche et dans les petits oiseaux de montagne, car
tous les animaux qui vivent sur les montagnes ont un
tempérament plutôt sec et chaud, et leur
chair est très peu pituiteuse et très
peu visqueuse. On mangera donc des étourneaux,
des grives, des merles et des perdrix, ainsi que les
moineaux appelés moineaux des tours, et ceux
qui habitent les vignes. Parmi les pigeons, ceux des
tours valent mieux que les pigeons domestiques. En général,
il faut préférer les animaux qui prennent
de l'exercice à ceux qui n'en font pas, ceux
qui prennent plutôt des aliments secs à
ceux dont les aliments sont plutôt humides, et
ceux qui respirent un air pur et ténu à
ceux qui vivent dans un milieu contraire. Parmi les
poissons de roche, on doit manger de la girelle, du
boulereau, du merle de mer, du tourd, du scare, et,
en un mot, de tous les poissons dont la chair est à
la fois molle et cassante, mais il faut s'abstenir tout
à fait de ceux dont la chair est dure ou visqueuse.
Or la chair des motelles est molle, il est vrai, mais
elle est moins cassante que celle des poissons de roche;
la chair des rougets, ail contraire, est cassante, mais
elle n'est pas molle. Vous avez donc deux signes pour
apprécier la chair des animaux quels qu'ils soient
: ce sont la mollesse et le cassant ; prenant ces signes
en considération, on mangera jusqu'à satiété
les poissons qui réunissent ces deux qualités;
on s'abstiendra tout à fait de ceux où
elles manquent toutes deux; on mangera aussi de temps
en temps, à défaut d'autres, ceux qui
présentent seulement l'une de ces qualités,
mais on se gardera d'en ingérer jusqu'à
satiété; on pourra donc, si on n'a pas
de poissons de roche, recourir aux motelles, aux rougets,
ainsi qu'aux autres poissons de haute mer, et surtout
à ceux qu'on mange avec de la moutarde, comme
la scorpène. Il existe certaines espèces
d'animaux qui présentent en effet l'une des deux
qualités dont je viens de parler, mais qu'il
faut cependant se garder de manger, parce que l'autre
est en excès ; les anguilles, par exemple, et
la plupart des mollusques, quoiqu'ils aient la chair
molle, sont cependant extrêmement nuisibles à
ceux qui ont besoin du régime atténuant,
à cause de leurs qualités visqueuses et
pituiteuses. Parmi les poissons cartilagineux, il n'y
a que la torpille et la pastenague qui soient convenables,
et dont on puisse quelquefois se servir à défaut
de poissons de roche. La sole et le flet sont doués
des mêmes propriétés. Je ne défends
pas, si ou prend de l'exercice, de manger des poules,
des pigeons et des tourterelles, surtout celles qui
habitent les montagnes. Ce n'est pas seulement la tourterelle
qu'il faut manger non fraîchement tuée,
mais conservée au moins pendant un jour; cette
précaution t'applique également à
la perdrix et à tous les animaux qui ont la chair
modérément dure. Les poissons salés
exercent une action atténuante et incisive très-prononcée
sur les humeurs épaisses et visqueuses; mais
il faut préférer aussi ceux dont la chair
est naturellement molle et se garder de ceux qui ressemblent
aux grands animaux marins. On peut encore sans danger
manger du porc salé. Parmi les fruits de l'arrière-saison,
ceux qui relâchent le ventre causeront le moins
de dommage : il faut donc choisir ceux qui sont un peu
mous plutôt que ceux qui sont un peu durs et qui
passent lente-ment, mais il ne faut user d'aucune espèce
jusqu'à satiété. Ceux qui sont
fortement âpres sont contraires au régime
atténuant. Les meilleurs entre tous sont les
figues sèches, les noix, les pistaches et les
amandes légèrement amères; quant
aux olives, je ne saurais ni les louer ni les blâmer.
De toutes les substances sucrées, non-seulement
parmi les mets, mais aussi parmi les boissons, il n'y
a, pour ainsi dire, que le miel qui produise une humeur'
d'une consistance parfaitement ténue. Les vins
blancs et ténus produisent un effet incisif sur
les humeurs épaisses et purgent [le corps] par
les urines. Le petit-lait appartient aussi aux substances
atténuantes. L'oxymel est particulièrement
très-utile pour le régime atténuant.
3. ALIMENTS CONTENANT DES HUMEURS ÉPAISSES.
Les pains cuits dans un four chauffé
par le bas , ceux qui sont mal préparés,
le mets appelé tragos, les fritures faites avec
du vin nouveau et de la farine sémidalique, les
lagana, les rhymmata, auxquels on donne le nom d'itria,
et toute friture faite avec du froment sans ferment,
ainsi que les gâteaux préparés avec
ces fritures. La farine sémidalique et l'alica
contiennent des humeurs extrêmement épaisses;
l'amidon en contient qui le sont modérément.
Les haricots renferment également des humeurs
épaisses, ainsi que les lupins, et la chair des
lentilles cuites, car l'écorce de ces dernières
a quelque chose de détersif. Puis viennent les
fèves torréfiées, la graine de
sésame, la graine d'erysimum, les animaux appelés
mollusques, par exemple les calmars, les seiches, les
poulpes, les poissons de la nature des grands animaux
marins, classe à laquelle appartiennent les thons;
toutefois les jeunes thons ont des propriétés
moins prononcées. Les huîtres, les buccins,
les pourpres, les cames, les bernicles, les peignes,
les jambonneaux, et, en un mot, tous les coquillages,
contiennent des humeurs très épaisses.
Puis viennent les anguilles, les escargots, la chair
de cerf, de chèvre, de boeuf, de lièvre,
de porc, le foie, les reins, les testicules, le cerveau,
la moelle épinière, les mamelles, les
glandes, la langue (mais à un degré modéré),
le lait fortement bouilli, tous les fromages (mais les
fromages nouveaux et ceux au lait aigre à un
moindre degré), le lait aigre, l'amouille coagulée
par la chaleur, les oeufs qu'on fait cuire dans l'eau
bouillante jusqu'à ce qu'ils soient entièrement
durs (les oeufs cuits sous la cendre à un degré
plus élevé, et plus encore ceux qu'on
frit dans la poêle), les dattes, les châtaignes,
les glands, les oignons de vaccet, les navets, les champignons,
la racine de gouet, les truffes, les pignons, les figues
qui ne sont pas parfaitement mûres, la pulpe de
citron, le concombre pour ceux qui en mangent abondamment,
les pommes vertes. Les vins d'un goût sucré,
et surtout celui appelé siraeum (vin doux cuit),
produisent un sang épais; il en est de même
pour le vin nouveau et pour les vins épais et
noirs.
4. ALIMENTS TENANT LE MILIEU ENTRE LES
ATTÉNUANTS ET LES INCRASSANTS.
Les pains les mieux préparés,
la chair de poule, de coq et de faisan, de perdrix et
de pigeon, de coq de bruyère et de tourterelle,
de grive, de merle et de tous les petits oiseaux, puis
celle des poissons de roche, de ceux des côtes
aussi bien que de ceux de haute mer, celle des loches
de mer, des murènes, des soles et, en général,
de tous les poissons qui n'ont aucune viscosité,
ni mauvaise odeur, ni mauvais goût quand on les
mange; les figues mûres ; parmi les herbes potagères
sauvages la chicorée (mais c'est là un
genre qui comprend plusieurs espèces particulières,
lesquelles ont reçu chacune un nom propre chez
les Attiques, comme la laitue, le duriou jaune, le gingicidium
et mille autres plantes de ce genre), l'asperge de marais
et l'asperge proprement dite, la tige de houx-frelon
et celle de couleuvrée, le vin d'un goût
sucré, jaune et transparent à la fois,
comme celui d'Ariuse, de Lesbos, de Falerne et du Tmolus;
car toutes ces espèces engendrent un sang qui
est bon et de consistance moyenne.
5. ALIMENTS PRODUISANT DES HUMEURS VISQUEUSES.
Les froments pesants, denses et jaunes à
l'intérieur sont visqueux; les froments légers,
rares et blancs à l'intérieur, le sont
moins ; la farine sémidalique et l'alica sont
très visqueux. Les tendons et les aponévroses
, les parties qui environnent les lèvres, la
couenne, toute chair de porc, la chair d'agneau, la
graine de sésame, les oignons de vaccet, les
dattes grasses [sont également visqueux].
6. ALIMENTS PRODUISANT DES HUMEURS CRUES.
Les dattes vertes remplissent d'humeurs crues
le corps de ceux qui les mangent; il en résulte
des frissons avec difficulté de se réchauffer.
Le navet, quand on en mange abondamment, les coquillages
à chair dure, quand ils ont perdu leur liquide
salé par une coction prolongée, les animaux
appelés mollusques, comme les poulpes, les seiches
et tous les autres du même genre, tous les animaux
marins d'une grandeur démesurée, l'estomac,
les intestins et la matrice des quadrupèdes,
les glandes dures, si elles ne sont pas digérées,
le lait aigre, les fromages, les gâteaux frits
dans la poêle, les lupins, le raisin, quand il
est retenu [produisent des humeurs crues].
7. ALIMENTS PRODUISANT DES HUMEURS FROIDES.
Il arrive à ceux qui se gorgent de
concombres d'éprouver une accumulation d'humeur
froide qui subit difficilement la transformation en
sang de bonne qualité. L'estomac, les intestins
et la matrice des quadrupèdes, le lait aigre,
les bolets, les pommes vertes, les oignons de vaccet
[produisent aussi des humeurs froides].
8. ALIMENTS PRODUISANT DE LA PITUITE.
Les parties nerveuses des animaux engendrent
une humeur simplement pituiteuse; [il en est de même]
du cerveau, du poumon, de la moelle épinière,
des glandes, si elles ne sont pas digérées,
de la chair des agneaux, des bolets, des amanites, des
coquillages à chair molle, des pommes vertes.
9. ALIMENTS PRODUISANT DE L'HUMEUR ATRABILAIRE.
La viande de boeuf, de chèvre, plus
encore celle des boucs et des taureaux, et, à
un degré plus fort, celle des ânes, des
chameaux, des renards, des chiens, la viande de lièvre,
de sanglier, la viande salée des animaux terrestres,
la rate des animaux; parmi les animaux marins la chair
des thons, de la baleine, du veau marin, du requin,
du dauphin et de tous les animaux d'une grandeur démesurée,
les escargots, le chou, les jeunes pousses des arbres,
conservées dans de l'eau salée ou dans
de l'eau salée et du vinaigre (je vous parle
de celles du lentisque, du térébenthinier,
de la ronce et de l'églantier), enfin ce qu'on
pourrait appeler la chair de l'artichaut. La lentille
est aussi un mets très atrabilaire; après
elle viennent le pain de son et celui qu'on fait avec
du petit épeautre ou avec les autres mauvaises
graines, ainsi que les fromages vieux, le jarseau et
la vesce, et les vins épais et noirs.
10. ALIMENTS PRODUISANT DE L'HUMEUR BILIEUSE.
Les caroubes. Le jus de l'artichaut est ténu
et produit de la bile amère; le mieux donc est
de manger l'artichaut après l'avoir fait bouillir.
Le miel se transforme facilement en bile dans les organismes
chauds, car toutes les humeurs d'un goût sucré
fournissent des matériaux à la bile jaune;
il en est de même des vins d'un goût sucré.
11. ALIMENTS CONTENANT DES HUMEURS EXCREMENTITIELLES.
Les ramiers, les oies, à l'exception
des ailes, tous les viscères, la moelle épinière,
le cerveau, les oiseaux des marais, des lacs et des
plaines, les pois chiches et les fèves vertes,
la fève d'Égypte, les jeunes porcs, le
mouton, et la chair de tous les animaux jeunes et de
ceux qui mènent une vie oisive; parmi les poissons,
ceux de rivière et de lac et ceux qui vivent
dans la boue; parmi les animaux marins, tous ceux qui
sont d'une grandeur démesurée.
12. ALIMENTS DÉPOURVUS D'HUMEURS
EXCRÉMENTITIELLES.
Le cou et la queue des animaux, les ailes,
la chair des animaux sauvages et de ceux qui vivent
dans les endroits secs.
13. ALIMENTS DONNANT BEAUCOUP DE NOURRITURE
AU CORPS.
La chair des porcs domestiques est le plus
nourrissant de tous les aliments. La cervelle de bœuf,
les testicules, le cœur, la moelle épinière
et l'autre moelle, les ailes des oies et encore plus
celles des poules, ainsi que l'estomac de tous les oiseaux,
les escargots, surtout quand on les a fait bouillir
trois fois, les coquillages à chair dure, comme
les cames, les pourpres, les buccins et tous les autres
animaux semblables donnent beaucoup de nourriture, ainsi
que les homards, les pouparts, les crabes, les salicoques,
les langoustes, tous les autres animaux semblables et
les animaux appelés mollusques, comme la poulpe,
la seiche, le calmar et ceux qui leur ressemblent. Parmi
les poissons cartilagineux, la torpille et la pastenague
nourrissent à un degré moins prononcé,
mais la raie, la raie lisse et le rhinobate nourrissent
plus ; les rougets et les loches de met nourrissent
à un degré moins prononcé. Le lait
plus ou moins épais nourrit à un degré
plus fort, mais celui qui est plutôt humide nourrit
moins. Le pain le plus nourrissant est celui de siligo;
vient ensuite celui de farine sémidalique; le
pain de ménage occupe le troisième rang.
Le froment bouilli; la farine sémidalique, l'alica
[nourrissent fortement]. Les fèves donnent un
embonpoint formé. non de chair serrée
et dense, mais plutôt de chair un peu molle. Les
pois chiches nourrissent plus fortement que les fèves,
les pilasèles et les gesses à fleurs jaunes
plus que le fenugrec. Les haricots, qu'on appelle aussi
gousses ou phaséoles, ne nourrissent pas moins
que les pois grecs. Les lupins, les châtaignes,
les lentilles, les dattes d'un goût sucré,
les raisins secs d'un goût sucré et gras,
les glands, le navet appelé aussi bunias sont
nourrissants; les oignons de vaccet sont très
nourrissants, surtout quand on les a fait bouillir deux
fois. Le miel écumé est favorable à
la distribution des aliments et à la nutrition,
ainsi que l'eau miellée bien cuite. Tout vin
nourrit en raison de son épaisseur; par conséquent,
les vins rouges et épais sont les plus propres
de tous à engendrer du sang; après eux
les vins d'un goût sucré, noirs et épais
à la fois; ensuite ceux qui sont rouges, épais
et astringents; les vins qui sont à la fois blancs,
épais et légèrement âpres,
nourrissent moins que les précédents,
et les vins blancs et ténus sont les moins nourrissants
de tous. Tous les aliments à humeurs épaisses
deviennent fortement nourrissants quand ils sont bien
digérés et bien convertis en sang.
14. ALIMENTS QUI DONNENT PEU DE NOURRITURE.
Les extrémités des animaux,
la matrice, l'estomac , les intestins, la queue, les
oreilles, la graisse molle et la graisse solide. Toute
la classe des oiseaux, comparée à la classe
des quadrupèdes, nourrit moins. La chair des
animaux âgés nourrit moins que celle des
animaux qui sont encore en croissance. La nourriture
fournie par les poissons engendre un sang légèrement
ténu; elle ne nourrit donc pas abondamment, et
se dissipe rapidement par la perspiration. Les testacés
à chair molle, comme les huîtres, nourrissent
peu. Les pains d'orge, de quelque manière qu'ils
soient préparés, sont tous peu nourrissants,
ainsi que l'alphiton fait avec de l'orge. De même
les pains de son, et tous les pains grossiers et les
pains lavés, l'amidon, la bouillie faite avec
l'orge légèrement torréfiée,
l'avoine, le petit millet et plus encore le grand, le
riz, les fèves vertes, la graine de pavot, la
graine de lin, l'ormin, les mûres, le fruit de
l'églantier, les baies de genévrier, celles
de myrte, les amandes, les pistaches, les prunes, les
pêches, les abricots, les abricotins, les olives,
surtout celles qui mûrissent sur l'arbre, les
noisettes et encore moins les noix, les jujubes, les
cornouilles, les prunes sauvages, les mourons, les arbouses,
les jujubes sauvages, les fruits du plaqueminier d'Europe,
les cerises de juif, la câpre et surtout la câpre
salée, toutes les parties du térébenthinier,
le chou, la bette, la patience, la patience sauvage,
le pourpier, la morelle, le radis, le navet, la moutarde,
le cresson, la pariétaire d'Espagne, toutes les
tiges comestibles, la carotte, le daucus, le carvi [donnent
peu de nourriture]. Les oignons, l'ail, les poireaux
et les poireaux des vignes ne donnent point de nourriture
du tout s'ils sont crus, tandis que, si on les fait
bouillir deux ou trois fois, ils en donnent, mais très-peu.
Les grenades nourrissent peu ; les poires, surtout les
grandes, ont quelque chose de nourrissant. La courge
et les raisins secs âpres et qui ne sont point
gras nourrissent peu. Les phasèles, les gesses
à fleurs jaunes, les gesses ordinaires et les
gesses chiches tiennent pour ainsi dire le milieu entre
les mets qui nourrissent peu et ceux qui nourrissent
fortement. Les figues ne ressemblent pas aux autres
fruits d'arrière-saison, lesquels nourrissent
peu, cependant elles produisent une chair spongieuse
ainsi que les raisins; ces derniers nourrissent moins
que les figues, en produisant une chair lâche
et pétrie d'humidité. Tous les aliments
qui sont doués de quelque qualité médicamenteuse
fortement prononcée ne donnent que peu de nourriture
quand ils ont perdu cette qualité pat la torréfaction,
l'ébullition ou la macération; auparavant
ils n'en donnaient pas du tout.
15. ALIMENTS CONTENANT DE BONNES HUMEURS.
De tous les aliments, le lait, quand il est
très bon, est à peu près celui
qui contient les meilleures humeurs, et le lait le plus
excellent est celui des animaux de bonne complexion,
quand on le boit aussitôt qu'il a été
trait. Les oeufs à demi mous et mous [contiennent
de bonnes humeurs], mais les meilleurs sont ceux de
poules et de faisans, tandis que ceux des oies et des
autruches sont moins bons. Les oiseaux et les poissons
contiennent presque tous de bonnes humeurs, excepté
ceux qui vivent dans les marais, les lacs et les rivières
bourbeuses et troubles, surtout quand l'eau vient d'une
ville, entraînant les immondices des latrines,
des bains et des cuisines, et les ordures provenant
du lavage des vêtements. On peut donc toujours
manger sans danger les poissons qui viennent de la partie
de la mer où il n'y a pas de mélange d'eau
douce ; à ce genre appartiennent les poissons
de haute mer et les poissons de roche, car ces poissons
l'emportent de beaucoup sur les autres sous les rapports
de la bonté des humeurs et de l'agrément
du goût. S'il s'agit d'un poisson du nombre de
ceux qui vivent dans les deux eaux, comme le muge, le
bar, la motelle, la loche de mer, les murènes,
les crabes et les anguilles, il faut s'informer d'abord
où il a été pris; on jugera ensuite
de sa bonté par l'odorat et par le goût,
car ceux qui passent leur vie dans la mauvaise eau ont
une odeur et une saveur désagréables,
et ils sont muqueux; en second lieu ils ont beaucoup
plus de graisse que les autres et pourrissent rapidement.
Les poissons deviennent aussi meilleurs ou plus mauvais
qu'ils ne le sont habituellement, d'après les
aliments propres à chaque localité, ce
qu'on reconnaît facilement par l'odorat et par
le goût; les rougets sont dans ce cas; en effet,
les plus mauvais sont ceux qui mangent les petits crabes;
quant aux autres, leur chair est un peu dure, il est
vrai, mais elle ne contient pas de mauvaises humeurs.
Le flétan macrolépidote, la barbue, le
merlus noir, la sole, le flet et le lézard de
mer tiennent, pour ainsi dire, le milieu entre les poissons
à chair molle et ceux à chair dure; la
nourriture qu'ils fournissent est excellente pour ceux
qui ne prennent point d'exercice, pour les gens faibles
et pour les convalescents. La nourriture cassante et
molle est ce qu'il y a de meilleur pour la santé,
parce que c'est, de toutes, celle qui contient les meilleures
humeurs. La chair des animaux, quand elle est bien digérée,
produit du très bon sang, surtout celle des animaux
imprégnés de bonnes humeurs; or c'est
à cette classe qu'appartient le genre des cochons;
leur chair est en effet la meilleure, aussi bien sous
le rapport du goût que sous celui de la facilité
de la digestion, surtout celle des cochons d'un âge
moyen; celle du porc très âgé est
moins bonne, ainsi que celle des porcs mangés
immédiatement après leur naissance; car
la chair des cochons de lait est d'une humidité
excessive et produit beaucoup de pituite. Les mamelles
contiennent de bonnes humeurs , ainsi que le foie, les
parties voisines des lèvres, les ailes et les
autres extrémités. Les intestins, la matrice
et la queue produisent des humeurs moins bonnes que
ne sont celles de la chair. Les glandes, quand elles
sont bien digérées, donnent une nourriture
à peu près égale à celle
que fournissent les chairs. Le coeur ne contient pas
de mauvaises humeurs. Les pieds de cochon sont meilleurs
que le museau et les oreilles, car le cartilage des
animaux adultes ne se digère pas du tout, tandis
que celui des animaux qui sont encore en croissance
est susceptible de se digérer, pourvu qu'il soit
bien broyé dans la bouche. Autant la chair des
autres animaux cède le pas à celle des
porcs pour la bonté de la nourriture, autant
leurs extrémités sont inférieures
à celles des porcs. La cervelle des oiseaux est
de beaucoup meilleure que celle des quadrupèdes.
La chair des animaux sauvages contient de meilleures
humeurs que celle des animaux domestiques. Le pain de
fine fleur et bien préparé contient de
bonnes humeurs ainsi que l'alica, l'orge mondée
bien cuite et les fèves; les châtaignes
n'en contiennent pas de mauvaises. Les figues mûres
et le raisin mûr conservé à l'aide
de la suspension sont irréprochables. Les figues
sèches, si elles sont rapidement distribuées
dans le corps, produisent de bonnes humeurs, mais, si
elles restent longtemps dans le canal intestinal, elles
s'imprègnent de mauvaises humeurs et engendrent
des poux ; mangées avec des noix, elles fournissent
un mets excellent; ceux qui mangent les figues, soit
vertes, soit sèches, avec quelque autre aliment,
se font un tort assez considérable. La laitue
produit du sang, autant que peut en produire une herbe
potagère ; après elle viennent les en-dives.
Les vins de bonne odeur contiennent de bonnes humeurs
; or les espèces suivantes sont du nombre de
ceux qui contiennent de très-bonnes humeurs :
le vin de Falerne, surtout celui qui est un peu sucré,
le vin d'Ariuse et le vin paillet sucré du Tmolus.
16. ALIMENTS CONTENANT DE MAUVAISES HUMEURS.
Il n'y a pas qu'une seule espèce d'humeurs
mauvaises : car les unes sont plutôt froides et
pituiteuses , les autres sont plutôt chaudes et
bilieuses; il en existe qui sont plutôt aqueuses;
de même il en est certaines qui sont plutôt
atrabilaires. Je conseille de s'abstenir de tous les
aliments qui contiennent de mauvaises humeurs, même
quand ils sont faciles à digérer; car
à la longue ils produisent dans les veines, sans
qu'on s'en doute, une accumulation de mauvaises humeurs
qui donnent lieu à des fièvres de mauvais
caractère, si elles rencontrent une occasion,
même insignifiante, de se pourrir. Or les aliments
qui contiennent de mauvaises humeurs sont les suivants
: la chair des moutons et aussi celle des chèvres
qui de plus est âcre; celle des boucs est la plus
mauvaise, ensuite celle des béliers, puis celle
des taureaux: chez tous ces animaux, la chair des individus
châtrés est meilleure, mais celle des sujets
âgés est très mauvaise. La chair
de lièvre produit, il est vrai, du sang assez
épais, mais ce sang est meilleur, sous le rapport
de la bonté des humeurs, que celui fourni par
le boeuf et le mouton. La viande de cerf contient des
humeurs qui ne sont pas moins mauvaises que celles des
viandes dont nous venons de parler. Les reins contiennent
de mauvaises humeurs ainsi que les testicules des animaux
tout à fait adultes, à l'exception de
ceux des coqs. [Il en est de même] de la cervelle,
de la moelle épinière, de la couenne de
lard, de la rate (mais de celle du porc à un
moindre degré), de tous les viscères des
animaux, des oeufs frits dans la poêle, des fromages
vieux, des bolets, des amanites (car la prudence veut
qu'on ne mange pas les autres champignons), du fenugrec,
des lentilles. Le petit épeautre, l'avoine et
le pain qu'on fait avec ces graines, pas plus que les
pois chiches, ne contiennent de bonnes humeurs; le grand
épeautre est d'autant inférieur au froment,
qu'il est supérieur au petit épeautre
et à l'avoine; le grand millet, le petit millet
et les graines qui leur ressemblent ne contiennent pas
de bonnes humeurs. Les vives, les grondins, les gades,
les scorpènes, les maquereaux bâtards,
les rougets, les orphes, les hiboux de mer, les marteaux,
les congres, les pagels et tous les animaux marins d'une
grandeur démesurée sont imprégnés
de mauvaises humeurs. Tous les fruits appelés
fruits d'été contiennent de mauvaises
humeurs, mais les figues à un moindre degré
que les autres. Le sang que produisent les figues sèches
chez ceux qui en usent abondamment n'est pas tout à
fait bon ; c'est pourquoi elles traînent à
leur suite une multitude de poux. Les pommes vertes,
les poires avant d'être mûres, le fruit
du térébenthinier sont imprégnés
de mauvaises humeurs; [il en est de même de] l'artichaut,
surtout quand il est devenu un peu dur, des concombres,
des pastèques; les melons [en sont imprégnés]
à un moindre degré; la courge est en effet
meilleure que les fruits susdits; cependant, si elle
se corrompt clans l'estomac, elle s'imprègne
aussi de très mauvaises humeurs. Aucune herbe
potagère ne contient de bonnes humeurs, mais
la laitue et l'endive tiennent le milieu entre les aliments
imprégnés de bonnes humeurs et ceux imprégnés
de mauvaises; après elles vient la mauve et ensuite
l'arroche, le pourpier, la blite et la patience. Parmi
les racines des herbes potagères, toutes celles
qui sont âcres contiennent de mauvaises humeurs,
comme l'oignon, le poireau, l'ail, le radis, le daucus;
les racines de gouet, celle de navet qu'on appelle aussi
bunias, et celle de la plante appelée carvi tiennent
le milieu entre les aliments qui ont de bonnes humeurs
et ceux qui en ont de mauvaises. Le basilic contient
de très mauvaises humeurs; le navet à
moitié cru, le chou, les oignons de vaccet mal
bouillis [en ont de mauvaises]. Les oignons, l'ail,
les poireaux et les poireaux des vignes perdent leurs
mauvaises humeurs quand on les fait bouillir deux fois.
Tout ce qu'on appelle herbes potagères sauvages,
comme la laitue sauvage, le duriou jaune, l'aiguillette,
le gingidium, la chicorée, l'urosperme, contiennent
des humeurs mauvaises au plus haut degré. Les
vins épais, d'une odeur désagréable,
d'un goût âpre, contiennent des humeurs
mauvaises, comme le mauvais vin de Bithynie qu'on conserve
dans les grandes cruches , car celui qu'on garde dans
les petites contient des humeurs qui ne sont ni bonnes
ni mauvaises, mais de qualité moyenne.
17. ALIMENTS FACILES À DIGÉRER.
Les pains bien préparés, tous
les poissons de roche, la loche de mer, la torpille,
la pastenague. Dans toute la classe des oiseaux, la
chair, si on la compare à celle des quadrupèdes,
est assez facile à digérer, surtout celle
de la perdrix, du coq de bruyère, du pigeon,
de la poule, du coq et des faisans. Les ailes des oies
sont faciles à digérer, mais celles des
poules le sont encore davantage; et, en général,
les ailes des individus bien nourris et jeunes sont
excellentes, tandis que celles des animaux maigres et
vieux sont très mauvaises; le foie des oies engraissés
avec du petit lait, ainsi que les testicules des coqs
qu'on a nourris de la même manière, sont
très-faciles à digérer. Quant au
porc, la chair des individus adultes convient mieux,
sous le rapport de la digestion, aux gens d'un âge
moyen et qui prennent de l'exercice, tandis que celle
des animaux qui sont encore en croissance va mieux aux
autres individus. Le veau est préférable
au boeuf adulte pour la facilité de la digestion;
les jeunes boucs valent mieux que les chèvres.
La viande de tous les animaux qui sont encore en croissance
est plus facile à digérer que celle des
individus sur le déclin de l'âge, et celle
des animaux qui vivent dans les endroits secs plus que
celle des autres. La noix se digère plus facilement
que la noisette. Les oignons de vaccet se digèrent
plus facilement quand on les a fait bouillir deux fois.
Les œufs demi-mous et les oeufs mous, la laitue, l'endive,
la mauve, la courge bouillie, pourvu qu'elle ne se corrompe
pas [sont faciles à digérer]. Les vins
sucrés se digèrent plus facilement que
les vins âpres. Sachez que parmi les substances
également favorables à la santé,
celle qui est la plus agréable se digère
le plus facilement.
18. ALIMENTS DIFFICILES À DIGÉRER.
La chèvre, le boeuf, le cerf. Le bouc
est ce qu'il y a de plus mauvais pour la digestion ;
vient ensuite le bélier et après lui le
taureau. La chair des animaux âgés est
aussi très mauvaise et même celle des vieux
porcs. L'estomac est difficile à digérer
ainsi que les intestins, la matrice, la couenne, le
coeur, le foie, les oreilles, la queue, les reins, tous
les viscères, le cerveau, la moelle épinière,
les testicules des animaux arrivés à l'âge
adulte, le sang quel qu'il soit, les oies à l'exception
des ailes. La chair des ramiers, des grives, des merles
et des petits oiseaux est un peu dure; celle de la tourterelle
et du canard l'est encore davantage, et celle du paon
et des outardes l'est encore plus. L'estomac des oiseaux,
quel qu'il soit, est difficile à digérer,
car c'est à tort que quelques-uns recommandent
ceux de l'autruche et du labbe comme un médicament
digestif; car d'abord ces mets ne se digèrent
pas facilement eux-mêmes, et ensuite ils ne constituent
pas un médicament digestif pour d'autres mets.
Les escargots sont difficiles à digérer;
il en est de même du lait aigre, surtout pour
ceux qui ont l'estomac froid, et du fromage vieux; mais
le fromage nouveau et surtout le fromage au lait aigre
sont meilleurs. La chair des pourpres et des buccins,
et, parmi les autres testacés, ceux qui ont la
chair dure, sont difficiles à digérer.
Les homards, les pouparts, les crabes, les langoustes,
les salicoques et tous les animaux semblables, les poulpes,
les seiches, les calmars et tous les animaux appelés
malacodermes, les raies, les raies lisses, les rhinobates,
les vives, les grondins, les gades, les scorpènes,
les maquereaux bâtards, les rougets, les orphes,
les hiboux de mer, les marteaux, les saupes, les congres,
les pagels, les squales-nez, les raies noires, les oeufs
durs, cuits sous la cendre ou frits dans la poêle,
le froment bouilli, le mets appelé tragos [ sont
difficiles à digérer]. La farine grossière
est plus difficile à digérer que l'orge
légèrement torréfiée. Le
petit épeautre, l'avoine et le pain qu'on fait
avec ces graines, les fèves, les gesses à
fleurs jaunes, les haricots, les phasèles, les
gesses ordinaires, les gesses chiches, les pois chiches,
le riz, les lupins, le grand millet, le petit millet,
et toutes les graines qui leur ressemblent, les lentilles,
les vesces, la graine de sésame, l'erysimum,
les châtaignes, les glands, les pommes, les poires,
les figues, les sorbes vertes, les raisins acides et
les raisins âpres, toutes les dattes, les caroubes,
le citron [se digèrent difficilement]; cependant,
si on emploie la partie extérieure du citron
comme médicament, elle favorisera la digestion,
ainsi que plusieurs autres substances âcres. Le
basilic, le navet à moitié cru, les oignons
de vaccet à moitié crus, la carotte, le
daucus, le carvi, toutes les racines des herbes potagères,
et toutes ces herbes elles-mêmes, à l'exception
de la laitue et de l'endive, les vins épais et,
nouveaux sont difficiles à digérer. L'eau
est aussi éminemment difficile à digérer.
19. ALIMENTS FAVORABLES À L'ORIFICE
DE L'ESTOMAC ET RENFORÇANT CETTE PARTIE.
Les dattes âpres, les coings, les olives
salées (mais celles qu'on conserve dans le vinaigre
sont les plus convenables), les raisins secs légèrement
astringents, le raisin qu'on conserve dans le marc.
La noix est plus favorable à l'orifice de l'estomac
que la noisette, et elle l'est encore beaucoup plus
quand on la mange avec des figues sèches. Toutes
les plantes épineuses sont modérément
favorables à l'orifice de l'estomac : ce sont
la cardousse, le carthame laineux, l'épine blanche,
le chardon à foulon, le carthame des teinturiers,
l'astragale, l'atragis et l'artichaut, qu'on estime
plus qu'il ne le mérite; [il en est de même
de] la racine de chervis bouillie. Le gingidium ressemble
à l'aiguillette et il est très favorable
à l'orifice de l'estomac, qu'on le mange cru
ou bouilli; mais il ne supporte pas une ébullition
prolongée. La moutarde, le radis, le navet, le
cresson, la pariétaire d'Espagne, l'asperge royale
et celle des marais, ainsi que les tiges du houx-frelon,
du palmier nain, du buisson ardent et de la couleuvrée
[sont favorables à l'orifice de l'estomac], ainsi
que la câpre salée. Les oignons de vaccet
excitent l'appétit. La partie extérieure
du citron renforce l'orifice de l'estomac, si on la
prend comme médicament. Le vin âpre renforce
l'orifice de l'estomac et cet organe lui-même,
surtout quand il est affecté d'une intempérie
chaude. L'absinthe et l'aloès [renforcent l'orifice
de l'estomac] à titre de médicaments.
20. ALIMENTS NUISIBLES À L'ORIFICE
DE L'ESTOMAC.
Les baies du genévrier causent des
pincements à l'orifice de l'estomac, et celles
du cèdre en produisent encore de plus forts.
Les arbouses , le bouton d'or, la graine de gattilier
sont nuisibles à l'orifice de l'estomac; la bette
l'est tellement, qu'elle y cause des pincements quand
on en mange trop abondamment; il en est de même
pour la patience. Le basilic, le navet à moitié
cru, la bute, l'arroche, à moins qu'on ne les
mange avec du vinaigre, du garon et de l'huile [nuisent
à l'orifice de l'estomac]. Le fenugrec retourne
l'orifice de l'estomac, et il en est de même pour
le sésame. Le lait s'aigrit chez ceux qui ont
l'estomac froid, et il produit des éructations
nidoreuses quand cet organe est chaud; il est donc tout
simple qu'il nuise aussi aux fébricitants. Si
on prend beaucoup de miel, il tend à produire
des vomissements. Quand la pastèque n'est pas
bien digérée, elle produit habituellement
le choléra; car, même avant qu'elle soit
corrompue, elle favorise le vomissement; si on en mange
beaucoup, elle le produira infailliblement, à
moins qu'on ne mange après quelque mets imprégné
de bonnes humeurs ; le melon produit le même effet,
[mais non] au même degré. Toute cervelle
est nuisible à l'orifice de l'estomac et produit
des nausées, ainsi que la moelle des os. Le vin
noir et âpre s'aigrit facilement et tend à
produire le vomissement, ainsi que le vin épais
et nouveau. À titre de médicaments, l'aurone,
l'armoise maritime et l'aphronitron [nuisent à
l'orifice de l'estomac].
21. ALIMENTS QUI NUISENT À LA TÊTE.
Les mûres, les mourons. Tous les mets
qui remplissent la tête à cause de leur
chaleur sont sujets à produire de la céphalalgie,
comme le vin, la moutarde, le persil, le daucus, l'oignon,
le smyrnium. Les arbouses, les baies du genévrier
et celles du cèdre, la graine de chanvre, les
racines du cistre, les dattes quelles qu'elles soient,
la roquette, le fenugrec, la graine de lin [nuisent
à la tête]. Le vin paillet et âpre
cause de la céphalalgie, et affecte l'intelligence
plus que le vin noir et âpre ; les vins odoriférants
donnent aussi du mai de tête; le vin aqueux n'affecte
ni la tête ni les nerfs et même le vin faible
guérit la céphalalgie qui provient des
humeur: contenues dans l'estomac. Le lait ne convient
pas à la tête, à moins qu'on ne
l'ait extrêmement forte. La macération
du marc de raisin, qu'on appelle piquette, donne de
la céphalalgie, ainsi que le raisin qu'on conserve
dans le mare.
22. ALIMENTS EXEMPTS DE FLATUOSITÉS.
Les pois grecs, les haricots, le cumin, la
racine et la graine du laser sermontain, la graine de
gattilier, celle de chanvre, les fèves torréfiées,
les oignons de vaccet, qu'on a fait bouillir pendant
long-temps ou deux fois et qu'on mange avec du vinaigre
dans de l'huile et du garon, le miel écumé.
L'oxymel fait descendre rapidement les flatuosités.
Le pain d'orge, de quelque manière qu'il soit
préparé, est très-peu flatulent.
Les phasèles, les gesses à fleur jaune,
les gesses communes et les gesses chiches tiennent le
milieu entre les mets exempts de flatuosités
et les mets flatulents.
23. ALIMENTS FLATULENTS.
Les pois chiches, les lupins, les phasèles,
les gesses à fleur jaune, le grand et le petit
millet, et toutes les graines semblables. Les fèves
en purée constituent déjà un mets
flatulent; elles le deviennent encore plus, quand on
les mange bouillies en entier, ou de quelque autre manière
que ce soit. La bouillie faite avec de l'alphiton est
flatulente, mais, quand elle a été pendant
longtemps mélangée et triturée,
elle passe plus facilement par le bas, surtout si on
y a ajouté du miel. La bière, tous les
sucs naturels des plantes et sur-tout le suc de Cyrène,
la fritillaire des Pyrénées, le suc et
la racine de silphium [sont flatulents]. Les flatuosités
produites par les figues ne durent pas longtemps, parce
qu'elles descendent facilement; peu s'en faut que les
figues parfaitement mûres, à l'exemple
des figues sèches , ne causent pas le moindre
dommage. Les dattes vertes sont flatulentes, ainsi que
les figues [et] le navet à moitié cru.
Le lait dégage facilement des vents dans l'estomac.
Les oignons de vaccet à moitié crus, le
miel incomplètement bouilli [sont flatulents].
Les vins d'un goût sucré produisent aussi
des flatuosités qui cheminent lentement; quant
aux vins qui ont à la fois un goût sucré
et âpre, comme ils ne sont pas distribués
dans le corps, qu'ils ne descendent pas non plus [à
travers les intestins], mais qu'ils restent flottants
dans le ventre supérieur, ils développent
des vents dans cette partie; le vin nouveau est flatulent.
24. ALIMENTS DÉTERGENTS, INCISIFS,
DÉSOBSTRUANTS.
L'orge mondée déterge, ainsi
que le fenugrec, le melon, la pastèque, les raisins
secs sucrés, les fèves, les pois chiches
et surtout les pois chiches noirs qui broient évidemment
aussi les calculs dans les reins. La câpre est
formée de molécules extrêmement
ténues; donc, à l'état salé,
elle déterge, fait descendre la pituite qui se
trouve dans l'estomac, et évacue les obstructions
de la rate et du foie; il faut pour cela la prendre
avec du vinaigre miellé ou du vinaigre et de
l'huile, avant tous les autres aliments. Le suc de bette
est détersif et dissout les obstructions du foie,
surtout quand on le prend avec de la moutarde ou du
vinaigre; il en est de même pour la patience.
L'ortie a la vertu des substances à molécules
ténues. Les racines de gouet et d'asphodèle,
ainsi que les oignons de vaccet, ont des propriétés
atténuantes et désobstruantes; voilà
pourquoi quelques-uns donnent la tige verte d'asphodèle
aux gens qui ont la jaunisse comme un remède
très puissant. Les oignons, l'ail, les poireaux
et les poireaux des vignes atténuent et divisent
les humeurs épaisses et visqueuses; cependant,
quand on les fait bouillir deux ou même trois
fois, ils perdent, il est vrai, leur âcreté,
mais ils n'en continuent pas moins à atténuer.
La partie séreuse du lait atténue les
humeurs épaisses. Les figues détergent
: c'est là ce qui produit une expulsion abondante
de graviers chez les néphrétiques, quand
ils en mangent. Les figues sèches atténuent
et divisent, ce qui fait qu'elles purgent les reins.
Les baies de genévrier évacuent ce qui
est contenu dans le foie et dans les reins, et atténuent
les humeurs épaisses et visqueuses. Les amandes
détergent, atténuent et nettoient les
viscères, et donnent lieu à l'expulsion
des liquides de la poitrine et du poumon. Les pistaches
sont utiles pour renforcer le foie et pour évacuer
les humeurs qui causent des obstructions dans ses canaux.
Le radis a la propriété des substances
à molécules ténues. Le miel qui
se forme sur les plantes chaudes et sèches est
composé de molécules très-ténues;
voilà pourquoi l'eau miellée est bonne
pour l'évacuation des crachats. L'oxymel fait
expectorer facilement les matières qui ne sont
pas extrêmement visqueuses et épaisses;
il nettoie les viscères sans causer de dommage
; il est d'une grande utilité dans les affections
de la poitrine et du poumon. Les vins ténus sont
utiles à ceux qui ont une accumulation d'humeurs
épaisses, mais, quand les humeurs sont, en outre,
froides, ce sont les vins ténus, vieux et doués
d'âcreté, qui conviennent; le vin aqueux
est bon pour faire expectorer ce qui est contenu dans
le poumon, parce -qu'il renforce et qu'il humecte et
divise modérément les humeurs; le
vin d'un goût sucré convient aussi dans
les maladies aiguës pour favoriser l'expectoration,
quand la péripneumonie et la pleurésie
sont déjà arrivées à maturité.
25. ALIMENTS CAUSANT DES OBSTRUCTIONS.
Le lait qui contient beaucoup de sérum
est tout à fait exempt de danger, même
pour ceux qui en prennent habituellement; mais celui
qui contient peu de sérum et beaucoup de matière
caséeuse n'est pas sans inconvénient pour
ceux qui en prennent beaucoup, car il nuit aux reins,
du moins à ceux qui ont une tendance à
engendrer des calculs; il donne lieu aussi à
des obstructions du foie chez ceux qui ont de la prédisposition
pour cette affection. Les figues sèches ainsi
que les figues vertes sont nuisibles au foie et à
la rate enflammés, non qu'elles possèdent
quelque propriété particulière,
mais parce qu'elles rentrent dans la règle commune
à toutes les substances d'un goût sucré
(car toutes ces substances font du tort à la
rate et au foie) ; mais , quand ces organes sont affectés
d'obstruction ou de squirrhe, ces fruits n'exercent
par eux-mêmes sur eux aucun effet bien marqué,
ni en bien ni en mal, tandis que, si on les mêle
aux médicaments doués de propriétés
incisives et détersives, ils sont d'une utilité
assez appréciable. L'eau miellée ne convient
pas à ceux qui ont les viscères tuméfiés
par le squirrhe, l'oedème ou l'inflammation,
parce que le miel tend, par sa nature, à se convertir
rapidement en humeur bilieuse. La graine de pavot retient
les matières qui doivent être expulsées
de la poitrine. Les dattes grasses et sucrées
causent des obstructions, surtout quand elles sont vertes.
Tous les mets qu'on prépare avec des itria ou
de la farine sémidalique produisent des obstructions,
grossissent la rate et engendrent des calculs dans les
reins; il en est de même pour la farine de froment
prise avec du lait. L'alica ne convient pas à
ceux dont le foie est sujet à s'engorger facilement,
ni à ceux dont les reins ont de la prédisposition
à engendrer des calculs. Le vin d'un goût
sucré cause des obstructions et augmente les
tumeurs des viscères.
26. ALIMENTS PASSANT LENTEMENT.
Tous les mets préparés avec
des itria et de la farine sémidalique passent
lentement. Les fèves torréfiées,
les pains de fine fleur, les lentilles privées
de leur écorce, la cervelle, la moelle épinière,
le foie, le coeur, l'amouille coagulée, les oeufs
durs [passent lentement]; les oeufs cuits [sous la cendre]
passent plus lentement, et les oeufs frits dans la poêle
plus lentement encore. Les lupins, les haricots, les
pois grecs, le sésame, l'érysimon, les
glands, les pommes et les poires avant leur maturité,
les caroubes, le vin d'un goût sucré, et
encore plus le vin noir, âpre et sans goût
sucré, tout vin épais et nouveau [passent
lentement]. L'eau passe aussi très lentement.
27. ALIMENTS SE CORROMPANT FACILEMENT.
Les pêches, les abricots, les abricotins.
Tous les fruits d'été d'un tempérament
humide se corrompent dans l'estomac, à moins
que cet inconvénient ne soit prévenu par
leur descente rapide; c'est pour cette raison qu'il
faut les manger avant les autres mets, car de cette
manière ils descendent eux-mêmes rapidement
et leur frayent le chemin; mais, quand on les mange
en dernier lieu, ils se corrompent eux-mêmes et
donnent en même temps lieu à la corruption
des autres mets.
28. ALIMENTS SE CORROMPANT DIFFICILEMENT.
Les petites cames, les pourpres, les buccins
et tous les autres testacés qui ont la chair
dure; à ceux chez qui les aliments se cor-rompent
sous l'influence de mauvaises humeurs, nous donnons
ces animaux après les avoir fait bouillir deux
ou trois fois dans de l'eau excellente, et les avoir
transvasés dans de l'eau pure lorsque la première
paraît salée. Les homards, les pouparts,
les crabes, les langoustes, les salicoques et tous les
autres animaux semblables ont une chair qui se corrompt
difficilement, comme celle des testacés à
chair dure.
29. ALIMENTS RELÂCHANT LE VENTRE.
La lentille, le chou, et, parmi les animaux
marins, presque tous ceux qu'on appelle testacés,
ont une nature composée de propriétés
opposées, car la partie solide, qui forme le
corps même de ces aliments, passe lentement et
resserre le ventre, tandis que la partie liquide l'excite
aux excrétions; si donc on fait bouillir des
lentilles, du chou ou quelqu'un des animaux marins susdits,
si on assaisonne ensuite le bouillon avec de l'huile,
du garou et du poivre, et qu'on le donne à boire
à un individu quelconque, on verra que le ventre
se relâchera après cette boisson. Le bouillon
des oursins et de tous les coquillages, ainsi que celui
des vieux coqs, relâche aussi le ventre. Si nous
voulons user du chou pour relâcher le ventre,
nous le retirons du vase qui est placé près
de nous et qui contient l'eau dans laquelle il a bouilli,
pour le jeter immédiatement dans de l'huile et
du garou; dans ce cas, il ne faut pas le faire bouillir
beaucoup. Les pains de son relâchent le ventre
parce qu'ils engendrent beaucoup d'excréments
dans cette cavité, et parce que le son est doué
de propriétés détersives. Le bouillon
de fenugrec cuit avec du miel peut, quand on le prend,
faire évacuer toutes les mauvaises humeurs qui
se trouvent dans les intestins; il peut aussi, par sa
vertu détersive, exciter ces organes à
l'excrétion, mais il faut que le miel qu'on y
mêle soit peu abondant, afin qu'il ne cause pas
de pincements. Les olives salées relâchent
le ventre, prises avec du garou avant le repas. De même
que les testacés, les escargots ont un jus qui
relâche le ventre; voilà pourquoi quelques-uns
les assaisonnent avec de l'huile, du garou et du vin,
et se servent du bouillon ainsi préparé
pour relâcher le ventre. Le lait plus ou moins
aqueux relâche davantage le ventre, tandis que
celui qui est plutôt épais produit cet
effet à un moindre degré. Le petit lait
est fortement laxatif, mais il faut y ajouter du miel
de qualité supérieure en quantité
suffisante pour lui donner un goût agréable
mais non pour retourner l'orifice de l'estomac; de même
on y ajoute aussi autant de sel qu'il faut pour ne pas
affecter désagréablement le goût;
si vous voulez que le petit lait relâche plus
fortement, ajoutez-y beaucoup de sel. La chair des animaux
tout à fait jeunes, ainsi que leurs extrémités,
traversent assez facilement les intestins; parmi les
poissons cartilagineux, la torpille et la pastenague
passent également assez vite. II en est de même
pour la mauve. La bette, la patience, l'ortie, le fromage
récemment coagulé pris avec du miel, l'arroche,
la blite, la courge, les pastèques, les melons,
les figues fraîches, les figues sèches,
les raisins sucrés [relâchent le ventre],
surtout s'ils sont humides. Les mûres, si elles
tombent dans un estomac pur et si on les prend en premier
lieu, passent très rapidement et frayent la route
aux autres aliments; mais, quand on les prend en second
lieu après d'autres mets, ou quand elles trouvent
des humeurs mauvaises dans l'estomac, elles se corrompent
très vite de la même manière que
les courges. Les noix, quand elles sont encore aqueuses,
conviennent pour faire aller à la selle; cependant,
quand elles sont déjà sèches et
qu'on les a fait macérer auparavant dans de l'eau,
elles produisent un effet analogue à celui des
noix vertes. Les prunes font aller à la selle;
mais, quand elles sont sèches et qu'on les fait
macérer dans de l'eau miellée très
chargée de miel, elles relâchent fortement
le ventre; elles produisent cet effet quand on les mange
seules, et, à plus forte raison, quand on boit
après de l'eau miellée; il est clair qu'on
favorise le relâchement du ventre, si, après
les avoir mangées [le matin] on boit du vin d'un
goût sucré, et si on attend ensuite quelque
temps sans déjeuner immédiatement après.
Les mûres, les cerises [relâchent le ventre].
Les abricots, les pêches, et toutes les substances
humides et aqueuses, en un mot toutes celles qui ne
montrent aucune qualité bien prononcée
au goût ou à l'odorat, passent facilement,
si le ventre est bien disposé pour les évacuations
alvines; sinon, elles restent suspendues dans l'estomac
et ne provoquent pas les excrétions, parce qu'elles
ne possèdent aucune propriété âcre
ou nitreuse. Cette classe de mets tient en quelque sorte
le milieu entre les aliments qui relâchent le
ventre et ceux qui le resserrent, en inclinant toutefois
un peu vers l'un des deux côtés, du moins
quand ils ne rencontrent pas un estomac tout à
fait paresseux à expulser les aliments, ou bien
un estomac doué d'une très forte puissance
de distribution : c'est pourquoi l'eau miellée
resserre quelquefois le ventre quand elle est distribuée
rapidement; dans ce cas, en effet, non seulement elle
n'excite pas le ventre à l'excrétion,
mais elle précède aussi les aliments,
auxquels elle est unie, dans les voies par lesquelles
s'opère la distribution [de l'aliment]; si, au
contraire, elle n'est pas avant distribuée rapidement
dans le corps, elle excite à l'excrétion,
parce qu'elle a quelque chose d'âcre. Le miel
aussi, quand il est sans mélange et qu'on le
lèche sans l'avoir fait bouillir, relâche
bien le ventre. L'eau miellée, cuite peu ou point
du tout, traverse les intestins avant d'être distribuée
dans le corps. L'oxymel racle l'intestin quand il est
faible. Le vin d'un goût sucré contribue
un peu à faciliter le passage des aliments à
travers le ventre; le vin nouveau fait aller à
la selle.
30. ALIMENTS RESSERRANT LE VENTRE.
Les dattes âpres, les raisins secs âpres,
les mûres, les mourons, les fruits de l'églantier
encore plus, les baies de myrte, les prunes sauvages,
appelées en grec proumna. Les pommes astringentes
resserrent le ventre; les pommes acides, si elles rencontrent
dans le ventre une humeur épaisse, produisent
sur cette humeur un effet incisif, la font descendre,
et humectent par là les excréments; mais,
quand elles trouvent le ventre pur, elles le resserrent
plutôt; les pommes qui ont un goût sucré
sans être âcres se distribuent plus facilement
dans le corps, tandis que celles qui sont en même
temps âcres passent par les selles ; les pommes
aqueuses et sans qualité sont désagréables
au goût et ne produisent aucun effet utile. Admettez
que tout ce que nous venons de dire des pommes se rapporte
également aux grenades et aux poires. Si on fait
bouillir d'abord le lait et qu'on en fasse disparaître
le sérum, il ne relâche pas du tout le
ventre; si on y jette des cailloux rougis au feu en
assez grand nombre pour consumer le sérum, le
lait ainsi préparé resserre, et nous le
donnons à ceux qui éprouvent des pincements
dans le ventre par l'effet des excréments acres;
si on y jette des disques de fer rougis au feu, ils
produisent le même effet, non seulement au même
degré que les cailloux, mais encore à
un degré plus fort: cependant le lait ainsi préparé
se convertit facilement en fromage dans le canal intestinal;
pour cette raison nous y ajoutons du miel et du sel;
il est plus sûr encore d'y verser de l'eau; il
ne faut pas vous étonner qu'après avoir
consumé le sérum nous versions de nouveau
de l'eau dans le lait, car ce n'est pas l'humidité
du sérum que nous redoutons, mais son âcreté,
qui lui donne la propriété de relâcher
le ventre. Les homards, les pouparts, les crabes, les
langoustes, les salicoques et tous les autres crustacés
semblables contiennent, il est vrai, moins d'humeur
salée que les testacés; cependant ils
en contiennent aussi, et, quand ils ont déposé
cette humeur dans l'eau, leur chair, ainsi que celle
des huîtres et des autres testacés, acquiert
la propriété de resserrer le ventre. Les
lentilles et le chou, étant bouillis deux fois
et ayant perdu leur suc, acquièrent la propriété
de resserrer le ventre; et, si nous voulons resserrer
le ventre quand il est relâché, nous rejetterons
la première eau, aussitôt que le chou semblera
cuit, puis nous le mettrons de suite dans de la nouvelle
eau chaude, et après cela nous l'y ferons de
nouveau fortement bouillir, de manière à
lui donner une apparence de gelée ; mais tout
ce qu'on fait bouillir deux fois ne doit être
mis en contact ni avec l'air ni avec l'eau froide, car,
dans ce cas, il ne prend plus une apparence de gelée,
même quand on le fait bouillir très-fortement.
Les lentilles privées de leur écorce perdent
leurs propriétés fortement astringentes
et ne tarissent plus de la même manière
les fluxions qui ont lieu vers les intestins ; si donc,
après les avoir mondées et les avoir fait
bouillir deux fois, on jette la première eau,
si ensuite, après y avoir mêlé un
peu de sel ou de garon, on y ajoute quelque substance
qui resserre le ventre, en assez petite quantité
pour ne pas offenser le goût, on aura préparé
aussi bien un médicament qu'un aliment très
agréable et très utile. L'alpinton bu
avec du vin âpre dessèche le ventre. Le
riz, le grand millet ou méline, le petit millet,
les gâteaux frits dans la poêle, le lièvre,
le vin noir et âpre sans avoir un goût sucré,
le vin blanc et âpre et le vin paillet et âpre
resserrent le ventre.
31. ALIMENTS ÉCHAUFFANTS.
Le froment bouilli et le pain qu'on fait avec
cette céréale, le petit épeautre,
l'avoine, le fenugrec, les baies de genévrier,
les dattes d'un goût sucré, les pommes
qui ont un goût sucré (mais modérément),
le sésame, l'erysimum : c'est la raison pour
laquelle ils ex-citent aussi de la soif. La graine de
chanvre, les raisins d'un goût-sucré [échauffent];
voilà pourquoi ces derniers excitent aussi de
la soif. Les raisins secs d'un goût sucré,
la mauve (mais modérément), le céleri,
le smyrnium, la roquette, [la racine] de radis [échauffent].
[Les tiges] de navet, de radis, de moutarde, de cresson,
de pariétaire d'Espagne sont acres et chaudes.
La carotte, le daucus, le carvi échauffent manifestement.
L'ail, l'oignon, le poireau et le poireau des vignes
sont très acres; mais, quand on les fait bouillir
deux ou trois fois, ils perdent leur âcreté.
Le fromage vieux est chaud, et pour cette raison il
donne de la soif. Le vin d'un goût sucré
est modérément chaud : voilà pourquoi
il excite de la soif; le vin paillet est plus chaud
que le noir; le vin jaune est chaud au suprême
degré; après lui vient le vin paillet,
ensuite le vin rouge, puis le vin d'un goût sucré
, et après eux le vin blanc échauffe moins
que tous les autres; le vin très-vieux est éminemment
chaud.
32. ALIMENTS REFROIDISSANTS.
L'orge, de quelque manière qu'on s'en
serve, le petit millet, le grand millet, les truffes,
la courge bouillie, les pastèques, les melons,
les concombres, les prunes, les sycomores, les raisins
âpres et les raisins acides, les raisins secs
âpres. Les pommes astringentes contiennent une
humeur froide et terreuse, celle des pommes acides est
froide et subtile, tandis que les pommes tout à
fait exemptes de qualité, et pour ainsi dire
aqueuses, inclinent aussi du côté du froid.
Admettez la même chose pour les poires et les
grenades. Il y a encore un assez grand nombre de fruits
des arbres qui refroidissent, principalement ceux qu'on
ne saurait conserver en magasin. Les dattes astringentes
contiennent une humeur froide; la laitue, l'endive (mais
modérément) , le pourpier, la graine de
pavot [refroidissent] ; la dernière fait aussi
dormir, et, si on en prend beaucoup, elle fait même
tomber dans le cataphora; elle est utile à ceux
qui ont des fluxions tenant à la descente d'humeurs
ténues de la tête; la graine blanchâtre
est la meilleure. Les baies de myrte refroidissent et
resserrent à la fois; elles sont, en outre, douées
d'une certaine âcreté. La-morelle produit
un refroidissement astringent efficace. L'eau [refroidit].
Le vin aqueux ne réchauffe pas manifestement;
voilà pourquoi on le donne aussi sans grand danger
aux fébricitants. Pour du vin, le vin blanc et
âpre réchauffe très peu; mais le
vin qui est à le fois blanc, âpre, épais
et nouveau , refroidit d'une manière appréciable.
Il en est de même du vinaigre, mais il est subtil,
et, pour cette raison , il fait plus de tort aux nerfs
que les autres refroidissants, parce qu'il pénètre
dans la profondeur. Les pains lavés et l'amidon
tiennent, pour ainsi dire, le milieu entre les réchauffants
et les refroidissants, ainsi que les raisins vineux.
33. ALIMENTS DESSÉCHANTS.
La lentille et le chou dessèchent de
la même manière, et, pour cette raison,
elles obscurcissent la vue, à moins que tout
l'oeil ne soit par hasard plus humide que de coutume.
La tige du chou dessèche moins que ce légume
lui-même, tandis que, pour les autres herbes potagères,
la tige est plus sèche ; le contraire a lieu
pour le radis, le navet, la moutarde, le cresson, la
pariétaire d'Espagne et toutes les plantes âcres
dont la tige est plutôt humide. L'alphiton dessèche,
ainsi que la graine de gattilier. L'ers bouilli deux
fois et adouci à plusieurs reprises au moyen
de l'eau devient un aliment desséchant; l'ers
blanc est le meilleur. Tous les mets qu'on mange rôtis
ou frits dans la poêle donnent une nourriture
plutôt sèche, tandis que la nourriture
fournie par les mets qu'on fait bouillir avant de les
manger est plutôt humide ; celle enfin qu'on doit
aux mets préparés dans les plats tient
le milieu entre les deux espèces susdites; parmi
ces derniers ceux qui contiennent beaucoup de vin et
de garou sont plus desséchants que ceux qui n'en
contiennent pas; ceux qui sont moins abondamment pourvus
de ces deux ingrédients, ou qui contiennent une
assez grande quantité de vin nouveau, cuit, ainsi
que ceux qu'on fait bouillir dans la sauce simple, sans
apprêt et blanche, sont ordinairement plus humides
que ceux dont nous venons de parler; ceux qu'on fait
bouillir avec de l'eau seulement le sont
Page 254 encore
plus que les derniers. Une très grande différence
dans la préparation des mets se remarque encore
d'après les propriétés des graines
et des plantes potagères qu'on y ajoute; elles
sont, il est vrai, toutes desséchantes, mais
les unes plus, les autres moins.
34. ALIMENTS HUMECTANTS.
L'orge mondée, la courge bouillie,
les pastèques, les melons, les concombres, la
noix verte, les prunes, les sycomores. Quand les mûres
ne se corrompent pas, elles humectent toujours, mais
elles ne refroidissent pas dans tous les cas, à
moins qu'on ne les prenne froides. La laitue humecte,
l'endive à un moindre degré qu'elle. Le
pourpier, la mauve [humectent] ; la blite et l'arroche
sont les plus aqueuses des herbes potagères.
Il existe encore un assez grand
Page 255
nombre de fruits humides provenant d'autres
arbres, surtout ceux qu'on ne saurait conserver en magasin,
La graine de laitue ainsi que celle de pavot humectent
également. Les fèves vertes, les pois
chiches verts [humectent]. L'eau humecte et refroidit
; chauffée elle humecte et réchauffe.
Fin du livre 3
Entête du livre 3
Entête
du livre 2
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1 : livre 4 bas
du livre
Page 256
1. DE LA PRÉPARATION DES ALIMENTS.
[Tiré de Galien.]
1. En mondant
comme il faut le grand épeautre de qualité
supérieure, on obtient le mets appelé
tragos. 2. On fait du pain avec cette graine et avec
le petit épeautre, ainsi qu'avec l'orge, après
les avoir aussi mondés; car ils ont une pellicule
à l'extérieur. 3. Si, après avoir moulu le froment,
on sépare avec un tamis la partie la plus fine
de la farine et qu'on fasse du pain avec le reste, on
aura les pains appelés pains de son, tandis que
les pains silignites et sémidalites se font avec
la partie la plus pure de la farine. 4. Les pains de farine
pure exigent une plus grande quantité de levure
et une manipulation plus forte; ils ne doivent pas être
cuits immédiatement après l'addition du
ferment et après la manipulation; pour les pains
de son, au contraire, il suffit d'une petite quantité
de levure, d'une manipulation
Page 257
faible et d'un court espace de temps [entre
la manipulation et la cuisson]. 5. De même
les pains de farine pure ont besoin d'une cuisson plus
prolongée, tandis que les pains de son exigent
une cuisson plus courte. 6. Entre les pains les plus purs et les pains
les plus impurs, il y a une distance assez considérable
occupée par les degrés intermédiaires
; toutefois, il existe une espèce qui tient exactement
le milieu entre les deux : c'est le pain appelé
autopyre ou pain de ménage, fabriqué avec
de la farine non tamisée, c'est-à-dire
avec celle dont on n'a pas séparé la fleur
du son. 7. L'alphiton le meilleur se fait avec de l'orge
nouvelle modérément torréfiée;
mais, à défaut d'orge semblable, on le
fait aussi quelquefois avec les autres orges. 8. Tout
alphiton bien préparé a une bonne odeur,
mais
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le plus odoriférant est celui qu'on
fait avec de l'orge nouvelle de qualité supérieure,
dont l'épi n'est pas tout à fait sec.
9.
Beaucoup de gens bien portants sont dans l'habitude
de jeter de l'alphiton dans du vin nouveau cuit, dans
du vin d'un goût sucré ou dans du vin miellé,
quelquefois aussi dans de l'eau, et de boire ce mélange
en été deux ou trois heures avant le bain;
ils prétendent reconnaître que cette boisson
prévient la soif. 10. On fait aussi la maza avec de l'alphiton
qu'on a délayé dans de l'eau. 11. L'alica
appartient au genre du froment. 12. Il faut prendre
des précautions pour les bouillies qu'on prépare
avec [ce qu'on appelle] l'alica lavé; cet alica
lavé est simplement une gelée obtenue
en délayant l'alica dans de l'eau ; comme cette
gelée a besoin d'une cuisson très prolongée,
ceux qui la préparent sont facilement induits
en erreur, en croyant qu'elle est suffisamment cuite,
et [s'il n'est pas assez cuit] l'alita lavé fait
un
Page 259
tort assez grand aux malades, parce qu'il
se caillebote et s'épaissit en peu de temps,
attendu qu'il est glutineux. 13. Il faut donc faire bouillir longtemps l'alica
sur des charbons, en le mêlant avec une grande
quantité d'eau, et en le remuant avec de l'aneth
jusqu'à ce qu'il soit cuit; c'est seulement alors
qu'il faut y ajouter du sel; vous ne gâterez rien,
lors même que vous ajoutez l'huile de suite. 14. Quand
les pincements vifs à l'estomac, ou le passage
de matières bilieuses, nécessitent parfois,
pour les gens en santé, l'usage de bouillies,
il faut leur donner à manger de l'alita, qu'on
aura fait bouillir pendant très longtemps jusqu'à
ce qu'il se prenne en gelée, et qu'on aura battu
ensuite de manière à le rendre semblable
à la crème de ptisane passée. 15. Il faut
se servir de la même préparation pour l'alica
lavé. 16. La ptisane sera convenablement préparée,
si elle se gonfle considérablement pendant qu'on
la fait bouillir, et si ensuite elle
Page 260
se prend en gelée par l'action prolongée
d'un feu doux. 17. On y mêle du vinaigre au moment où
elle a atteint son plus haut degré de gonflement.
18.
Quand elle est complètement cuite, il faut y
ajouter du sel fin peu de temps avant de la manger;
l'huile, au contraire, peut y être ajoutée
de suite, sans que par là on nuise à la
cuisson; mais il ne faut pas y ajouter autre chose,
si ce n'est un peu de poireau et d'aneth; ces substances
doivent y être mises aussi dès le commencement.
19.
On doit d'abord faire macérer l'orge crue dans
de l'eau pendant un court espace de temps, ensuite on
la jette dans un mortier et on la frotte avec les mains pourvues de quelque chose
de raboteux comme le spart, qui sert à tisser
des chaussures pour les bêtes de somme. 20. On cessera
de frotter
dès qu'on aura détaché la pellicule
de l'orge; si toutes les pellicules n'ont pas été
enlevées, la ptisane acquiert par la coction
des propriétés plus ou moins déter-
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sives, mais elle n'acquiert aucune autre qualité
nuisible. 21. La manière la plus mauvaise de préparer
la ptisane est la suivante : les cuisiniers triturent
l'orge crue dans un mortier avec de l'eau, et, après
l'avoir fait bouillir pendant quelque temps, ils y ajoutent
ensuite la boisson appelée hepsema ou siraeum
(c'est-à-dire vin nouveau cuit); quelquefois
aussi ils y mêlent en même temps du miel
et du cumin; de cette façon ils font plutôt
un cyceon que de la ptisane. 22. Le mets appelé phacoptisane est un
excellent aliment, si on mêle les lentilles et
l'orge mondée, non à parties égaies,
mais en mettant moins d'orge mondée [que de lentilles],
parce que l'orge se convertit en gelée et se
gonfle considérablement, tandis que les lentilles
se gonflent peu quand on les fait bouillir. 23. L'assaisonnement
est le même pour ce mets que pour la ptisane,
à cette exception près
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que, si on y ajoute de la thymbre ou du pouliot,
il devient plus agréable et en même temps
plus facile à digérer, tandis que la ptisane
ne se prête pas à cet assaisonnement, mais
n'admet que l'aneth et le poireau. 24. La plus mauvaise
manière de préparer les lentilles, c'est
de les faire bouillir avec du vin nouveau cuit, comme
le font les cuisiniers pour les gens du peuple. 25. Si on
veut faire bouillir du porc avec ces mets, on constatera
que la viande fraîche et surtout les pieds vont
bien avec l'orge mondée, et le porc salé
avec les lentilles; de même, la viande qui tient
le milieu entre ces deux espèces, c'est-à-dire
la viande récemment salée, va bien avec
la phacoptisane, tant sous le rapport du goût
que sous celui de la facilité de la digestion.
26.
C'est aussi un bon aliment que la bouillie de lentilles
et de bette; il faut y mettre beaucoup de bette et une
quantité un peu considérable de sel ou
de garon doux ; car, ainsi
Page 263
préparé, ce mets relâche
mieux le ventre. 27. La courge aime naturellement à être
assaisonnée avec de l'origan, à cause
des propriétés aqueuses dont elle est
douée par nature; car toutes les substances semblables
ont besoin d'être mélangées à
des ingrédients d'un goût âcre, acide,
âpre ou salé, si on veut qu'elles ne soient
pas désagréables à prendre et qu'elles
ne causent pas du dégoût à ceux
qui les mangent. 28. C'est un mets très appétissant
que la courge préparée dans le plat avec
du poisson salé, surtout si ce poisson est une
des salaisons du Pont qu'on appelle ombrines. 29. Il faut
faire bouillir fortement les navets; ceux qu'on a fait
bouillir deux fois sont les meilleurs. 30. On mange aussi
la racine de gouet de la même manière que
le navet. 31. Dans certains pays, cette racine est plus
âcre
Page 264
[que dans d'autres] ; à Cyrène
et dans mon pays, cette plante se comporte d'une manière
opposée, car, à Cyrène, le gouet
est très peu âcre et n'a presque pas le
goût de drogues, de sorte qu'il est même
préférable aux navets. 32. On donne également
à manger la racine de serpentaire en la faisant
bouillir deux ou trois fois, et la racine d'asphodèle,
en la préparant comme les lupins. 33. Quand
nous faisons bouillir deux fois de semblables substances,
il convient, lorsqu'elles semblent avoir atteint un
degré modéré de cuisson, de jeter
la première eau et de les transvaser immédiatement
dans de l'eau chaude ; il faut ensuite les faire bouillir
fortement une seconde fois dans cette dernière
eau, de façon à ce qu'elles forment une
gelée; car la substance qu'on fait bouillir deux
fois ne doit toucher ni à l'air ni à l'eau
froide, parce que, clans ce cas, elle ne forme plus
une gelée parfaite, lors même qu'on la
ferait bouillir pendant très longtemps. 34. Quand
on a fait bouillir deux fois les escargots et qu'on
les a assaisonnés, il faut les faire bouillir
une troisième fois jusqu'à ce qu'ils soient
devenus gélatineux, car, de cette façon,
ils deviendront nourrissants; mais, pour relâcher
le ventre, on se sert du bouillon obtenu en les assaisonnant
immédiatement avec de l'huile, du garon et un
peu de vin. 35. Les substances propres à être
salées sont celles dont la chair est à
la fois dure et imprégnée d'humeurs excrémentitielles;
car celles dont la structure solide est ou extrêmement
molle ou extrêmement sèche et dépourvue
d'humeurs excrémentitielles ne se prêtent
pas à cette opération. 36. Si donc on saupoudre
de sel des animaux secs, ils cessent d'être mangeables
parce qu'ils se racornissent : tel est par exemple le
lièvre; mais la chair des cochons gras et d'un
âge moyen est propre à être salée,
parce qu'elle est à l'abri de ces deux inconvénients
: à savoir, la sécheresse des individus
âgés et l'humidité exagérée
des jeunes pores ; car, tandis que les substances sèches
deviennent semblables à du cuir quand elles sont
salées, les substances démesurément
humides, au contraire, deviennent diffluentes et se
fondent quand elles sont en contact avec le sel. 37. Pour
cette raison donc, tous les poissons qui ont la chair
molle et dépourvue d'humeur excrémentitielle
ne se prêtent pas non plus à cette opération
; tels sont, par exemple, ceux qu'on appelle poissons
de roche et les motelles de la haute mer; mais les bolty,
les ombrines et les petits thons peuvent être
salés, ainsi que les thons de l'Océan,
les sardines et les poissons appelés Sexitanes.
38.
De même les animaux marins de grandeur démesurée
s'améliorent par la salaison, parce que leur
chair est imprégnée d'humeurs excrémentitielles,
tandis que les rougets ne sont pas propres à
être salés, attendu qu'ils ont la chair
sèche et dépourvue d'humeurs excrémentitielles.
39.
Il ressort évidemment de ce que nous venons de
dire que toutes les substances dures, nerveuses et,
pour ainsi dire, coriaces, deviennent difficiles à
digérer quand elles sont salées, tandis
que celles qui ont la disposition contraire prennent
elles-mêmes des particules ténues et atténuent
les humeurs épaisses et glutineuses. 40. Les
meilleures salaisons, d'après mon expérience
personnelle, sont celles de Cadix, qu'on appelle actuellement
sarcles, et les ombrines qu'on apporte du Pont; les
bolty, le petit thon et les salaisons appelées
Sexitanes occupent après elles le second rang.
41.
Toute cervelle s'améliore sous tous les rapports
quand on la prépare avec des ingrédients
incisifs et réchauffants. 42. Il faut préparer
la sauce blanche simple avec de l'eau seule, de l'huile,
de l'aneth et un peu de poireau, en y ajoutant, après
qu'elle a suffisamment bouilli, une quantité
modérée de sel. 43. Le bouillon de la plupart des substances,
ou même de toutes, se sale toujours d'autant plus
qu'on le fait bouillir plus longtemps ; plus tard il
devient même amer, mais la substance solide qu'on
fait bouillir dans l'eau y dépose les qualités
qu'elle avait auparavant et acquiert à la longue
la saveur qu'on appelle sans qualité et aqueuse,
sans contracter aucun goût salé, amer ou
astringent. 44. Si donc on s'avise de faire bouillir deux
ou trois fois les substances amères, elles perdront
entièrement dans l'eau leur amertume et appartiendront
aux substances sans qualité ; de même les
substances âcres perdront leur âcreté,
si on les fait bouillir de cette manière; la
même chose peut se dire également des substances
astringentes. 45. L'eau même, quand on la fait bouillir
toute seule pendant longtemps, devient plus salée
qu'elle ne l'était auparavant.
2. DE LA PRÉPARATION DES ALIMENTS.
(Tiré de Rufus.)
[Ce chapitre se trouve dans le traité
Du régime, dans le premier livre, vers la fin.]
1. Tous
les mets que nous mangeons rôtis dessèchent;
tous ceux que nous mangeons bouillis humectent, même
quand par nature ils ne produiraient pas cet effet.
2.
Les mets diffèrent aussi sous le rapport des
assaisonnements qu'on y mêle, comme le coriandre,
l'aneth, le cumin, les poireaux et tous les autres ingrédients
qui servent encore de condiment à la viande.
3.
Les assaisonnements doivent se révéler
très peu au goût; car les mets trop relevés
font sentir à l'estomac l'excès d'assaisonnement.
4.
La meilleure manière d'assaisonner la viande
est de le faire dès le commencement; celle à
laquelle on a ajouté plus tard quelque chose
est moins bonne, car, dans ce cas, la cuisson est inégale;
cette addition conviendra [seulement] aux viandes fortes;
c'est aux mêmes viandes qu'il importe d'ajouter
aussi une grande quantité de sel pour consumer
la graisse, car le gras s'imbibe de sel; [puis] il faut
employer un feu très fort; si, au contraire,
on veut rôtir les viandes maigres ou contenant
peu de sang, on se servira d'un feu plus doux. 5. Les viandes
de chèvre ou de brebis qu'on fait bouillir doivent
toutes être cuites après le solstice d'été,
car, à cette époque, elles ont une odeur
plus mauvaise que pendant le reste de l'année;
cela est bien plus prononcé pour les béliers
et pour les boucs; et même leur chair rôtie
aura une odeur plus ou moins désagréable.
6.
Quand on fait cuire ces viandes, on doit ôter
le couvercle, les faire bouillir dans une grande masse
d'eau et les transformer par les assaisonnements; tous
les os revêtus de viande ayant une mauvaise odeur
doivent aussi être cassés et écrasés;
car la moelle est la partie qui se pourrit la première;
or, si elle n'est pas pourrie, elle est très
grasse et très agréable. 7. Il faut distinguer
les viandes qui doivent être bouillies fraîchement
tuées de celles qui doivent l'être après
avoir été conservées : d'abord
toutes les viandes des animaux sauvages doivent être
bouillies après avoir été conservées;
parmi les animaux domestiques, le porc, le mouton et
la chèvre exigent une cuisson immédiate;
mais le boeuf doit être bouilli plus tard; parmi
les oiseaux, il faut cuire après quelque temps
les grandes espèces, les oiseaux de marais, les
coqs, le ramier, la perdrix, le paon et le coq de bruyère;
mais la tourterelle, le pigeon et la grive doivent être
cuits de suite; tous les poissons doivent être
bouillis quand ils palpitent encore, car ils ne supportent
pas qu'on les conserve. 8. Toutes les viandes qu'il convient de laisser
vieillir et de faire bouillir ensuite sont rendues plus
cassantes à l'aide du vinaigre. 9. Quant aux poules,
il faut les fatiguer en les pourchassant, et de plus
verser dessus du vinaigre [quand on les a tuées];
cependant il peut suffire aussi de les pourchasser;
car, même si vous faites bouillir immédiatement
après la chasse un animal sauvage quelconque,
il n'y aura pas de grand motif de blâme; cependant
n'approuvez pas outre mesure cette façon d'agir.
10.
On doit admettre que les grêlons (ladrerie), qu'on
trouve dans les chairs, et qui se forment chez les porcs,
rendent, s'ils sont en petit nombre, la viande plus
agréable, mais que, s'ils sont plus nombreux,
ils la rendent plutôt humide et désagréable.
11.
Il faut donc tâcher d'éviter de se servir
de viandes pareilles; si on est obligé parfois
de les employer, il faut y ajouter un peu de cire,
ou, lorsqu'on les fait rôtir, graisser la broche
de cire. 12. On reconnaîtra chez l'animal vivant
s'il y a des grêlons, en inspectant le voisinage
de la langue; car c'est là que se révèle
la maladie, ainsi qu'aux pieds de derrière, parce
qu'ils sont toujours en mouvement. 13. Ceux qui veulent
accélérer la cuisson ajoutent les uns
du natron, d'autres du suc de silphium, d'autres de
la cire, d'autres du suc de figues et surtout celui
des figues sauvages; de cette manière on accélère
aussi la cuisson des viandes qu'on fait rôtir.
14.
Les sauces comme le myttoton, celle à la menthe
ou au céleri, et celles qu'on prépare
avec du fromage et du vinaigre, ont toutes pour but
principal de faciliter la digestion; mais le myttoton
relâche à cause de l'ail. 15. Les viandes qui
conviennent aux vieillards sont celles qu'on bat avant
l'ébullition et qu'on fait macérer doucement
dans de l'eau contenant du sel et du thym ou de l'origan
de bouc. 16. Il ne faut pas laisser vieillir les poissons
avant de les cuire, à l'exception des poissons
très durs; il ne faut pas non plus les battre,
si ce n'est les mollusques, mais on doit d'abord les
macérer tous, comme on le fait pour la viande,
dans de l'eau contenant du sel et du thym; quant à
la viande des quadrupèdes, après l'avoir
ainsi fait bouillir, on la soumettra [de nouveau] à
une forte ébullition afin qu'elle s'assimile
rapidement; mais les poissons, on ne doit ni les soumettre
à une ébullition préalable, ni
les griller, mais seulement les couvrir de feu, car,
de cette façon, leur peau se détache complètement,
et ce qu'ils ont de glutineux est absorbé. 17. Il convient
de faire bouillir aussi simplement que possible ceux;
qu'on ne peut griller. 18. On traite de la même manière
les oiseaux et la viande, quand on a affaire à
quelqu'un qui aime les choses bouillies. 19. Si,
après avoir fait bouillir fortement les huîtres,
on les grille et on les mange ensuite avec un peu de
moutarde et de poivre, on les trouvera non moins dignes
de louange, même pour les malades, que les testicules
de coq bons à manger. 20. Le coing ne se corrompt pas du tout, et
on le prend avec du miel cuit et un peu de vin, après
avoir ôté l'écorce; ou bien on ôte
les graines, on verse dedans du miel, on enduit complètement
le fruit de pâte de farine et on le met dans de
la braise jusqu'à ce que la pâte soit brûlée;
alors on ôte la pâte, le fruit est entièrement
cuit et il a absorbé tout le miel.
3. DE LA PRÉPARATION DES ALIMENTS.
(Tiré de Dioclès.)
1. Comme
la plupart des mets ont besoin de quelque préparation,
et s'améliorent, les uns par ce que nous y ajoutons,
d'autres par ce que nous leur enlevons, ceux-ci enfin,
parce que nous changeons certaines choses d'une façon
ou d'une autre, il convient peut-être de dire
quelques mots sur ce sujet. 2. Ce n'est pas la partie la moins importante
de ces opérations, tant sous le rapport de la
santé que sous celui de l'agrément, que
le nettoyage des mets quand ils sont encore crus; il
faut, avant tout, s'occuper d'abord de ce soin, en retranchant
ce qui est inutile et en purifiant les substances qui
ont certaines qualités désagréables.
3.
On purifie toute chose, soit en la faisant bouillir,
soit en la macérant, soit en la lavant à
plusieurs reprises ; on fera donc bouillir ce qui a
quelque amertume ou âpreté dans de l'eau,
et dans du vinaigre coupé les substances qui
ont une âcreté mordante; on enlèvera
le goût salé par la macération,
et on lavera les substances qui ont certaines impuretés.
4.
Le feu et aussi les assaisonnements qui conviennent
à chaque mets enlèvent surtout les mauvaises
odeurs et les mauvaises qualités des sucs des
aliments qu'on fait bouillir ou rôtir, et corrigent
le défaut de suc. 5. Dans ce but il faut jeter sur tous de la
rue, du cumin, de la coriandre, ainsi que les autres
assaisonnements verts, mais aucune substance pulvérisée;
dans les mets qui réclameraient quelque chose
de semblable on mettra le suc des ingrédients
écrasés; il y a encore l'origan, le thymbre,
le thym, le sel, le vinaigre, l'huile, qui tous ont
leurs propriétés spéciales. 6. Le fromage,
de quelque espèce qu'il soit, est moins bon que
les ingrédients susdits; celui qui entraîne
le moins d'inconvénients est le fromage de chèvre
fait avec de la présure, quand il est de bonne
odeur, qu'il n'est pas vieux et qu'on en prend peu,
surtout s'il est grillé. 7. S'il est quelquefois
nécessaire d'y mettre du silphium, il faut prendre
celui qui est très blanc, très odoriférant
et très amer; car c'est dans les odeurs que consistent
l'agrément et les propriétés des
assaisonnements. 8. L'épaisseur qu'on obtient par une
grande quantité de fromage, par le sésame,
le silphium, et par la multitude des ingrédients
pulvérisés, n'ajoute rien à l'agrément,
mais elle rebute souvent. 9. Il convient de faire bouillir les mets secondaires,
qui n'ont pas besoin d'une grande amélioration
ou qui n'en exigent pas du tout, dans de l'eau simple,
pour ainsi dire, et ceux qui ont une mauvaise odeur,
qui sont humides ou peu succulents, dans de l'eau vinaigrée.
10.
Il est également bon de faire bouillir dans de
l'eau et du vinaigre les mets aqueux et fades, et dans
du vinaigre doux ceux qui contiennent plutôt des
sucs mauvais ou qui sont un peu âpres. 11. Le point
le plus important est de préparer et de mêler
les ingrédients de la manière qui convient
aux saveurs et aux odeurs de chaque mets sans y mettre
rien de pulvérisé; on atteindra le mieux
ce but en tâchant de faire en sorte que le mélange
ne soit imprégné d'aucune odeur ou d'aucune
saveur, et qu'il ne se manifeste qu'une seule odeur
et qu'une seule saveur, celles, bien entendu, qui conviennent
à chacun des mets qu'on prépare. 12. On fera
bouillir tous les mets sur des charbons d'une manière
égale; lorsqu'ils seront cuits, on les ôtera
du vase, quand les liquides sont encore en ébullition,
et on ne les laissera pas tremper dans le bouillon pendant
qu'il se refroidit, excepté les mets qu'on mange
avec le bouillon. 13. Il faut rôtir tous les mets sur un
feu doux et égal, et chercher à enlever
plutôt les sucs aux substances qui en ont de mauvais,
tandis qu'il faut plutôt rendre succulents ceux
qui contiennent de bons sucs.
4. DU CHOU.
(Tiré de Mnésithée de
Cyzique.)
1. Il faut
hacher le chou avec un fer aussi tranchant que possible,
ensuite le laver et laisser écouler l'eau; on
hachera en même temps avec lui de la coriandre
et de la rue en quantité suffisante; puis on
l'arrosera d'oxymel et on y ajoutera au moins une petite
quantité de silphium râpé. 2. Si vous
voulez prendre une jatte de ce chou, [faites-le, et]
il ne se formera rien de mauvais dans votre corps; et
même si préalablement il existait déjà
quelque chose de mauvais, le chou le poussera dehors;
si un obscurcissement survient aux yeux, il le dissipe;
les étouffements, et de plus les accidents malencontreux
qui pourraient exister clans la région du diaphragme
et des hypocondres, ainsi que les affections de la rate,
le chou les enlève également; quand cet
organe est d'un volume exagéré, il l'affaisse;
et, lorsqu'on mange le chou cru, il est d'un effet admirable
chez les gens atrabilaires, car il purge les veines.
3.
Contre la goutte, il n'y a rien qui soit comparable
au chou ainsi préparé et donné
de grand matin à jeun. 4. Contre la dysenterie il faut prendre du
chou, le faire bien macérer clans une grande
quantité d'eau, le mettre ensuite dans de l'eau
chaude et le faire bouillir, jusqu'à ce qu'il
forme une gelée; après avoir décanté
toute l'eau, on verse de l'huile dessus, puis on fait
bouillir fortement le tout ensemble; ensuite on met
le tout dans un pot et on y ajoute, en l'émiettant,
une préparation farineuse, ou bien on mange seul
le chou, et on le donne froid. 5. On ne fera pas
cela seulement une seule fois, mais chaque jour de grand
matin pendant plusieurs jours de suite; cependant il
ne faut pas en prendre beaucoup, afin que cela ne devienne
pas fâcheux.
5. DE LA PRÉPARATION DU PAIN
(Tiré de Dieuchès.)
1. Il faut
faire le pain avec l'espèce de froment à
farine légère; elle doit être aussi
peu glutineuse que possible, et très légèrement
fermentée avec de la levure douce, de façon
que la pâte soit très solide ; on la triturera
pendant longtemps. 2. La cuisson opérée dans un
four chauffé par le bas me semble mieux assurée
que celle opérée dans un four chauffé
de tous les côtés, et celle dans la tourtière
l'est encore plus, car elle est douce et prolongée,
et le pain n'est guère exposé à
être brûlé par le feu, pendant qu'on
le cuit, parce que l'action du feu est au dehors. 3. Le pain
cuit dans le four chauffé de tous côtés
est plus sec et plus agréable à manger
que celui qu'on cuit dans le four chauffé par
le bas, mais ce mode de cuisson n'est pas sûr,
parce qu'il peut arriver que la partie extérieure
étant vite brûlée, l'intérieure
reste crue. 4. Le pain cuit sous la cendre est le plus
sec de tous les pains, mais ce mode de cuisson a encore
plus d'inconvénients que le four chauffé
de tous côtés; il faut qu'on ait beaucoup
de charbons ardents, et que sur ces charbons il y ait
une quantité considérable de cendres.
5.
La meilleure pâte est celle qu'on fait avec l'espèce
légère de farine et non avec de la sémidale;
il convient qu'elle soit suffisamment triturée
et qu'elle soit plus molle que celle dont on fait le
pain cuit dans le four chauffé de tous côtés;
ensuite on mettra la pâte sur la cendre placée
sur le feu, on la couvrira d'une nouvelle quantité
de cendres, puis on jettera dessus autant de charbons
ardents que possible, et, pendant qu'on cuit le pain
on fera principalement agir le feu en dessus. 6. Ce pain
est le plus sec de tous; il peut être très
utile, quand le ventre est relâché, que
la digestion languit, ou qu'il y a beaucoup de pituite
dans les intestins.
6. DE L'ALPHITON.
(Tiré de Dieuchès.)
1. On peut
employer l'alphiton en boisson ou en bouillie, soit
en le jetant, lorsqu'il est aussi fortement torréfié
que possible, dans du bouillon de poulet en ébullition
(dans ce cas on ne remue pas, mais on le laisse se prendre
en gelée et on le fait arriver doucement à
une température tiède sur le feu ou sur
l'eau chaude, de façon que sa cuisson soit complète),
soit dans du bouillon d'agneau ou de jeune bouc et qui
n'est pas tout à fait exempt de graisse, soit
dans du bouillon de cochon de lait; enfin on fait bouillir
l'alphiton pour les individus affectés de dysenterie.
2.
On peut, dans ce cas, se contenter d'ajouter à
un quart de choée du meilleur alphiton à
très gros grains deux cotyles de lait, le tiers
d'eau et trois oboles de têtes de pavot légèrement
torréfiées; il faut les mêler aux
ingrédients triturés, faire bouillir le
tout ensemble et l'administrer après qu'il a
acquis la consistance d'une bouillie; il donne du repos
aux malades en leur procurant une suspension des selles
et du sommeil. 3. On ne doit pas se servir souvent de cette
préparation, mais seulement trois ou quatre fois,
car elle produit une certaine faiblesse, et les urines
deviennent rares chez ceux qui en prennent beaucoup;
il faut en user surtout chez les gens forts. 4. On fait
aussi de l'alphiton avec l'avoine; on la torréfie
tout entière avec l'enveloppe; on la monde, on
la triture et on l'écrase, comme on le fait pour
l'alphiton d'orge; l'alphiton d'avoine est meilleur
et un peu plus exempt de flatuosités que l'alphiton
d'orge.
7. DE LA PRÉPARATION DES ALIMENTS.
(Tiré de Dieuchès.)
1. Pour
les gens très faibles et qui ne peuvent pas encore
supporter des aliments plus épais que l'eau,
le mieux est de faire macérer ou bouillir ou
de triturer les aliments dans la boisson qu'on leur
destine; car de ce mode d'administration il résulte
qu'une partie de tous les aliments atténuée
et réduite en vapeur se distribue dans le corps,
qu'il ne reste de matière excrémentitielle
ni dans le ventre inférieur, ni dans le supérieur,
enfin que, pendant tout le cours de la journée,
la boisson et l'aliment se distribuent simultanément
dans le corps. 2. Cette manière de donner de la nourriture
conviendra surtout aux gens chez qui le ventre est resserré
et n'est point dérangé ; car ils ont besoin
d'une nourriture à la fois pesante et ténue.
3.
On peut donc faire macérer l'alphiton desséché
et le mets appelé éricides; mais le pain
mis en morceaux aussi chaud que possible et macéré
est la préparation qui a la plus grande efficacité;
on pourra également faire macérer de la
même manière du froment torréfié
et écrasé. 4. Cependant les boissons [alimentaires] obtenues
par la décoction sont encore meilleures et nourrissent
encore plus. 5. Pour ceux donc qui ont la fièvre
et chez qui les crises ne se font pas facilement, il
ne faut pas monder l'orge, mais la faire bouillir dans
de l'eau après l'avoir lavée; on élèvera
d'abord l'eau à une température tiède,
puis on jettera cette première eau pour verser
dessus une nouvelle quantité, dans laquelle on
fait bouillir l'orge ; la décoction sera bonne,
si on verse dix cotyles d'eau sur une mine d'orge on
fait bouillir jusqu'à ce que l'orge crève
; ensuite on décante la partie la plus ténue
de l'eau et on la donne soit seule, soit mêlée
à du miel. 6. Cette boisson facilite les déjections
alvines, pousse aux urines et nourrit fortement. 7. On donne
encore l'orge changée par la torréfaction
en alphiton, appelée aussi cachrys; avant de
moudre cette orge torréfiée, on ôtera
avec légèreté la glume brûlée,
qui y est restée attachée, et on fera
bouillir l'orge après l'avoir fait macérer.
8.
Cette boisson resserre le ventre plus que celle dont
nous avons parlé en premier lieu; on doit la
faire bouillir dans de l'eau ainsi que l'orge crue.
9.
On peut aussi faire bouillir dans de l'eau ce qu'on
appelle éricides, en s'abstenant de remuer, afin
que la décoction soit aussi claire que possible.
10.
On pourra aussi faire bouillir du pain fermenté
sec ou frais, du froment cru ou torréfié,
du petit millet et presque tous les aliments qu'on supposera
convenir au malade, soit dans la boisson qu'on lui donne,
soit dans le bouillon d'agneau et dans plusieurs autres
bouillons. 11. Les boissons alimentaires obtenues par la
trituration sont plus épaisses et plus actives
que celles qu'on obtient par la macération ou
la décoction; on peut triturer aussi dans la
boisson du malade presque tous les aliments dont nous
venons de parler. 12. Il y a, en outre, plusieurs fruits d'arbre
et plusieurs graines farineuses, dont on peut se servir,
chez certains malades, à titre de nourriture
ou pour ranimer les forces, en les pilant, les triturant,
et les passant pour les mêler à la boisson
qu'on doit administrer. 13. Il faut triturer les pains, soit secs, soit
frais, et les popana, en les délayant dans de
l'eau après les avoir fait macérer; on
doit ensuite les passer à travers un linge. 14. Afin
que la blancheur du pain ne se trahisse pas, on peut
mêler à cette préparation des graines
de concombre torréfiées, des amandes,
des pignons ou des sorbes; on ajoute à chacun
de ces ingrédients, ou à plusieurs, ou
à tous à la fois, de la graine d'aneth
ou de fenouil ; on donne le tout dans de l'eau miellée
aux fébricitants, dans de l'eau miellée
et dans du vin à ceux qui ne le sont pas. 15. Le petit
millet et le grand millet triturés conviendront,
surtout quand ils sont torréfiés et mondés,
à ceux dont le ventre est surchargé de
bile et qui ont des déjections nombreuses et
ténues. 16. On triture et on délaye en même
temps dans de l'eau une quantité qui ne soit
pas moindre d'un oxybaphe dans dix oxybaphes d'eau pour
chaque malade; on passe à travers un linge serré
et on ajoute à un cotyle d'eau une quantité
moyenne de vin âpre pour le donner à jeun.
17.
Il conviendra de triturer avec le petit millet des châtaignes
en petit nombre avec leur écorce intérieure;
en passant les châtaignes à travers un
tamis conjointement avec le petit millet, on obtiendra
une bouillie pour les fébricitants. 18. La plus
faible de toutes les bouillies qu'on puisse donner est
celle qu'on fait avec l'orge torréfiée;
on prend un demi-chénice d'orge pour six cotyles
d'eau; quand la bouillie est complètement cuite,
il convient de la remuer comme on fait pour l'orge mondée
et de la passer. 19. Ainsi préparée, cette bouillie
fait moins aller à la selle que celle d'orge
mondée, et elle est plus claire. 20. Le bormos,
que quelques uns appellent bramas (avoine), est, de
toutes les graines farineuses, la plus facile à
digérer; la bouillie qu'on en fait est la meilleure;
elle est plus forte que celle d'orge torréfiée,
et plus faible, mais plus agréable que celle
d'orge mondée ; on la fait bouillir de la même
manière que l'orge mondée, dans la proportion
d'un cotyle d'avoine pour dix cotyles d'eau. 21. On prépare
la bouillie de lentilles après avoir ôté
leur écorce sans les torréfier ; dans
ce but, on mêle aux lentilles une quantité
double de cendre très fine de bois de sapin,
puis on frappe doucement jusqu'à ce que l'écorce
soit bien enlevée; on secoue ensuite le tout
sur un crible fin et la cendre va au fond; quant aux
lentilles, on les fait bouillir après les avoir
lavées plusieurs fois, en y ajoutant un peu d'aneth
ou de pouliot sans huile; on y mettra une quantité
moyenne de sel et on versera dessus un peu de vinaigre,
quand la bouillie est complètement cuite; chez
les malades qui n'ont pas de fièvre, et chez
ceux qui ont de la tendance à la diarrhée,
on y ajoute, au lieu de vinaigre, un cyathe de vin très
odoriférant. 22. On soulagera aussi le ventre en faisant
bouillir conjointement avec les lentilles des poires
ou des coings coupés par morceaux sans y mettre
du vin ou du vinaigre; on fera bouillir un cotyle de
lentilles dans sept cotyles d'eau. 23. Chez certains
malades, dont il faut rendre les selles liquides, on
peut employer la bouillie de lentilles en faisant bouillir
avec elle les feuilles du sommet des jeunes pieds de
bette ou de la mauve, ou du concombre ou de la courge,
coupés par petits morceaux. 24. On emploiera
l'amidon chez ceux qui sont atteints de dévoiement
pendant la fièvre ; on peut en mêler aussi
aux lentilles pour resserrer le ventre; on peut s'en
servir également avec du lait, soit qu'on coupe
ce liquide avec de l'eau, soit qu'on l'emploie seul;
cette préparation convient encore mieux à
ceux qui ont la dysenterie ou un catarrhe accompagné
de toux; on fera bouillir dix drachmes d'amidon dans
quatre cotyles de liquide. 25. Le petit millet convient très peu
aux fébricitants, il est vrai, mais parfaitement
bien à ceux qui sont incommodés du côté
du ventre; on fera bouillir un oxybaphe de petit millet
dans dix oxyhaphes d'eau ; on le triturera dans un mortier
en versant dessus la quantité susdite d'eau;
après l'avoir délayé et passé
au tamis, on fait bouillir, en y mettant un peu d'aneth
et de sel. 26. On mêlera la bouillie de petit millet
passée au tamis à celle de lentilles et
à celle d'orge mondée; de même on
peut mettre dans une bouillie quelconque, excepté
dans celle de lentilles, des graines de concombre crues
au lieu d'huile. 27. Mêlez aussi soit la noix de pomme
de pin appelée strobile, soit des noisettes ou
des amandes après les avoir tamisées,
à la ptisane et aux autres bouillies, mais surtout
aux bouillies auxquelles vous voudriez ajouter quelque
chose qui tienne lieu de lait. 28. Vous approprierez
le mieux les bouillies à l'usage des gens qui
toussent en y triturant des amandes; mais, pour ceux
qui sont incommodés du côté du ventre,
il faut, au lieu d'y mettre de l'huile, y triturer du
pavot blanc torréfié légèrement
avec son enveloppe, et dont on exprime le suc dans la
bouillie; cela contribue aussi à faire dormir.
29.
Pour resserrer le ventre, il faut triturer [dans les
bouillies] les noix d'Eubée appelées aussi
noix de Sardes (châtaignes) avec l'écorce
interne qui touche à la noix; après les
avoir triturées, on doit y ajouter en passant
au tamis l'eau de pavot. 30. On peut aussi faire bouillir un quart [de
mine ?] de sémidale dans dix cotyles d'eau avec
une quantité modérée d'huile et
d'aneth, après avoir lavé auparavant la
sémidale; on traitera de la même manière
l'alica, si on veut en faire une bouillie. 31. Faites
aussi bouillir de la sémidale ou de l'alica,
en y mêlant du lait, quand la bouillie est déjà
complètement cuite; mais il importe que le lait
qu'on verse dedans soit chaud et qu'il ne bouille pas
longtemps avec ces ingrédients; on doit auparavant
faire macérer l'alica dans de l'eau ; ensuite
on y mêle le quart d'une chénice [de lait];
de chacun de ces deux ingrédients on met deux
cotyles dans sept cotyles de lait; il faut faire cuire
doucement ces bouillies sur des charbons, en les remuant
et en tenant le vase dans la main, afin que la bouillie
ne brûle pas. 32. On peut aussi mêler du lait à
toute espèce de bouillie. 33. Le popanon, que
quelques-uns appellent itrion, présentera les
conditions les moins défavorables, si, après
l'avoir pilé et réduit en poudre, on y
triture des amandes ou des graines de concombre; sinon,
il faut le faire bouillir avec de l'huile et de l'aneth,
comme c'est la coutume. 34. On peut l'employer aussi pour resserrer
le ventre, soit seul, soit mêlé aux lentilles;
mais, pour les fébricitants, c'est ce qu'on peut
donner de moins convenable. 35. Ceux qui le font bouillir dans du bouillon
de poulet ou d'agneau s'y prennent comme il faut, car
ils le font bouillir dans une grande quantité
de bouillon et dans des pots de terre cuite, en n'y
touchant pas, en ne remuant même pas, parce que
de cette manière on parvient le plus facilement
à le faire ramollir et à le pousser à
un degré complet de cuisson. 36. Le pain sec est
une bouillie très légère; pour
les fébricitants on doit le réduire en
poudre par la trituration, après l'avoir fait
parvenir à une température tiède
au feu et après l'avoir préalablement
fait macérer; il faut en faire bouillir dix drachmes
dans deux cotyles et lui faire acquérir l'épaisseur
d'une bouillie; on triturera dans cette bouillie des
amandes ou des graines de concombre. 37. Pour ceux qui
n'ont pas de fièvre, il faut, en le pilant, rendre
le pain aussi menu que la sémidale ou l'alica,
ensuite le faire macérer préalablement
pendant quelque temps, jeter l'eau et faire bouillir
dix drachmes avec un cotyle et demi; après y
avoir trituré quelqu'un des ingrédients
susdits et lui avoir donné l'épaisseur
de la bouillie d'alica, on l'administre avec du miel
ou comme cela est agréable au malade. 38. On peut
encore l'employer, soit seul, soit avec des lentilles,
quand l'estomac ne digère pas et quand on est
incommodé de flatuosités ou quand on a
des selles liquides; on le donnera aussi en morceaux
plus gros contre la constipation dans du bouillon de
poulet, en le faisant macérer ou bouillir.
8. DE LA PRÉPARATION DE L'AMIDON
ET DES AUTRES PRÉCIPITÉS.
1. On fait
des précipités de toutes les graines farineuses
de la même manière qu'on fait l'amidon,
or l'amidon se fait de la manière suivante :
on prend de la farine sémidalite la plus pure,
on la fait macérer d'abord doucement, on la lave,
on la passe à travers un linge dans une grande
quantité d'eau et on enlève autant que
possible la colle; après avoir donné au
précipité le temps de se former dans un
vase de terre cuite, on laisse écouler l'eau,
on verse de nouveau dessus de la même manière
une nouvelle quantité d'eau, et on continue à
faire ainsi jusqu'à ce que l'eau décantée
soit claire; ensuite on enlève le précipité
et on le dessèche en l'exposant au soleil dans
un vase de terre jusqu'à ce qu'il soit complément
sec. 2. On traitera de la même manière
l'ers, surtout l'ers blanc : l'écraser, enlever
l'écorce par l'ébullition, le faire macérer,
le réduire en poudre par la trituration, puis
le délayer dans une grande quantité d'eau
qu'on jette plusieurs fois par jour, jusqu'à
ce que le liquide décanté soit clair,
enfin le mettre de côté après l'avoir
séché. 3. On peut donner cette préparation
aux gens qui ont du pus dans la poitrine, en la mêlant
à leur bouillie afin de favoriser l'expectoration,
ainsi qu'aux femmes pour provoquer les règles,
ou pour procurer de l'embonpoint ou un bon teint, en
l'administrant dans du vin miellé ou avec de
l'alphiton. 4. Un oxybaphe de cette farine suffit pour
les gens bien portants, que ce soit un homme ou une
femme. 5. On fait aussi un précipité
avec les lentilles, en les écrasant de la même
manière, en les faisant macérer et en
les triturant comme l'ers; on jette l'eau jusqu'à
ce que cette eau décantée soit claire.
6.
Ce précipité étant séché,
on peut le mêler aux bouillies destinées
aux gens incommodés du côté du ventre;
on l'emploiera surtout conjointement avec le petit millet,
le pain sec, l'orge mondée et plusieurs autres
bouillies. 7. Les bouillies faites avec des graines impropres
à la panification sont moins utiles aux fébricitants
que celles que nous venons d'énumérer,
car elles sont moins nourrissantes et plus flatulentes;
on peut user des bouillies faites avec ces graines réduites
en farine par l'écrasement quand elles sont crues.
8.
Pour ôter à la farine de fèves ses
propriétés flatulentes, il faut verser
dessus beaucoup d'eau et la faire bouillir; puis, quand
la bouillie commence à se rider et qu'elle est
complètement cuite, on jette toute l'eau et on
y ajoute de la nouvelle eau chaude; il suffira d'ajouter
deux cotyles d'eau et d'huile à un quart de chénice
de la bouillie, arrivée déjà à
un degré complet de cuisson. 9. On peut employer
cette bouillie contre les coryzas et les catarrhes,
en y mêlant un peu de rayons de miel. 10. On s'en
servira aussi contre la dysenterie et le ténesme,
si toutefois on la rend plus grasse, en ne la soumettant
pas à une ébullition préalable
et en ne jetant pas l'eau. 11. On peut aussi y mettre de la moelle, de
la cire ou du fromage, surtout du fromage grillé,
et beaucoup d'huile pour les malades dont on veut expulser
les excréments. 12. On peut aussi mêler cette farine à
l'orge mondée ou aux lentilles, pour les individus
affectés de ténesme ou de dysenterie.
13.
On fera bouillir dans six cotyles d'eau un quart de
chénice de la farine dont on ne pousse pas la
cuisson jusqu'au bout. 14. La purée de pois grecs est moins
flatulente que celle de fèves et on l'assimile
plus facilement : voilà pourquoi on la donnera
surtout aux malades. 15. On peut s'en servir aussi contre les catarrhes
et contre la toux; on fera bouillir également
un quart de chénice dans six cotyles d'eau. 16. La purée
de phasèles est la plus sucrée de toutes,
mais elle est difficile à cuire; ses autres propriétés
sont semblables à celles des purées susdites.
17.
On la cuit aussi dans la même quantité
de liquide. 18. Les purées de haricots et de gesses
chiches sont les plus mauvaises de toutes les purées,
et on ne saurait en faire une bouillie qui ait quelque
avantage, dans quelque maladie que ce soit.
9. DE LA CUISSON.
1. On doit
faire cuire toutes les graines impropres à la
panification, aussi bien que l'orge et le froment, dans
un pot dont on enduit le couvercle de pâte de
farine ; on les fera bouillir très longtemps
et sur un feu aussi doux que possible; car la bouillie
ne saurait brûler, quoiqu'on la fasse bouillir
aussi longtemps qu'on veut sans la remuer; c'est seulement
lorsque les graines sont parvenues à un degré
très avancé de cuisson qu'on doit remuer
avec un petit bâton et tenir le pot dans sa main
en l'agitant afin que la bouillie ne brûle pas.
2.
Il faut se servir, tant pour les bouillies que pour
les mets secondaires, d'huile qui n'ait pas la moindre
odeur et qui ne trahisse au goût aucune propriété;
l'huile d'olives vertes satisfera à ces conditions.
3.
Il faut faire bouillir aussi bien que griller les poissons
de grande taille dans leurs écailles ; on y mettra
quelque assaisonnement et on y ajoutera beaucoup d'huile,
même quand on les fait bouillir il convient aussi
de faire bouillir préalablement l'eau salée
et de n'y mettre le poisson que lorsqu'elle est en ébullition
; cuit de cette manière, le poisson devient plus
succulent et il garde ses humeurs propres. 4. De même
le poisson grillé sera meilleur, si on le cuit
dans ses écailles; alors aussi il devient très
tendre et très nourrissant. 5. On doit y ajouter
les assaisonnements dans l'huile et le saupoudrer d'une
quantité suffisante de sel ainsi que d'alphiton
pulvérisé.
10. DE LA PRÉPARATION DU PETIT MILLET.
(Tiré de Philotime.)
1. Si on
triture le petit millet cru et qu'on le réduise
en poudre, si, après y avoir ajouté l'eau,
on le triture de nouveau, si on décante l'eau
et si on fait bouillir le millet de manière à
ce qu'il devienne semblable à la farine obtenue
par la mouture, ce mets est glutineux et doué
d'une âpreté fortement prononcée;
il resserre le ventre et il est susceptible de s'assimiler.
2.
Si, au contraire, on fait bouillir cette graine en entier,
comme c'est la coutume, le petit millet s'assimilera
plus difficilement, il relâchera quelquefois le
ventre, il sera expulsé par les excréments
sans avoir subi de grands changements, quoiqu'il soit
plus glutineux, mais il distribuera dans le corps une
humeur douée d'une douce astringence.
11. NOURRITURE DE CEUX QUI SONT HABITUELLEMENT
MALADES, ET MANIÈRE DE LA PRÉPARER.
(Tiré d'Antyllus.)
[Ce chapitre se trouve dans l'ouvrage Sur
les moyens de traitement, au chapitre second du troisième
livre, lequel traite de ce qu'on donne aux malades.]
1. Dans
les maladies continues, il faut choisir un aliment qui
se digère très facilement, qui se distribue
très rapidement, qui ne nourrisse pas trop, et
qui s'échappe aisément par la perspiration;
car, si les aliments sont retenus, ils donnent du corps
à la fièvre ; or le pain lavé pris
dans de l'eau a toutes ces qualités. 2. On doit
le faire avec du froment d'été qui ne
soit pas trop pur, car, dans ce cas, il nourrit trop;
il faut qu'il soit très fortement trituré
et fortement cuit, mais on ne se servira pas de farine
sémidalique à cause de sa puissance [nutritive],
que ce soit de la farine du froment dont il a été
parlé ou d'un autre; le pain doit, de plus, être
fermenté et un peu rassis; on le fera macérer
dans de l'eau chaude qu'on jette à chaque instant
pour la renouveler, non pas tout le pain, mais sa partie
intérieure, car la croûte est impropre
à l'absorption de l'eau ainsi qu'à la
digestion ; on doit interrompre la macération
lorsque le pain non seulement s'est gonflé, mais
qu'il a aussi laissé évaporer le ferment
et qu'il en a perdu tout à fait l'odeur. 3. L'alica
lavée appartient au même genre; on en fait
une gelée en la lavant fortement, et on la donne
après l'avoir fait bouillir dans de l'eau simple
ou dans de l'eau miellée. 4. La crème
d'orge mondée rentre égaiement dans ce
genre; on fait bouillir une partie d'orge dans quinze
parties d'eau; pendant la coction on réduit la
masse du liquide au cinquième et on la passe
à travers un tamis; on boit cette crème
en y ajoutant un peu d'eau miellée. 5. On peut
aussi ranger l'eau miellée elle-même dans
la même classe de moyens nutritifs, si on la fait
bouillir fortement suivant le mode décrit à
propos de la crème d'orge mondée, c'est-à-dire
en mêlant plusieurs parties d'eau à une
partie de miel et en réduisant de même
la masse au cinquième. 6. On prépare aussi une boisson avec
l'alica de la manière suivante : prendre de l'alica
fortement lavée, jeter à plusieurs reprises
l'eau employée, faire macérer l'alica
de nouveau pendant une heure dans de l'eau pure, ensuite,
avec les mains, la triturer dans cette eau, jusqu'à
ce qu'elle ait pris l'aspect du lait tant sous le rapport
de la couleur que sous celui de l'épaisseur;
l'alica, ayant été ensuite séparée
par le filtre, ne fait pas partie de la bouillie, mais
on ajoute à l'eau qu'il a rendue laiteuse un
peu de sel, et, en outre, un peu d'aneth pour ceux qui
éprouvera des pincements à l'orifice de
l'estomac et aux intestins, un peu de pouliot ou de
thym pour peux qui ont l'orifice de l'estomac retourné
et qui souffrent de nausées, un peu de cumin
pour ceux qui sont gonflés de flatuosités;
on fait bouillir cette eau jusqu'à ce qu'elle
se prenne et on donne la bouillie avant qu'elle se refroidisse.
7.
Quand ce genre d'aliment est bien préparé,
nous le préférons quelquefois à
l'alica et au pain parce qu'il est facile à administrer,
qu'il se digère aisément et qu'il se distribue
rapidement dans le corps. 8. Ce sont là les aliments qui conviennent
dans les fièvres aiguës; mais, dans beaucoup
de circonstances, soit qu'on n'ait pas ces aliments
sous la main, soit que l'état des malades ne
se prête pas à leur usage, nous sommes
forcés d'en employer d'autres, par exemple,
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l'itrion, les herbes potagères, l'alphiton
et les oeufs. 9. Il faut que l'itrion soit fait avec le même
froment que le pain bien cuit; il doit être très
léger, car, s'il est épais, il donne lieu
à une cuisson inégale; il faut qu'il soit
réduit en poudre très fine par la trituration,
de manière à ressembler à de l'alphiton;
ensuite on le fait bouillir très fortement, de
préférence dans de l'eau de pluie, jusqu'à
ce qu'il constitue une masse uniforme : à défaut
de cette eau, on prendra l'eau aussi pure que possible.
10.
Il faut y mettre un peu de sel et point d'huile, si
ce n'est une très petite quantité, qu'on
fait bouillir avec l'eau avant d'y jeter l'itrion réduit
en poudre. 11. On fait bouillir aussi de la même
manière l'alica avec les mêmes assaisonnements.
12.
De tous les légumes potagers, celui qui convient
le mieux est la mauve, qu'on mange bouillie dans du
garou et de l'huile; il en est de même de la bouillie
faite avec cette herbe, bouillie qu'on prépare
en cuisant les feuilles tendres de mauve sans les nervures,
en les triturant ensuite dans un mortier et en les faisant
bouillir de nouveau dans de l'eau avec du sel et de
l'huile. 13. Les courges oc-
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cupent le second rang; il faut les choisir
très fraîches; on les fait bouillir en
entier sans les râper, afin qu'elles ne s'imprègnent
pas d'eau pendant l'ébullition; on les râpe
quand elles sont cuites, et on les donne surtout dans
de l'eau faiblement salée, car, ainsi préparé,
ce mets n'est pas du tout désagréable;
on peut donner aussi la courge dans du garon et de l'huile.
14.
Il convient de faire bouillir les oeufs dans de l'eau,
en remuant continuellement, car, si on les remue, ils
ne se prennent ni ne s'épaississent; il vaut
mieux les faire bouillir dans du vinaigre coupé,
car de cette manière ils restent encore plus
liquides.
Fin du Livre 4
Entête du livre 4
Entête
du livre 3
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Volume
1 : livre 5 bas
du livre
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LIVRE V.
1. DE L'EAU.
(Tiré de Galien.)
L'eau, pour être excellente, doit être
exempte de toute qualité, non seulement quant
au goût, mais aussi quant à l'odorat. Une
eau semblable sera en même temps très agréable
à boire et complètement pure, et, si,
de plus, elle traverse rapidement les hypocondres, on
en chercherait, vainement une meilleure; tandis que
les eaux pures, limpides et qui ne sont pas désagréables
à boire, mais qui séjournent longtemps
dans les hypocondres en paralysant et gonflant l'estomac
ou le rendant pesant, doivent être regardées
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comme à moitié mauvaises; car,
assurément, il existe un grand nombre d'eaux
analogues, et c'est surtout, à mon avis, la différence
entre ces dernières et les meilleures qu'Hippocrate
a voulu marquer lorsqu'il dit : « L'eau qui s'échauffe
et se refroidit vite est la plus légère
; » en effet, cette distinction est inutile pour
les eaux bourbeuses ou de mauvaise odeur et aussi pour
celles qui trahissent au goût quelque chose de
médicamenteux, parce que tout le monde peut en
apprécier la nature sans chance d'erreur, tandis
qu'elle s'applique aux cas où il n'y a rien de
semblable, mais où il existe dans l'eau soit
quelque autre vice tenant au mélange d'un air
mauvais, soit quelque défaut inhérent
à l'eau elle-même et dont la cause est
cachée; car, dans ces cas, la distinction susdite
fournit un critérium excellent, puisque de pareilles
eaux ne s'échauffent ni ne se refroidissent rapidement
; il existe encore un autre critérium semblable
au premier : c'est celui que donnent les herbes, les
graines, la viande, les fruits ou les racines
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qu'on fait bouillir dans ces eaux; car ces
substances cuisent très rapidement dans les eaux
excellentes, et très lentement dans les mauvaises.
Quelques anciens ont appelé dures les mauvaises
eaux de cette espèce, en se servant du même
mot que pour les graines elles-mêmes qui cuisent
difficilement. Le plus sûr donc est d'avoir expérimenté
de pareilles eaux; toutefois, si on veut également
reconnaître d'avance ses propriétés
à des signes, [on peut recourir aux suivants]
: toutes celles dont les sources se frayent un chemin
vers les constellations des Ourses et sourdent à
travers des rochers, de façon à avoir
le soleil derrière elles, doivent être
regardées comme dures et sujettes à passer
lentement, et ce sont justement celles-là qui
s'échauffent et se refroidissent lentement; de
même on peut s'at-
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tendre à trouver excellentes celles
dont les sources se frayent un chemin vers l'orient,
filtrent à travers quelque pierre molle ou à
travers la terre, et qui s'échauffent et se refroidissent
très rapidement. Les eaux les plus légères
sont les eaux de pluie, parce que le soleil attire et
enlève rapidement les parties les plus légères
et les plus ténues de l'eau ; il exerce cette
action aussi bien sur la mer que sur les autres eaux
et même sur le corps humain; voilà pourquoi,
entre toutes, elles se corrompent aussi le plus vite;
car, en général, les corps qui ne possèdent
qu'une seule qualité se corrompent plus difficilement
que ceux qui en ont plusieurs, à moins que, par
l'effet d'une autre cause, ils ne soient doués
de la propriété de se corrompre difficilement
ou facilement. Il faut se garder de croire que l'eau
qui se corrompt le plus rapidement est la plus détestable,
car elle peut même être excellente, si elle
présente tous les signes caractéristiques
des meilleures eaux précédemment exposés,
puisque la propriété de modifier facilement
ses qualités doit être imputée à
l'eau plutôt comme un avantage que comme un défaut.
Ce qui prouve aussi la bonté des eaux de pluie,
c'est qu'elles sont cuites par la chaleur du soleil,
car toute substance soumise à l'ébullition
devient plus douce qu'elle n'était auparavant.
Quand l'eau a commencé à se corrompre,
elle est tout à fait impropre à la boisson;
ceux donc qui en boivent quand elle commence à
se corrompre sont pris d'enrouement, de toux, et ont
la voix grave. Parmi les eaux de pluie elles-mêmes,
celle qui tombe en été, et qu'Hippocrate
appelle eau de saison, est meilleure que l'eau de tempête,
et l'eau de tonnerre est également meilleure
que l'eau de tempête. Les eaux qui proviennent
de la fonte de la glace et de la neige sont très
mauvaises, car tout ce que contiennent de plus subtil
les substances qui se congèlent par le froid
est poussé au dehors. Ce serait une bonne mesure
de ne donner les eaux bourbeuses ou de mauvaise odeur,
ainsi que celles qui ont des qualités peu convenables,
qu'après les avoir préalablement modifiées
par l'ébullition. Cependant nous trouvons encore
un autre avantage à refroidir l'eau après
l'avoir chauffée, lors même qu'elle n'a
ni odeur ni goût mauvais, qu'elle est complètement
pure, c'est quand l'expérience nous a prouvé
qu'elle reste pendant longtemps dans l'estomac et y
cause quelque dommage; en effet, la chaleur, en désagrégeant
toute l'eau d'une manière égale pendant
l'ébullition, la rend propre à se désunir,
car, pendant le refroidissement, les parties terreuses,
en se précipitant par leur pesanteur innée,
se rendront au fond du vase, tandis que l'eau surnagera
au-dessus d'elles; en versant donc doucement cette eau
dans un autre ustensile nous pourrons nous en servir
sans inconvénient. Si, après l'ébullition,
nous voulons rendre l'eau très froide, et si
nous avons de la neige, nous chauffons d'abord l'eau,
et ensuite nous l'environnons de neige à l'extérieur;
mais, si nous n'en avons pas , nous procurons à
l'eau un refroidissement à l'aide de puits ou
de chutes d'eau, après l'avoir toutefois chauffée
afin qu'elle devienne prompte à se modifier;
car toute chose qu'on a d'abord chauffée admet
plus facilement dans la totalité de sa substance
les modifications que lui impriment les objets avec
lesquels elle est en rapport. Après avoir placé
le vase dans des puits ou sous des chutes d'eau, il
est nécessaire que nous y adaptions un couvercle
et que nous le fermions exactement de tout côté
; on ne remplira pas le vase, mais on le laissera à
moitié vide afin que l'air qui se trouve entre
le couvercle et l'eau contenue dans le vase, en se refroidissant
d'abord, refroidisse à son tour l'eau avec laquelle
il est immédiatement en contact. Là où
on n'a aucune de ces ressources, comme en Égypte,
on suspend le vase et on le laisse sans couvercle afin
qu'il admette l'air. Puisque l'eau n'a rien d'incisif
ni de chaud, il est clair que toute eau doit passer
lentement, se digérer difficilement et céder
avec peine à l'assimilation, lors même
qu'elle excelle sous les autres rapports; elle reste
donc longtemps dans l'estomac et y produit eu général
des fluctuations ; de plus, quand cet organe est imprégné
de bile, elle se corrompt aussi; quand enfin elle est
descendue, non sans effort, de l'estomac dans le jejunum,
elle n'est pas facilement distribuée dans le
corps; voilà pourquoi elle est naturellement
incapable de pousser aux urines ou d'expulser les crachats.
Elle n'étanche pas même la soif parce qu'elle
reste longtemps dans l'estomac, ne pénètre
pas dans toute la profondeur du corps et n'humecte pas
les parties desséchées. Qu'elle ne nourrit
pas non plus, mais qu'elle est seulement un véhicule
de la nourriture, cela a déjà été
dit par Hippocrate et par les plus éminents d'entre
les autres médecins; aussi n'est-elle pas même
capable d'augmenter la force vitale; et ce sont là
les raisons pour lesquelles Hippocrate abandonne l'eau
et se sert de l'eau miellée, de l'oxymel et du
vin chez les malades. Si donc il n'y avait pas autre
chose à considérer, personne ne se servirait
jamais de l'eau; mais la plupart des médecins,
quand ils ont été déçus
par l'emploi des autres boissons, ont recours à
l'eau, qui ne produit pas de grand mécompte,
parce qu'elle n'a pas non plus une grande efficacité
; or l'usage de l'oxymel, du vin et de l'eau miellée,
devient mauvais par les changements subits qu'il cause;
il le devient encore par un mélange trop fort
comme les médecins le font habituellement; car
le vin doit conduire l'eau comme par la main vers les
endroits où elle doit se distribuer, et, pour
atteindre ce but, il faut y mêler une toute petite
quantité de vin afin que l'eau cesse d'être
pure; de la même manière aussi je recommande
l'oxymel aqueux parce que l'oxymel fort, s'il ne relâche
pas tout d'abord le ventre, devient très nuisible,
surtout chez les malades incommodés par la bile
amère ou dont les viscères sont tuméfiés,
et chez lesquels l'eau est nuisible aussi bien que l'oxymel
quand elle se convertit en bile en séjournant
longtemps dans les hypocondres, car, joignant encore
à tous ses autres défauts celui de ne
pas produire de matières alvines, elle ne cause
même aucun relâchement du ventre. C'est
un fait reconnu de tout le inonde, que l'eau est nuisible
quand on la boit au commencement des accès. Quand
clone convient-il de boire de l'eau? lorsque le malade
est exclusivement au régime des boissons et qu'il
ne prend pas encore de la crème d'orge mondée;
en effet, c'est dans cette circonstance qu'on peut donner
à propos de l'eau entre les autres boissons,
surtout quand le malade a de la soif: car, dit Hippocrate,
elle cause une espèce d'inondation, c'est-à-dire
une abondance d'humidité; c'est pourquoi Hippocrate
donne un peu d'eau entre l'eau miellée ou entre
l'oxymel, parce qu'elle est commode pour humecter les
matières qui doivent être rejetées
par les crachats; mais il donne également de
l'eau lorsque le vin est extrêmement nuisible,
et il l'est quand le malade a du délire ou un
violent mal de tête. La nature propre de l'eau
est elle-même humide et froide, mais, quand elle
reçoit une chaleur empruntée, elle échauffe
et humecte ce qui est en rapport avec elle; cependant
elle n'est pas capable de faire tout cela de la même
manière, puisqu'elle humecte au suprême
degré, qu'elle soit d'une température
moyenne ou tiède, ou plus chaude encore; tandis
qu'elle n'échauffe jamais au suprême degré,
à moins qu'elle ne soit au plus fort de l'ébullition.
Appliquons ce que nous venons de dire à une constitution
d'un tempérament moyen : si donc on administre
de l'eau modérément chaude à un
individu de cette constitution, soit qu'on donne un
bain ou qu'on fasse une affusion sur une partie quelconque,
autant que dure l'affusion, on rendra cette partie plus
humide et plus chaude qu'elle n'était 'auparavant;
si on s'arrête après cela et qu'on ne resserre
ni ne condense le corps à l'aide de l'eau froide,
on trouvera bientôt qu'il est devenu plus froid
qu'il ne l'est habituellement, parce que la chaleur
innée. s'est évaporée outre mesure;
bien que, par un effet secondaire, l'usage de l'eau
chaude ait rendu le corps plus froid, il ne l'a cependant
pas rendu pour cela plus sec, ce qui cependant semblera
avoir lieu à cause du relâchement des conduits,
du ramollissement du corps et de la liquéfaction
de sa substance; en effet, pour produire ces divers
états, il se fait nécessairement une évaporation
plus forte que de coutume, et la vapeur est une humidité
atténuée; mais en réalité
cette sécheresse n'existe pas, car toute l'humidité
contenue dans les vaisseaux et dans les autres espaces
vides s'échappe, tandis que le corps même
des vaisseaux et toutes les parties charnues deviennent
plus humides qu'elles n'étaient, et il n'y a,
à ce qu'il paraît, que cette propriété
humectante que l'eau ne perd jamais; car, même
lorsqu'à l'état d'ébullition elle
brûle les corps, les parties brûlées
ne deviennent pas sèches à l'instar de
celles qui ont été brûlées
par le feu; de même, lorsqu'elle est parvenue
au suprême degré de froid et qu'on en fait
des affusions pendant une journée entière
ou pendant plus longtemps encore sur une partie quelconque,
elle ne la rendra pas plus sèche que de coutume,
quoique la partie se montre ridée et tout à
fait atrophiée; cela tient à ce que l'humidité
des vaisseaux et des autres espaces vides s'est échappée,
tandis que les parties fondamentales elles-mêmes
ne deviennent en aucune façon plus sèches
qu'elles n'étaient auparavant.
2. DE L'ADMINISTRATION DE L'EAU FROIDE
ET DE L'OXYMEL FROID CHEZ LES MALADES.
Comme toute affection contre nature se guérit
par les moyens qui lui sont contraires, ainsi que nous
l'avons montré , il est clair que la fièvre
sera entièrement éteinte par l'eau froide,
pourvu qu'elle existe seule sans accompagnement de quelque
affection à laquelle l'eau froide est préjudiciable;
car, si concurremment avec la fièvre il existe
une autre affection que l'eau froide exaspère,
plus tard, au cas où on aurait éteint
à l'aide de l'eau froide, pour le moment du moins,
la fièvre produite par cette affection, il s'allumera
une autre fièvre plus grave que la première,
parce que l'affection pour laquelle l'eau froide prise
en boisson ne convient pas se sera aggravée;
or les affections auxquelles l'eau froide est préjudiciable
sont celles qui tiennent à l'inflammation des
parties ou à la crudité des humeurs, dont
la crudité des urines est le signe; la considération
des urines, conjointement avec l'absence de l'inflammation
d'un organe important, suffit donc pour nous déterminer
à donner de l'eau froide à boire. Si cependant,
en été, nous sommes pressés par
la violence de la fièvre, et si le malade est
jeune et habitué à boire de l'eau froide,
on ne commettra pas de faute en lui en administrant,
au cas où les urines présentent un énéorème
louable en même temps qu'un bon aspect et une
bonne consistance, lors même qu'il y aurait une
partie enflammée ; car, dans un pareil cas, on
aime mieux arrêter la violence de la fièvre,
au risque d'être dans la nécessité
de consacrer un plus grand nombre de jours au traitement
de ce qui reste de l'inflammation et qui nécessairement
s'est rapproché de la nature du squirrhe et est
devenu plus difficile à résoudre. Si cependant
les fièvres ne sont pas accompagnées d'une
très-grande chaleur et s'il y a des parties enflammées,
on éprouvera de grands mécomptes en donnant
de l'eau froide; car les fièvres accompagnées
d'une vive chaleur indiquent que l'inflammation est
en quelque sorte érésipélateuse,
et c'est justement pour cela que l'eau froide réussit
dans ce cas, comme on le voit aussi pour les parties
extérieures. Chez ceux qui ont des inflammations
commençantes au foie, à l'estomac ou à
d'autres parties semblables, on doit admettre une distinction
plus rigoureuse, car tous ces malades éprouvent
un grand dommage, si la quantité de la boisson
dépasse un peu la mesure, quand même ils
prendraient l'eau en temps opportun ; en effet, les
inflammations commençantes produites sans violence
extérieure et sans plaie résultent ou
de la faiblesse des parties ou d'une certaine chaleur;
or l'eau froide sera toujours nuisible dans les inflammations
qui tiennent à la faiblesse, tandis qu'elle conviendra
pour celles qui dépendent d'une certaine chaleur
ignée, pourvu que la dose soit modérée;
car, si on donne trop d'eau, on s'expose au danger de
voir la partie passer à l'excès con-traire.
L'eau froide, prise en boisson, fera encore plus de
bien dans ce genre d'affections, si les malades en usaient
auparavant dans l'état de santé. Avant
d'administrer l'eau froide, il faut donc préalablement
prendre en considération les maladies graves
de la poitrine, de l'estomac, du foie, du cou et de
toute la tête, car les membres n'en éprouveront
peut-être pas de grand dommage; ils en éprouveront,
il est vrai, quelque peu dans certaines affections dont
je parlerai plus tard; mais un homme étranger
à la médecine n'ose-rait pas même
comparer ce dommage à celui qu'entraîne
l'eau froide, lorsque les parties susdites sont gravement
affectées. Si donc il existe à l'hypocondre
une affection de nature érésipélateuse
ou herpétique, ou s'il y a une inflammation érésipélateuse,
ou une affection éminemment chaude tenant à
une intempérie sans humeurs, l'eau froide soulagera;
de même qu'un abcès, un oedème,
un squirrhe, une plaie ou des intempéries froides
en éprouverons une aggravation considérable.
Mais, puisque j'ai promis de parles aussi des membres,
il faut savoir que l'eau froide prise en boisson est
très nuisible dans les inflammations des parties
nerveuses de ces régions, car ces inflammations,
en l'absence même de l'eau froide menacent du
danger des convulsions; si, au contraire, l'inflammation
a son siège dans les parties charnues des membres,
et que le malade boive de l'eau froide ou qu'il en applique
extérieurement sur la partie enflammée,
cela lui fera du tort, il est vrai, mais ce tort ne
sera ni considérable ni apparent, surtout si
ce malade est habitué à boire de l'eau
froide. Si, donc la fièvre existe seule et sans
autre affection à laquelle l'eau froide puisse
être nuisible, il faut donner autant d'eau froide
que le malade lui-même pourra en avaler d'un seul
trait. Quant à l'oxymel froid, on le donne en
été pour empêcher que la soif du
malade ne s'exaspère; voilà pourquoi nous
nous permettons de donner en été de l'oxymel
froid, même avant que la maladie ne soit arrivée
à coction, tandis que nous ne donnerions pas
de l'eau froide jusqu'à satiété
dans un pareil état, car elle resserrerait les
parties enflammées, si c'est l'inflammation qui
produit la fièvre, et elle maintiendrait à
l'état de crudité les humeurs, si c'est
d'elles que dépend la maladie; mais nous donnons
alors un peu d'oxymel, parce que cette boisson prend
dans l'estomac une température tiède avant
que le refroidissement qu'elle produit n'arrive jusqu'au
côté; et, si même ce refroidissement
s'y faisait un peu sentir, cet inconvénient serait
corrigé par l'oxymel lui-même, qui est
doué de propriétés incisives.
3. DE L'EAU.
(Tiré de Rufus.)
[Il se trouve dans le deuxième livre
du traité Sur le régime, c'est-à-dire dans le livre Sur les boissons.]
Les eaux stagnantes (j'appelle ainsi les eaux
de puits) ne sont pas très ténues parce
qu'elles n'ont point de mouvement, et, quand elles ont
pénétré jusqu'à l'intérieur,
elles humectent et dissolvent moins les aliments que
les autres eaux; elles agissent aussi moins bien sur
la digestion et elles ne passent pas non plus facilement
par les urines à cause de leur épaisseur
et parce qu'elles sont froides; elles deviennent meilleures
à boire quand elles éprouvent une espèce
d'écoulement par le puisement ainsi que par le
nettoyage des puits. Les eaux qui coulent sur une pente
sont beaucoup plus ténues et valent mieux pour
humecter et pour favoriser la digestion et l'émission
des urines. Les eaux de lac sont, sans exception, très
mauvaises, car elles ont une odeur peu convenable, comme
si elles étaient corrompues, puis elles sont
chaudes en été et froides en hiver, circonstance
que je regarde comme le principal signe de la mauvaise
qualité des eaux. En été, donc,
elles causent la diarrhée et passent lentement
parla vessie ; souvent aussi on est pris de dysenterie
et d'affection lientérique qui se transforme
en hydropisie. En hiver, les eaux de lacs ne causent
pas beaucoup de diarrhée parce qu'elles sont
froides, mais elles produisent des ruptures, des pleurésies
et de la toux; elles se portent aussi du côté
de la rate et finissent ensuite par engendrer l'hydropisie;
la rate étant affectée, les pieds s'ulcèrent
aussi, et ces ulcères ne veulent pas se fermer
vite. Il n'y a, à ma connaissance, que les marais
de l'Égypte qui soient favorables à la
santé, parce que l'eau, n'étant pas chauffée
outre mesure, ne se corrompt pas en hiver, tandis qu'en
automne le Nil, en remplissant les marais, chasse la
vieille eau et y introduit de l'eau nouvelle. Sur les
eaux de pluie je professe l'opinion suivante : ces eaux
sont légères, ténues, pures et
douces au goût, et, si on veut y faire bouillir
une substance quelconque, elle cuira très rapidement;
si on les soumet au feu, elles s'échauffent très
vite et elles exigent très peu de vin pour former
un bon mélange; elles favorisent donc la digestion
et le cours des urines; elles sont également
favorables au foie, à la rate, aux reins, au
poumon et aux nerfs, car, n'étant pas douées
d'une force refroidissante très prononcée,
elles ne sauraient manquer d'être plus ou moins
propices à ces organes. Les eaux de printemps
et d'hiver étant celles qui arrivent le mieux
à leur temps et qui sont les plus belles, je
les recommande par-dessus toutes. Les eaux d'automne
et d'été sont sans doute meilleures que
certaines autres, mais toutes ne sont pas supérieures
à quelque eau que ce soit, car il y a aussi sous
terre des eaux douées de qualités éminentes;
on ne saurait dire combien les eaux d'automne et d'été
sont inférieures aux eaux de printemps et d'hiver,
car la terre omet des vapeurs plus sèches dans
l'été et dans l'automne, et la pluie se
charge beaucoup d'immondices de la terre; de pareilles
eaux doivent donc être plus sèches que
d'autres et très nitreuses ; elles ont des propriétés
détersives et sont propres à passer à
travers les intestins, mais elles ne conviennent ni
aux reins, ni au poumon, ni à la trachée-artère;
elle doivent donc aussi exiger, en quelque sorte, une
plus grande quantité de vin pour que leurs qualités
nitreuses soient vaincues. Les vents, selon qu'ils viennent
du nord ou du midi, produiront aussi une différence
assez considérable, car la pluie qui tombe pendant
le vent du nord est plus douce, mais aussi plus froide,
tandis que celle qui accompagne les vents du sud est
moins douce, mais plus chaude; et, en général,
les temps pluvieux fournissent plutôt des eaux
douces, tandis que les temps secs et peu pluvieux donnent
plutôt des eaux nitreuses. Toutes les eaux qui
proviennent de la fonte des neiges et des glaces sont
dures et refroidissent outre mesure, mais elles sont
douces au goût, or une eau dure et froide ne convient
ni pour la digestion ni pour l'écoulement des
urines; elle nuit aussi aux nerfs, à la poitrine
et aux côtés, car elle produit des convulsions,
du tétanos et, dans la poitrine, des ruptures
qui ont entraîné chez quelques individus
des crachats sanguinolents et de la suppuration. Quant
aux eaux de source, toutes celles qui sont tour- nées
vers l'orient sont supérieures aux autres par
leur humidité [radicale], leur ténuité,
leur bonne odeur et leur propriété de
refroidir et de réchauffer modérément.
Celles qui sont tournées vers le nord sont douces,
il est vrai, mais refroidissent outre mesure. Celles
qui sont tournées vers l'occident refroidissent
avec force et agissent fortement aussi par leur dureté;
pour ce motif elles causent de l'enrouement, la pleurésie
et des convulsions. Celles qui sont tournées
vers le midi sont plutôt salées et chaudes
; elles ne sont pas propres à passer par les
urines, mais plutôt par les selles. Bien que je
ne loue pas les eaux du midi, je loue cependant le Nil
à un tel degré, qu'à mon avis il
y a peu de fleuves qui lui soient comparables sous le
rapport de la bonté de l'eau; car elle relâche
le ventre, provoque les règles, et on peut l'administrer
pendant les couches. La plupart des eaux du midi sont
stationnaires, ce qui entraîne un double inconvénient,
l'un tenant au sol, et l'autre à ce qu'elles
ne s'écoulent pas. La nature du sol conduit à
la distinction suivante entre les eaux : le sol se compose,
soit de plaines, soit de collines et de montagnes ;
les plaines valent mieux pour le rassemblement des eaux,
et ordinairement il y a dans ces localités des
puits creusés et des sources stationnaires; mais
les collines et les montagnes sont plus favorables,
car elles fournissent des eaux plus pures, plus ténues,
de meilleure odeur et plus agréables par leur
douceur. Quelques plaines présentent des efflorescences
salines et nitreuses pendant l'été et
l'automne ; d'autres n'offrent rien de semblable, et
on appelle ce terrain sol doux : c'est dans cette espèce
de plaines que l'eau est meilleure et plus potable qu'ailleurs,
tandis que, dans les plaines à efflorescences
, elle est salée et nitreuse. Parmi les montagnes,
quelques-unes sont terreuses, d'autres rocheuses; les
[eaux fournies par les] montagnes terreuses sont meilleures,
parce qu'elles sont douces au toucher et qu'elles sont
moins froides [que les suivantes; celles qui coulent]
des montagnes rocheuses sont moins bonnes, à
cause de leur dureté et de leur froideur; mais
elles sont plus pures que les autres et n'ont point
de dépôt. Une différence très-grande
et très remarquable entre les eaux résulte
de la présence des mines ou des plantes qui se
trouvent aux environs des sources : les mines non-seulement
rendent les eaux moins potables, mais elles vicient
même toutes les autres conditions d'habitation;
les plantes sont aussi quelquefois tout à fait
nuisibles à l'eau; mais quelquefois aussi l'eau
est améliorée par la berle, la menthe
sauvage et le capillaire; car ce sont là les
plantes qui croissent le plus fréquemment dans
les canaux; or elles gâtent la bonne eau, tandis
qu'elles corrigent celle qui, sans cela, serait mauvaise,
en jouant pour ainsi dire, en s'y mêlant, le rôle
de médicament : de pareilles eaux deviennent
plus favorables au flux des urines. Il faut veiller
sérieusement à ce que les eaux n'empruntent
aucune mauvaise qualité, soit au sol, soit à
d'autres circonstances; il ne suffit donc pas que les
sources fournissent ici de l'eau bonne et potable, et
là de l'eau salée et nitreuse, si les
canaux ne présentent pas les mêmes conditions.
Les principaux points de mon sujet ont été
traités dans ce qui précède; rapportons
cependant encore quelques autres signes de la bonté
des eaux : ainsi celles qui sont chaudes en hiver et
froides en été me semblent, en quelque
sorte, être les meilleures ; tandis que celles
qui sont dans un rapport exact de froid et de chaleur
avec les saisons sont les plus mauvaises, car en été
la chaleur se rapproche de la surface du sol, tandis
qu'en hiver elle s'enfonce dans la profondeur; et c'est
pour cette raison, je pense, que les sources qui s'écoulent
d'une grande profondeur, ainsi que les cavernes creuses,
sont toutes très chaudes en hiver et très
froides en été; pour la même cause
aussi, tout ce qui est rapproché de la surface
subit, eu égard à la chaleur et au froid;
des changements en rapport avec ceux des saisons. Il
est étonnant de voir l'eau disparaître
en hiver, et reparaître en été,
bien que le contraire fût vraisemblable ; mais
on peut encore admettre que la cause de ce phénomène
est la chaleur qui entraîne avec elle les eaux
profondes, car les eaux sentent aussi la chaleur; en
effet, vous trouverez toutes les sources profondes et
qui n'empruntent pas beaucoup aux pluies de l'extérieur,
très faibles en hiver et pendant les froids les
plus rigoureux, tandis qu'elles sont très abondantes
en été : c'est ainsi que, pour les mêmes
raisons, le lac de Délos et les puits à
Pythopolis présentent ce même phénomène.
Être chaudes en hiver et froides en été
est donc un des signes à l'aide desquels on distingue
les bonnes eaux des mauvaises ; le second est qu'elles
ne présentent au palais aucun goût appréciable
; dans ce cas , elles n'exigeront pas non plus beaucoup
de vin pour un bon mélange, et elles supporteront
toute espèce de vin. Il faut encore, pour être
la meilleure, que l'eau soit pure, qu'elle ne contienne
ni boue ni sédiment, et que nulle autre circonstance
ne gâte sa couleur; puis il est indispensable
que l'eau pure soit en même temps légère
au poids ; car ce qui est léger au poids ne contient
jamais un mélange de terre; si, au contraire,
elle est pesante, c'est à la terre qu'elle doit
ce surcroît de pesanteur. On doit encore prendre
grandement en considération les circonstances
suivantes : examiner si l'eau s'échauffe et se
refroidit vite (car cette eau-là est meilleure
que les autres), savoir comment elle se comporte par
rapport à la digestion et comment elle traverse
le corps; car celles qui accélèrent la
digestion sont meilleures que les autres : il en est
de même de celles qui, dans leur passage à
travers le corps, se procurent une issue par la vessie;
car passer par les intestins est une plus mauvaise note
pour l'eau. Il faut s'enquérir auprès
des gens du pays des eaux dont on ne saurait connaître
l'efficacité par notre art; or il n'est en aucune
façon aisé de connaître ce qui se
produit contre le cours ordinaire de la nature. Ainsi
il y a, chez les Léontins , une eau qui tue ceux
qui en boivent; il en existe une autre semblable, qu'on
appelle eau du Styx, à Phénée en
Arcadie, et encore une autre dans la Thrace; puis il
y a, chez les Sauromates, le lac que les oiseaux même
ne sauraient traverser [sans tomber morts]; il y a encore,
à ce qu'on raconte, chez les Mèdes, un
autre lac sur lequel il surnage une liqueur noire qui
s'enflamme lorsqu'on s'approche du feu après
s'en être enduit le corps : c'est, dit-on, à
l'aide de ce poison que Médée a tué
la fille de Créon. Il y a aussi près de
Suze une eau qui fait tomber les dents de ceux qui en
boivent. Le fleuve Sybaris rend les hommes chastes.
L'eau qu'on appelle rouge, en Éthiopie, produit
la folie. En Égypte, une certaine eau rend
chauves ceux qui en boivent. La science ne sait rien
de ces prodiges ; aussi beaucoup de gens ont-ils déjà
trouvé la mort, après avoir usé
de ces eaux sans précaution, et d'autres ont
éprouvé quelque autre fâcheux accident.
Il existe encore pour les eaux plusieurs autres propriétés
qui s'écartent du cours habituel de la nature
: ainsi une certaine eau, chez les Lyncestes, enivre
ceux qui en boivent; à Clitorium en Arcadie,
une autre produit chez les baigneurs l'aversion de l'odeur
même du vin; l'eau de la fontaine Aréthuse,
à Chalcis, fait du bien aux femmes, tandis qu'elle
donne des maux de pieds aux animaux qui en boivent;
on admet enfin que le Cydnus adoucit la goutte, quoiqu'il
soit d'une froideur excessive. Si l'on séjourne
dans un endroit où l'eau est mauvaise, il faut
s'efforcer de la rendre plus potable; le mieux pour
cela est de la faire bouillir dans des vases de terre
cuite, et de ne la boire qu'après l'avoir refroidie
pendant la nuit et ensuite de nouveau réchauffée.
Si, pour une armée, on est obligé de rendre
potable une mauvaise eau, il faut creuser des fosses
continues du point le plus élevé vers
la partie déclive, et les faire traverser par
l'eau, après y avoir jeté de la terre
douce et grasse, par exemple celle dont on fait de la
poterie; car les eaux laisseront toujours dans les fosses
leurs mauvaises qualités.
4. DE L'AMÉLIORATION DE L'EAU.
(Tiré de Dioclès.)
On rendra l'eau très peu active en
la réduisant au tiers par l'ébullition;
on fera également bouillir, de la même
manière, les eaux blanchâtres, mais on
jettera dans ces dernières des mottes de terre
glaise sèche, jusqu'à ce qu'elles soient
imbibées d'humidité, dans la mesure d'un
demi-modius pour chaque amphore; on ne boira ces eaux
qu'après les avoir fait bouillir. On peut chasser
de la manière suivante une odeur chaude de l'eau
: on la frappe avec la main contre le vent, on l'expose
au grand air dans un vase à grande ouverture,
et on la transvase peu à peu dans plusieurs [autres]
ustensiles.
5. PURIFICATION DE L'EAU.
(Tiré d'Athénée.)
On passe l'eau, tantôt à l'aide
des vases appelés stactes, comme à Alexandrie,
tantôt à l'aide de filtres, soit simples,
soit doubles ou triples, employés pour que la
partie la plus pure coule à travers. On creuse
aussi des fosses auprès de la mer ou des lacs;
dans le premier cas, quand on veut tirer de la mer de
l'eau potable, et dans le second, quand le lac est trouble
et contient des sangsues ou présente quelque
autre inconvénient, afin que la partie la plus
pure et la moins nuisible, en filtrant à travers
la terre, se rassemble dans les fosses. Lorsqu'il faut
se procurer une grande provision d'eau, par exemple
quand on est en campagne, on revêt les paroi,
des fosses de pierres ou de bois, et on tâche
de conserver l'eau pure en pavant le fond de la même
manière. Les eaux filtrées deviennent
plus ténues et très pures, par cette raison
elles sont aussi plus froides: mais plusieurs conservent,
même après la filtration, les propriétés
des corps visqueux.
6. DES VINS.
(Tiré de Galien.)
On appelle vulgairement vin aqueux celui qui
ressemble à l'eau par la couleur et par la consistance
; car il est transparent, limpide, pur et montre une
consistance ténue ; et, si vous le goûtez,
vous verrez qu'il n'a aucune qualité bien prononcée,
et que, pour faire un bon mélange, il ne supporte
pas l'addition de beaucoup d'eau voilà pourquoi
les anciens l'appelaient oligophore (qui supporte peu).
Ce vin-là n'est pas tout à fait dépourvu
d'action astringente, mais c'est une astringence tout
à fait affaiblie qu'il possède car, si
vous le comparez à l'eau, vous verrez clairement,
par cette comparaison, qu'il est formé d'eau
ayant pris une légère astringence. Son
action est également semblable à celle
de l'eau, puisqu'il n'affecte ni la tête ni les
nerfs, quand ces parties sont faibles, car il n'échauffe
pas manifestement non plus. On voit qu'il ne possède
aucune âpreté plus ou moins prononcée,
ni goût sucré ou âcre, ni aucune
autre qualité apparente. Ce vin convient pour
expulser les crachats du poumon, parce qu'il donne de
la force et qu'il exerce sur les humeurs une action
modérément humectante et incisive. Administré
aux fébricitants, il est moins dangereux que
tout autre; car il est le seul entre tous qui ait le
privilège d'être exempt à la fois
des inconvénients de l'eau et de ceux du vin.
Outre qu'il ne fatigue jamais la tête, ce vin
lui est souvent même avantageux, en faisant cesser
les petites douleurs qui tiennent aux humeurs renfermées
dans l'estomac; car vous verrez, en effet, que certaines
gens prennent quelquefois de la céphalalgie pour
avoir bu de l'eau, surtout quand cette eau est mauvaise,
parce qu'elle se corrompt et relâche la tension
naturelle de l'estomac ; or, cet organe étant
relâché, des humeurs bilieuses ténues
se rassemblent ordinairement de tous les points du corps
dans sa cavité, comme cela arrive chez les gens
qui ont jeûné; et c'est justement de l'inconvénient
et de l'effet nuisible de ces humeurs que le vin aqueux
délivre les malades, d'abord par son action tempérante
immédiate, et un peu plus tard parce que l'estomac,
s'étant renforcé, repousse vers le bas
ce qui l'incommodait. Pour les sujets d'un tempérament
tout à fait chaud, il vaut mieux boire de l'eau
que du vin ; et, si quelquefois ils ont besoin de vin,
il faut leur en donner qui soit ténu et modérément
âpre. Les vins aqueux et clairs donnent très-peu
de nourriture au corps, parce qu'ils poussent aux urines.
De tous les vins, il n'y a que ceux-là qu'on
puisse boire utilement quand ils sont nouveaux, par
exemple le vin appelé Gaurien, et quelques-uns
de ceux qui se font chez les Sabins. On trouvera facilement
dans chaque contrée des vins pareils ; chez nous,
ceux qui deviennent bons à boire en peu de temps
sont le Tibène, l'Arsyin et, après eux,
le Titacazène. Vous ne verrez jamais du vin d'un
goût sucré qui soit exactement clair ou
limpide; au contraire, il s'écartera plus ou
moins de ces deux qualités, sans être doué
d'aucune d'elles. Tout vin d'un goût sucré
réchauffe, présente une consistance épaisse,
et les propriétés particulières
dont il se montre doué, quand on le boit, sont
les conséquences des deux qualités susdites
; car la couleur n'a par elle-même aucun action
profitable ou nuisible. Ce vin traverse le corps avec
une lenteur proportionnelle au degré de sa consistance
: ainsi non-seulement il ne désobstruera pas
les organes engorgés, mais il aggravera même
l'obstruction, et, pour ce motif, il devient très
nuisible au foie malade, surtout quand cet organe est
affecté d'inflammation ou de squirrhe; tandis
qu'il fait moins de mal quand ce viscère est
obstrué par des humeurs épaisses, ou que
la maladie dépend de la faiblesse, comme dans
les maladies hépatiques proprement dites. Après
le foie, c'est à la raie que les vins d'un goût
sucré font le plus de tort; mais ils ne nuisent
pas au poumon, lorsqu'il contient dans les bronches
une humeur épaisse; car, dans les maladies aiguës,
le vin d'un goût sucré favorise l'expectoration,
quand la péripneumonie et la pleurésie
sont déjà arrivées à coction,
et que les parties ne sont plus enflammées. Les
vins d'un goût sucré causent d'autant moins
de pesanteur de tête et de perversion de l'intelligence,
qu'ils s'écartent davantage de l'extrême
degré de chaleur: ils traversent plutôt
rapidement le corps et augmentent le volume des viscères;
mais ils ne conviennent pas aux gens tourmentés
par la bile amère, car toutes les humeurs d'un
goût sucré fournissent des matériaux
à la bile jaune. Ce n'est pas seulement parce
que l'excès de chaleur rend ces humeurs amères
que le vin d'un goût sucré nuit aux fébricitants,
mais aussi parce qu'étant épais il ne
passe pas vite par les urines, et n'entraîne ni
n'évacue avec lui les humeurs bilieuses. Il ne
présente, par conséquent, qu'un seul avantage,
celui de relâcher le ventre; c'est aussi pour
cette raison qu'on le boit avant le repas : si donc
il ne produit pas cet effet, il nuit de toutes les façons;
car à ses autres inconvénients il joint
celui de produire de la soif, et prouve par cela même
qu'il se transforme facilement en bile. Ces vins sont,
en outre, flatulents, mais ils ne sont pas nuisibles
à la partie inférieure des intestins,
bien que les flatuosités qu'ils produisent marchent
lentement et séjournent longtemps dans l'hypocondre,
jusqu'à ce qu'elles aient atteint un degré
complet de coction et d'atténuation ; car, dès
qu'elles sont une fois parvenues à ce degré
de coction, elles acquièrent en même temps
une nature plus mobile et plus subtile. Le vin âpre
doué en même temps d'un goût sucré,
comme le vin Abate, dans la Cilicie, est mauvais, parce
qu'il réunit des qualités opposées
; il ne se distribue donc pas dans le corps et ne descend
pas, mais il séjourne pendant longtemps dans
le ventre supérieur et le remplit, de flatuosités.
Le vin noir, qui, sans avoir un goût sucré,
présente une âpreté manifeste plus
ou moins prononcée, cause de la plénitude
, marche lentement et supprime les deux excrétions,
celle qui se fait par le ventre, et surtout celle qui
se fait par la vessie; il séjourne longtemps
dans les hypocondres, s'aigrit facilement, et a de la
tendance à produire le vomissement : ce n'est
que dans le cas de flux de ventre qu'il convient, et
même, dans cette circonstance, il ne faut pas
le boire jusqu'à satiété. Le vin
qui est à la fois blanc et âpre ne pousse
cependant pas aux urines, et, s'il est épais,
il séjourne longtemps [dans l'hypocondre]; si,
au contraire, il n'est pas épais, il n'y reste
pas longtemps, comme fait le vin noir. mais il ne passe
pas non plus par les urines, comme les vins à
la fois blancs et modérément âpres.
Le vin paillet et âpre convient aussi contre le
flux de ventre; car il y a aussi deux espèces
de vin paillet, de même que de vin noir, l'un
doué d'un goût sucré, et l'autre
âpre. Mais le vin paillet affecte davantage la
tête et l'intelligence, parce qu'il est plus chaud
que le noir. Le vin jaune est éminemment chaud,
ainsi que le vin paillet qui vient après lui,
puis après eux viennent le vin rouge, et ensuite
le vin d'un goût sucré, tandis que le vin
blanc est le moins échauffant de tous. Aucun
vin blanc n'est doué d'un goût sucré;
mais quelques-uns sont âpres et épais,
d'autres aqueux et ténus; parmi les vins jaunes
et paillets, quelques-uns ont un goût modérément
sucré, comme le vin d'Hippodame et le vin Faustien;
d'autres, au contraire, n'ont pas le moindre goût
sucré. Les vins rouges sont plus épais
que ceux dont il vient d'être question, parce
qu'ils se rapprochent déjà, par la couleur,
des vins noirs. La nourriture que fournissent tous ces
vins est en raison de leur consistance; il faut donc
permettre de boire des vins d'un goût sucré
à ceux qui ont besoin d'être restaurés,
surtout quand leur foie, leur rate et leurs reins sont
dans un état irréprochable, tandis que
les vins d'une consistance ténue conviennent
à ceux qui ont une accumulation d'humeurs épaisses
dans les veines, et, si ces humeurs sont froides, il
faut choisir des vins âcres et vieux; si, au contraire,
ces humeurs ne sont pas froides, on doit s'en tenir
à ceux qui ne pré-sentent aucune de ces
deux qualités. Le vin odorant est plus favorable
que les autres à la bonté des humeurs,
mais il porte à la tête. Nous employons
les vins âpres pour arrêter les flux de
ventre; mais nous ne nous en servirions dans aucun autre
cas, parce qu'ils ne favorisent ni la distribution des
aliments, ni la sanguification, ni la formation de bonnes
humeurs, ni l'écoulement facile des urines, ni
l'excrétion de la sueur, ni l'évacuation
des selles. Ni le vin de Falerne, ni le vin d'un goût
sucré et paillet du Tmolus, ni celui d'Ariuse,
ni le vin odorant et paillet de Lesbos qui leur est
semblable, ne conviennent donc aux constitutions plus
ou moins bilieuses; car tous ces vins-là
sont plus ou moins chauds, et ceux qui les boivent sont
facilement sujets à prendre du mal de tête,
de la fièvre ou quelque affection des nerfs.
Il ne faut donc pas donner du vin semblable aux individus
d'une nature bilieuse, ni à ceux qui on' éprouvé
un échauffement, ou une grande fatigue, ou la
faim, ou des chagrins, ni à ceux qui vivent dans
une saison chaude, dans un pays chaud ou sous une constitution
chaude de l'air; par contré, il convient à
tous ceux qui ont besoin d'être réchauffés,
comme sont les sujets d'un tempérament pituiteux
et froid, à ceux qui souffrent d'une accumulation
d'humeurs froides, qui mènent une vie oisive;
dans un pays froid, en hiver, sous une constitution
froide et humide de l'air. Tous les vins qui ne sont
pas extrêmement épais et doués d'un
goût très-sucré, comme le vin de
Thère et le Scybélite, ont cela de commun,
que, lorsqu'ils ont vieilli, ils prennent une couleur
jaune et présentent quelque chose de brillant
à l'instar du feu; car les vins noirs, comme
chez nous le vin de Perpérine, deviennent d'abord,
en vieillissant, rouges ou paillets, et plus tard d'une
couleur jaune; et il en est de même pour le vin
blanc, comme le vin aminéen de Bithynie : les
Romains appellent Cécube le vin qui est parvenu
à ce degré de vieillesse; or ce vin est
déjà amer, et, pour cette raison, il n'est
pas bon à boire. Il faut donc éviter de
boire des vins aussi vieux, de même que les vins
tout à fait jeunes; il faut surtout s'abstenir
de boire les vins naturellement épais quand ils
sont jeunes, car ils sont si loin de favoriser la digestion,
qu'à peine ils se digèrent eux-mêmes;
en outre, ils ne descendent pas non plus par le ventre,
ne se distribuent pas facilement dans le corps, ne poussent
pas aux urines, et ne contribuent en rien ni à
la sanguification, ni à la nutrition, mais ils
restent long-temps suspendus dans l'estomac de même
que l'eau, et, si l'on en prend un peu trop, ils s'aigrissent
facilement. Le vin très-vieux diffère
tellement du vin à la fois blanc, âpre,
jeune et épais, que le premier réchauffe
très fortement, tandis que l'autre refroidit
d'une manière sensible. Quant au vin doux, tout
le monde sait qu'il est flatulent, qu'il se digère
difficilement, qu'il contient des humeurs épaisses
et qu'il n'a qu'un seul avantage, celui de relâcher
le ventre; et, si quelquefois il ne réussit pas
à produire cet effet, il devient très
nuisible. De tous les vins, les vins blancs et aqueux
vieillissent le plus vite, c'est-à-dire qu'ils
acquièrent promptement les qualités des
vins qui commencent à vieillir; ces qualités
consistent en une certaine âcreté jointe
à la propriété manifeste de réchauffer,
en une amertume qui se développe plus tard, qualité
dont on peut voir quelquefois se revêtir les vins
aqueux après un espace de dix ans, à moins
qu'auparavant, dans les trois ou quatre premières
années, ils ne se soient aigris. Il est arrivé
quelquefois que les vins à la fois forts, âpres,
blancs et épais se sont encore aigris après
un espace de dix ans, quand ils n'étaient pas
bien emmagasinés; ils sont aussi sujets à
prendre les qualités des vins vieux après
un espace de temps très prolongé. À
ce genre de vin appartiennent en Italie celui de Tibur,
celui du pays des Signins et des Marses, et celui de
Sorrente, lequel est à peine arrivé à
l'époque de sa maturité avant vingt ans;
cependant, parvenu à cet âge-là,
il a atteint le suprême degré de bonté,
et il reste longtemps bon à boire, parce qu'il
ne devient pas facilement amer, étant, par ses
vertus, l'émule du vin de Falerne. Les vins aqueux,
comme celui du pays des Sabins, le Gaurien, l'Arsyin,
le Titacazène, le Tibène et tous ceux
qui leur sont semblables, se comportent d'une façon
contraire; car ils prennent facilement des qualités
opposées, c'est-à-dire qu'ils deviennent
ou acides, ou bien amers, s'ils vieillissent [en se
conservant]. Le lieu dans lequel on conserve les vins
contribue beaucoup à leur faire subir l'un ou
l'autre de ces deux changements; car il faut préférer,
au commencement, un endroit froid, et plus tard un endroit
chaud, tandis qu'une localité tiède fait
facilement aigrir le vin. Si, déposés
dans un endroit froid, ils se sont conservés
deux ou trois ans, ils ont besoin, après cela,
d'être fortement réchauffés, mais
ils ne réclament jamais une localité tiède
ou d'une température moyenne. Quelques vins sont
tellement faibles et aqueux, qu'ils ne supportent pas
le froid, même lorsqu'ils sont tout à fait
nouveaux. Les vases qu'on laissera sans couvercle aigriront
facilement le vin; au contraire, parmi ceux qui sont
munis de couvercles, les vases pleins sont les moins
sujets à produire cet accident; car, dans les
vases à moitié remplis, et qui par conséquent
contiennent de l'air à l'intérieur, les
vins subissent plus vite, par l'intermédiaire
de cet air intérieur, les changements que leur
impriment les influences extérieures, mais les
vins renfermés dans des vases remplis jusqu'au
couvercle n'éprouvent que par son intermédiaire
une altération faible, peu sensible, proportionnelle
à la densité du couvercle; car on verra
que le vin contenu dans des vases fermés à
l'aide de poix ou de gypse se conservera mieux que celui
qu'on a mis dans des vases fermés avec du cuir
seulement, ou dans des vases qui ont des feuilles pour
couvercle. Il y a chez nous, en Asie, trois vins paillets
excellents, celui du Tmolus, celui de Lesbos et celui
d'Ariuse qui croît à Chios, lequel était
le plus célèbre chez les anciens et dont
tous se servaient pour la préparation des meilleurs
médicaments, et surtout pour les antidotes.
7. SUR LE VIN.
(Tiré de Rufus.)
[Ce chapitre se, trouve dans le traité
Sur le régime, ou Sur les boissons; dans le second livre.]
Je loue le vin comme soutien de la santé
plus que toute autre chose; mais celui qui en boit a
besoin de sagesse, s'il ne veut pas s'attirer quelque
mal irrémédiable; car le vin peut développer
la chaleur, remplir le corps de force, et digérer
les aliments dans toutes leurs parties ; et il n'y a
aucun vin qui soit si mauvais qu'il ne puisse produire
ces effets; mais il existe, sous ce rapport, comme pour
les autres choses, des qualités inférieures
et des qualités supérieures. Le vin peut
aussi placer l'âme dans un certain état,
car il est le remède de la douleur; et, à
mon avis, c'était du vin qu'Hélène
versait dans le cratère. Celui donc qui en boit
modérément peut être joyeux et accueillant;
il peut se porter parfaitement bien; mais qu'y a-t-il
d'agréable dans l'excès pour celui qui
boit du vin outre mesure? qu'y a-t-il dans cet excès
qui ne soit douloureux? D'ailleurs , comment celui qui
en boit plus qu'il n'en faut pourrait-il être.
exempt de désagréments, quand l'âme
est noyée dans une si grande quantité
de vin, qu'elle est refroidie par ce qu'il y a de plus
chaud? Jugez-en par les preuves suivantes : d'abord
le corps de l'homme ivre devient impuissant à
se gouverner, et ensuite enclin au sommeil; cependant
la nourriture se digère aussi par la chaleur.
Voilà ce qu'éprouvent les gens ivres immédiatement
par l'effet du refroidissement; plus tard il n'y a pas
de maux auxquels on ne puisse s'attendre; car il est
à craindre qu'on ne soit frappé d'apoplexie,
qu'on n'éprouve des douleurs aux articulations,
qu'on ne devienne estropié de quelque membre,
et que le vin ne fasse naître au foie, à
la rate et à la tête, les maladies propres
à chacune de ces parties. Je me surprends quelquefois
à m'étonner comment, dans un cas où
les avantages et les inconvénients sont si évidents,
on préfère ce qu'il y a de plus mauvais,
tandis qu'on pouvait obtenir des résultats excellents
de l'usage du vin.
8. DU SIRAEON.
(Tiré de Galien.)
Il faut faire le siraeon (vin doux cuit) avec
du vin doux, non pas celui qui provient de raisins âpres,
mais, autant que possible, avec celui qu'on tire de
raisins doués d'un goût sucré; on
ne doit pas non plus le préparer avec le vin
qui coule le premier, mais avec celui qui coule le dernier.
Si donc le vin est tel que nous venons de le dire, il
faut le faire bouillir jusqu'à réduction
de moitié; si, au contraire, le vin doux n'est
pas de cette espèce, on le réduira au
tiers par
9. DU VIN DOUX CUIT.
(Tiré de Rufus.)
[Du second livre du traité Sur le régime.]
Le vin doux cuit a la propriété
de réchauffer, mais pas autant que le vin, d'où
quelques-uns sont d'avis qu'il refroidit; mais, à
mon avis, rien de ce qui est d'un goût sucré
ne refroidit véritable-ment, comme on le croit,
parce que toute chose à goût sucré
est nécessairement agréable, et tout ce
qui est agréable cause une liquéfaction
ou dissolution; or c'est justement le chaud qui produit
ces effets-là. Le vin doux cuit ne passe pas
non plus par les urines, et n'a pas de tendance à
se distribuer rapidement dans le corps; mais il reste
dans l'estomac et y cause toujours de plus en plus de
la plénitude, tant il est épais. Il épaissit
aussi le sang; le foie et la rate s'épaississent
également par l'action du vin doux cuit.
10. DU VINAIGRE.
(Tiré de Galien.)
Le vinaigre est formé du mélange
d'une substance froide et d'une substance chaude, lesquelles
sont toutes deux composées de molécules
ténues ; mais l'action du froid prédomine,
bien que le froid reste subtil : voilà pourquoi
le vinaigre a des propriétés répercussives.
11. DU VINAIGRE.
( Tiré de Rufus. )
[Du second livre du traité Sur le régime.]
On se sert très fréquemment
du vinaigre dans le régime ordinaire; car c'est
le meilleur assaisonnement pour les mets secondaires,
et plusieurs d'entre eux ne sauraient s'en passer. Si
quel-qu'un avait la force de s'en priver, il en éprouverait
un très grand dommage aussi bien que s'il mangeait
sans sel les mets auxquels cet assaisonnement convient.
Le vinaigre est excellent pour l'orifice de l'estomac
et fournit un très bon aliment; il favorise la
digestion et est ennemi de la pituite. Le meilleur vinaigre
est celui qui provient des vins très forts, c'est-à-dire
de ceux qui ont une âpreté assez prononcée.
12. SUR LA BOISSON FAITE AVEC DU MARC DE
RAISIN (PIQUETTE).
(Tiré de Rufus.)
[Du même livre.]
On use encore de la boisson suivante : on
exprime le vin du raisin, puis on verse de l'eau sur
ce raisin, on le foule avec les pieds et on le pressure,
puis on le fait bouillir jusqu'à ce qu'il ne
reste que le tiers de la masse du liquide. On obtient
ainsi une boisson d'un goût sucré comme
le vin doux cuit, mais qui n'est ni épaisse ni
forte; et, si on la fait bien bouillir, elle convient
et par le plaisir qu'elle donne et parce. qu'elle pousse
aux urines; elle est exempte de flatuosités,
de façon qu'on peut la donner hardiment aux malades,
si cela est parfois nécessaire; si on ne la fait
pas bouillir, elle se change en mauvais vinaigre. Dioscoride
ajoute encore deux sextaires de sel par métrète,
et met la liqueur, après l'hiver, dans un vase
de terre cuite; il conseille de l'employer à
un an de là, parce qu'elle se gâte rapidement.
13. DU VIN FAIBLE.
(Tiré de Dioscoride.)
Il y a encore le vin appelé faible;
[pour le préparer] il faut mêler ensemble
parties égales d'eau et de vin doux; on les fait
bouillir ensuite lentement sur un feu doux, jusqu'à
ce que l'eau se soit épuisée; après
cela, on refroidit le liquide et on le dépose
dans un vase luté avec de la poix.
14. DE L'EAU MIELLÉE.
(Tiré de Galien.)
L'eau miellée n'est pas très
profitable aux gens tourmentés par la bile amère
; car, chez eux, elle se convertit en bile, à
moins qu'elle ne passe auparavant par les intestins
ou par la vessie, tandis que , si elle passe, non seulement
elle ne nuit en aucune façon, mais elle procure
même un grand avantage, parce qu'elle entraîne
avec elle les superfluités bilieuses; il convient
donc, pour les constitutions bilieuses, de donner de
l'eau miellée qui soit plutôt aqueuse,
afin qu'elle ne donne pas de soif et ne produise pas
de bile. De même que l'eau miellée ne convient
pas aux gens tourmentés par la bile amère,
de même elle ne convient pas à ceux dont
les viscères sont tuméfiés par
l'effet d'un squirrhe , de l'inflammation ou d'un oedème;
car elle est nuisible chez ces individus, en ce qu'elle
ne saurait traverser rapidement ces organes, tandis
qu'elle se change facilement en bile, surtout dans les
inflammations, à cause de l'excès de chaleur.
Le miel, étant de toutes les substances la plus
sucrée, s'il tombe dans un organisme d'un tempérament
chaud, se change et se convertit en une humeur bilieuse
aussitôt qu'il arrive dans les intestins avant
de remonter dans les veines; et, s'il arrive dans les
veines sans subir ce changement, il s'y transforme certainement
lorsqu'il y est parvenu; les autres substances sucrées
subissent ce changement plus tôt ou plus tard,
en raison de l'intensité de leur goût sucré,
en observant la même proportion que le miel, c'est-à-dire
qu'elles le subissent plus rapidement dans une constitution
plus ou moins chaude , et plus lentement dans une constitution
plutôt froide. Ainsi, puisque le miel se change
en bile dans les maladies aiguës, et que, de cette
façon, il leur est nuisible; que, de son côté,
l'eau passe lentement et séjourne très-longtemps
dans les hypocondres, et que ce dernier inconvénient
doit à son tour être évité,
le mélange de ces substances devient utile, si
on le compose dans les proportions suivantes : il faut
mêler à une grande quantité d'eau
assez de miel pour qu'il lui fraye le chemin et l'amène
à être distribuée dans le corps;
car, si les ingrédients sont mêlés
dans cette proportion, les urines commenceront à
couler plus facilement, et l'évacuation des crachats
devient plus rapide; si, au contraire, on y a mis beaucoup
de miel, il produit de la soif et rend les crachats
visqueux. Si donc on veut produire les effets susdits,
l'eau miellée plus ou moins aqueuse est préférable,
tandis que l'eau miellée plus ou moins chargée
convient pour relâcher le ventre. L'eau miellée
crue est également plutôt propre à
relâcher le ventre, tandis que l'eau miellée
bien cuite est plutôt nourrissante. On doit préparer
l'eau miellée en mêlant d'abord le miel
à une grande quantité d'eau, et en le
faisant bouillir ensuite jusqu'à ce qu'il cesse
de produire de l'écume; mais il faut, bien entendu,
ôter constamment l'écume aussitôt
qu'elle se forme, car cette opération enlève
au miel son âcreté.
15. DE L'EAU DE RAYONS DE MIEL.
On boit l'eau de rayons de miel en été,
comme une liqueur propre à rafraîchir et
à éteindre la soif, en la mêlant
à de l'eau froide. Cette boisson convient aussi
à ceux qui ont une accumulation d'humeurs crues
, surtout quand elle s'est aigrie; et cela lui arrive
très-souvent à un degré plus ou
moins prononcé, parce qu'on ne la prépare
pas avec de l'eau de pluie, comme l'hydromel. mais avec
la première eau venue. On la prépare de
la manière suivante : on exprime le miel des
rayons, lesquels doivent être de bonne qualité,
et on le jette dans un chaudron contenant de l'eau de
source pure et agréable au goût; ensuite
on fait bouillir jusqu'à ce que les rayons semblent
avoir perdu suffisamment tout le liquide qu'ils contenaient;
on met ce liquide en réserve, on le. con-serve,
et on fait usage de cette boisson, que les anciens appelaient
oxyglyky (aigre-doux).
16. DE L'HYDROMEL USITÉ CHEZ LES
ANCIENS.
Quand l'eau de pluie a perdu la propriété
de se corrompre, elle devient douce; on se sert de cette
eau après y avoir mêlé du miel qu'on
a préalablement fait bouillir et écumé.
On appelle vulgairement cette boisson hydromélon,
mais Dioscoride l'appelle hydromel, et il dit qu'on la prépare
en mêlant à une partie de miel deux parties
de vieille eau de pluie et en exposant le mélange
au soleil; il dit aussi que certaines gens font le mélange
avec l'eau de source, le réduisent au tiers par
l'ébullition et le mettent en réserve.
17. DE L'EAU DE RAYONS DE MIEL.
(Tiré de Philagrius.)
[Du traité Sur
les boissons agréables.]
Le temps opportun pour boire de l'eau de rayons
de miel est, dans les fièvres, celui où
il se montre quelque signe de coction dans les urines
seulement, et tout à la fois dans les crachats
[et dans les urines], s'il y a, en outre, au poumon
quelque affection qui ait besoin d'arriver à
coction. Il ne serait pas déraisonnable non plus
de donner de l'eau de rayons de miel avant la coction,
parce qu'elle a quelque chose d'incisif et de détersif,
et qui peut contribuer à amener la coction; cependant
l'eau miellée vaut mieux pour amener la coction.
Le temps le plus favorable pour boire de l'eau de rayons
de miel c'est donc après la coction, parce que
cette liqueur a quelque chose de vineux; or on voit
les fièvres s'aggraver, si l'on boit du vin quand
la maladie n'est pas encore arrivée à
son déclin, époque où les causes
sont atténuées et où les canaux
se sont ouverts ; c'est alors que le vin qu'on boit
passe bien, qu'il n'aggrave pas les symptômes
de la fièvre, qu'il attire la chaleur vers la
peau, qu'il tempère immédiatement les
acrimonies, que peu après il provoque quelques
sueurs et pousse aux urines ; l'époque du déclin
est donc celle où il convient de boire du vin
ou quelqu'une des autres boissons vineuses. Mais, comme,
d'un autre côté, l'eau de rayons de miel
a une chaleur plus faible que le vin, qu'elle est douée
de propriétés détersives et incisives,
et que c'est là ce qui prépare la solution
des fièvres produites par des humeurs en putréfaction,
il faut donner également à boire de l'eau
de rayons de miel avant le déclin. On boit l'eau
miellée immédiatement après qu'elle
a été préparée : on peut
quelquefois aussi donner l'oxymel aussitôt après
sa préparation, quoiqu'il vaille mieux l'administrer
quand il y a vieilli; car alors ses propriétés
se sont unies intimement. Mais le miel aux roses, le
miel au verjus et la boisson aux têtes de pavot
ont grand besoin de vieillir; car ces liqueurs contiennent
une partie épaisse de la nature de la lie de
vin, et une autre qui est utile et bonne à boire
: ces deux parties ont besoin de temps pour se séparer,
surtout pour l'eau de rayons de miel ; car, avant que
cette dernière n'ait avec le temps acquis quelque
chose de vineux au goût et à l'odorat,
elle ne semblera différer en rien de l'eau miellée
; si, au contraire, on l'a soumise à l'ébullition
et si on l'a conservée pendant six mois environ,
elle offre non seulement les propriétés
que je viens d'énumérer, mais en outre
elle a celle de fortifier à l'instar du vin,
sans affecter la tête. Il faut donc boire l'eau
de rayons de miel quand elle a vieilli, et la préparer
de la manière suivante : on prend des rayons
remplis de miel de couleur blanche et qui laissent apercevoir
le miel en transparence, on les exprime avec les mains,
et on y mêle quatre mesures de bonne eau de source
si le miel est un peu épais, trois et demie s'il
est de consistance moyenne, et trois s'il est plutôt
ténu et liquide; on exprime fortement avec les
mains le résidu terreux de la cire d'où
le miel est sorti , on casse ce résidu en petits
morceaux qu'on laisse tomber dans l'eau ; ensuite on
recueille le liquide et on y dissout tout le miel; puis
on verse cette liqueur dans un pot neuf où l'on
a préalablement fait bouillir doucement de l'eau,
afin de lui ôter ce qu'il a de terreux ; on fait
bouillir l'eau de rayons de miel en chauffant avec des
charbons ou à l'aide d'une flamme peu intense
produite par du bois qui ne donne pas de fumée;
on ôte constamment les impuretés que le
liquide crache pour ainsi dire pendant l'ébullition.
Après la première ébullition, on
enlève tout ce qu'il y a de terreux, ainsi que
l'écume, bien entendu; on ôte le pot du
feu, puis on le laisse refroidir complètement,
et on enlève ce qui surnage après le refroidissement
(car, vers ce temps, il surnage quelque chose à
la surface); ensuite on chauffe de nouveau le vase,
et, après l'ébullition on le met de côté,
sans oublier d'enlever auparavant, encore une fois,
ce qui se porte à la surface après le
refroidissement; enfin, après avoir soumis le
liquide pour la troisième fois à l'ébullition,
au refroidissement, et après en avoir enlevé
de nouveau les impuretés, on verse l'eau de rayons
de miel préparée dans un vase de terre
cuite (or les vases dits de Philadelphie, de Carye ou
d'Omphace conviennent à cet effet), et on le
met dans une chambre où le vin se conserve habituellement
sans tourner. Il est clair qu'il faut prolonger l'ébullition
pendant longtemps; car, si on ôte le vase du feu
quand elle n'a fait que commencer ou quand elle est
peu avancée, il s'ensuivra que le liquide est
incomplètement cuit, et il y reste des impuretés
terreuses qui peuvent se pourrir et gâter la boisson.
Il y a deux manières de préparer l'eau
de rayons de miel; la première consiste à
faire bouillir seulement dans l'eau les rayons après
en avoir exprimé le miel, et c'est de cette manière
qu'on fait à la campagne une eau de rayons de
miel très vineuse, très épaisse
et plus ou moins noire; l'autre espèce se prépare
comme je viens de le décrire, en considérant
qu'on a un plus grand besoin du miel que des rayons
pour cette boisson; car on lave les rayons dans l'eau
sans les faire bouillir, tandis qu'on soumet à
l'ébullition tout le miel. C'est de cette préparation
que nous nous servons toujours, car nous rejetons habituellement
l'usage de l'eau toute seule, parce que, dans les maladies
fébriles, elle produit des effets mauvais assez
nombreux et assez considérables.
18. DU MÉDICAMENT AUX TÊTES
DE PAVOT.
(Tiré de Galien.)
On jette dans un sextaire d'eau dix têtes
de pavot : il faut les faire macérer d'abord,
si elles sont plutôt humides et molles, pendant
un jour et une nuit; si, au contraire, elles sont plutôt
dures et sèches, pendant un espace de temps qui
va au delà d'une journée; cependant il
est préférable de prendre celles qui ne
sont pas encore dures; il est clair qu'on rejettera
aussi celles qui sont tout à fait molles; car
celles qui sont trop sèches contiennent peu de
suc, tandis que les têtes de pavot trop humides
en contiennent beaucoup, il est vrai, mais ce suc est
encore mal élaboré, aqueux et faible :
voilà pourquoi on doit aussi éviter de
se servir de celles qui viennent d'un pays humide ou
marécageux. Ce que j'ai dit du nombre proportionnel
de têtes de pavot, eu égard à la
quantité d'eau, doit s'entendre de celles de
grandeur moyenne; si cependant quelques-unes dépassent
la moyenne, tandis que d'autres restent en deçà
et d'autres encore tiennent le milieu entre les deux
extrêmes, comme cela arrive habituellement, on
ajoute le nombre susdit pour chaque sextaire. Prenez
pour terme de la cuisson non pas le moment où
il ne reste plus que le tiers , le quart ou en général
une proportion plus ou moins grande d'eau, mais celui
où les têtes de pavot ont commencé
à se ramollir; car il est évident que
nous voulons en exprimer le suc, et cette opération
se fait quand elles sont entièrement ramollies.
Je conseille de mêler à ce médicament
la moitié de sa quantité de miel, de le
faire bouillir sur du feu qui ne fume pas, jusqu'à
ce qu'il ait atteint la consistance du miel d'Attique
: mais c'est dans l'eau de pluie qu'il faut le faire
bouillir, ou bien dans l'eau de source. On l'emploie
chez les gens qui manquent de sommeil, et auxquels nous
sommes souvent aussi obligés de donner des médicaments
faits avec l'opium; mais ceux qui ont le plus besoin
de ce genre de médicaments sont les malades qui
ont une fluxion ténue descendant de la tète
à la trachée-artère, fluxion qui
ne leur permet pas de dormir, par suite de la toux qu'elle
occasionne. Pour ces malades, j'ai aussi l'habitude
de préparer le médicament avec le vin
doux cuit. Dans ce cas, il suffit de cuire le médicament
en faisant bouillir les têtes de pavot jusqu'à
réduction de moitié. Si la fluxion est
très ténue, il vaut mieux encore les faire
bouillir dans du vin de Théra ou de Crète,
qui ont un goût sucré, que dans du miel;
car le miel a des propriétés atténuantes,
et, dans ces cas, il faut l'éviter, parce qu'il
aggrave les catarrhes ténus, Il faut encore mêler
à ce médicament, pendant qu'il est en
ébullition, de la racine de réglisse,
de façon qu'elle soit cuite avec les autres ingrédients
; et, si l'on n'a pas la racine sous la main, on en
met le suc importé de Crète. Si le poumon
contient en abondance des humeurs descendues de la tête,
la préparation faite avec du miel devient préférable;
car, de même que le médicament au vin doux
cuit vaut mieux pour ceux qui ont besoin de sommeil,
de même celui qu'on fait avec du miel mérite
la préférence pour favoriser l'expectoration.
On s'attaquera donc à ce qui est le plus pressé;
et, quand le malade va se cou-cher pour dormir, on lui
donnera, soit le médicament au miel, soit celui
qui n'en contient pas : quelquefois aussi on mêlera
tous les deux ensemble, en se proposant pour but de
faire prédominer dans le mélange celui
des deux dont l'usage est le plus pressé. Que
la dose moyenne soit de deux grandes cuillerées;
vous l'augmenterez ou vous la diminuerez en raison de
la complexion du malade auquel vous donnez le médicament,
de son âge, de la saison de l'année et
du pays; car, si toutes ces circonstances se rapprochent
plutôt du froid, vous donnerez une très-petite
dose, tandis que, si elles se rapprochent plutôt
du chaud, vous donnerez une dose plus forte. Il est
clair qu'on donnera aussi une quantité plus ou
moins considérable du médicament, en raison
de la quantité et de la qualité de la
fluxion; car c'est là une règle commune
pour tous les moyens de traitement.
19. DE LA BOISSON AUX TÊTES DE PAVOT.
(Tiré de Philagrius.)
[Du livre Sur les
boissons agréables.]
Moi je ne donne pas seulement la boisson faite
avec les têtes de pavot aux gens qui vont se coucher
pour dormir, ou qui manquent de sommeil, ou pour combattre
une toux, cas pour lesquels Galien a
bien déterminé le temps de l'administration
et la dose du médicament, mais j'en donne également
à ceux qui ont une fièvre violente, qui
éprouvent une chaleur insupportable, qui ont
de l'ardeur à l'orifice de l'estomac ; je le
prescris dans l'érésipèle et en
général dans les maladies chaudes, et,
dans ces cas, j'augmente de beaucoup la dose, en donnant
cinq ou six cuillerées, et non pas seulement
une fois, mais deux, trois et plusieurs fois par jour;
non seulement à l'acmé des maladies fébriles,
mais aussi avant cette époque, et quand il n'y
a pas encore des signes évidents de coction ;
si le malade est abattu par l'insomnie, ou par quelque
chaleur âcre ou vive; voilà pourquoi ceux
qui veulent donner la boisson aux têtes de pavot
avant le point culminant des maladies fébriles
ont raison, à mon avis, de verser dedans de l'oxymel;
car ce liquide atténue la densité de la
substance du médicament et lui conserve sa vertu
refroidissante sans porter obstacle à la rapidité
de la digestion. Ce n'est pas seulement dans les fièvres
excitées par la putréfaction d'humeurs
épaisses, qu'il faut ajouter de l'oxymel à
la boisson susdite, surtout quand nous la donnons avant
l'acmé, mais aussi dans les cas où l'obstruction
des viscères, par exemple du foie, de la rate,
du poumon et des autres organes semblables, est accompagnée
de fièvres ardentes; on donne alors cinq ou six
cuillerées pleines, sans craindre l'excès
du refroidissement, comme on le craint chez les malades
affectés de toux sans fièvre; car nous
réprimons la chaleur contre nature, et c'est
en vue de ce résultat que nous réglons
la quantité du remède, qui, dans ce cas,
ne s'attaque pas à la chaleur naturelle. Il est
clair que, quand on veut administrer ce remède
comme moyen héroïque, il faut que non seulement
la maladie, mais aussi l'accès, soient arrivés
à leur acmé, de sorte que les deux points
culminants, celui de l'accès partiel et celui
de la maladie elle-même, coïncident; or je
me sers de l'expression héroïque, quand
les doses sont fortement augmentées dans le cas
où nous espérons résoudre la maladie
par une crise; car, avant l'acmé de la maladie,
quand nous sommes convaincus que nous ne pouvons pas
produire de crise, nous employons cette boisson pour
refroidir, en en prescrivant une dose modérée.
Nous donnerons cette boisson, à l'acmé
de la maladie, quelquefois toute seule, d'autres fois
avec de l'oxymel, ou bien nous y ajoutons une quantité
modérée de miel au verjus, quelquefois
aussi de miel aux roses , ou un peu de vin du genre
de ceux qui passent vite, surtout si la boisson a été
préparée avec de l'eau; car c'est une
propriété inhérente à l'eau
de passer lentement. Il vaut encore un peu mieux administrer
du vin un peu clair et transparent que de l'eau, pour
y faire bouillir les têtes de pavot; car, ainsi
préparée, la boisson passe plus vite et
a en même temps des propriétés fortifiantes.
Mais l'emploi d'un vin semblable agit également
assez bien dans le cas d'un resserrement de la peau
plus ou moins prononcé; de même le miel
au verjus est préférable pour les organismes
un peu lâches, ou lorsqu'il y a une faiblesse
plus ou moins grande de l'orifice de l'estomac, surtout
quand cette partie pèche par défaut d'appétit;
il en est de même pour les gens habitués
à boire du vin d'un goût sucré,
ou pour les malades qui ressentent à l'estomac
quelque afflux d'humeurs délétères
ou bilieuses ; on pourra aussi mêler du miel rosat
à la boisson pour les individus qui présentent
ces conditions. Voilà ce qu'il suffit de considérer
préalablement dans les fièvres; il faut
maintenant parler des autres maladies; car ce n'est
pas seulement quand le poumon est échauffé
ou affecté de fluxion, ou qu'il excite de la
toux que cette boisson est utile, mais elle l'est également
pour les autres viscères ; voilà pourquoi
nous n'en donnons pas seulement aux malades qui souffrent
du foie ou de la rate, mais aussi à ceux qui
ont les reins et la vessie affectés, quand la
maladie est chaude. Ainsi elle dompte merveilleusement
les stranguries causées par l'âcreté
des urines, surtout quand on la donne en grande quantité
dans le bain, ou avant, lorsqu'on est sur le point d'y
entrer; dans ce cas, nous prescrivons aussi un régime
plus ou moins substantiel et propre à produire
de bonnes humeurs. Cette boisson convient encore chez
les sujets affectés de maladies des reins, et
dont les flancs et les lombes sont plus ou moins chauds,
ainsi que pour ceux que le diabète ou le choléra
ont mis en danger; mais, dans ces deux derniers cas,
il est éminemment utile, si rien ne s'y oppose,
de mêler de l'eau très froide à
cette boisson, car l'eau froide est le suprême
médicament du choléra. Cependant, chez
ces malades, il faut fortifier d'abord tout le ventre,
à l'aide d'[embrocations faites avec] l'huile
de pommes ou de mastic, le suc de raisins verts et un
peu d'alun scissile, ou avec d'autres ingrédients
semblables; on frottera aussi toute la peau du malade, pendant longtemps,
avec les mains non graissées ou avec des linges
doux, on appliquera des ventouses à la partie
inférieure et supérieure du dos et à
la poitrine, et on donnera ensuite notre boisson mêlée
à du miel au verjus chaud. Après avoir
agi de cette façon , si les évacuations
restent exagérées, et qu'on soupçonne
ou qu'on craigne une défaillance et des convulsions,
on est obligé d'avoir recours à l'eau
froide prise en boisson. Si l'on veut décharger
la poitrine et qu'on s'aperçoive que cela est
nécessaire à cause de l'insomnie ou de
l'excès de chaleur, il faut administrer, quand
la maladie a besoin d'être amenée à
coction, du beurre, de la résine de térébenthine,
et avec cela de l'iris; si, au contraire, la maladie
est chronique, on prescrit du miel et des remèdes
semblables, après quoi on donne la boisson quand
les malades vont se coucher; s'il est besoin d'exercer
une action incisive et détersive sur ce que contient
le poumon, il faut donner non seulement les remèdes
susdits, mais encore un peu de feuilles de pouliot,
d'hyssope, de capillaire, d'opopanax, le tout cuit dans
l'eau, ainsi qu'un peu d'oxymel, soit seul, soit avec
la décoction des plantes qui viennent d'être
énumérées, puis, au moment où
le malade va se coucher, on y ajoute la boisson aux
têtes de pavot; et quelque-fois, s'il est nécessaire,
on l'ajoute aussi pendant le jour ou à quelque
autre époque de la nuit, dans le cas où
nous sommes pressés par quelque lièvre
ardente ou par l'insomnie.
20. DE LA BOISSON AUX COINGS ET DE CELLE
AUX CORNOUILLES.
[Du même livre.]
La boisson aux coings se fait de la manière
suivante : après avoir enlevé l'écorce
et la partie centrale de ces fruits, on les fait bouillir
avec de la bonne eau de source, jusqu'à ce qu'un
tiers en soit évaporé, et on verse avec
soin les deux tiers qui restent dans les vases de terre
cuite dont j'ai parlé plus haut (p. 370) , pour
les mettre en réserve dans une pièce convenable,
car cette boisson devient vineuse et âpre. Son
usage est favorable aux gens affectés du flux
céliaque, et elle fortifie quelquefois l'orifice
de l'estomac, quand il est affaibli, ainsi que le foie,
dans les circonstances où ces parties sont plus
humides que dans l'état habituel. Quand l'ébullition
est presque achevée, on ajoute quelquefois aussi
à cette boisson du bon miel, ingrédient
qu'on ne mêle pas aux diverses préparations
seulement pour l'agrément du goût, mais
aussi pour les empêcher de se décomposer;
car le liquide dans lequel on aura mis du miel ne se
gâtera pas facilement. Il est clair qu'une telle
boisson conviendra aux maladies qui réclament
une action à la fois détersive et astringente,
comme celles qui tiennent à l'ulcération
des parties internes, telles que les intestins, l'orifice
de l'estomac, l'oesophage. On fait encore avec certains
autres ingrédients, mais surtout avec les fruits
appelés cornouilles, une boisson semblable à
la boisson aux coings, dont il vient d'être question,
ayant la même composition qu'elle et se prêtant
aux mêmes usages.
21. DU MIEL AU VERJUS.
[Du même livre.]
On prend des raisins verts quand ils vont
commencer à mûrir, époque à
laquelle ils conservent encore au suprême degré
leurs propriétés acides, ans avoir perdu
leur astringence; on les place ensuite, pendant trois
ou quatre jours, dans une pièce d'une température
moyenne, surtout si l'air extérieur est un peu
humide; puis, après les avoir mis de côté,
il faut les exprimer et recueillir le liquide dans un
vase en verre, puis ajouter une partie de bon miel écumé
à trois parties du liquide, et chauffer le tout
au soleil pendant plusieurs jours, jusqu'à ce
que le suc des raisins verts ait cessé de fermenter
(mais il faut beaucoup de temps pour cela) ; ensuite
on le met dans une pièce d'un étage supérieur,
et on con-serve la boisson exempte de corruption. En
composant ce médicament dans ces proportions-là,
je l'emploie dans les maladies dont je viens de parler
(ch. 19), ainsi que chez ceux qui ont vers les intestins
des flux ténus et de longue durée, lesquels,
par l'effet d'une disproportion chaude des éléments,
produisent continuellement des évacuations. Aux
individus chez lesquels l'orifice de l'estomac, à
cause d'une disposition à la fois chaude et humide,
n'excite pas l'appétit, je l'administre également,
après avoir toutefois, à l'aide de certains
autres moyens, balayé les liquides malfaisants
qui sont poussés vers l'orifice de l'estomac
et qui y causent le défaut d'appétit.
Je donne aussi cette boisson sans opérer de détersion
préalable, si l'humeur n'a pas été
absorbée; car le miel au verjus agit bien pour
faire ces-série défaut d'appétit,
surtout si on le boit sans trop le couper. Il agit encore
assez bien chez les malades en proie à des défaillances
qui tiennent à la raréfaction du corps,
produite par un écoulement d'humeurs ténues,
et surtout dans les fièvres dans lesquelles un
abattement soudain et très prononcé, qui
a lieu sans évacuation palpable, révèle
la nature de la maladie. Le principal moyen de traitement,
dans cet état, est un vin qui passe bien et qui,
en même temps, a une certaine astringence; si
on n'en a pas de semblable, on peut mêler à
notre boisson du vin de couleur jaune et d'une consistance
ténue, et la donner avec du pain, en la coupant,
en été, avec de l'eau froide, pourvu qu'il
n'existe pas d'inflammation d'une partie importante;
tandis qu'en hiver, il est indispensable de la couper
avec de l'eau chaude, et même, quand les défaillances
dont j'ai parlé sont très fortes, il faut,
en tout temps, la couper avec de l'eau chaude. Dans
les défaillances très rapides, il importe
quelquefois que les aliments se distribuent très
promptement; car le remède qui convient aux malades
chez qui s'opère une telle évaporation
doit en même temps accélérer la
distribution des molécules et produire sûrement
leur rétention; or on considérera, avec
raison, comme telles les boissons qui ont à la
fois des propriétés chaudes et astringentes,
parce que la chaleur dont elles sont douées leur
donne la faculté d'arriver vite au but, et leur
astringence celle de demeurer en place [quand elles
sont arrivées]. Il suit donc de ce raisonnement
que le miel de verjus convient [dans les cas qui exigent
de telles substances] ; car le miel qu'il contient,
et son acidité lui impriment un mouvement rapide,
tandis que son astringence, qui, par nature, arrive
lentement, le fait demeurer en place [quand il est parvenu
au but]. Toutefois il sera meilleur d'ajouter du vin
dans le miel au verjus, afin d'affaiblir ses propriétés
acides, qui exercent une action atténuante sur
les humeurs ; pour cette même raison, il est préférable
de choisir du vin paillet d'un goût légèrement
sucré et qui ne soit pas trop ténu. On
s'apercevra donc que les deux boissons, celle aux têtes
de pavot et le miel au verjus, conviennent dans les
maladies chaudes et les intempéries chaudes des
éléments : il en est encore de même
pour le miel aux roses, qui cependant a des propriétés
tempérantes plus prononcées que le miel
au verjus, et qui, pour cette raison même, est
éminemment utile aux malades en proie à
l'ardeur causée par des humeurs mordicantes et
chaudes, qu'elles produisent cette ardeur par une fièvre
très aiguë ou de toute autre façon,
pourvu qu'il n'y ait pas de relâchement fâcheux
du ventre; car, dans ce cas, la première des
boissons mentionnées convient mieux. Il faut
que la cause [matérielle] des fièvres
soit déjà en voie de parvenir à
coction, pour qu'on puisse donner ensuite l'une et l'autre.
22. DU MIEL AUX ROSES.
[Du même livre.]
Le miel aux roses se fait avec trois parties
de suc de roses passé au tamis et une partie
de miel; on le laisse fermenter au soleil de la même
manière que le miel au verjus. Cette boisson
est doucement astringente; elle refroidit, a quelque
chose de détersif, et est douée d'une
certaine âcreté ; pour cette raison, c'est
aussi un bon moyen de traitement pour la bouche, quand
cette partie devient le siège d'une inflammation
chaude par l'afflux d'humeurs de même qualité
; car le miel aux roses réprime doucement ce
qui afflue, refroidit modérément ce qui
est en ébullition, et peut aussi amortir une
partie de l'âcreté, mode d'action semblable
à celle de la boisson aux têtes de pavot.
Le miel aux roses agit donc aussi de la même façon
sur les organes profonds ; il enlève en lavant,
grâce à sa vertu détersive, les
humeurs mordicantes, il procure un refroidissement aux
parties incommodées par la chaleur et la qualité
mordicante des humeurs, et il soutient les forces naturelles
par son astringence : aussi donnons-nous cette boisson
mêlée à l'eau, et aux malades affectés
de fièvre, et à certains autres, quand
l'accès aussi bien que la maladie elle-même
sont déjà arrivés à leur
acmé. À ceux qui n'ont point de surabondance
d'humeurs, il faut donner le miel aux roses, sans provoquer
aucune évacuation ; mais à ceux dont le
mal est accompagné d'humeurs brûlantes,
il ne faut le donner qu'après les avoir fait
vomir, ou après que les superfluités qui
les incommodaient ont passé par le bas. On doit
quelquefois aussi administrer cette boisson d'une manière
persistante chez les malades qui éprouvent des
ardeurs, lorsqu'il tombe une humeur délétère
des parties supérieures sur l'orifice de l'estomac
; car, dans les maladies fébriles, une seule
dose abondante, administrée en temps opportun,
suffira pour résoudre la maladie soit par des
sueurs, soit par un flux de ventre, soit par des vomissements,
symptômes qui suivent habituellement l'administration
des autres boissons données à l'époque
de l'acmé.
23. DE L'EAU DE CÉLERI.
[Du même livre.]
La décoction de céleri triomphe
des flatuosités crues et mal digérées
, et évacue la surabondance des humeurs par l'urine.
Il faut la donner à ceux qui ont la fièvre,
surtout quand cette fièvre est du genre des aiguës,
et que la solution ne s'opère pas par des crises
soudaines, mais par le procédé appelé
cochon lente. Le meilleur moyen de préparer cette
boisson, c'est de soumettre les racines à une
ébullition modérée, de façon
qu'elle ne devienne pas plus forte qu'il ne le faut,
et de ne pas donner l'eau de céleri avant la
désagrégation des humeurs qui allumaient
la fièvre.
24. DE L'OXYMEL.
(Tiré de Galien.)
Tandis que les propriétés de
l'eau miellée répondent, connue je l'ai
déjà dit, à tous les besoins dans
les maladies aiguës, et qu'elles ne leur sont contraires
que dans un seul cas, celui où, s'étant
échauffée outre mesure, elle se change
en bile, l'addition de vinaigre, en empêchant
ce changement, en fait un médicament excellent.
Il faut mêler à l'eau miellée le
vinaigre en assez grande quantité pour corriger
ce qu'elle a de bilieux; car [ainsi préparé]
l'oxymel chassera la soif et évacuera rapidement
les crachats qui ne sont pas tout à fait épais
et visqueux. Le résultat de ces deux actions
de l'oxymel est l'humectation de la bouche et du pharynx;
et, par cette même propriété humectante,
il est éminemment utile à la rate et au
foie, parce qu'il nettoie sans faire du mal. L'oxymel
est encore d'un usage très-étendu et d'une
utilité très considérable dans
les maladies du poumon et de la poitrine, à cause
du mélange bien proportionné de l'eau,
du vinaigre et du miel ; car l'oxymel ainsi préparé,
en exerçant une action incisive sur les gaz épais
et flatulents qui se trouvent dans l'hypocondre, en
chassant par le bas les flatuosités et en nettoyant
tous les conduits, fraye aux superfluités séreuses
et bilieuses la route des urines. Tandis donc que l'oxymel
modérément coupé est à l'abri
de tous les inconvénients que produisent l'eau
miellée, et de ceux que causent le vin et l'eau
, il n'y a qu'une circonstance nit il nuit quelquefois
en raclant l'intestin; or il produit cet effet chez
les gens qui ont les intestins naturellement faibles
et prédisposés à être malades.
Le miel donc a des propriétés chaudes
et il se change aisément en bile dans les organismes
chauds; aussi c'est un mets qui convient aux natures
plus ou moins pituiteuses, à la vieillesse, ainsi
que dans les maladies froides; mais l'oxymel est éminemment
utile à tout âge et à toute constitution
pour raffermir la santé, parce qu'il désobstrue
tous les canaux étroits, de façon que
nulle part des humeurs épaisses ou glutineuses
n'y sont retenues ; c'est justement pour cette raison
même que les médicaments appelés
hygiéniques par les médecins son du genre
de ceux qui ont des vertus atténuantes. Si donc
vous examinez la chose aussi bien par le raisonnement
que par l'expérience vous vous apercevrez que
l'oxymel est la plus convenable de toute; les substances
qui constituent le régime atténuant, puisqu'il
ne contient pas d'humeurs mauvaises, qu'il ne nuit pas
à l'orifice de l'estomac, et qu'il ne possède
aucune autre propriété incommode. Mais
si c'est du vinaigre scillitique qu'on emploie [pour
le préparer], l'oxymel produira l'action incisive
la plus forte, non seulement de tous les: ingrédients
du ressort du régime, mais aussi de tous les
médicaments; et ceux qui veulent exercer une
action incisive et atténuante très prononcée
sur toutes les superfluités épaisses ,
visqueuses et pituiteuses qui se forment peu à
peu dans leur corps, doivent se servir du vin et du
vinaigre scillitique; en effet, j'ai connu un grand
nombre de gens qui ont été exempts de
maladies jusqu'à leur mort en prenant du vinaigre
et du vin scillitique. On doit préparer l'oxymel
de la manière suivante ; on écume sur
des charbons du miel de qualité supérieure,
on y met du vinaigre autant qu'il en faut pour que le
mélange ne se montre ni trop acide ni trop sucré
au goût, et on le fait bouillir de nouveau sur
des charbons, de façon que les propriétés
des ingrédients s'unissent intimement, et que
la crudité du vinaigre ne se trahisse pas au
goût; ensuite on met le mélange en réserve
dans un endroit quelconque, et, lorsqu'on veut s'en
servir, on y verse de l'eau, en le coupant dans la même
pro-portion que le vin. Il vaut mieux déterminer
la proportion des ingrédients par les sensations
de ceux auxquels l'oxymel est destiné, que par
les nôtres, et admettre que l'oxymel le plus agréable
au goût est celui qui s'adapte le mieux à
la nature de l'individu , et que par conséquent
il lui sera utile, tandis que l'oxymel très désagréable
au goût lui sera très contraire. La première
préparation de l'oxymel, pour convenir autant
que possible à la plupart des gens, doit se faire
ainsi : on mêle à une partie de vinaigre
le double de miel écumé. Si on veut y
mettre l'eau dès le commencement, on s'y prend
de cette façon : mêler à l'oxymel
le quadruple d'eau de qualité supérieure,
ensuite faire bouillir le tout modérément
aussi longtemps qu'il monte de l'écume à
la surface. Le mauvais miel rejette beaucoup d'écume;
on doit donc prolonger son ébullition pendant
plus longtemps; le meilleur miel, au contraire, en rejette
très peu, et pendant un très court espace
de temps ; c'est pourquoi il n'a pas besoin d'une ébullition
aussi prolongée : or l'ébullition la plus
prolongée réduit à un quart le
liquide primitif. On prépare aussi l'oxymel en
mêlant de suite ensemble les trois ingrédients;
on mettra une partie de vinaigre, deux de miel et quatre
d'eau, et on les réduira, par l'ébullition,
au tiers ou au quart, en ôtant l'écume.
Si on veut faire de l'oxymel plus fort, on y mettra
autant de vinaigre que de miel.
25. PRÉPARATION DU VINAIGRE SCILLITIQUE
ET DE [QUELQUES] VINS.
(Tiré de Dioscoride.)
Le vinaigre scillitique se fait de la manière
suivante : on coupe par morceaux une mine de scille
blanche mondée, on la jette dans six sextaires
de bon vinaigre, on ferme soigneusement le vase avec
un couvercle, et on l'abandonne à lui-même
pendant six mois; ensuite on ôte la scille, on
l'exprime et on la jette; on met le vinaigre dans un
pot, après l'avoir passé au tamis. On
le donne journellement à boire à jeun,
d'abord en petite quantité, mais ensuite on augmente
peu à peu la dose, jusqu'à un cyathe :
quelques-uns donnent deux cyathes , et plus encore.
Le vin scillitique se fait de la manière suivante
; on prend trois mines de scille mondée et coupée
par morceaux, on la met dans un métrète
italien de bon vin doux ; on met le couvercle dessus,
et on abandonne le mélange à lui-même
pendant six mois; ensuite on passe au tamis, on transvase
et on met le liquide de côté. Le vin scillitique
devenu vieux est le meilleur. Il faut éviter
de s'en servir en cas de fièvre ou d'ulcération
des parties internes. On donne le vin appelé
melitite dans les fièvres de longue durée,
parce qu'il relâche légèrement le
ventre et qu'il pousse aux urines. Il convient encore
aux goutteux, ainsi qu'à ceux qui ont la tête
faible. On le prépare en jetant un choée
de miel et un cyathe de sel dans cinq choées
de vin nouveau âpre. Il faut le préparer
dans un grand pot, afin qu'il ait de l'espace pour fermenter,
et y saupoudrer peu à peu la quantité
susdite de sel, aussi longtemps qu'il est en fermentation;
quand la fermentation est finie, on le transvase dans
un autre pot de terre cuite.
[Préparation du vin miellé.]
Le meilleur, vin miellé est celui qu'on prépare
avec du vin vieux âpre et du bon miel; car il
cause moins de flatulence que les autres. On le prépare
ordinairement en mêlant une mesure de miel à
deux mesures de vin. D'autres, afin de pouvoir se servir
plus tôt de cette boisson, font bouillir ensemble
le miel avec le vin, et le mettent ensuite dans un pot.
Quelques-uns mêlent, par économie, six
sextaires de vin doux en fermentation à un sextaire
de miel, et mettent le liquide dans un pot quand la
fermentation est finie. Cette liqueur conserve son goût
sucré.
[Du vin aux coings.] Le vin aux coings, que
quelques-uns appellent vin aux pommes, se fait de la
manière suivante : on ôte les pépins
des coings, on les coupe comme des navets, et on en
fait tremper douze mines pendant trente jours dans un
métrète de vin doux; puis on filtre le
liquide et on le met de côté. On prépare
encore le miel aux pommes, que quelques-uns appellent
miel aux coings, en jetant dans du miel, et en si grande
quantité qu'ils y soient en-tassés, des
coings dont on a ôté les pépins.
Cette boisson devient douce :après un an, et
ressemble alors au vin miellé. Le vin aux coings
et le miel aux coings ont des propriétés
astringentes, sont favorables à l'orifice de
l'estomac, et conviennent contre les dysenteries, ainsi
qu'aux sujets affectés de maladie du foie ou
des reins, et à ceux qui urinent difficilement.
[Préparation de l'hydromélon.]
L'hydromélon se prépare en mêlant
quatre sextaires de suc de coings à huit sextaires
de miel et douze sextaires d'eau, qu'on expose au soleil
vers la canicule. Ses propriétés
sont encore les mêmes que celles des boissons
précédentes.
[Autre manière de faire de l'hydromélon.]
Coupez par petits morceaux, avec un roseau, trente-deux
coings de qualité supérieure dont on a
ôté les pépins; jetez-les dans huit
sextaires du meilleur miel; abandonnez le mélange
à lui-même pendant huit mois, mêlez-y
douze sextaires de vieille eau de pluie, et exposez
le tout au soleil pendant les chaleurs voisines de la
canicule, en évitant la pluie et la rosée.
[Préparation du vin de grenades.] Le
vin de grenades se prépare de la manière
suivante : on prend des grenades mûres sans pépins,
on exprime le suc des grains, et on le met de côté
après l'avoir réduit au tiers par l'ébullition.
Il agit contre les fluxions internes et contre les lièvres
qui tiennent au flux. II est favorable à l'orifice
de l'estomac et resserre le ventre.
[Préparation du vin aux roses.] Le
vin aux roses se fait de la manière suivante
: on lie une mine de roses de l'année sèches
et pilées dans un linge, on le met dans vingt
sextaires de vin doux et on presse le sachet; trois
mois plus tard, on filtre, on transvase et on met en
réserve. Ce vin convient à ceux qui n'ont
pas de fièvre, pour favoriser la digestion de
l'estomac et pour apaiser ses douleurs, si on le prend
après le repas; il est également utile
contre les selles liquides et contre la dysenterie.
[Préparation du miel aux roses. ] On
prépare encore la boisson appelée miel
aux roses, en mêlant ensemble du suc de roses
et du miel.
[Préparation du vin aux baies de myrte.]
Le vin aux baies de myrte se fait de la manière
suivante : on prend des baies de myrte noires qui commencent
déjà à se gâter; on les sèche
d'abord au soleil, et, après les avoir séchées,
on en pile une chénice qu'on mêle à
trois cotyles d'eau et à la même quantité
de vin âpre; ensuite on exprime et on met en réserve.
Ce vin est fortement astringent et très favorable
à l'orifice de l'estomac; il Convient contre
les fluxions qui se font vers cet orifice, ainsi que
vers l'estomac lui-même, contre les ulcérations
intérieures et contre le flux, Il noircit aussi
les cheveux.
[Préparation du vin de raisins verts.]
On prépare la boisson appelée vin aux
raisins verts, en faisant sécher au soleil, pendant
trois ou quatre jours, du raisin qui n'est pas encore
tout à fait mûr, mais qui est encore à
l'état vert, jusqu'à ce que les grains
se soient ridés. Après avoir exprimé
le vin, on l'expose au soleil dans des vases de terre
cuite; il a des propriétés astringentes
et est favorable à l'orifice de l'estomac. On
prétend aussi qu'il est utile contre les constitutions
pestilentielles. Il lui faut plusieurs années
pour devenir bon à boire.
[Préparation du vin au goudron.] On
prépare le vin au goudron avec du goudron et
du vin doux. Il faut d'abord laver fortement le goudron
avec de l'eau de mer ou de l'eau salée, jusqu'à
ce qu'il devienne blanc et que l'eau de mer en découle
pure; ensuite on le lave avec de l'eau douce, on mêle
une once de goudron à huit choées de vin,
et on abandonne le mélange à lui-même;
quand il a fermenté et qu'il s'est clarifié,
on le transvase. Ce vin réchauffe et favorise
la digestion; il est détersif, expectorant, et
convient contre les douleurs de la poitrine, de l'estomac,
du foie, de la rate et de la matrice non accompagnées
de fièvre, ainsi que contre les fluxions de longue
durée et les ulcérations des organes profondément
situés. Il agit aussi contre la toux, la lenteur
de la digestion, les accumulations de gaz et l'asthme.
[Préparation du vin d'absinthe.] Le
vin d'absinthe se prépare de la manière
suivante : on mêle, dans un vase de terre cuite,
une livre d'absinthe du Pont à quarante-huit
sextaires italiques [de vin doux], on les réduit,
par l'ébullition, au tiers; ensuite on verse
dessus six sextaires de vin doux et une demi-livre d'absinthe,
on les mêle avec soin, on les transvase et on
les met de côté. Ce vin est favorable à
l'orifice de l'estomac et pousse aux urines ; il convient
aux malades affectés de maladies du foie ou des
reins, ainsi que contre la jaunisse, la lenteur de la
digestion, le défaut d'appétit, la tension
prolongée des hypocondres, les accumulations
de gaz, les vers ronds et la rétention des règles.
[Préparation du vin à l'ellébore.]
Le vin à l'ellébore se prépare
de la manière suivante : on fait tremper ensemble,
pendant quinze jours, douze onces d'ellébore
noir, quatre onces d'aphronitron et douze cotyles de
vin doux; on décante et on s'en sert six mois
plus tard. Ce vin provoque aussi l'avortement. Donnez-en
un cyathe.
[Préparation du vin à la scammonée.]
On jette, contenue dans un linge, dans un choée
de vin doux , où on la laisse trente jours ,
quinze onces de racine de scammonée pulvérisée,
racine qu'on récolte au temps de la moisson.
Ce vin purge la bile et la pituite par les selles.
[Préparation du vin au thym.] Mettez,
dans soixante-douze livres de vin doux, cent drachmes
de thym pilé, criblé et lié dans
un linge. Ce vin convient contre la mauvaise digestion,
le défaut d'appétit, la torpeur des nerfs,
les douleurs des hypocondres, les frissons d'hiver et
les animaux vénéneux qui refroidissent
et causent de la putréfaction.
26. VIN DE DIOCLÈS POUR CONSERVER
LA SANTÉ.
Quand on a mis le vin doux dans les cruches
, jetez dans dix métrètes une mine de
marrube.
27. DE LA MANIÈRE D'ADMINISTRER
LE VIN.
(Tiré d'Hérodote.)
Comme il existe deux manières d'administrer
du vin, et que la nécessité exige son
emploi, soit pour résoudre une fièvre,
soit pour arrêter la liquéfaction de la
composition élémentaire du corps, il faut
savoir que, dans le dernier cas, on doit donner du vin
en tout état de cause pour restaurer les forces,
tandis que, pour les malades auxquels on pourrait donner
du vin dans le but de guérir la fièvre,
on peut employer ce traitement pour les uns, et le rejeter
pour les autres; car il n'y a rien qui presse. Les circonstances
qui se prêtent à l'usage du vin sont :
l'âge viril ou une époque de la vie qui
n'en est pas trop loin, le sexe masculin, plus que le
sexe féminin, le printemps et l'été,
les natures humides et modérément chaudes,
les fièvres de courte durée et non accompagnées
de symptômes graves; enfin celles dont le déclin
est confirmé se prêtent mieux à
l'administration du vin que celles qui ne sont qu'au
commencement de cette période. Ce traitement,
au contraire, ne convient pas, en général,
aux malades qui ont de la dureté ou de l'inflammation
à la région moyenne du corps, qui sont
d'un tempérament sec, et chez lesquels la perspiration
se fait difficilement, ni à ceux qui ont des
fièvres continues ou chez lesquels le système
nerveux est affecté. Il faut donner le vin à
jeun, en y ajoutant un cinquième d'eau très-chaude;
et, si le vin est très-fort, on y met un quart.
On l'affaiblira encore plus en le filtrant; car, dans
ce cas, il se fait beaucoup d'évaporation à
ses dépens. On administre la première
dose de vin affaiblie en se guidant d'après l'habitude
du malade et d'après l'effet agréable
que produit chez lui tel ou tel mélange. Il faut
en donner aussi une seconde fois, et même, si
on le désire, une troisième. On peut permettre
d'aller jusqu'à six cotyles à ceux qui
ont l'habitude de prendre du vin avant le repas, ou
qui, du reste, boivent habituellement beaucoup. Ceux
qui vivent à la manière des athlètes
ou qui ont l'habitude de ce qu'on appelle apocoltabismne
(c'est-à-dire de vomir avant dîner), peuvent,
s'ils le veulent, boire d'abord le double de la quantité
susdite et vomir ensuite; car, [de cette manière],
le liquide âcre et pituiteux qui se rassemble
habituellement, chez eux, [dans l'estomac,] sera évacué.
Il faut permettre également, à ceux qui
le veulent, de boire au milieu du repas, et leur faire
prendre ensuite, après le repas, la dose déterminée;
mais, en tout cas, l'administration du vin ne doit pas
s'éloigner de plus de deux heures de la fin du
repas; si plus tard on a de la soif, il faut boire de
l'eau. À ceux qui ont l'intention de manger quelque
chose de froid, il faut donner le vin au milieu du repas
ou après. Si nous avons besoin de faire agir
le vin sur les surfaces libres du corps, et s'il s'agit
d'individus qui ne sont pas accoutumés à
boire à jeun, ou bien qui ont des préjugés
contre l'habitude de boire sans manger, on leur donnera
quelques morceaux de pain qu'on aura trempés
dans du vin coupé d'eau chaude, et on leur ordonnera
de boire le mélange qui reste ; car cela fera
le même effet que s'ils buvaient à jeun.
Il faut s'y prendre de la même manière
chez les vieillards, les enfants et la plupart des femmes
; il en est de même pour ceux qui boivent habituellement
peu, ou auxquels le vin est naturellement nuisible.
Quant à ceux qui ne commencent à prendre
du vin qu'à l'occasion de notre traitement, il
faudra leur en donner en petite quantité pendant
le repas; on leur donnera, avant et après, l'eau
à laquelle ils sont accoutumés. Quand
les choses marchent à souhait, il faut forcer
tous ceux à qui on donne du vin pour guérir
quelque fièvre ou quelque maladie, de rester
en deçà de ce qui leur convient [dans
l'état de santé]. Comme, parmi les malades
qui doivent prendre du vin, il y a des différences
nombreuses, et qu'il est presque impossible de réunir
sous un seul point de vue, il n'est pas facile de déterminer
une dose commune pour tous ; cependant il faut bien
fixer des limites qui restent en deçà
du trop et du trop peu : que les malades ne boivent
donc pas plus de trois et pas moins d'un cotyle de vin
; en effet, chez ceux qui rejettent par le vomissement
ce qu'ils ont bu à jeun, il faut qu'un tiers
[du liquide avalé] reste [dans le corps] ; puis
il faut abandonner à leur habitude ceux qui ne
prennent un bain qu'après être restés
longtemps [dans la première chambre] : il en
est de même pour ceux qui ont l'habitude de prendre
du vin immédiatement avant le bain. Si les malades
qu'on traite par le vin veulent boire quelque chose
le lendemain, on leur ordonnera à tous de boire
de l'eau; et si on ne peut pas obtenir cela, il faut
leur permettre de prendre un peu de vin : on doit aussi
diminuer la quantité des aliments. Ceux qui prennent
un bain pour guérir la fièvre doivent,
quand ils sont arrivés à la seconde partie
du bain, s'en tenir à la même espèce
de vin qu'ils ont bue au commencement ; mais ceux qui
le font pour se restaurer doivent, à cette seconde
partie, passer à des vins plus forts; cependant
ce passage ne doit pas se faire brusquement, mais peu
à peu. Il est temps d'énumérer
les signes que doivent présenter ceux auxquels
on administre le vin avec succès; car, par cette
énumération, on comprendra du même
coup quels sont les mauvais signes. Les bons signes
sont les suivants : rougeur de la face accompagnée
d'une belle couleur naturelle [de tout le corps], facilité
de la respiration, sueurs chaudes générales,
légèreté de la tête, facilité
à mouvoir les membres, gaieté d'esprit,
oeil humide, sentiment de bien-être retiré
du bain et d'une bonne disposition à boire du
vin ; après que les malades ont bu, l'envie de
prendre des aliments, sensation agréable pendant
qu'on les prend, éructations qui soulagent; enfin,
après le repas, envie modérée de
boire, sueurs qui durent peu, évacuation d'urine,
souplesse, et bonne coloration du corps. Voici, au contraire,
les accidents qui arrivent à ceux auxquels on
a donné du vin à contre-temps : décoloration
de la face, sécheresse de toutes ou de la plupart
des parties du corps, et, s'il se montre quelque part
de la sueur, on verra qu'elle est froide et qu'il y
a en même temps de la pesanteur de tête,
symptôme qui est toujours accompagné d'une
difficulté de mouvement dans tous les membres
; puis on observera de la mauvaise humeur, de l'indifférence
pour les aliments, une soif qui ne s'étanche
pas par la boisson, de l'ardeur à l'hypocondre,
de l'absence d'éructation, accompagnée
d'envie de rendre des vents; ou, s'il y a des éructations,
elles ne soulageront pas du tout; enfin la vessie restera
souvent sans remplir ses fonctions, ou n'évacuera
l'urine que peu à peu, et il est inévitable
que ces malades aient le pouls fréquent. Si donc
soit tous, soit la plupart de ces signes se présentent,
et que les malades aient des nausées, on leur
ordonnera de vomir immédiatement; mais, si les
nausées manquent, et si les malades vomissent,
du reste, facilement, on leur ordonnera également
de vomir; à ceux, au contraire, qui vomissent
difficilement, on prescrira de prendre de l'eau chaude
après le vin, et de se reposer. Si, après
l'administration du vin, les malades sont pris de fièvre,
il faut, quand ils ont vomi et que l'accès est
long, les nourrir, après l'accès, avec
des aliments en petite quantité ; si, au contraire,
l'accès est court, il ne faut les nourrir qu'après
le sommeil qui suit le second accès; si enfin
ils n'ont pas vomi, il faut faire attention au ternaire
qui suit l'accès, et leur donner continuellement
de l'eau pendant les jours moyens, aux temps [du jour]
que nous avons déterminés, parce que,
si l'administration du vin est suivie de fièvre,
il est nuisible d'employer la méthode desséchante:
voilà pourquoi il convient d'affaiblir les corps
desséchés outre mesure par l'administration
du vin, en les humectant par l'usage continuel de l'eau.
28. DES COLLUTOIRES.
(Tiré d'Antyllus.)
[De son ouvrage Sur
les moyens de traitement,
du IIIe livre, qui comprend les choses administrées
aux malades.]
Les collutoires apaisent la soif, humectent
la bouche sèche, effacent les aspérités
de la langue, diminuent l'abattement des forces et enlèvent
la viscosité des dents. Ce n'est pas seulement
dans la rémittence qu'il faut administrer les
collutoires ; mais on doit en permettre un usage modéré
à toutes les époques de la maladie, excepté
au début. Le gargarisme, au contraire, produit
à la vérité un peu de bien, en
humectant les parties supérieures de l'oesophage;
mais cet effet est plus que compensé par le tort
qu'il fait en fermant les issues de la tête, et
en imprimant aux humeurs une tendance vers le haut.
29. DE LA BOISSON.
[Du même livre.]
À l'époque convenable, il faut
donner de l'eau chaude à tous les malades, quelle
que soit leur maladie; tandis que nous donnons principalement
de l'eau froide pour éteindre la chaleur qui
ne tient pas à une autre affection, par exemple
à l'inflammation, mais qui existe et incommode
par elle-même, comme dans les fièvres ardentes
accompagnées d'une chaleur extrême. En
outre, nous donnons accidentellement de l'eau froide
à ceux qui sont habitués à la prendre,
et qui sont mal prédisposés pour boire
de l'eau chaude, ainsi qu'à ceux dont l'orifice
de l'estomac se soulève quand ils boivent de
l'eau chaude étant malades. Si on prend de l'eau
froide à cause de l'ardeur de la fièvre,
il faut en boire largement et beaucoup si c'est pour
quelque autre cause, nous prescrirons d'en prendre peu
et de la humer pour ainsi dire. On défendra de
boire aussitôt après avoir mangé,
si ce n'est du vin ou de l'eau froide. Nous ne donnons
pas du vinaigre tout seul, pas plus que du vin, si ce
n'est quelquefois en petite quantité, à
titre de médicament; mais nous administrons de
l'eau vinaigrée à ceux qui crachent du
sang, surtout quand ce sang vient de l'oesophage ou
de l'estomac; nous le donnons encore à ceux qui
ont de fortes nausées, ainsi qu'à ceux
qui éprouvent des évacuations exagérées
pendant un voyage sur mer, et quelquefois aussi aux
gens pituiteux, pour exercer un effet incisif sur leur
pituite. Nous employons l'oxymel contre les maladies
qui se forment dans la poitrine, ainsi que dans les
cas où l'on aurait mangé des champignons
[vénéneux], ou bu du gypse, ou, à
plus forte raison encore, du sang de taureau. Je ne
sais pas s'il existe des malades auxquels il convient
de donner du vin miellé, mais nous donnons de
l'eau miellée à ceux dont le système
nerveux est affecté, que ce soit dans une maladie
fébrile ou non fébrile. L'hydromel, l'eau
de rayons de miel et le miel aux pommes ne sont pas
par eux-mêmes des boissons convenables, car elles
se gâtent et s'aigrissent facilement; mais ces
liqueurs ont un goût très-agréable
pour ceux qui manquent d'appétit dans les fièvres
bénignes ; et ce n'est pas à tort qu'on
les donne comme aliment dans les maladies qui traînent
en longueur et dans celles qui sont sans fièvre.
Dans les cas où nous employons de l'eau froide
ou du vin, nous sommes d'avis de donner ces boissons
aussitôt après l'ingestion des aliments;
car le corps, et surtout l'estomac et son orifice, n'éprouveront
aucun dommage ni du contact de l'eau froide, ni des
propriétés actives du vin , quand ils
sont remplis ; pour cette raison, nous ne donnons ces
boissons ni à jeun ni longtemps après
l'ingestion des aliments, puisqu'il revient au même
qu'on boive longtemps après le repas ou à
jeun. Donner des aliments immédiatement après
qu'en a bu ne convient ni aux gens qui boivent à
jeun immédiatement avant leur repas, parce que
le vin et l'eau froide auront produit leur effet nuisible
avant que les aliments soient entrés dans le
corps, ni à ceux qui boivent longtemps après
qu'ils ont mangé, car il est difficile de se
figurer comment ces aliments pourraient combattre les
effets du contact de l'eau froide ou énerver
les propriétés actives du vin, quand les
effets de ces boissons' se sont déjà propagés
dans le corps.
30. DE L'EAU; À QUELLE ÉPOQUE
DE L'ACCÈS IL FAUT L'ADMINISTRER.
(Tiré d'Hérodote.)
Quand la division de l'accès est en
quelque sorte complète, on reconnaît, dans
toute la durée de l'accès, un commencement,
un augment, un acmé et un déclin, et on
trouve que, pour chacune de ces périodes, l'administration
des boissons peut être nécessaire. Si,
par exemple, on juge devoir faire vomir ceux qui sont
pris de fièvre à la suite d'un repas,
ou parce que les aliments se sont corrompus, ou ceux
qui ont mangé au commencement de l'accès,
ou enfin ceux qu'on soupçonne d'avoir usé
de mauvais aliments, il ne faut le faire qu'après
leur avoir donné à boire. À ces
malades, nous donnerons aussi à boire une seconde
fois, s'il le faut, pour expulser complètement
ce qui reste [dans l'estomac], souvent aussi pour tempérer
et pour faire descendre la cause matérielle de
la maladie. On trouvera encore d'autres circonstances
qui exigent l'emploi des boissons au commencement de
l'accès, par exemple la première enfance;
car, dans ce cas, nous regarderons le désir de
boire comme une indication, et nous ne donnerons pas
de boissons avant [que ce désir ne se manifeste],
tandis que nous ne tarderons pas non plus après.
Si les malades ont de l'aversion pour les boissons,
et que, par là même, ils soient dans un
état dangereux, comme cela a habituellement lieu
dans les obstructions graves des canaux, il ne faut
pas les empêcher de boire, au cas où ils
en manifesteraient le désir au commencement de
l'accès. À l'époque de l'augment,
les raisons pour donner à boire sont plus nombreuses
: si, par exemple, certains malades sont pris, en même
temps que de l'accès, d'une soif violente, difficile
à supporter, et qui ne tient pas à la
malignité ou à l'aggravation de la maladie,
mais à quelque chose de spécial propre
à leur affection, il est de toute nécessité
d'apaiser cette soif par un traitement de symptômes;
on jugera qu'il en est ainsi, si la soif s'aggrave plus
que ne le comporte la gravité de la fièvre.
Il faut, en outre, faire attention à la nature
du malade ; car, si, du reste, il supporte habituellement
bien ses souffrances, et s'il ne tolère pas la
soif, c'est là le cas où il convient de
donner à boire dans l'augment de l'accès.
Ceux qui ont une accumulation considérable de
matières bilieuses à l'orifice de l'estomac
, qui en rejettent avec beaucoup de peine, sans en éprouver
un grand soulagement, qui ont les extrémités
refroidies, qui présentent de la pâleur
et de l'anxiété, qui ne supportent pas
même de rester couchés, qui éprouvent
une soif ardente, quoiqu'ils vomissent avec facilité,
subissent ces accidents périodiquement, avec
des retours réguliers ; ils n'ont pas de repos,
et la fièvre n'arrive pas jusqu'aux extrémités,
à moins que nous ne les submergions, pour ainsi
dire, en leur donnant une grande quantité de
liquide. Si l'on fait vomir ces malades , on verra qu'immédiatement
après l'administration des boissons et le vomissement,
la chaleur revient tout d'un coup, et que l'état
du malade prend les signes caractéristiques de
l'acmé. Si, au contraire, l'accès se divise
en périodes inégales, de façon
que la plus grande partie est formée par l'augment,
tandis que l'acmé est court, l'époque
de l'augment sera celle où il faut donner à
boire; car cette époque est l'équivalent
de l'acmé, parce qu'à l'une aussi bien
qu'à l'autre époque la cause de la maladie
prédomine, et le malade éprouve des souffrances.
Ceux dont les forces s'abattent facilement ont aussi
besoin qu'on leur administre assez vite des boissons;
et, chez eux, ce n'est pas seulement par l'usage des
boissons qu'il faut se mettre en garde contre les accidents,
longtemps auparavant, mais aussi en donnant des aliments.
Si l'on n'humecte pas, en leur donnant presque constamment
à boire, ceux qui, dans les fièvres, avalent
difficilement, parce que l'oesophage est desséché,
que ce soit par sa chaleur propre ou par l'intensité
de la fièvre, on ne pourra, sans beaucoup d'inconvénients,
rétablir ces malades [par l'humectation] même
au temps où l'on donne des aliments. Quelques-uns
d'entre eux présentent des symptômes qui
simulent l'étouffement, et chez ceux-là
nous donnerons à boire, même avant l'acmé,
pour combattre un danger pressant. Chez les malades
qui manquent naturellement d'appétit et qui mangent
péniblement, on doit donner constamment à
boire, surtout s'il y a de plus de la sécheresse
à la bouche; car il résultera de l'emploi
des boissons un avantage assez considérable pour
l'avenir. Quand il se présente des défaillances
tenant à une faim exagérée , nous
donnons aussi assez vite à boire, comme traitement
palliatif de ce symptôme. Telles sont les époques
où il faut donner de l'eau chaude; et, si nous
avons oublié quelque chose, il sera facile d'y
suppléer au moyen de ce que nous avons déjà
dit. On emploie, au contraire, l'eau froide dans le
commencement de l'accès, quand il y a hémorragie;
tandis que, pendant l'augment, il faut la donner aux
malades qui, par quelque circonstance particulière,
ne peuvent prendre de l'eau chaude; enfin on donne l'eau
froide, comme moyen curatif, aux gens affectés
de fièvre ardente à l'époque de
l'acmé, avant la rémission. Les temps
opportuns sont les mêmes pour donner de l'eau
tiède, ou celle qui est au degré de chaleur
pareille à celle du lait, ou celle qui est au
degré nécessaire pour faire fondre la
glace. La manière de donner de l'eau chaude n'est
pas toujours identique; car, si on la donne au commencement
de l'accès pour provoquer des vomissements, il
faut qu'elle soit tiède et en grande quantité;
il en est de même si nous voulons étancher
une soif violente et brûlante, ou si, dans les
maladies fluxionnaires, il se rassemble une grande quantité
de matières acres et bilieuses à l'orifice
de l'estomac: car, dans ces cas, l'eau qu'on a prise
n'est pas retenue, mais elle est rejetée. Puis,
lorsque les malades prennent de l'eau chaude pour étancher
une soif intense, il faut l'administrer peu à
peu, en leur enjoignant de se reposer de temps en temps
et d'avaler lentement; à ceux, au contraire,
qui boivent pour provoquer des vomissements, on doit
donner beaucoup de liquide à la fois, et il doit
être avalé d'un seul trait. Si, à
l'époque de l'augment ou de l'acmé, nous
donnons de l'eau chaude à cause de la longueur
de l'accès , de la prostration des forces, ou
des circonstances que nous avons déjà
énumérées plus haut, il faut en
donner une quantité moyenne, c'est-à-dire
ne pas se contenter d'en faire goûter seulement
aux malades, ni les gorger de liquide; car il est bon,
dans les fièvres, de conserver le ventre lâche
et non tendu. Aux malades qui prennent de l'eau chaude
pour cause de sécheresse ou de l'étouffement
que cet état produit, ou chez lesquels on veut
préserver les organes de la déglutition,
il faut en donner constamment et à petites doses.
Si les malades pris de fièvre ont en même
temps des fluxions à l'estomac ou à son
orifice, c'est encore une raison pour défendre
de boire beaucoup à la fois; car cette méthode
aggrave les accidents : le mieux, dans ce cas, c'est
de boire à petites doses, dans des vases à
ouverture étroite. Si on donne à boire
pendant la rémission, il ne faut jamais en donner
une grande quantité, ni beaucoup à la
fois, aux gens affectés de maladies fluxionnaires;
cependant on ne se servira pas de la méthode
susdite. Les autres malades doivent boire jusqu'à
satiété; et à ceux qui sont très-secs
et dont la chair a ses canaux fermés et est resserrée
de tous côtés, on doit en donner plus qu'il
n'en faut pour étancher la soif, et, s'ils le
demandent, il faut leur en permettre aussi une seconde
fois ; car l'indication pour donner à boire est
la même, qu'on en donne une fois ou plu-sieurs;
cependant il faut tâcher de saisir le moment où
ce que le malade a pris d'abord a déjà
été consumé par la chaleur, et
où le désir qu'il exprime tient à
l'état des parties, et non à son caprice.
Si les sueurs qui se montrent après l'administration
de la boisson procurent du soulagement, il faut les
entretenir, en donnant à boire une seconde fois.
Si la maladie exige une plus grande quantité
de sueurs, ou si les sueurs se sont arrêtées,
on les provoquera. Les malades sont-ils incommodés
de hoquet ou d'une toux sèche intense, il faut
leur faire humer un peu d'eau chaude. Si on donne de
l'eau froide, ou au degré nécessaire pour
fondre la glace, au lieu d'eau chaude , on réglera
son usage d'après les mêmes indications
et les mêmes méthodes ; mais , si on en
donne pour arrêter les sueurs ou pour amender
les autres symptômes dont nous avons déjà
fait l'énumération, on doit en donner
à petites doses, et à des intervalles
assez longs. L'eau froide qu'on donne après le
repas doit être également en petite quantité.
Quant à l'eau froide, ou à la température
naturelle du lait, ou à celle qui fait fondre
la glace, et qu'on donne comme moyen héroïque
à ceux qui ont des fièvres ardentes, nous
en parlerons en traitant de la thérapeutique.
L'eau qu'on boit doit être aussi bonne que possible,
et il faut la faire bouillir sur des charbons, dans
un vase de terre cuite; quant à nous, nous la
versons dans un vase de verre soufflé, que nous
plaçons dans de l'eau bouillante, car cette méthode
est à l'abri de tout reproche. Si l'eau est mauvaise,
il faut l'exposer au grand air après l'ébullition.
L'eau froide doit être tout à fait froide
et non dure. Si les malades ont de la propension pour
l'eau tiède, ou à la température
naturelle du lait, ou à celle qui fait fondre
la glace, il faut employer ces eaux-là en faisant
le mélange avec l'eau chaude dans des proportions
différentes. Le mélange de l'eau tiède
doit se faire dans la proportion suivante : cinq cyathes
d'eau potable chaude et un d'eau froide. Pour l'eau
à la température exigée pour la
fonte de la glace, il faut prendre la proportion inverse;
qu'elle contienne donc une partie d'eau chaude et cinq
d'eau froide. Le mélange qui constitue l'eau
à la température naturelle du lait doit
se faire à proportions égales. La froideur
de l'eau froide doit être intense; si elle est
faible, il faut augmenter la quantité de cette
eau.
31. DES BOISSONS QUI CONVIENNENT AUX FÉBRICITANTS.
La meilleure boisson pour les fébricitants
est l'eau miellée, ainsi que l'oxymel pour ceux
dont il n'affecte pas l'orifice de l'estomac; l'eau
n'a pas la moindre tendance à produire des picotements
chez les fébricitants; mais elle n'agit pas du
tout sur les excrétions. C'est surtout contre
les flux de ventre que les boissons préparées
par macération et douées d'astringence
ne sont pas trop mal placées, ainsi que contre
les vomissements, et chez les malades auxquels l'usage
du miel et de l'oxymel est contraire. On fera macérer,
au plus fort de l'été, des pommes du printemps
douées d'un goût sucré, râpées
très-menu, jusqu'à ce que l'eau soit fortement
colorée; ou bien il faut couper et faire macérer
de la même manière des coings parfaitement
mûrs. On doit surtout donner la boisson aux pommes
à ceux qui vomissent de la bile, ainsi que pour
resserrer le ventre; mais il faut faire attention à
ce que les pommes n'aient aucune acidité. On
doit faire macérer de la même manière
les poires d'un goût sucré et d'une âpreté
très-prononcée. i Toute boisson aux poires
préparée par macération est fortement
vineuse; après elle, celle de coings occupe le
second rang, tandis que celle de dattes vertes est très
peu vineuse; celle, au contraire, de dattes à
moitié mûres est meilleure. Si on fait
macérer des baies de myrte fraîches, on
obtient, il est vrai, un liquide vineux d'un goût
sucré; cette boisson coule aisément et
ne produit pas de picotements. Le suc de grenades par
macération est aussi fortement vineux que les
boissons susdites ; il coule facilement aussi et n'a
rien de chaud. On emploiera ces macérations d'une
âpreté fortement prononcée contre
les fièvres, sans trouble et sans danger, et
lorsque le ventre est tout à fait relâché.
Les macérations de sorbes, de poires sèches,
de baies de myrte et de dattes, toutes ces macérations,
dis-je, fournissent peu de substance analogue au marc;
on les emploiera également chez les malades auxquels
il ne faut pas donner du vin. On fait macérer
aussi les pépins de raisin, après les
avoir écrasés; mais la décoction
de ces pépins est préférable à
la macération , parce qu'elle possède
une astringence très-efficace, sans avoir, du
reste, aucune âcreté ou acidité.
Les vins qu'on fait avec des baies de myrte, des rayons
de miel, du froment ou de l'orge, ne sont, en aucune
façon, plus faibles que le vin de raisin, mais
ils passent beaucoup plus lentement et sont beaucoup
plus mauvais; les vins de dattes et de figues, si on
les boit récemment préparés, deviennent
semblables, quant au goût, au vin d'un goût
sucré; mais, sous le rapport de leurs propriétés,
ils sont beaucoup plus mauvais, plus lourds et plus
difficiles à assimiler; cependant, en vieillissant,
ils deviennent semblables au vin âpre, tant sous
le rapport de la chaleur que sous celui de leur action
sur l'économie.
32. DE L'HABITUDE DE BOIRE APRÈS
OU AVANT LE REPAS.
(Tiré de Philotime.)
Si, après le repas, on boit beaucoup
à la fois, il arrive que l'oesophage, et surtout
sa partie supérieure, s'élargit et que
le ventre se distend, tandis que cette surabondance
de boisson prépare l'humectation et la diffusion
des aliments, et réchauffe la bouche, la tête
la trachée-artère et le ventre. Quand
on boit de l'eau froide la nuit cette eau refroidit
toutes les parties susdites; elle refroidit aussi la
nourriture, qui est précisément alors
au plus fort de son échauffement; elle empêche
la digestion, réprime et affaisse l'aliment eu
ébullition ainsi que les bulles qui s'y forment,
en épaissit la partie dissoute et liquéfiée.
Si on boit de l'eau froide à jeun, les parties
susdites se refroidiront, et il remontera rapidement
du ventre dam le corps une grande quantité de
liquide peu échauffé; cette eau prise
à jeun épaissit également la pituite
contenue dans le ventre, Si on boit après des
fatigues, des bains ou des fièvres, la distribution
des liquides dans le corps se fait très rapidement,
et ils se mêlent moins exactement même à
la nourriture contenue dans les veines; tandis que cette
manière d'agir refroidit surtout la bouche, la
face, l'oesophage et le ventre, et refroidit et épaissit
pour quelque temps les humeurs contenues dans les veines.
33. PRÉPARATION DES BOISSONS USUELLES.
[Vin aux roses.] Soyez pur de souillure; ôtez
les onglets des roses, jetez-en autant que vous voudrez
dans du vin très-vieux; cependant pas toutes
à la fois, mais par parties; remuez le mélange
chaque jour avec la pointe d'un roseau, de sorte qu'il
parvienne jusqu'au fond du vase; fermez ensuite exactement
le pot avec un couvercle, afin que le mélange
ne s'évapore pas ; abandonnez-le à lui-même
pendant trente jours ; filtrez ensuite le vin, et ajoutez,
sur cinq sextaires, un sextaire de miel bien trituré,
et servez-vous de la boisson, après l'avoir abandonnée
à elle-même pendant trente jours, afin
qu'elle se clarifie.
[Autre manière de préparer du
vin aux roses mis en réserve.] Après avoir
ôté les onglets des roses, jetez dessus
six sextaires de miel, et abandonnez le tout à
lui-même pendant un an ; prenez ensuite une livre
des roses mises de côté et cinq livres
de miel pur; triturez ce mélange et versez dessus
dix sextaires de bon vin.
[Hydro-rosat.] Trente livres du meilleur miel,
dix livres de feuilles de roses, soixante livres d'eau
de source; chauffez l'eau jusqu'à ce qu'elle
bouille, ôtez le pot [du feu] et mettez-y les
roses; tenez le pot bien fermé avec un couvercle,
jusqu'à ce que le mélange soit complètement
infusé ; faites bouillir à part et écumez
le miel, séparez les roses avec un tamis, et
ajoutez le miel à la décoction de roses.
[Autre vin aux roses.] Vin de première
qualité, vingt et une livres; miel, huit livres;
feuilles de roses, trois livres : faites macérer
les roses dans le vin pendant quinze jours, séparez-les
du vin avec un tamis, faites bouillir le miel et écumez-le,
ajoutez-le au vin, et abandonnez le tout à lui-même,
après l'avoir bouché en le liant comme
il faut avec un lacet.
[Autre vin frais aux roses.] Miel, sept livres
; vin, vingt et une
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livres ; feuilles de roses, deux livres :
triturez les roses comme il faut, et mettez-les ensemble
avec le vin pendant deux jours; séparez ensuite
les feuilles avec un tamis, faites bouillir le miel,
réunissez les deux liquides, et abandonnez le
mélange à lui-même, après
l'avoir bouché en le liant comme il faut.
6 [Vin aux violettes.] Miel, sept livres;
vin, vingt et une livres; violettes, deux cent quarante
bottes : effeuillez les violettes, et faites-les macérer
dans le vin pendant trente jours; séparez les
violettes avec un tamis, faites bouillir le miel, réunissez
ensuite les deux liquides, et abandonnez le mélange
à lui-même après l'avoir bouché
en le liant comme il faut.
7 [Vin aux camomilles.] Vin d'Ascalon, vingt
et une livres ; miel, sept livres, boules de camomille,
six onces : faites macérer les boules avec le
vin pendant vingt jours, séparez-les avec un
tamis ; faites bouillir le miel et écumez-le;
unissez le miel aux autres ingrédients, et abandonnez
le mélange à lui-même, après
l'avoir bouché en le liant.
8 [Vin poivré très-bon contre
les calculs dans la vessie.] Miel, un sex-
Page 434
taire; vin, cinq sextaires ; poivre, une once;
saxifrage, quatre onces ; épi de nard, quatre
onces ; caspesium, gingembre, cistre, cabaret, fausse
cannelle, faux amome, persil, acore, gentiane, daucus,
de chaque quatre onces; mêlez les poudres au miel
écumé et au vin, et abandonnez le vase
à lui-même pendant dix jours, afin que
le mélange se digère.
[Vin poivré.] Miel, dix livres ; vin
de première qualité, trente livres; poivre,
une once : triturez le poivre et mêlez-le au vin;
ajoutez le miel au vin après l'avoir écumé,
et abandonez le mélange à lui-même,
après l'avoir bouché en le liant.
[Vin à l'anis.] Miel, dix livres ;
vin blanc de première qualité, trente
livres; anis, cinq onces.
[Vin aux fleurs de jonc odorant.] Mêlez
à seize onces de jonc odorant douze onces de
safran et seize onces de mastic : triturez ces ingrédients
ensemble et unissez-les au vin ; écumez le miel,
mettez
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tout ensemble, et abandonnez le mélange
à lui-même après l'avoir bouché
en le liant.
12 [Vin eu styrax.]
Miel, trente livres; styrax, une livre; vin, quatre-vingt-dix
livres : mêlez le miel et le styrax ensemble,
après avoir écumé le premier et
trituré le second; ajoutez le vin au miel écumé
pendant qu'il est encore dans le mortier, et servez-vous-en,
après l'avoir enlevé avec la main.
13 [Vin à l'absinthe.] Ajoutez à
cinquante sextaires de vin une demi-once de costus,
une demi-once de feuilles de faux cannellier, une demi-once
d'amome, une demi-once de fausse cannelle et dix sextaires
de miel ; macérez la plante appelée absinthe
dans un peu de vin, et versez sur les ingrédients
susdits une quantité du liquide, fait par macération
suffisante pour que la liqueur vous semble agréable
au goût.
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et en tête de chapitre.
Nom propres cités : Antyllus
; Galien
; Hippocrate ; Hérodote
;
Noms communs cités : friction ; massent ; frotter
LIVRE VI.
[DES EXERCICES.]
1. Du coucher,
tiré d'Antyllus
2. Du repos
(Hipp. Vict. rat. II, § 6o, t. VI, p. 574.) 3. De l'abstinence
(Cels. II, 16) 4. Du sommeil et de la veille, tiré de Galien, (Hipp.
Vict. rat.
II, § 6o,t. VI, p. 570; Paul. I, 97 et 98; Act.
Spir. anim.
II, 6) 5. De l'utilité du sommeil, tiré d'Antyllus 6.
Des veilles TDM 7. De la conversation
8. De la déclamation 9.
Quelle est la meilleure méthode
de déclamation (Aët.
III, 5) TDM 10. De la déclamation salutaire (Synops. I, 5; Aët. III, 5; Paul. I, 19)
11. Des exercices,
tiré de Galien (Synops. I, 2; Aët. III, 2; Paul. I, 16;Act.
Spir. anim.
II, 11 ; Meth, med. III, 11 ) 12. Quel est le temps convenable pour les
exercices 13. De la friction préparatoire (Synops. I, 1; Aët. III, 1; Paul. I, 15) TDM
14. Des diverses espèces d'exercices
et de leur efficacité
(Synops.
I, 3;Aët. III, 3; Paul. I, 17) TDM 15. Comment il faut s'exercer TDM 16. De la friction apothérapeutique TDM 17.
De la friction considérée en elle-même
(Hipp. Vict.
rat. II, § 64 et 65,
t. VI, p. 580-82 ; Cels. II, 14; Synops. I, 4; Aët. III, 4 ; Paul. I, 18) TDM
18. De la friction du matin
(Ath. IV, 48 [Ét. 49]) TDM 19. De la friction du soir
(Aët. IV, 49) TDM 20. De la friction comme moyen curatif, tiré d'Hérodote, (Cels. 11,
14) TDM 21. De la promenade,
tiré d'Antyllus (Hipp.
Vict. rat.
II, § 62, t. VI, p. 576; Cels. II, 2) 22. De la course
(Hipp. Vict. rat. II, § 63, t. VI, p. 578) 23. Du mouvement passif (Cels. II, 15; Aët. III, 6) 24.
De l'équitation (Aët. III, 7) 25. Du mouvement passif qui convient dans les fièvres, tiré d'Hérodote (Cels.II,
15) 26. De l'exercice du cerceau, tiré d'Antyllus (Hipp.
Vict. rat.
II, § 63, t. VI, p. 578-80) 27. De la natation TDM 28. De la lutte
(Hipp. Vict. rat. II, § 64, t. VI, p. 580) 29. Du combat simulé 30. De la gesticulation 31. Du saut simple et du saut progressif 32. Du jeu de paume
33. Du corycos
(Hipp. Vict. rat. II, § 64, t. VI, p. 580) 34. De la manière de lancer des
haltères 35. De la marche sur un terrain accidenté
36. Du combat en armes
(Athen. IV, 39-41) 37. Du coït,
tiré de Galien (Hipp.
Vict. rat.
II, § 58, t. VI, p. 572;
Ad Eun. I, 13 38. Sur le même sujet, tiré de Rufus
; ce chapitre contient aussi le
régime (Synops. I, 6; Ad Eun. I, 13; Aët. III, 8, et XI, 35; Paul.
I, 35)
Page 436
LIVRE VI.
1. DU COUCHER.
(Tiré d'Antyllus.)
[Du quatrième livre, lequel traite
De ce qu'on fait soi-même
en vue de la santé.]
Volume 1er, Livre
6, chap. 1 d'Oribase tiré d'Antyllus.
Il convient de faire coucher ceux qui sont
affectés de maladies aiguës, car ceux qui
sont dans cet état ne doivent pas se fatiguer;
quant à ceux qui ont des affections chroniques,
ils doivent se coucher seulement pendant les exacerbations
; dans les intervalles, rien ne les empêche de
prendre du mouvement, car ils ont besoin de quelque
chose qui les remue et d'excitations variées.
Quant à la position que les malades doivent tenir
dans le lit, celle où la tête est plus
élevée que le reste du corps convient
aux malades qui souf-
N.B. Pour ce livre, nous avons opéré
dans les variantes une réforme dont nous rendons
compte dans notre préface.
Page 437
frent de la tête, excepté aux
frénétiques ; car, chez eux, nous préférons
la position horizontale sur le dos, parce que la position
élevée pourrait occasionner du trouble.
De même, dans les affections de la poitrine, la
position élevée doit être recommandée.
La position horizontale sur le dos convient aux dysentériques,
aux malades qui souffrent de l'estomac, de l'utérus
ou des flancs. Dans la gonorrhée, le satyriasis
et l'affection des reins, il est bon de se coucher sur
l'un des deux côtés, car ces maladies s'aggravent
par la position horizontale sur le dos : la gonorrhée
et le satyriasis, parce que cette position échauffe
les parties malades; l'affection des reins, parce que
les lombes sont comprimés dans cette position.
Ceux qui se nourrissent mal et digèrent lentement
font bien de se coucher sur le côté gauche,
parce que, dans cette position, le foie enveloppe l'estomac
et le réchauffe ; cependant, dans les affections
squirrheuses, les gonflements et les dépôts
inflammatoires du foie, la position sur le côté
droit
Page 438
est la meilleure; de même, si la rate
est atteinte d'affections semblables, il vaut mieux
se coucher sur ce viscère. Dans les douleurs
de ventre, dans l'iléus et dans les affections
du colon, il faut préférer la position
moyenne entre la position horizontale sur le dos et
le coucher sur le côté gauche ; mais il
faut remarquer que ceux dont le colon est affecté
sont soulagés par la position où les pieds
sont plus élevés que le reste du corps.
Le coucher sur le ventre remplit la tête et les
organes des sens, mais cette position n'est pas sans
avantage pour ceux qui ont le ventre lui-même
douloureux ou refroidi.
2.
DU REPOS.
(Tiré du même livre.) Volume 1er, Livre 6, chap.
2 d'Oribase tiré d'Antyllus.
La tranquillité et le repos conviennent
aux mêmes malades que le décubitus, mais
ils conviennent surtout soit au commencement,
Page 439
soit pendant l'accroissement des accès
et quand on vient de prendre de la nourriture. Le repos
est également convenable immédiatement
avant le sommeil.
3 DE L'ABSTINENCE.
(Tiré du même livre.) Volume 1er, Livre 6, chap.
3 d'Oribase tiré d'Antyllus.
Réprimer la surabondance de chair et
de sang, cuire les aliments non digérés,
évacuer la pléthore, dessécher
les fluxions, surtout celles qui tiennent à la
pléthore, [tels sont les effets de l'abstinence].
Elle diminue aussi l'excès d'humidité,
elle apaise encore les douleurs, non pas celles qui
tiennent à l'acrimonie, mais celles qui viennent
d'un arrêt de la pléthore dans les pores.
4. DU SOMMEIL ET DE LA VEILLE.
(Tiré de Galien.)
Volume 1er, Livre
6, chap. 4 d'Oribase tiré de Galien.
Le sommeil humecte toujours, de même
que les veilles dessèchent
Page 440
toujours, tandis que par sa nature le sommeil
ne réchauffe ou ne refroidit pas toujours; mais,
quand les malades n'ont pas de fièvre, et que,
trouvant dans le corps des humeurs pituiteuses, crues,
ou enfin froides de telle ou telle façon, il
les élabore et les amène à maturité
en les changeant en bon sang, il réchauffe le
malade en augmentant sa chaleur innée ; si, au
contraire, la putréfaction de ces humeurs a déjà
causé la fièvre, il refroidira, en éteignant
la chaleur fébrile, tandis qu'il augmente la
chaleur propre. Si donc le sommeil augmente et renforce
la chaleur propre et naturelle, et qu'il détruise
et épuise la chaleur acquise et contre nature,
on aura raison de dire que notre corps est devenu en
même temps plus chaud et plus froid par le sommeil.
Les inconvénients du sommeil étant de
deux espèces, les uns communs, quand les malades
dorment au commencement des accès, les autres
propres à certaines maladies,
Page 441
quand ils dorment à une autre période,
il faut admettre que ces derniers inconvénients
sont dangereux ; car les premiers n'indiquent ni la
mort, ni quelque autre chose, puisqu'ils tiennent à
la nature de la période ; en effet, au commencement
des accès, la chaleur et les humeurs convergent
vers le centre du corps, et, s'il y a quelque inflammation
d'un viscère, il est naturel qu'elle s'augmente,
et, si quelques humeurs se rassemblent dans le ventre,
elles ne sont pas élaborées comme dans
tout autre sommeil, mais elles deviennent beaucoup plus
abondantes. Voilà pourquoi nous exhortons les
malades à veiller dans cette période afin
d'opposer la tendance qu'ont le pneuma, le sang et la
chaleur qui les accompagne à se porter vers l'extérieur
par suite de la veille, comme un remède efficace,
à celle qui les pousse vers la profondeur du
corps à l'époque de l'invasion.
Page 442
Quant au sommeil qui arrive aux autres périodes
de l'accès, il est généralement
suivi d'un avantage évident, surtout s'il arrive
au déclin; car celui qui arrive à l'acmé
même, ou même quelquefois vers la dernière
partie de l'augment qui touche à l'acmé,
fait quelquefois aussi un bien manifeste, il est vrai,
mais de tous les avantages, le plus évident se
montre pendant le déclin. De même, le sommeil,
s'il nuit, est moins pernicieux pendant l'acmé
et l'augment de l'accès, tandis que celui qui
a lieu au déclin l'est beaucoup, car, si une
chose quelconque, à l'époque où
elle est habituellement très-avantageuse, non
seulement ne fait aucun bien, mais même cause
encore du dommage, il est probable qu'elle présage
la mort. Les inconvénients du sommeil sont l'opposé
de ses avantages ; ces inconvénients sont d'empêcher
la fièvre de se résoudre ou de l'aug-
Page 443
menter, d'aiguiser les douleurs, de rendre
les fluxions plus abondantes et d'accroître l'inflammation.
Le sommeil est utile aux humeurs qui doivent être
élaborées, la veille l'est à celles
qui doivent être enlevées par la perspiration.
Le sommeil augmente la tendance des humeurs vers l'estomac,
les intestins et le foie ; la veille, au contraire,
opère sur elles une révulsion. Quand il
existe une hémorragie produite par une plaie,
le sommeil l'arrête, la veille la rappelle. Quand
il faut atténuer les humeurs épaisses
ou visqueuses, la veille est utile, pourvu qu'elle ne
soit pas prolongée outre mesure, car il faut
que ces humeurs soient élaborées à
leur tour, ce qui se fait parle sommeil. Il est très-nuisible
aux humeurs éminemment froides qu'on permette
aux malades de dormir autant qu'ils veulent, car, à
cause du refroidissement, ils ont de la tendance au
sommeil, quoi-qu'il ne leur soit pas utile, mais, dans
tous les cas semblables, on dormira autant qu'il faut
pour rétablir les forces qui s'épuisent
pen-
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dant la veille et pour opérer quelque
coction ; car le sommeil est produit soit parce que
la chaleur innée, par quelque fatigue ou par
un excès de sécheresse, se porte là
où s'élabore la nourriture, soit parce
que l'excès d'humidité la rend impuissante
à rayonner vers l'extérieur ; or le sommeil
dont nous avons parlé en premier lieu est salubre
et naturel, et celui que nous avons mentionné
en second lieu est semblable au sommeil du coma et du
léthargus.
5. SUR L'UTILITÉ DU SOMMEIL.
(Tiré d'Antyllus.)
[Du quatrième livre, lequel traite
De ce qu'on fait soi-même
en vue de la santé.]
Volume 1er, Livre
6, chap. 5 d'Oribase tiré d'Antyllus.
Le sommeil relâche ce qui est tendu,
ramollit ce qui est dur, fond ce qui est coagulé,
rend lisse ce qui est raboteux; en outre il apaise les
secousses du corps et les troubles de l'âme, rend
la respiration uniforme, arrête les flux, en épaississant
les humeurs dans le
Page 445
corps. Le temps favorable pour le sommeil
dans les maladies intermittentes est l'intervalle des
accès ; si l'accès est long, la période
de l'acmé et celle du déclin sont les
plus convenables, celle du début est la moins
avantageuse ; le temps qui précède l'accès
est également peu convenable. Si la durée
de l'augment est courte, il ne faut pas permettre de
dormir pendant cette période; si, au contraire,
elle est longue, et que l'augment arrive après
le milieu du jour, il faut empêcher les malades
de dormir, car tout sommeil du soir est naturellement
mauvais mais, si le milieu de l'augment vient après
minuit et coïncide à peu près avec
le lever du soleil, il faut permettre de dormir. Dans
les maladies continues, la nuit est plus propre au sommeil
que le jour, et, parmi les diverses parties de la nuit,
celle qui vient après la troisième heure,
surtout la dernière partie, est plus propice
que celle qui la précède; parmi les diverses
parties du jour, celle du lever du soleil est préférable
jusqu'à midi.
Page 446
6.
DES VEILLES. TDM
(Tiré du même livre.) Volume 1er, Livre 6, chap.
6 d'Oribase tiré d'Antyllus.
Les veilles dissipent la pléthore,
font descendre les matières con-tenues dans le
ventre et les préparent à être évacuées
par en bas: elles dissipent la torpeur, chassent la
pesanteur, excitent les parties épuisées,
donnent du ton à la nature et à l'âme,
et répriment les sueurs. On doit conseiller à
ceux qui prennent un médicament purgatif de veiller
jusqu'à ce que la purgation soit entièrement
terminée. Il faut aussi veiller quand on vient
de prendre des aliments ou des boissons ainsi que pendant
et avant l'invasion des accès, comme nous l'avons
dit dans la chapitre sur le sommeil. Les moyens qui
produisent la veille sont les suivants : friction un peu
rude et sans graisse, surtout si elle se fait avec du
linge grossier et nouveau (il faut surtout frotter les jambes);
liniments plus ou moins âcres, comme ceux qui
contiennent de la soude brute, de l'euphorbe, de
Page 447
l'adarce, de l'armarinte, du cresson, de la
pariétaire d'Espagne, de la dauphinelle, des
baies de Guide ou de la moutarde; il faut aussi placer
des cataplasmes de moutarde sur les jambes. Les moyens
suivants produisent également la veille : prurit
violent, arrachement des poils, tiraillement des doigts,
titillation de l'oesophage au moyen de l'introduction
des doigts, suppositoires appliqués au siège,
desquels nous avons décrit la composition; parmi
les médicaments qu'on fait flairer, ceux qui
sont de mauvaise odeur et provoquent des éternuements,
médicaments âcres appliqués aux
yeux, ainsi que l'huile elle-même qu'on verse
dedans, ventouses appliquées aux aines, cris
continuels poussés à l'oreille, nouvelles
qui troublent, exhortations pressantes, choses terribles
à voir ou dures à entendre. Et, si ces
moyens de traitement ne produisent pas seulement la
veille, mais dissipent aussi le cataphora, qu'y aurait-il
à cela d'extraordinaire?
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7. DE LA CONVERSATION.
(Tiré du quatrième livre.)
Volume 1er, Livre
6, chap. 7 d'Oribase.
La conversation a, jusqu'à un certain
point, la faculté de remplir la tête et
de causer de la pesanteur; elle épuise aussi
les forces, surtout dans les fièvres, et à
plus forte raison pendant l'invasion ; elle donne de
la soif, dessèche la langue et provoque des vomissements.
Elle ne convient pas non plus à ceux qui ont
des ophtalmies ou des hémorragies nasales, et
bien moins encore à ceux qui ont des hémoptysies
; mais elle est utile à ceux qui ont une tendance
démesurée à s'endormir.
8. DE LA DÉCLAMATION.
(Tiré du quatrième livre.)
Volume 1er, Livre
6, chap. 8 d'Oribase.
La déclamation est un exercice de la
poitrine et des organes de la voix, et encore plus de
la chaleur naturelle, puisqu'elle aug-
Page 449
mente, purifie, renforce et atténue
la chaleur, et qu'elle rend les parties solides du corps
fortes, pures et résistantes. Nous employons
la déclamation tantôt pour guérir
une maladie, que la voix soit fatiguée ou que
ce soit tout le corps, tantôt pour améliorer
la voix, qu'elle soit affectée accidentellement
ou congénialement. La déclamation convient
dans les cas de vomissements qui tiennent à une
affection de l'orifice de l'estomac, aux gens qui ont
des renvois acides ou qui sont sujets aux mauvaises
digestions ; elle est également utile à
ceux qui abondent en pituite et aux femmes qui ont des
appétits contre nature ; mais elle ne convient
pas aux affections de la tête parce qu'elle a,
jusqu'à un certain point, la propriété
de causer de la plénitude dans cette partie et
dans les organes des sens qui y sont logés. Elle
est encore utile à ceux qui n'ont point d'appétit
ou qui profitent mal de la nourriture, et bien plus
encore aux paralytiques, aux hydropiques et aux asthmatiques
; elle est aussi très avantageuse dans la convalescence
des maladies. La voix souffre
Page 450
tantôt d'une conversation démesurément
prolongée, tantôt parce qu'on a crié
trop fort, tantôt à cause de l'acuité
et de l'intensité des sons proférés,
et enfin elle souffre aussi du silence, oubliant pour
ainsi dire ses propres fonctions; dans tous les cas
énumérés, le traitement par la
déclamation est utile, car il dissipe [les inconvénients
causés par] la conversation trop longtemps prolongée,
il guérit le mal produit par les cris trop forts
en le détruisant doucement, et il remédie
[au dommage causé par] les sons aigus en faisant
descendre la voix aux tons graves. Quoiqu'on ne puisse
pas appeler proprement fatigue de la voix le mal qui
résulte du silence, il a cependant quelque chose
de semblable à la fatigue, et la déclamation
est également utile dans cette espèce
d'affection, puisqu'elle exerce la voix ; elle est encore
utile comme traitement secondaire quand les organes
de la voix sont fatigués ou que tout le corps
est affaibli ou en proie à la lassitude.
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9. QUELLE EST LA MEILLEURE MÉTHODE
DE DÉCLAMATION.
TDM
(Tiré du quatrième livre.)
Volume 1er, Livre
6, chap. 9 d'Oribase.
Quand on veut déclamer, on doit auparavant
aller à la selle, subir une friction douce, surtout aux parties inférieures,
essuyer sa figure avec une éponge ou la laver,
causer auparavant doucement et attendre ensuite quelques
instants, ou, ce qui vaut mieux encore, se promener
auparavant et passer ensuite à la déclamation.
Celui qui ne manque pas d'éducation littéraire
doit réciter un morceau qu'il sait par coeur,
qui lui paraît beau et qui passe fréquemment
du langage doux au langage âpre. Si on ne sait
pas de vers épiques, on récitera des ïambes
; les élégies occupent le troisième
rang, et la poésie lyrique le quatrième.
Il vaut mieux, pour celui qui déclame, réciter
par coeur que de lire. Il faut d'abord déclamer,
en se tenant dans les notes les plus basses, faisant
descendre la voix autant que
Page 452
possible, ensuite on montera aux notes les
plus élevées, et, après cela, ne
s'arrêtant pas longtemps à ces notes élevées,
on reviendra au point de départ, en faisant descendre
peu à peu la voix, jusqu'à ce qu'on arrive
à la note la plus basse, par laquelle on avait
commencé. La durée de la déclamation
se détermine d'après les forces, le plaisir
qu'on y trouve et l'habitude.
10. DE LA DÉCLAMATION SALUTAIRE. Volume
1er, Livre 6, chap. 10 d'Oribase.
Ayant appris par l'expérience que l'exercice
de la voix, exécuté selon la règle,
est le plus efficace de tous les moyens qu'on ordonne
pour raffermir et pour conserver la santé, je
me suis efforcé, autant qu'il m'était
possible, de décrire la nature de ce mode de
traitement et les diverses manières de l'employer.
Il est temps maintenant de dire quelle est la véritable
méthode d'exercer la voix pour raffermir la santé
du corps et prolonger la vie. Toute voix doit son origine
à l'air qui se répartit pendant l'inspiration
et l'expiration et qui est façonné (articulation
et timbre) par le moyen des organes que la nature a
construits à cet effet; ainsi la matière
de la voix est l'air qu'on respire, et l'art (moyens
expressifs) de la voix, s'il faut s'exprimer de cette
façon, réside dans les parties du corps
qui donnent une forme à
Page 453
l'air. Les bonnes ou les mauvaises qualités
de la voix tiennent donc indispensablement soit à
l'air soit aux organes qui lui donnent sa forme ; or
ces organes sont la partie supérieure de la trachée,
celle qu'on appelle épiglotte, et les diverses
parties de la bouche, la langue, le palais, les dents,
les lèvres, toutes parties qui sont, construites
dans une harmonie et une proportion parfaites avec les
fonctions. Il faut donc examiner dans quel état
et dans quelles conditions de distribution l'air produit
la meilleure voix. Pendant les tons très aigus,
il arrive que le cou et la région hyoïdienne
sont comprimés et rétrécis, la
partie postérieure de la langue étant
appuyée fortement vers le haut contre les parties
qui envi-
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ronnent la luette, que le reste du tronc éprouve
un resserrement proportionné à celui des
parties susdites, et que le volume de l'air qui parcourt
les organes de la voix est en raison du degré
de dilatation de ces parties; au contraire, si on émet
ou si on chante les notes les plus graves, le cou se
dilate et s'aplatit autant que possible, les parties
postérieures de la langue s'éloignent
fortement des parties voisines de la luette, beaucoup
d'air est poussé à travers ces parties
pendant la production de la voix, et tout le reste du
corps est détendu et relâché par
l'effet de la raréfaction. Il faut donc renoncer
sans hésiter à l'émission des notes
aiguës, à l'exercice inutile qui consiste
à remonter peu à peu depuis les notes
les plus graves, et de lutter en forçant sa voix
sur les notes aiguës ; sous quel rapport, en effet,
la beauté du chant et de la voix contribuera-t-elle
Page 455
à raffermir la santé du corps
? mais ce sont les notes graves qu'il faut cultiver,
car la source principale et la plus importante des bienfaits
de la voix, c'est l'air attiré à l'intérieur
par l'inspiration en aussi grande quantité que
possible, à travers la trachée et les
conduits imperceptibles qui s'ouvrent à la surface
du corps; on y arrivera surtout par une dilatation considérable
des canaux qui attirent l'air; or cette dilatation est
opérée par un exercice fait avec soin,
qui consiste à faire des efforts pour élargir
et pour dilater ces conduits, et à les forcer
peu à peu à admettre [par l'inspiration],
et à rejeter de nouveau [par l'expiration] autant
d'air que possible ; car on trouvera que presque tous
les bienfaits de la voix viennent de l'abondance de
l'air; en effet, on n'émettra jamais une voix
forte sans un air puissant par sa quantité, jamais
de voix étendue sans disposer d'un air abondant;
jamais on ne soutiendra sa voix pendant un long espace
de temps, si la quantité de l'air ne suffit pas
à la
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durée de la voix ; il n'y aura pas
de voix corsée, claire ou pleine, si l'air par
la petitesse et la faiblesse de son émission
ne produit qu'un son creux, sourd et mat; les mots ne
seront ni entiers ni clairs, s'ils sont dérobés
et coupés à cause de la petite quantité
d'air qui ne peut suffire à leur émission;
[en un mot] ou ne tirera jamais rien de bon de la voix,
à moins de mettre en mouvement un air abondant
et copieux. Ainsi, puisque la quantité de l'air
qu'on respire paraît être le point le plus
important sous le rapport des bonnes qualités
de la voix, c'est à cela que doivent, avant tout,
s'appliquer ceux qui exercent leur voix ; mais quelle
est la manière de s'exercer fructueusement? c'est
ce qui reste à dire. Or, comme l'attraction de
l'air dans l'intérieur du corps se fait par la
dilatation de la poitrine, du ventre et des conduits
disséminés partout dans la chair (car
l'air est poussé forcément dans l'espace
vide formé par la dilatation, en vertu de la
nécessité qu'impose la nature de remplir
le vide),
Page 457
nous admettrons des flots d'air par la bouche,
le nez, et aussi une grande quantité par les
conduits répandus sur toute la surface, et nous
introduirons dans notre intérieur une quantité
d'autant plus grande de l'air ambiant, que nous aurons
agrandi davantage l'espace vide des parties qui doivent
l'attirer. Voilà pourquoi les gens dont la chair
est dense et pourvue de pores étroits ont la
voix grêle et produisent des sons faibles, tandis
que ceux qui ont la chair rare et les pores dilatés
ont la voix forte; par conséquent, à cause
de l'étroitesse des pores, les enfants, les femmes
et les eunuques ont la voix plus faible que les hommes,
et les malades plus faible que ceux qui se portent bien.
Puisque nous avons prouvé que l'utilité
des exercices de la voix dépend de l'abondance
de l'air attiré par la respiration et que cette
abondance tient à son tour à la dilatation
et à l'élargissement des pores, il nous
reste à rechercher comment ce dernier effet se
produit. Comme tout espace vide et
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toute cavité dans le corps s'étendent
et se dilatent de deux manières, soit que les
membranes qui limitent les cavités soient refoulées
peu à peu [de l'intérieur] dans l'espace
qui les environne de tous côtés, soit que
les parties qui enveloppent ces cavités en augmentant
peu à peu de volume [augmentent en même
temps le leur], nous devons, avec un soin égal,
dilater les conduits à l'aide de ces deux moyens.
Il faut donc éviter tout resserrement et tout
ce qui peut le produire, relâcher autant que possible
en maintenant le corps, non pas étendu en longueur,
mais ramassé en largeur. On doit, en outre, augmenter
la quantité d'air, en s'efforçant tour
à tour d'en attirer peu à peu, pendant
l'inspiration, plus que de coutume, par la dilatation
préalable et volontaire des cavités qui
doivent l'admettre, et d'en expulser graduellement autant
d'air qu'il est possible à l'extérieur,
d'exprimer et d'évacuer avec plus ou moins de
force celui qui était entré auparavant;
car le relâchement et la diffluence
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de la chair élargiront les conduits,
l'inspiration forcée d'une plus grande quantité
d'air les dilatera toujours de plus en plus, et les
efforts qu'on fait pendant l'expiration pour rejeter
autant d'air que possible, élargissent considérablement
les conduits; en effet, la quantité d'air dont
on aura besoin pour remplacer celui dont on a usé
est d'autant plus grande, qu'un se sera efforcé
de vider plus exactement la poitrine d'air pendant l'expiration.
Par conséquent, l'exercice de la voix raréfie
le corps par la dilatation des conduits, tandis que
tous les autres exercices foulent les chairs, les condensent
et les épaississent; il rend le corps léger
par la dilatation des conduits qui sont au milieu des
chairs, les autres le rendent lourd, pesant et épais.
On peut voir que la chair façonnée par
l'exercice de la voix, au moyen de la raréfaction
qu'elle entraîne, cède et prête facilement
à toutes les fonctions possibles, tandis que,
par les autres exercices,
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elle devient résistante, dure et insensible
; voilà pourquoi la plupart des athlètes
ont l'intelligence plus stupide que le commun des hommes.
Il faut donc donner la préférence à
l'exercice de la voix, car d'abord elle amène,
pendant la lecture et la prononciation même une
excrétion manifeste d'humeurs surabondantes;
pour ceux qui lisent avec effort, cette excrétion
est plus considérable et se fait par là
sueur; pour ceux qui y mettent moins d'action, elle
se fait par la perspiration insensible, laquelle s'effectue
par tout le corps; pour les uns et les autres, elle
est produite par les humeurs abondantes rejetées
en soufflant pendant l'expiration qui accompagne l'émission
des mots, et par les superfluités abondantes
expulsées en raclant pendant l'atténuation
et l'éréthisme causés par l'émission
de la voix aussi bien que par les crachats, le mucus
et la pituite qui s'évacuent [ en même
temps]. Il se fait aussi, pendant la respiration intense
produite à dessein par l'exercice de la voix,
à la
Page 461
suite de la dilatation des canaux, une grande
dépense d'humeurs, soit qu'elles s'échappent
imperceptiblement à la surface du corps, soit
qu'on les rejette en soufflant par le nez et par la
bouche. Quel autre remède serait plus utile que
l'activité produite pendant l'exercice intelligent
de la respiration à ceux qui demandent à
être échauffés pour cause de froideur
? car le souffle, au moyen de son mouvement de progression
très varié, excite et allume en nous,
pendant le frottement, la chaleur interne, et cause, par la continuité
de son action, un tel incendie dans notre corps, que,
si nous ne nous rafraîchissions pas à chaque
instant par le refroidissement inhérent à
l'inspiration, il nous arriverait, sans que nous nous
en fussions aperçus, la même chose qu'a
ceux qui sont surpris par un accès de chaleur.
Nous venons de démontrer que ceux qui exercent
convenablement la voix dépensent l'excès
d'humidité qui est en eux et corrigent
Page 462
l'excès de refroidissement. Quand,
au contraire, le sec ou le chaud semble prédominer
outre mesure dans le corps, la grande quantité
d'air qui entre pendant l'inspiration, par suite de
la dilatation des conduits, humectera fortement les
parties desséchées, et ramollira la dureté
causée par la sécheresse, car l'air est
plus subtil et plus humide que toute espèce d'eau.
Est-il encore besoin de dire que rien ne refroidira
et n'éteindra mieux la chaleur démesurée
du corps que l'air attiré incessamment pendant
l'inspiration? Il faut, par conséquent, lire
et déclamer souvent, en relâchant tout
le corps, et, quand la chair est devenue assez diffluente
pour se raréfier, on doit, en s'efforçant
de dilater la trachée et les autres conduits
de l'air, déclamer dans les notes les plus graves
de la voix et renoncer sans hésiter aux sons
qui montent graduellement, avec une recherche artistique,
à la note de la dernière corde, car l'acuité
de la voix est ce qu'il y a de plus contraire à
la force, à la puissance et à la di-
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latation des conduits, tandis qu'elle est
favorable à la beauté du chant, à
la variété des sons ainsi qu'aux modulations
bien ménagées dans le chant, mais on trouvera
qu'aucune de ces choses n'est bonne pour raffermir la
santé du corps ; il faut étendre, autant
que possible, l'émission de la voix dans les
notes graves en forçant le son ; car il se fait
une dépense très évidente de l'humidité
intérieure chez ceux qui lisent ou qui parlent
tout haut. Ceci se reconnaît par la vapeur abondante
qu'on voit sortir de la bouche chez ceux qui lisent,
par l'excrétion des superfluités retenues
depuis longtemps et qui s'échappent à
travers les conduits qui leur sont respectivement destinés,
non seulement par ce, qu'on appelle l'expiration, mais
aussi, immédiatement, d'une manière perceptible
aux sens, par les crachats, le mucus et la pituite pendant
l'expuition ; et par tous ces moyens le corps se débarrasse
des causes morbifiques. Il ne faut pas employer au hasard
et imprudemment les exercices de
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la voix dont nous venons de parler, recommandation
qui s'applique surtout à ceux qui se livrent
à cet exercice sans y être accoutumés
; on ne doit donc pas s'y livrer ni quand on est rempli
d'humeurs mauvaises et corrompues, ni quand on souffre
d'une indigestion considérable et évidente,
de peur qu'il ne se fasse dans le corps une distribution
trop forte de vapeurs corrompues causée par l'activité
de l'inspiration et de l'expiration devenue plus intense
et plus forcée pendant qu'augmentent la grandeur
et l'étendue de la voix.
11. DES EXERCICES.
(Tiré de Galien)
Volume 1er, Livre
6, chap. 11 d'Oribase tiré de Galien.
Tout mouvement n'est pas un exercice, mais
seulement les mouvements plus ou moins forts, or la
force est quelque chose de relatif; par conséquent
le même mouvement sera pour tel homme un exercice,
tandis qu'il ne l'est pas pour tel autre. La limite
de la
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force de l'exercice est le changement de la
respiration, en sorte que, pour les mouvements qui ne
changent pas la respiration, on ne se sert pas encore
du nom d'exercice. Ainsi, puisque l'exercice est un
mouvement fort, les trois premières conséquences
suivantes en résulteront indispensablement pour
tout corps qui s'exerce : les organes deviennent plus
durs en se frottant l'un contre l'autre, la chaleur
innée est augmentée et le mouvement du
pneuma devient plus violent ; ces conséquences
donnent lieu, à leur tour, à tous les
autres avantages partiels que les corps retirent des
exercices ; la dureté des organes amène
leur résistance aux causes morbifiques et la
force pour l'exécution des fonctions, la chaleur
[augmentée], une attraction plus forte des matières
à distribuer, une transformation plus facile,
une nutrition meilleure et une fonte des parties
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elles-mêmes, fonte par laquelle les
parties solides deviennent plus molles, les fluides
plus ténus et les conduits plus larges [qu'auparavant]
; par le mouvement violent du pneuma indispensablement
les conduits seront purgés et les superfluités
seront évacuées. Les exercices donc échauffent
et dessèchent, en dissipant les fluides superflus
; mais, accidentellement, ils causent des maladies froides
ou humides ; chez ceux donc qui ont une accumulation
de pituite, les exercices fondent la partie coagulée
de cette humeur et la forcent à couler vers quelqu'un
des organes principaux ; de cette manière une
partie capitale étant refroidie ou humectée,
tout le corps est atteint d'une maladie froide ou humide.
L'oisiveté engendre ordinairement une pléthore
froide, mais, dans quelques cas rares, elle réchauffe
aussi, quand la nature du corps est si mal tempérée,
qu'il devient le siège de sécrétions
âcres ; en effet, comme ces sécrétions
sont re-
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tenues pendant l'oisiveté absolue,
ils vont même jusqu'à allumer une chaleur
fébrile. Cependant l'oisiveté dessèche
aussi par accident, en affaiblissant les forces qui
président à la distribution de la nourriture
[et à la nutrition des parties elles-mêmes,
de la même manière que le défaut
d'aliments] dessèche les solides. On ne doit
pas du tout négliger les mouvements du corps,
comme le font quelques-uns de ceux qui cultivent les
sciences avec ardeur ; il faut, au contraire, autant
que possible, le mouvoir tout entier aussi bien que
ses parties par des mouvements de force égale,
en se livrant à toutes les espèces d'exercices,
au moyen desquels chaque partie exécutera sa
fonction propre. Les mouvements que nous faisons par
nous-mêmes sont les plus utiles, parce qu'ils
ont leur point de départ dans la profondeur du
corps et que ce sont nos actions propres.
12. QUEL EST LE TEMPS CONVENABLE POUR LES
EXERCICES. Volume 1er, Livre 6, chap.
12 d'Oribase tiré de Galien.
Puisque les exercices peuvent produire ces
effets, il n'est pas dif-
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ficile de déterminer le temps où
ils conviennent ; en effet, comme ils sont favorables
à la distribution de la nourriture, il faut que
l'estomac ou les intestins ne contiennent pas une surabondance
d'aliments mal digérés ou d'humeurs crues,
car alors il y aurait danger que ces matières
ne fussent attirées vers toutes les parties du
corps avant que la coction ne les eût rendues
propres à la nutrition. Les exercices détergeant
les conduits et évacuant les superfluités,
il vaut mieux les employer avant le repas ; car, plus
vous nourrirez un corps impur, plus vous lui nuirez
; de ce que nous venons de dire il ressort par conséquent
que le meilleur temps pour les exercices est le moment
où le repas de la veille est parfaitement élaboré,
et a subi les deux coctions, celle qui se fait dans
l'estomac et celle qui se fait dans les vaisseaux, et
où le temps de prendre un
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nouveau repas s'approche. Si vous permettez
à quelqu'un de s'exercer avant ou après
ce temps, vous remplirez son corps d'humeurs mal digérées,
ou vous donnerez lieu à la formation d'une quantité
trop grande de bile pâle. Le moyen de déterminer
ce temps est fourni par la couleur de l'urine ; ainsi
l'urine aqueuse signifie que les vaisseaux contiennent
encore les humeurs mal digérées qu'ils
ont reçues du ventre, l'urine jaune et bilieuse
indique que ces humeurs sont élaborées
depuis longtemps, et l'urine légèrement
teinte de jaune est un signe que la seconde coction
vient d'être achevée ; c'est alors par
conséquent qu'il faut permettre les exercices
après que toutes les superfluités contenues
dans la vessie et dans la partie inférieure des
intestins ont été évacuées;
car il y a danger qu'une certaine quantité de
ces superfluités ne se porte vers les parties
solides du corps, entraînée par le mouvement
de la chaleur qui se développe pendant les exercices.
Page 470
13. DE LA FRICTION PRÉPARATOIRE. TDM Volume
1er, Livre 6, chap. 13 d'Oribase tiré de Galien.
Si, après s'être déshabillé,
on passe immédiatement aux mouvements très
forts avant que tout le corps se soit ramolli, que les
superfluités soient atténuées et
que les conduits soient dilatés, il y a danger
de rupture ou de tiraillement de quelqu'une des parties
solides, il y a danger aussi que les superfluités
n'obstruent les conduits par la rapidité du pneuma
qui les met en mouvement. Afin donc que cela n'arrive
pas, il faut auparavant réchauffer le corps en
le frottant modérément avec un linge de
coton, ensuite avec de l'huile ; car je ne conseille
pas d'employer l'huile avant que la peau ne soit réchauffée,
que les conduits ne soient dilatés et, pour le
dire en un mot, que le corps ne soit préparé
à recevoir l'huile ; pour obtenir ces conditions
il suffit de passer, un très petit nombre
Page 471
de fois, avec une vitesse modérée,
les mains sur le corps sans le comprimer, en ayant pour
but de le réchauffer sans le froisser. Après
avoir agi de la sorte vous verrez une belle rougeur
s'étendre sur toute la surface de la peau; alors
il est temps d'appliquer l'huile et de faire frotter avec
les mains nues ; elles ne doivent être ni trop
dures ni trop molles, afin que le corps ne soit ni condensé
et resserré, ni affaibli et relâché
plus qu'il ne faut, mais qu'il reste dans son état
naturel. On doit frotter doucement pendant les premières passes,
ensuite on augmentera peu à peu et on se rapprochera
de la friction rude, en l'arrêtant au point on le
corps est évidemment comprimé, mais où
il ne subit pas encore de contusion. Il ne faut pas
faire pendant longtemps une friction aussi forte, mais seulement une ou deux fois
sur chaque partie ; car nous ne frottons pas ainsi pour endurcir le corps, quand nous
faisons passer un
Page 472
jeune garçon aux exercices, mais pour
exciter son activité, pour condenser la tonicité,
et pour compenser la raréfaction produite par
la friction molle ; il convient en effet de conserver
son corps dans un état moyen et de ne le rendre
en aucune façon ni trop dur ni trop sec, de peur
d'empêcher en quelque chose son accroissement
naturel. Quand il avance en âge et qu'il va devenir
jeune homme, nous nous servirons aussi d'une friction plus
rude et des bains froids après les exercices.
Il faut, dans les frictions, appliquer et passer les mains de plusieurs
façons, et les mouvoir non seulement de haut
en bas et de bas en haut, mais aussi suivant une ligne
qui se rapproche de la perpendiculaire, obliquement,
horizontalement, enfin suivant une ligne qui se rapproche
de l'horizontale (voyez la figure dans les notes), afin
que toutes les fibres des muscles soient, autant que
possible, frottées de tous côtés. La pièce
dans laquelle il va s'exercer ne doit être ni
trop chaude ni
Page 473
trop froide, afin que le corps prenne une
température exactement tempérée
durant la friction ; car, si la chambre était plus chaude
ou plus froide qu'il ne le faut, on commencerait à
suer dans la chambre chaude avant que le corps ne fut
suffisamment ramolli, et dans la chambre froide le corps
n'arriverait pas même à être réchauffé
ni bien ramolli [sous l'influence des exercices], il
ne s'élèverait pas de belle rougeur et
le corps ne se tuméfierait pas; en effet ce sont
là les signes d'une friction modérée pratiquée dans
un air tempéré chez un individu d'une
complexion tempérée.
14. DES DIVERSES ESPÈCES D'EXERCICES
ET DE LEUR EFFICACITÉ.
TDM Volume
1er, Livre 6, chap. 14 d'Oribase tiré de Galien.
Ce qui est commun à tous les exercices
c'est qu'ils procurent à l'économie une
augmentation de chaleur propre ; quant aux pro-
Page 474
priétés spéciales des
exercices particuliers, l'exercice qui exige de la force,
c'est-à-dire qui fatigue efficacement sans que
les mouvements soient rapides, tend fortement les muscles
et les parties fibreuses. Bêcher, retenir quatre
chevaux à la fois, soulever un poids considérable
en restant en place ou en avançant un peu, appartiennent
à ce genre d'exercice. Se promener sur un terrain
montant, grimper le long d'une corde, tenir les poings
serrés en étendant ou en soulevant les
bras et rester pendant longtemps dans cette position,
résister aux efforts d'une personne qu'on a engagée
à vous faire baisser le bras étendu, surtout
si on porte dans ses mains quelques poids comme sont
les haltères, et qu'on les tienne immobiles en
étendant ou en soulevant les bras, rentrent dans
la même catégorie. Il y a dans la palestre
des milliers d'autres exercices analogues qui exigent
de la force ; l'expérience et l'habitude de tous
ces exercices se trouvent chez le pédotribe,
personnage aussi différent du gymnaste que le
cuisinier l'est du médecin. Nous venons donc
d'énumérer les exercices qui
Page 475
exigent de la force ; il est temps maintenant
de passer aux exercices rapides sans intensité
ni violence ; à ce genre appartiennent les courses,
le combat simulé, la gesticulation, l'exercice
du corycos et celui de la petite balle. Ceux qu'on appelle
ecplethriser et pityliser sont également de la même espèce
: ecpléthriser, c'est courir à diverses
reprises tour à tour en avant et en arrière,
en se restreignant dans un espace de cent pieds, en
ne se retournant pas et en diminuant un peu à
chaque course la longueur de l'espace parcouru, jusqu'à
ce qu'on s'arrête à la fin à un
point fixe ; pityliser, c'est marcher sur la pointe
des pieds, soulever les bras et les faire mouvoir très
rapidement, l'un en arrière, l'autre en avant.
Page 476
D'autres exercices rapides, mais n'exigeant
point de force, sont ceux qu'on fait dans la palestre
en se roulant rapidement soit plusieurs ensemble, soit
tout seul. On peut aussi s'entrelacer étant debout,
et exécuter un exercice du genre rapide en saisissant
vivement tour à tour ceux qui sont près
de vous. On peut encore exécuter debout un exercice
du même genre pour les jambes seulement, en restant
à la même place, en sautant plusieurs fois
non seulement en arrière, mais quelquefois aussi
en avant et en soulevant tour à tour chacune
des jambes. On peut aussi exécuter de la même
manière un exercice du même genre pour
les bras, si l'on s'évertue à les mouvoir
à la fois fréquemment et rapidement sans
tenir des haltères, soit qu'on tienne le poing
serré, soit qu'on se contente de lever vivement
le bras sans fermer le poing. Tel est l'exercice rapide,
borné aux espèces que nous venons d'énumérer
; il est temps de
Page 477
passer à l'exercice violent, qui est
composé de l'exercice qui réclame de la
force et de l'exercice rapide ; car on peut se servir
comme d'exercices violents de tous ceux que nous venons
de ranger dans la classe des exercices qui réclament
de la force, pourvu qu'on y ajoute la rapidité
du mouvement. Les exercices suivants sont certainement
aussi du nombre des exercices violents : bêcher,
lancer des disques, sauter constamment sans se reposer,
de même lancer un projectile lourd quel qu'il
soit en rassemblant ses forces, ou travailler rapidement
étant couvert d'une armure pesante. Par conséquent
tous ces exercices sont des espèces qui diffèrent
par les points dont nous venons de parler, et, en outre,
parce que les uns fatiguent davantage les lombes, les
bras ou les jambes, d'autres l'épine du dos,
ou la poitrine seulement, ou le poumon. La marche et
la course sont des exercices propres des jambes ; la
gesticulation et le combat simulé, des exercices
propres des bras; se baisser et se relever continuellement
est un exercice propre aux
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lombes. Les respirations très grandes
sont des exercices propres de la poitrine et du poumon,
de même que les vociférations très
fortes sont en même temps des exercices propres
des parties susdites et de tous les organes de la voix.
Nous tenons de nous-mêmes les mouvements dont
nous venons de parler ; les suivants, au contraire,
nous viennent de l'extérieur : la navigation,
l'équitation et les déplacements qui se
font dans les voitures et les lits suspendus ou dans
les berceaux qu'on remue, ou pour les petits enfants
dans les bras de leurs nourrices ; on peut aussi ranger
la friction dans la classe des mouvements qui viennent
de l'extérieur. Quelques mouvements sont mixtes,
par exemple, l'équitation ; car il n'en est pas
pour ce mouvement comme pour le transport en voiture,
pendant lequel on est uniquement secoué par son
véhicule sans rien faire par soi-même,
mais, dans l'équitation, il faut tenir l'épine
droite, serrer
Page 479
exactement avec les deux cuisses les côtés
du cheval, tenir les jambes tendues et regarder en avant
; et par là on exerce aussi la vue et on fatigue
le cou. Les viscères ne sont pas moins secoués,
quand on va à cheval, mais moins quand on se
promène en voiture ; si, par conséquent,
on veut mettre en mouvement avec une certaine force
les viscères au-dessous du diaphragme, il faut
passer aux exercices susdits, en outre aux frictions qu'on
pratique à l'aide de bandes qui entourent le
corps. Respirer et vociférer très largement
et souffler fortement secouent aussi les viscères
situés au-dessous du diaphragme; enfin la rétention
du souffle elle-même n'est pas moins un exercice
des muscles du ventre que de ceux de la poitrine. Tels
sont les mouvements qui viennent de l'extérieur.
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15. COMMENT IL FAUT S'EXERCER. TDM Volume
1er, Livre 6, chap. 15 d'Oribase tiré de Galien.
Que le jeune homme se déshabille, comme
je l'ai déjà dit auparavant, quand les
urines sont arrivées à une maturité
complète, qu'il soit ensuite frotté modérément ; on reconnaîtra
le degré modéré de la friction à
la rougeur fleurie qui se répand, à la
facilité de croiser les bras et les jambes et
à la promptitude pour toute sorte de mouvement.
Qu'il s'exerce alors jusqu'à ce que son corps
se tuméfie, prenne une rougeur fleurie, et que
les mouvements soient faciles, égaux et bien
cadencés ; durant ce temps vous verrez aussi
apparaître de la sueur chaude mêlée
à de la vapeur. Mais il faut s'arrêter
aussitôt qu'un des signes énumérés
vient à se modifier, comme par exemple si on
voit que la tuméfaction du corps s'affaisse,
on fera de suite cesser l'exercice ; car, si vous laissez
Page 481
le jeune homme s'exercer davantage, vous donnerez
lieu aussi à l'évacuation de quelque chose
d'utile, en sorte que vous rendrez par là son
corps plus maigre et plus sec, et que vous en empêcherez
la croissance. On doit s'arrêter de même,
quand la fraîcheur de la couleur se fane; car
vous refroidirez le corps et vous dissiperez ses particules
par la perspiration, si vous continuez à l'exercer.
Puis, quand la facilité, la cadence et l'égalité
des mouvements paraissent compromises et anéanties,
on fera aussitôt reposer le jeune homme; de même,
s'il s'opère quelque changement dans la sueur,
par rapport à la quantité ou à
la qualité ; car elle doit de-venir toujours
de plus en plus abondante, plus forte et plus chaude
à mesure que les mouvements augmentent d'intensité.
Si elle de-vient moindre ou plus froide, le corps s'évapore
déjà, se refroidit et se sèche
plus qu'il ne convient. Par conséquent on donnera
une attention suivie à celui qui s'exerce, et
on le fera reposer immé-
Page 482
diatement dès qu'un des symptômes
susdits se montre; cependant. on ne l'enverra pas de
suite au bain, mais on modérera la force des
exercices et on lui ordonnera de s'arrêter, et,
si on veut, on pourra remplir les lombes par la rétention
du souffle, et passer à l'apothérapie
en versant de l'huile sur le corps. Or l'apothérapie
est de deux sortes, l'une est une partie de l'exercice
et l'autre en est une espèce; nous parlerons
dans la suite de celle qui est une espèce d'exercice.
16. DE LA FRICTION APOTRÉRAPEUTIQUE. TDM Volume
1er, Livre 6, chap. 16 d'Oribase tiré de Galien.
Traitons maintenant de l'apothérapie
qui est une partie de l'exercice. La dernière
partie de tout exercice qui se fait comme il faut s'appelle
apothérapie ; elle a deux buts, celui d'évacuer
les superfluités et de préserver le corps
de la fatigue. Le premier lui est commun avec l'exercice
considéré comme un tout ; car nous disions
Page 483
que l'exercice avait en tout deux buts, celui
de renforcer les parties solides du corps et celui d'évacuer
les superfluités. Le but propre de l'apothérapie
est de combattre et d'empêcher la fatigue qui
suit habituellement les exercices plus ou moins immodérés,
et la nature du but nous indiquera comment il faut faire
l'apothérapie ; car, comme on se propose d'évacuer
exactement les superfluités des parties solides
de l'économie qui, après avoir été
échauffées et atténuées
par les exercices, restent encore dans l'organisme,
il faut employer la friction qui se fait par un grand nombre de mains
étrangères avec rapidité, afin
qu'autant que possible aucune partie de l'individu que
l'on frictionne ne soit à découvert; on doit
tendre pendant la friction les parties qu'on frotte, et, en outre, on prescrira ce qu'on appelle
la rétention du souffle. Il faut verser beaucoup
d'huile sur le corps de celui qu'on frotte, car cette huile aide à la rapidité
et à la douceur de la friction, et en même temps elle procure
Page 484
un autre avantage très-considérable,
celui d'affaiblir la tension et de ramollir les parties
qui se sont fatiguées pendant les exercices un
peu forts. Que la friction tienne le milieu entre la friction molle et la friction rude, ce qui constitue en effet la friction moyenne.
Ceci aura lieu si les mains de celui qui frotte sont fortement
appliquées, de sorte que la pression qu'elles
causent se rapproche en quelque sorte de la friction rude.
Il faut modérer la quantité de l'huile
et la rapidité du mouvement des mains, jusqu'à
ce que la friction tienne exactement le milieu. Nous sommes
d'avis de tendre alors les parties qu'on frotte afin d'évacuer
à travers la peau toutes les superfluités
qui se trouvent entre elle et la chair sous-jacente.
C'est pour la même raison qu'une partie importante
de l'apothérapie
consiste dans la suspension et la rétention du
souffle (fig. 1) qui
se fait par la tension de tous les muscles de la poitrine
et par le relâchement de tous ceux du ventre et
du diaphragme ; ainsi les excréments se-
Page 485
ront poussés vers le bas. En second
lieu il faut, pour soumettre à l'apothérapie
les viscères sous-diaphragmatiques, recourir
à l'espèce de rétention du souffle
qui tend modérément les muscles du ventre.
C'est pour obtenir le même effet qu'il convient
d'employer les frictions opérées par des enroulements
de bandes autour du corps ; celui qu'on frotte doit se
roidir contre tous les mouvements des bandes, mais il
ne sera pas entraîné par tous, car, pendant
l'apothérapie, il ne doit plus se livrer ni à
des mouvements continuels ni à des mouvements
forts, mais il en fera quelques-uns qui seront interrompus
par des frictions ; voilà pourquoi il doit être
souvent enroulé dans les bandes, souvent repoussé
; souvent aussi, vers ce temps, il doit changer de place
avec le progymnaste, souvent enfin, étant placé
derrière lui, il enlacera ses jambes, tantôt
l'une, tantôt l'autre, autour du progymnaste,
avec une certaine tension qui ne
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doit pas être trop forte ; dans cette
position il doit être frotté par des gens qui le massent convenablement ; car c'est là la meilleure
manière de conserver l'augmentation de chaleur
qu'il doit à ses: exercices, et en même
temps d'évacuer les superfluités par ses
tensions et ses mouvements propres ; il semble aussi
que la rétention du souffle aide assez efficacement
à produire cet effet. Les meilleurs gymnastes
emploient donc aussi entre les exercices la rétention
du souffle ainsi que la friction apothérapeutique, que nous venons
de décrire; par là ils font reposer du
même coup, quand ils commencent à être
fatigués, ceux qu'on exerce, et ils détergent
peu à peu les conduits, afin de rendre le corps
pur et en même temps propre à la perspiration
pour les exercices qui vont suivre; en effet. si le
gymnaste ne prenait pas de pareils soins, il encourrait
le danger de voir plutôt les conduits s'obstruer
que se nettoyer; car les mouvements un peu forts des
matières sont de nature à causer des
Page 487
effets opposés, s'ils se produisent
dans des circonstances dissemblables et d'une manière
différente ; ils produisent des obstructions,
si la matière mise en mouvement est épaisse
et abondante et si elle se précipite en grande
quantité à la fois ; ils produisent, au
contraire, des détersions, si elle est peu abondante,
subtile, si elle ne marche pas très rapidement,
et si elle ne fait pas. des efforts pour être
évacuée d'un seul coup. Voilà pourquoi
j'approuve ceux qui emploient l'apothérapie au
milieu des exercices, surtout chez ceux qui s'occupent
des combats d'athlètes appelés lourds.
17. DE LA FRICTION CONSIDÉRÉE
EN ELLE-MÊME.
TDM Volume
1er, Livre 6, chap. 17 d'Oribase tiré de Galien.
Quelquefois la friction est de nature à produire par elle-même
quelque chose d'utile pour le corps, quelquefois aussi
elle est l'auxiliaire des moyens qui agissent dans le
même sens ; elle est auxiliaire quand il s'agit
d'exercices, aussi bien quand elle y prépare
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que quand on l'emploie après eux; dans
le premier cas, elle est appelée préparatoire,
dans le second apothérapeutique ; nous
en avons déjà parlé précédemment.
La friction qui produit par elle-même un effet
utile peut relâcher, resserrer, donner de l'embonpoint
et amaigrir : resserrer, si elle est rude, relâcher,
si elle est molle, amaigrir, si elle est prolongée,
donner de l'embonpoint, si elle est modérée;
car ce sont là les quatre différences,
eu égard au genre, dans lesquelles rentrent toutes
les frictions, établies sur leurs quatre propriétés
et sur leur quadruple utilité. Si nous y ajoutons
encore les espèces moyennes dont nous saisissons
la nature par la considération des espèces
fondamentales, nous aurons en tout six espèces;
car, si la friction rude peut resserrer, et la friction molle relâcher, il faut frictionner rudement
les corps qui sont affaiblis outre mesure et mollement
ceux qui sont resserrés ; mais, s'il y a un corps
qui se trouve dans une situation moyenne, il est clair
qu'il ne faut le
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frotter ni rudement
ni mollement, mais en évitant autant que possible
les deux extrêmes. De même que, dans ces
différences qui tiennent à la qualité,
il n'y a pas seulement une friction rude et une friction molle, mais encore une friction modérée, de même, dans
les différences selon la quantité, il
n'y a pas seulement une friction prolongée et une friction de courte durée, mais aussi une friction moyenne
; en effet, comme il y a deux choses qui diffèrent
entièrement en genre, c'est-à-dire l'actif
qui diffère en genre du passif, les
frictions
appartiennent au genre actif et
les modifications qu'elles produisent dans notre corps,
au genre passif; voilà pourquoi il existe indispensablement
des séries de qualités opposées
qui tiennent aux frictions elles-mêmes, et d'autres qui tiennent
aux modifications qu'elles produisent ; celles qui tiennent
aux frictions sont la friction molle et la friction rude, la friction prolongée et la friction de courte durée, tandis que l'acte
qui consiste à resserrer et à relâcher
les corps, ainsi que celui d'amaigrir et de
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donner de l'embonpoint tiennent aux modifications.
La première série d'effets opposés
quant aux modifications est produite par la première
série de qualités opposées quant
à la friction, mais il n'en est plus ainsi pour la seconde
; car, dans cette série, l'amaigrissement est
produit par la friction prolongée, et l'embonpoint par la
friction
modérée ; en effet la friction de courte durée ne saurait donner
de l'embonpoint, parce que la partie dans laquelle nous
voulons produire cet effet a besoin d'un appel modéré
de sang et d'une force réelle, et que ces deux
conditions sont remplies comme il faut par la friction
modérée, tandis que ni l'une ni l'autre
ne l'est complètement et suffisamment par la
friction
de courte durée. Par conséquent, en ramenant,
pour ainsi dire, à leurs éléments
les différences simples entre les frictions, Hippocrate
a exposé toute la doctrine qui s'y rapporte,
enseignant comment on nourrira, on amaigrira, on ramollira
ou on resserrera suffisamment le corps. Les effets moyens
et ceux qui sont produits par les combinaisons se comprennent
tout de suite aussitôt qu'on connaît les
effets principaux ; il y
Page 491
a un effet moyen, par exemple, si nous ne
voulons ni relâcher, ni resserrer le corps, ni
lui donner de l'embonpoint, ni l'amaigrir; il y a une
combinaison, si nous voulons en même temps resserrer
le corps et lui donner de l'embonpoint ; qui ne comprendra
pas en effet que, si nous voulons donner au corps de
l'embonpoint constitué par une chair dure, il
faut employer une friction rude qui soit en même temps moyenne
eu égard à la quantité de même,
si nous voulons procurer au corps un embonpoint constitué
par une chair molle, il faut employer une friction molle
mais moyenne par rapport à la quantité
; il en est de même pour les autres combinaisons
; car, si on combine alternativement les trois différences
de frictions selon la qualité avec leurs trois
différences selon la quantité, on obtiendra
neuf combinaisons. Je vais les exposer dans un diagramme,
dans lequel il faut comprendre que la première
série de haut en bas se rapporte aux qualités,
et la seconde aux quantités.
Page 492
QUALITÉS. QUANTITÉS.
____ ____
Rude................... Prolongée.
Rude .................. Courte. Rude ..................
Moyenne. Molle .................. Prolongée.
Molle .................. Courte. Molle ..................
Moyenne. Moyenne ..............Prolongée.
Moyenne ..............Courte. Moyenne ..............Moyenne.
18. DE LA FRICTION DU MATIN. TDM Volume
1er, Livre 6, chap. 18 d'Oribase tiré de Galien.
Voici à peu près l'opinion qu'il
faut se former sur la friction du matin, du moins quand il s'agit d'un individu
dont le corps est bien tempéré : si l'individu
est dans un état irréprochable, il est
superflu de le frictionner, à moins qu'il ne soit parfois dans
la né-
Page 493
cessité de résister à
un froid intense ; car, dans ce cas, nous préparons
cet individu par la friction de la même manière que ceux
qui vont prendre un bain froid ; s'il y a quelque sentiment
de fatigue, alors il faut oindre
et frictionner doucement. De même, s'il existe une
sécheresse exagérée, on doit oindre avec de
l'huile
douce (car cette pratique humecte le corps quand il
est sec), mais on frottera très peu, et la friction ne sera ni rude ni molle ; car il nous faut
seulement activer la distribution de l'aliment et non
pas changer la complexion ou dissiper par la perspiration
quelque matière contenue dans le corps ; or la
friction
molle produit ces deux effets et la friction rude seulement l'un des deux, puisque la
dernière resserre et durcit la peau, tandis que
la friction molle favorise la perspiration, raréfie
le corps et le ramollit. Si nous voulons remédier
à un resserrement du corps produit par des frictions rudes
accom-
Page 494
pagnées de pincements, ou par des exercices
violents, ou par ceux pour l'exécution desquels
on a employé beaucoup de poussière, nous
frictionnerons mollement en usant abondamment d'huile douce
; quant aux parties resserrées par suite de refroidissement,
nous les ramènerons à l'état normal
en réchauffant d'abord par des frictions sèches et rapides, en second lieu,
par des frictions faites avec de l'huile. La raréfaction qui tient à
des bains fréquents, à des frictions molles
ou aux rapprochements sexuels, se guérira par
des frictions sèches et peu nombreuses, suivies
de frictions également peu nombreuses, mais pratiquées
avec quelque huile astringente. Quant à l'humidité produite
par les excès de boisson, il n'y a que les frictions sèches
avec des linges de coton ou des gants qui la gué-rissent,
quelquefois aussi celles qui se font avec les mains
toutes seules sans huile ou avec très-peu d'huile, mais il
faut que cette huile favorise la perspiration et soit
privée de toute qualité refroidissante.
Page 495
19. DE LA FRICTION DU SOIR. TDM Volume
1er, Livre 6, chap. 19 d'Oribase tiré de Galien.
Voilà pour la friction du matin ; quant à la friction du soir,
elle convient à ceux qui sont très fatigués,
ou desséchés ou atrophiés. Mais
ne parlons pas pour le moment du défaut de nutrition,
symptôme que nous traiterons ailleurs avec tous
les autres symptômes morbides; au contraire, chez
un individu d'une nature bien tempérée,
s'il existe une fatigue très-prononcée
ou une sécheresse démesurée du
corps, il faut que le déjeuner soit léger,
qu'il y ait un intervalle assez long entre ce repas
et le dîner, que la majeure partie de cet intervalle
se .passe dans le repos ; il doit néanmoins se
promener un peu aussi pour faire descendre les aliments
qui sont secoués et poussés vers le bas
par les mouvements qui se font de-bout; le résultat
sera encore meilleur, si on peut aller à la selle
; car, après tout cela, on peut frictionner sans danger avec de l'huile
Page 496
douce, pourvu qu'on ne malaxe pas trop le
ventre ; si on ne prend pas cette précaution,
on court risque. de rendre plus difficile la digestion
des aliments, de faire remonter de ces aliments dans
le corps une humeur à demi digérée,
de voir la tête se troubler et l'orifice de l'estomac
se retourner. Le mieux par conséquent est de
ne pas frictionner du tout au ventre ; mais, s'il existe quelquefois
un sentiment de fatigue ou s'il survient une sécheresse
trop grande dans les muscles qui forment ses parois,
il faut oindre modérément, en malaxant doucement.
20. DE LA FRICTION COMME MOYEN CURATIF. TDM
(Tiré d'Hérodote.)
[Du livre Sur ce
que les malades doivent faire pour se traiter.] Volume
1er, Livre 6, chap. 20 d'Oribase tiré d'Hérodote.
Les frictions qu'on emploie pour guérir les fièvres
doivent se
Page 497
faire aux époques suivantes : elles
conviennent pendant l'acmé de la maladie, mais
non pendant toutes les parties de cette période,
mais seulement vers la fin, de sorte qu'elles soient
assez rapprochées du déclin. Quant aux
diverses époques de l'accès, il faut préférer
le commencement du déclin. On doit se défier
des inflammations des parties centrales, car, dès
que ces inflammations existent, il est impossible de
faire cesser la fièvre. On se défiera
aussi des respirations difficiles et des sueurs qui
se montrent irrégulièrement soit sur tout
le corps, soit à la figure et au cou. Quant à
ceux donc qui ont eu une crise au commencement du déclin,
il faut les coucher, en été et en automne,
dans un endroit tempéré ; et on aura tout
prêt un mélange chaud d'huile et d'eau
auquel on a ajouté de l'aphronitre
grillé. La friction doit être pratiquée, chez les
sujets jeunes et de petite taille, par quatre hommes,
et par six hommes chez ceux qui ont atteint l'âge
viril et qui ont une taille plus élevée.
Les uns frotteront les membres supérieurs jusqu'aux doigts,
Page 498
d'autres le tronc jusqu'aux aines, d'autres
enfin les membres inférieurs jusqu'aux pieds.
Après avoir versé sur le corps le mélange
gras, on doit frictionner chaque partie en passant les mains de haut
en bas, ensuite on couchera le malade sur le ventre
et on le frictionnera de la même manière. Au commencement,
la friction devra être légère et
lente, ensuite elle deviendra rapide et accompagnée
de pression, tandis que, vers la fin, la friction redeviendra
douce et en tout semblable à celle du commencement.
Ceux qui frottent doivent aussi malaxer la tête et le cou après avoir
versé dessus le mélange gras. Chaque partie
doit être frictionnée environ cent fois chez les jeune ; gens,
deux cents fois chez les adultes ; chez ceux qui mènent
une vie d'athlète, il faut doubler le nombre
des frictions. S'il se développe, durant les frictions, une
sensation très appréciable de bien-être,
si la fièvre cesse en même temps, si la
respiration est facile, si les malades ont une bonne
couleur, si l'ampleur du pouls ne diminue pas beaucoup,
s'il ne devient pas plus fréquent et si la chair
Page 499
se tuméfie et rougit, il faut augmenter
le nombre des frictions. Si, pendant les frictions, il survient une sueur qui n'existait pas
auparavant, il faut savoir que la friction a été employée à
propos, qu'elle a fait du bien au malade, que cependant
il a encore besoin d'une répétition de
ce traitement. Si les accès restent les mêmes
et qu'il ne se montre aucun symptôme ni bon ni
mauvais qui soit appréciable aux sens, il faut
que le médecin, trouvant ses raisons d'agir dans
soi-même, s'en tienne au traitement qu'il a jugé
bon d'abord ; car l'utilité de ce traitement
se manifestera par la seconde application. Après
les frictions il faut administrer à tous les malades
une quantité suffisante d'eau chaude, et, s'il
y a coïncidence de rémission, on les nourrira
quand l'ébullition et le trouble causés
par le traitement sont apaisés ; quant à
ceux qui n'éprouvent pas encore de rémission,
nous les nourrirons après avoir attendu la rémission
complète, et en attendant nous leur donnerons
à boire abondamment, surtout à ceux qui
restent dans un état de sécheresse. Il
faut
Page 500
donner des aliments humides et chauds. Si
c'est en hiver, on emploiera ce traitement dans un lieu
suffisamment chaud ; on mêlera à l'huile
de l'aphronitre et un dixième de vin. Si, pendant
la répétition du traitement par les frictions, les
malades ne sont pas relâchés, si les forces
restent intactes, si le pouls conserve son ampleur et
si la respiration ne montre aucune apparence de trouble,
il faut les restaurer après les frictions, leur donner un bain de siège et faire
des affusions, car les parties se relâcheront
par ce traitement, et la sueur produira par sa chaleur
quelque chose de semblable à la métasyncrise.
Les bons effets des frictions se révèlent de diverses manières
; d'abord les malades peuvent présenter les mêmes
symptômes qu'avant, comme je l'ai déjà
dit, et n'éprouver de l'amélioration que
par rapport à leur situation générale;
ensuite les types de la maladie peuvent se changer en
formes d'une autre espèce, ou revêtir le
caractère intermittent, ou bien la maladie s'arrête
après s'être aggravée le jour même;
souvent les frictions amènent une persistance de la maladie
exempte de danger,
Page 501
cas dans lequel on renoncera à l'application
héroïque de ce traitement, car alors il
faut s'en tenir au traitement adopté auparavant
et s'attendre à ce que son efficacité
ne se montre qu'après un long espace de temps.
Si les malades ne supportent pas l'application des mains,
parce qu'elle leur donne la même sensation que
lorsqu'on touche une plaie, il faut arrêter la
friction.
Si, pendant la friction, les malades sentent une chaleur plus forte
dans leur intérieur, que ce symptôme aille
toujours en augmentant, et qu'il y ait encore quelque
autre signe de malaise, il faut, dans ce cas aussi,
renoncer à ce traitement, administrer de l'eau
bouillie refroidie, et attendre le temps de la rémission
pour appliquer les. autres moyens de traitement. S'il
arrivait que l'emploi de la friction dans des fièvres intermittentes de
longue durée fût suivi d'une fièvre
continue et intense, il ne faut pas s'en effrayer, comme
s'il était survenu quelque chose de mauvais ;
car, plus tard, cet accident disparaît en peu
de temps. On emploiera les frictions pour guérir les fièvres chez
ceux où la fièvre,
Page 502
ayant été faible et sans grande
chaleur dès son origine, est restée toujours
dans le même état, ou chez ceux dont les
fièvres, d'abord fortes et graves, se sont transformées,
à leur déclin, en des fièvres égales
en intensité aux premières. Si nous avons
prescrit les frictions à ceux qui n'en avaient pas besoin,
ou si non seulement nous n'avons pas su saisir avec
sûreté le temps opportun, mais si, de plus,
nous les avons employées en opposition avec l'idiosyncrasie,
il faut admettre que cela leur a fait beaucoup de tort;
par conséquent il est nécessaire de considérer
les inconvénients qui résultent de cette
manière d'agir : si la fièvre qui suit
les frictions est forte et ne se transforme pas, il faut
savoir que le traitement a été employé
à tort; de même, si les malades deviennent
lourds et plus ou moins somnolents durant toute la période
de chaleur, s'ils ont le corps fatigué, la respiration
plus rapide qu'auparavant, le pouls petit, faible et,
de plus, fréquent, il faut juger également
que la
Page 503
friction a été
appliquée à tort; il peut se produire
aussi des tremblements et des convulsions par des frictions inopportunes
et répétées ; il en est de même
s'il survient quelque douleur ou quelque inflammation
pendant que la chair de tout le corps se tuméfie.
On fera soigneusement attention à ces symptômes,
et on leur opposera immédiatement le traitement
convenable.
21. DE LA PROMENADE.
(Tiré d'Antyllus.)
[Du quatrième livre ; Sur
ce que les malades font eux-mêmes pour se traiter.] Volume
1er, Livre 6, chap. 21 d'Oribase tiré d'Antyllus.
Il faut distinguer deux espèces de
promenades; celle qu'on emploie comme moyen de traitement
et celle qu'on emploie pour restaurer le corps. Nous
prescrivons donc la promenade comme moyen de traitement
dans les affections de la tête, des yeux, de la
luette, et dans celles de la poitrine, en exceptant
le crachement de sang ;
Page 504
elle est éminemment utile quand l'orifice
de l'estomac est saturé d'humidité ou
douloureux, qu'il rend acides ou corrompt les aliments
; elle convient aussi quand les femmes ont une rétention
des règles, quand le ventre est resserré,
quand les aliments surnagent dans l'estomac, quand il
y a rétention d'urine. Elle fait beaucoup de
bien aussi à ceux qui ont la sciatique, et, en
général, à tous ceux chez qui quelque
humeur doit couler d'en haut vers les parties inférieures,
ou chez qui les matières, bien qu'elles aient
une tendance vers le bas, ont néanmoins besoin
d'excitation pour être excrétées.
Nous employons la promenade apothérapeutique après les exercices lourds, les purgations
produites par les médicaments, l'onction des
yeux, les vomissements abondants; en un mot la promenade
apothérapeutique peut détendre l'âme,
déplacer le pneuma et le ramener à l'état
normal, relâcher les parties tendues, purger la
poitrine, faciliter la respiration, renforcer les organes
des sens et l'estomac, et, ce qui est le plus important,
dissiper tout état pénible
Page 505
qui ressemble à la fatigue. La promenade,
employée comme moyen de traitement, doit être
longue et accompagnée de déploiement de
force; elle doit se faire en appuyant fortement les
pieds et en marchant plutôt sur les talons que
sur la plante des pieds et en tendant le jarret; au
début elle doit être douce, ensuite plus
forte, et après cela elle doit de nouveau se
ralentir ; on calculera la durée d'après
les forces ; la promenade apothérapeutique, au
contraire, doit être courte, douce, sans tension,
modérée et accompagnée de distractions
de l'âme et du corps. Les promenades douces conviennent
aux gens faibles, à ceux qui font usage de la
promenade après le repas, à ceux qui viennent
de se lever après le sommeil, à ceux qui
en usent pour se préparer à de grands
exercices, à ceux qui y ont recours à
cause d'une douleur quelconque ; les promenades dans
lesquelles on emploie de la force conviennent aux gens
Page 506
vigoureux, à ceux qui sont refroidis,
à ceux chez qui le pneuma est difficile et long
à mettre en mouvement, bien qu'ils conservent
leurs forces, à ceux qui ont le corps un peu
paresseux, et aux convalescents qui ont un faux embonpoint.
Celles qui sont accompagnées d'une forte tension
des jambes et dans lesquelles on appuie sur les talons
sont très avantageuses, si la tête souffre
d'une maladie quelconque, si la poitrine est trop humide,
si l'utérus est rétracté vers le
haut, si les règles sont arrêtées,
si les parties inférieures sont mal nourries,
en un mot dans tous les cas où la matière
tend à se porter en haut. Les promenades qui
ne sont pas accompagnées de tension étant
semblables aux marches modérées, conviennent
dans les mêmes cas. On a observé que la
marche qui se fait sur la pointe des pieds est spécialement
utile contre les ophtalmies et la constipation, et que
la promenade qui se fait en montant convient quand la
respiration est courte, ainsi qu'avant le repas, et
quand cette promenade
Page 507
remplace quelque grand exercice. Se promener
en descendant fatigue les jambes, mais est plus propre
que les autres promenades à faire descendre les
matières en les entraînant de la tête
vers le bas. La promenade irrégulière
convient à ceux que cet exercice ennuie promptement.
Les promenades dans la plaine sont plus fatigantes que
ces dernières, mais elles ramènent plus
facilement à leur état naturel le pneuma
aussi bien que le corps. Celles qui se font sur une
pente rapide remplissent la tête. Celles qui se
font dans le sable, surtout s'il est épais, constituent
un des exercices les plus lourds et ont une grande efficacité
pour renforcer toute partie du corps et pour faire descendre
les matières des parties supérieures.
Celles qui se font dans de la terre molle se rapprochent
en quelque sorte de celles qui se font dans le sable.
Celles qui se font dans une prairie sont très-douces,
ne frappent point fortement [la tête] et ne produisent
pas de trouble, mais elles remplissent la tête
à cause des odeurs parfumées et de l'humidité
propre aux prairies. Les promenades sur les routes sont
moins fatigantes que les promenades
Page 508
dans les promenoirs. Celles où on fait
beaucoup de détours nuisent à la tête.
Les promenades dans lesquelles on va toujours en ligne
droite sont semblables à celles qui se font sur
les routes. Les promenades qui se font dans les étages
supérieurs du promenoir sont préférables
à toutes les autres, car on est à l'abri
de l'évaporation de la terre, et on jouit d'un
air plus pur que dans les autres; celles de cette espèce
qui se font sur un plancher sont les plus convenables,
car les planches, en cédant, rendent la tête
légère et attirent la matière vers
le bas. Se promener peu convient quand on est fatigué,
quand on ne prend pas de bain après les exercices,
quand on a besoin de se promener après le repas
et quand on se sent le corps pesant. Se promener beaucoup
profite à ceux qui ont une affection de la tête
ou de la poitrine, à ceux dont les parties inférieures
du corps sont mal nourries et à ceux qui ont
besoin d'un exercice un peu lourd. Les promenades le
long de la mer dessèchent et atténuent
les matières. Les promenades près des
rivières ou des lacs humectent, mais
Page 509
celles qui se font au bord des lacs sont les
plus mauvaises. Les promenades au centre du pays sont
meilleures que les autres dont nous venons de parler,
mais elles sont inférieures aux promenades le
long de la mer. Les promenades dans la rosée
sont semblables à celles qui se font près
des lacs. Dans des plaines ouvertes, elles sont plus
propres à favoriser la perspiration et à
rendre légers que toutes les autres ; il en est
de même pour celles qui se font dans les endroits
élevés. Les promenades dans les vallées
profondes et les précipices [sont mauvaises],
car l'air dans ces endroits est mal tempéré
et vicieux. De même, les promenades sous un toit
sont pires que celles qui se font en plein air, car
elles remplissent la tête, surtout si le toit
est bas. Les promenades par un temps calme favorisent
la perspiration, dissipent les superfluités,
relâchent et ne frappent pas [la tête].
Quant aux promenades qu'on fait au vent, celles qui
se font au vent du nord produisent de la toux et nuisent
à la poitrine, mais
Page 510
elles renforcent l'orifice de l'estomac quand
il est affaibli, rassemblent les forces qui se dissipent
et rendent les sens plus subtils ; au vent du sud elles
remplissent la tête, obscurcissent les organes
des sens, mais elles relâchent le ventre et elles
affaiblissent; au vent d'ouest, elles sont les meilleures
de toutes celles qui se font au vent, car elles n'ont
pas les désavantages des promenades au vent du
nord, et de plus elles sont douces et donnent de la
distraction; les promenades au vent d'est sont mauvaises
et frappent [la tête]. Les promenades au soleil
donnent de la distraction, remplissent la tête
et produisent du malaise. Sous les arbres, elles sont
meilleures que sous un toit, (car l'air y est renouvelé
et devient plus salubre) ; elles font du bien ou du
mal au corps, selon la nature des arbres. Les promenades,
quand le ciel est pur, rendent léger, favorisent
la perspiration, atténuent et rendent la respiration
et les mouvements faciles. Quand le ciel est couvert,
elles remplissent la tête, produisent de la pe-
Page 511
santeur, mais favorisent moins la perspiration.
Les promenades du matin relâchent le ventre, dissipent
la lourdeur produite par le sommeil et atténuent
le pneuma. Celles du soir préparent au sommeil
et dissipent les accumulations de gaz.
22.
DE LA COURSE.
(Tiré du même livre.) Volume 1er, Livre 6, chap.
22 d'Oribase tiré d'Antyllus.
La course, étant une promenade violente,
se range parmi les exercices violents; elle convient
bien en hiver et aussi au milieu de l'été.
Elle sert à réchauffer le corps, à
rappeler l'appétit, à fortifier l'activité
naturelle, à renforcer l'orifice de l'estomac
et à arrêter les fluxions, car, quoiqu'elle
semble aggraver les fluxions le premier jour, elle les
réprimera dans la suite, mais elle remplit la
tête. Dans les maladies des reins et dans la gonorrhée
nous employons la course comme un moyen de traitement
éprouvé par l'expérience. La course
Page 512
est utile aux gens affectés de sciatique,
qui ont de la peine, il est vrai, à commencer
à courir, mais qui oublient pour ainsi dire leur
maladie quand ils sont en train. Nous avons observé
nous-même que la course profite à ceux
qui ont des coliques, qui ont mangé des champignons
[vénéneux] et à ceux qui ont été
piqués par un scorpion. Quant aux diverses espèces
de courses, d'après la qualité, la quantité
et de semblables points de vue, nous les déduirons
de ce que nous avons dit auparavant sur les promenades,
et nous parlerons actuellement de celles dont il n'a
pas encore été question, et qui sont peu
nombreuses. Il y a donc d'abord une espèce de
course qui consiste à marcher en avant en ligne
droite et qu'on a appelée du nom générique
de course; il y en a une autre qui consiste à
marcher en arrière et qu'on appelle anatrochasme
; enfin il y en a une troisième espèce
qui consiste à marcher en cercle et qu'on nomme
péritrochasme. La course en avant a les propriétés
que nous avons déjà énumérées.
L'anatrochasme fait du bien à la tête,
aux yeux, à la
Page 513
nuque, à l'orifice de l'estomac et
aux lombes, parce qu'elle n'est pas rapide (pour cette
raison elle ne remplit pas non plus la tête) et
que la rétrogression, en forçant d'appuyer
plus fortement et de marcher sur la pointe des pieds
de peur de tomber, attire les matières vers le
haut. Le péritrochasme est favorable à
la poitrine et aux jambes, mais il ne convient pas aux
affections de la tête. Les courses avec des vêtements
échauffent la chair et produisent de la sueur.
Les courses sans vêtements ne produisent pas beaucoup
de sueurs, mais elles dissipent efficacement [les humeurs]
par la perspiration insensible et elles durcissent et
dessèchent le corps.
23. DU MOUVEMENT PASSIF.
(Tiré du même livre.) Volume 1er, Livre 6, chap.
23 d'Oribase tiré d'Antyllus.
Les autres exercices consistent dans le mouvement
du corps; mais le mouvement passif a pour éléments
le mouvement et la position qu'on observe, les parties
du corps étant en repos, tandis
Page 514
que le tout est mu par impulsion ; voilà
pourquoi c'est un exercice très utile et très
doux, qui ne fatigue pas les parties, quoiqu'il ne les
mette pas moins en mouvement que les grands exercices.
Tout mouvement passif peut exciter la chaleur innée,
disperser la surabondance des matières, renforcer
les parties solides et exciter les fonctions engourdies;
en outre il chasse la lourdeur, apaise le trouble du
corps, procure du sommeil aux gens frappés d'insomnie
; il excite, au contraire, l'attention et produit la
veille chez ceux qui sont lourds ou affaiblis, car il
amène le sommeil en dissipant les superfluités
de la tête et de l'orifice de l'estomac, puisque
ce sont justement ces parties qui ont le plus d'influence
pour la production de l'insomnie, tandis qu'il devient
une cause de veille parce qu'il
Page 515
excite et renforce la tension des parties.
Outre les différences communes dont nous avons
déjà parlé dans le chapitre [21]
Sur la promenade, le mouvement passif présente
encore les espèces suivantes, qui lui sont propres
: le mouvement dans un lit, qui est de deux sortes,
selon que le lit est suspendu ou qu'il a des supports
aux pieds qui sont diagonalement opposés ; le
mouvement dans une litière, qui est double aussi,
puisque, dans quelques litières, ceux qu'on transporte
sont assis, et que, dans d'autres, ils sont couchés;
le mouvement dans une voiture, le mouvement dans un
navire qui diffère aussi selon qu'il s'agit d'un
navire à voiles ou à rames. Il faut encore
ranger l'équitation parmi les mouvements passifs,
quoique quelques auteurs en traitent séparément.
On emploiera le mouvement dans le lit chez les fébricitants
ou chez ceux qui
Page 516
sont affectés d'une maladie chronique,
ainsi que chez les individus traités par l'ellébore
; il est utile aussi pendant la convalescence à
ceux qui sont encore faibles, à ceux qui souffrent
d'insomnie, qui ont une disposition à la paresse,
qui ont la faim canine (car il fait cesser la tension),
chez qui les aliments se distribuent lentement dans
le corps, enfin qui sont trop faibles pour supporter
les autres exercices ; c'est de la même manière
qu'il soulage ceux qui sont depuis longtemps malades.
Mais l'une des espèces de mouvement dans le lit,
celui qui se fait dans le lit suspendu est également
bonne avant le repas et après, tandis que l'autre
ne saurait s'employer après le repas ; quant
à la manière de l'employer, nous l'avons
expliquée dans le chapitre Sur
l'ellébore (VIII, 6
). Nous donnons un mouvement passif aux fébricitants
dans une litière où ils sont couchés,
surtout à ceux qui ont du léthargus ou
de l'assoupissement, et à ceux qui sont affectés
d'une fièvre simple, enracinée et longue.
Si les forces ne font pas défaut, on doit prolonger
la durée du mouvement
Page 517
passif ; car celui qui meut le corps pendant
un court espace de temps rend quelquefois la fièvre
plus forte. S'il s'agit de fébricitants, on donnera
un mouvement passif, dans une litière où
on s'assied, à ceux qui arrivent à une
rémission complète, ou qui ont au moins
une rémission de longue durée, et aussi
dans les fièvres qui durent long-temps, même
quand les intervalles ne sont pas de longue durée;
s'il s'agit d'individus apyrétiques [aux .......
]. Une litière découverte est préférable
à une litière fermée. Quant au
temps approprié au mouvement passif, aux endroits
où on le met en usage et à la manière
dont on l'emploie, nous les déduirons de ce que
nous avons dit dans le chapitre [21] Sur la promenade.
Le mouvement passif dans une voiture agit, en quelque
sorte, comme un levier : il met en mouvement les maladies
enracinées. De tous les mouvements passifs produits
par un vaisseau, celui qu'on fait dans un navire à
rames est ordinairement peu considérable ; on
le fait près de la
Page 518
terre et dans une mer sans vagues; par conséquent
il ne produit pas beaucoup de trouble, ni de ballottement
; aussi convient-il à peu près dans les
mêmes cas que le mouvement en voiture ; seulement
il a l'avantage de se faire dans un air pur qui contient
des évaporations sèches, âcres et
non pas humides ; pour cette raison il est préférable.
Le mouvement passif dans un navire mu par le vent dans
la haute mer est très varié et composé
d'éléments diamétralement opposés
; car il se fait avec un mouvement incessant très
rapide et très-intense par suite de la marche
du navire ; il est accompagné à la fois
de quiétude et de peur, puisqu'il amène
des changements très faciles et très rapides
; or, de pareils changements guérissent de toute
disposition invétérée aux maladies.
Le ballottement pendant la navigation a la même
efficacité qu'un traitement léger par
l'ellébore blanc.
Page 519
24. DE L'ÉQUITATION.
(Tiré du même livre.) Volume 1er, Livre 6, chap.
24 d'Oribase tiré d'Antyllus.
L'équitation est peu employée
chez les malades ; car, si le cheval marche doucement,
l'équitation ne produira d'autre effet que de
la fatigue, surtout aux aines; si, au contraire, il
marche avec véhémence, l'équitation
secoue tout le corps d'une manière pénible;
cependant elle a quelque chose d'utile, car elle renforce
le corps et surtout l'orifice de l'estomac plus que
tous les autres exercices; elle purge les organes des
sens et les rend plus déliés, mais c'est
un exercice très-nuisible à la poitrine.
25. DU MOUVEMENT PASSIF QUI CONVIENT DANS
LES FIÈVRES.
(Tiré d'Hérodote.)
[Du livre Sur ce
que les malades font pour se traiter.] Volume
1er, Livre 6, chap. 25 d'Oribase tiré d'Hérodote.
La mesure du mouvement passif dans une litière
ou dans une
Page 520
chaise, qu'on prescrit en cas de fièvre,
doit ne pas rester d'abord au-dessous de cinq stades,
et ne pas dépasser non plus dix stades; le second
jour il faut s'en tenir également à la
même distance, mais, à partir du troisième
jour, on ajoutera, chaque jour, cinq stades, jusqu'à
ce qu'on arrive à trente stades. Ceux qui ont
besoin d'un mouvement passif plus prolongé doivent
se servir d'un char à bras ; on commencera en
leur faisant faire trente stades, et on ira jusqu'à
soixante. Ceux qui ont de l'insomnie dans les fièvres
doivent être soumis au mouvement passif jusqu'à
ce que le sommeil les prenne ; de même les individus
qui éprouvent une douleur, ou quelque autre accident
semblable, doivent continuer le mouvement passif jusqu'à
la suppression de l'accident qui les incommodait. Il
n'est pas facile d'exprimer en nombres la mesure du
mouvement passif qui se fait dans le lit suspendu, mais
on calculera le temps dans lequel on ferait quarante
stades, si on était porté dans une litière.
Ceux qui se font
Page 521
transporter par un attelage doivent faire,
au commencement, trente ou quarante stades et aller
jusqu'au double. Ceux qui ont l'habitude de monter à
cheval ont besoin d'un mouvement passif plus prolongé;
on le détermine d'après leur nature et
leurs habitudes. Ceux qui font usage du mouvement passif
dans un navire doivent faire, au commencement, soixante
stades, et s'arrêter au double.
26. DE L'EXERCICE DU CERCEAU.
(Tiré d'Antyllus.)
[Du quatrième livre, Sur
ce que les malades doivent faire eux-mêmes pour
se traiter.] Volume 1er, Livre 6, chap.
26 d'Oribase tiré d'Antyllus.
L'exercice du cerceau (fig. 2) peut
ramollir les parties tendues et rendre flexibles celles
qui sont desséchées, par les mouvements
qu'on fait pour éviter le cerceau et par la multiplicité
des positions du corps ; il peut renforcer et relâcher
les nerfs affaiblis, exciter la chaleur, et rétablir
une intelligence stupéfiée ou dérangée
par l'effet de la bile
Page 522
noire. Que le diamètre du cerceau soit
moindre que la taille de l'homme [qui s'en sert], de
sorte qu'il lui vienne jusqu'aux mamelles. Il ne faut
pas pousser le cerceau [seulement] en ligne droite,
mais aussi en zig-zag. La baguette doit être en
fer et avoir un manche de bois. Les petits anneaux qui
sont à l'intérieur du cerceau ont été
regardés par quelques-uns comme superflus, mais
il n'en est pas ainsi, car le bruit qu'ils font donne
de la distraction et du plaisir à l'âme.
Au début, on poussera le cerceau en se tenant
droit, mais, quand le corps est devenu chaud et humide
[de sueur], alors il faut sauter et courir çà
et là; vers la fin on poussera de nouveau le
cerceau en se tenant droit afin d'apaiser le trouble
produit par l'exercice. Le temps convenable pour le
cerceau comme pour les autres exercices, c'est-à-dire
pour les grands, est celui qui précède
le repas ou le bain.
Page 523
27. DE LA NATATION. TDM
(Tiré du même livre.) Volume 1er, Livre 6, chap.
27 d'Oribase tiré d'Antyllus.
La natation ne convient que rarement et dans
un nombre restreint de maladies chroniques ; on n'y
a recours qu'en été; elle peut amaigrir,
favoriser la perspiration, renforcer, réchauffer,
atténuer et donner la faculté de résister
aux causes morbifiques. Si elle se fait dans la mer,
elle convient aux hydropiques, à ceux qui ont
la psore ou des dartres ; elle convient aussi aux malades
affectés d'éléphantiasis et à
ceux qui ont des fluxions aux jambes ou à quelque
[autre] partie du corps ; elle est également
favorable aux individus émaciés et à
ceux qui ont de l'enflure à la suite d'une maladie
; mais la natation est nuisible à la tête,
qu'elle se fasse dans la mer ou partout ailleurs. La
natation dans l'eau douce produit les mêmes effets
à un degré faible et peu intense ; voilà
pourquoi il faut la défendre ordinairement, car
elle est nuisible au tissu nerveux à
Page 524
cause du froid et de l'humidité qu'elle
produit chez ceux qui restent longtemps dans l'eau.
La natation dans les eaux minérales chaudes ne
convient pas parce qu'elle remplit [la tête] ;
il faut rejeter, à plus forte raison, la natation
dans de l'eau chauffée artificielle-ment. Mais,
que l'on nage dans la mer ou dans quelque autre eau,
on doit toujours auparavant s'oindre modérément,
réchauffer le corps par la friction et ensuite se précipiter brusquement
dans l'eau.
28.
DE LA LUTTE. Volume 1er, Livre 6, chap.
28 d'Oribase.
La lutte violente donne au pneuma de l'activité
et de la force d'expansion, rend le corps ferme et musculeux,
renforce les nerfs, aiguise les sens et augmente l'activité
des fonctions naturelles ; elle donne de la chair dense
et serrée, mais très peu abondante ; elle
détruit la graisse, les oedèmes, les tumeurs
et toutes sortes d'hydropisies, mais elle convient peu
à la poitrine. La lutte modérée,
au
Page 525
contraire, produit beaucoup de chair ; voilà
pourquoi elle est plus utile que l'autre à ceux
qui commencent à se rétablir. Ensuite
la lutte qui se fait debout est favorable à la
tête et à la poitrine, et renforce les
nerfs. Celle qui se fait à terre est avantageuse
pour les lombes, les genoux, les hypocondres et les
intestins, s'ils sont malades, mais elle convient moins
bien à la tête. (V. fig. 5, 6, 7 et 8.)
29. DU COMBAT SIMULÉ.
[Tiré du quatrième livre.]
Volume 1er, Livre
6, chap. 29 d'Oribase.
Le combat simulé sert à dissiper
un état qui tient de la fatigue, à renforcer
les épaules et à guérir le désordre
des nerfs et le tremblement. Il fait aussi descendre
les matières, surtout chez ceux qui imitent les
pugilateurs, en marchant sur la pointe des pieds; il
est encore bon pour les reins et pour le colon ainsi
que pour les accidents de la poitrine. Il faut simuler
le combat, non seulement avec
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les bras, mais aussi avec les jambes, en faisant
semblant tantôt de sauter, tantôt de donner
des coups de talon.
30. DE LA GESTICULATION.
(Tiré du même livre.) Volume 1er, Livre 6, chap.
30 d'Oribase tiré d'Antyllus..
La gesticulation tient le milieu entre la
danse et le combat simulé, mais elle se rapproche
davantage du dernier. Elle convient dans les mêmes
cas que le combat simulé, mais elle mérite
la préférence chez les enfants, les femmes,
les vieillards et ceux qui ont le corps très
maigre ou très faible; car cet exercice leur
est spécialement utile.
31. DU SAUT SIMPLE ET DU SAUT PROGRESSIF.
(Tiré du même livre.) Volume 1er, Livre 6, chap.
31 d'Oribase tiré d'Antyllus.
Le saut simple diffère du saut progressif,
car le saut simple ressemble à une course où
le corps reste dans le même endroit en fléchissant
le jarret ; le saut progressif, au contraire, est un
mouve-
Page 527
ment continu de progression des jambes. Le
saut contre les fesses, dont les Lacédémoniennes
se servaient anciennement, se rapproche de ces exercices
; c'est un saut simple où l'on fléchissait
les jambes à un degré tel, que les talons
touchaient aux fesses en frappant du talon, tantôt
alternativement avec une seule jambe, tantôt avec
les deux jambes à la fois. Le saut simple convient
aux maladies chroniques de la tête, à la
poitrine, aux individus chez qui les matières
ont de la tendance vers le haut, et à ceux dont
les jambes sont faibles, mal nourries, décharnées,
engourdies ou tremblantes. Le saut progressif fait descendre
les matières plus efficacement que le saut simple,
mais, comme il secoue la poitrine, il ne convient pas
aux affections de cette partie ; cependant il procure
au corps la faculté de se mouvoir très
facilement et le rend très apte aux occupations
journalières. Le saut contre les fesses purge
et dessèche la tête, provoque les règles
chez les femmes, et fait avorter les embryons qui ne
sont pas encore formés, comme Hippocrate nous
l'a rapporté dans le livre Sur
la nature de l'enfant. Ce
saut fait sortir
Page 528
aussi l'arrière-faix, quand il est
retenu ; il fait redescendre l'utérus quand il
est remonté et provoque les hémorroïdes.
32. DU JEU DE PAUME.
(Tiré du même livre.) Volume 1er, Livre 6, chap.
32 d'Oribase tiré d'Antyllus.
Le jeu de paume facilite les mouvements de
ceux qui s'y livrent, et fortifie les fonctions vitales.
Ses diverses espèces tiennent à la différence
des balles dont on se sert, car il y a une petite balle,
une grande balle, une balle moyenne, une très
grande balle et une balle creuse. Il y a trois espèces
de petites balles qui diffèrent selon la grandeur,
et qui servent chacune à un exercice spécial
: il y a d'abord une balle qui est très petite,
avec laquelle les joueurs s'exercent en appuyant fortement
le corps l'un contre l'autre, et en tenant les mains
très rapprochées pour lancer la balle;
cet exercice est très profitable aux jambes,
puisqu'il est accompagné de tension de ces parties
; il l'est aussi au dos et aux côtés, ainsi
qu'aux bras eux-mêmes, quand ces
Page 529
parties sont affaiblies ; enfin il rend la
chair ferme. Il y a une autre espèce de balle
un peu plus grande que la première ; on s'en
sert en appliquant l'avant-bras contre l'avant-bras
des autres joueurs, mais sans que les corps se touchent
et sans s'incliner les uns vers les autres tandis qu'on
exécute des mouvements variés et qu'on
change de place à cause du passage de la balle
d'un des joueurs à l'autre. Cette espèce
de jeu de paume est le plus beau des exercices qu'on
fait avec la balle, parce qu'il rend le corps sain,
qu'il facilite ses mouvements, en lui donnant en même
temps de la force, qu'il fortifie la vue et qu'il ne
remplit pas la tête. Il y a une troisième
espèce de petite balle, qui est plus grande que
la dernière, et avec laquelle on joue en se plaçant
à une certaine distance ; ce jeu est de deux
espèces, selon qu'un le fait en restant en place
ou en courant ; quand on reste debout en place, on lance
la balle avec force et en la suivant de la main; on
en retire de l'avantage pour les bras et pour les yeux.
Le jeu de paume qu'on fait en cour-
Page 530
ant est tout aussi avantageux aux bras et
aux yeux que le précédent, mais, en outre,
il est utile aux jambes à cause de la course,
et à l'épine du dos à cause des
flexions qui ont lieu pendant la course. Voilà
ce que nous avons à dire de la petite balle;
quant à l'exercice avec la grande balle, il ne
diffère pas seulement des précédents
par la grandeur de l'instrument, mais aussi par la pose
des bras; car, dans toutes les espèces dont nous
avons parlé, les mains sont toujours placées
plus bas que les épaules, tandis que, dans celui-ci,
elles sont au-dessus de la tête, et par là
la partie charnue des lombes est portée en arrière
pendant cet exercice. Quelquefois aussi on marche sur
la pointe des pieds en tâchant d'élever
le bras, d'autres fois on saute, quand la balle passe
par-dessus la tête. Cet exercice renforce tout
le corps, et il convient à la tête parce
qu'il fait descendre la matière. La très-grosse
balle renforce les bras, pendant qu'on la lance (on
la lance des deux mains, à cause de sa grandeur),
mais, comme elle donne des coups rudes, elle est nuisible
non-seulement aux malades
Page 531
et aux convalescents, mais aussi, sous quelques
rapports, aux gens bien portants. La balle creuse, qu'on
appelle aussi sac, produit, comme exercice, le même
effet que le jeu de paume qui a lieu en courant ; mais
il n'est ni très facile, ni très élégant;
c'est pourquoi il faut le rejeter.
33.
DU CORYCOS.
(Tiré du même livre.) Volume 1er, Livre 6, chap.
33 d'Oribase tiré d'Antyllus.
On remplit le corycos de graines de figues
ou de farine pour les gens faibles, et de sable pour
les gens forts. La grandeur doit être appropriée
aux forces et à l'âge. On le suspend en
haut au plafond des gymnases à une distance du
sol telle que le fond est à la hauteur du nombril
de celui qui s'exerce. Ceux qui s'en servent le tiennent
avec les mains et le font balancer avec les deux à
la fois, d'abord doucement et ensuite plus fortement,
de façon à courir
Page 532
après quand il s'en va, et à
l'éviter quand il revient, pour ne pas être
repoussés avec force; ensuite ils le lancent
hors de leurs mains, en le poussant, de sorte qu'en
revenant il frappe plus fortement le corps lorsqu'il
le touche; enfin ils le lancent en le frappant très
fortement, de manière à être repoussés
quand il revient, s'ils ne sont pas très attentifs.
Quelquefois ils vont à sa rencontre pour le recevoir
dans les mains, d'autres fois ils le reçoivent
sur la poitrine les bras étendus, d'autres fois
enfin ils se retournent et le reçoivent sur le
dos. Le corycos peut rendre le corps musculeux et donner
de la force ; c'est un exercice efficace pour les épaules
et pour tout le corps, et il est profitable à
tous les viscères â cause des coups qu'on
reçoit.
34. DE LA MANIÈRE DE LANCER LES
HALTÈRES.
(Tiré du même livre.) Volume 1er, Livre 6, chap.
34 d'Oribase tiré d'Antyllus.
Le jeu des haltères (fig. 3 et
4) est un
exercice rude ; il convient
Page 533
à l'orifice de l'estomac affecté
de fluxion, de faiblesse ou d'aigreur, et à l'estomac
quand il digère difficilement ; il exerce aussi
fortement les épaules et les rend charnues, mais
il ne convient ni à la tête ni à
la poitrine. Il y a une différence quant à
la manière de lancer les haltères eux-mêmes;
tantôt on les lance en étendant et en fléchissant
tour à tour les bras ; tantôt on les tient
seulement [dans les mains] en étendant les bras
au-devant de soi sans les mouvoir ; ordinairement on
fait aussi subir aux bras un petit mouvement, et ceux
qui s'exercent marchent et les secouent à la
manière des pugilateurs ; quelquefois on fléchit
l'épine du dos en faisant accorder ce mouvement
avec une flexion légère des bras. Le premier
genre d'exercice produit les effets énumérés
; le second fortifie les jambes et les nerfs et fait
descendre les matières ; le troisième
fait profiter l'épine du dos et les lombes, mais
il met la tête dans un état très
fâcheux.
Page 534
35. DE LA MARCHE SUR UN TERRAIN ACCIDENTÉ.
(Tiré du même livre.) Volume 1er, Livre 6, chap.
35 d'Oribase tiré d'Antyllus.
Cet exercice fortifie le pneuma, rend le corps,
et surtout les jambes, flexibles, en même temps
qu'il donne de la force aux parties mises en mouvement;
il donne aussi une fermeté durable et force à
employer alternativement toutes les parties fibreuses;
il déplace les matières et pousse les
superfluités turgescentes vers les conduits excréteurs.
Si on fait, en outre, porter des haltères à
ceux qui marchent sur un terrain inégal, cet
exercice devient un des plus lourds, parce qu'il met
également en activité les parties supérieures
et les parties inférieures du corps.
36. DU COMBAT EN ARMES.
(Tiré du même livre.) Volume 1er, Livre 6, chap.
36 d'Oribase tiré d'Antyllus.
Le combat en armes ne fait pas partie des
exercices anciens, je
Page 535
veux dire de ceux qu'on prescrivait aux malades;
car, du reste, le maniement des armes est ancien. Mais
les Romains inventèrent l'espèce de combat
en armes dont il s'agit ici ; d'abord on s'en servit
pour se préparer à la guerre; actuellement
on y a recours pour mettre le corps en activité,
du moins pour les soldats, car ils se battent armés
à la manière des gladiateurs, soit contre
des adversaires, soit contre une colonne, comme si c'était
un adversaire. Cet exercice peut faciliter les mouvements
du corps et procurer de l'embonpoint, mais la chair
qu'il donne est pétrie d'humidité; il
est nuisible à la tête, parce qu'elle est
fortement couverte par les feutres et le casque, et
qu'elle souffre sous ce poids. Ce qu'on vante surtout
dans cet exercice, c'est qu'il renforce le corps et
qu'il agrandit le champ de la respiration, raison pour
laquelle ceux qui s'y sent d'abord accoutumés
sont capables de supporter toute autre expulsion rapide
du souffle.
Page 536
37.
Du COÏT.
(Tiré de Galien.)
Volume 1er, Livre
6, chap. 37 d'Oribase tiré de Galien.
Selon Épicure le coït n'est jamais
favorable à la santé ; mais, en vérité,
il l'est, lorsqu'on y a recours à des intervalles
assez longs pour qu'on ne sente aucun affaiblissement
et qu'on semble être devenu plus léger
et avoir la respiration plus facile que de coutume.
Le temps le plus favorable pour le coït est celui
où le corps, étant dans un état
exactement moyen par rapport à toutes les influences
extérieures, n'est ni trop chargé de nourriture,
ni sous l'empire du besoin, ni trop refroidi, ni trop
échauffé, ni desséché, ni
imbibé d'humidité outre mesure. Si, par
fois, on s'écarte en quelque chose de cet état
moyen, cet écart doit être peu considérable,
et il vaut mieux recourir au coït quand le corps
est échauffé que quand il est
Page 537
refroidi, quand il est chargé de nourriture
que quand il éprouve du besoin, quand il est
imbibé d'humidité que quand il est desséché.
Le coït amène au comble de la faiblesse
ceux dont les forces sont peu considérables,
tandis que ceux dont les forces sont intactes et qui
sont malades par l'effet de la pituite n'en seront point
abattus; l'excès de pituite sera desséché
par un surcroît d'évaporation d'humeurs,
car le coït est sans inconvénient pour les
individus humides et chauds, et pour tous ceux qui ont
naturellement beau-coup de sperme. Mais le coït
réchauffe aussi le corps de ceux dont les forces
sont intactes ; les gens faibles, au contraire, il les
réchauffe aussi au moment même, mais il
les refroidit ensuite considérablement. Quelques-uns,
dès leur jeune âge, deviennent faibles
après le coït ;
Page 538
d'autres, s'ils n'en usent pas habituellement,
ont la tête lourde, sont pris d'anxiété
et de fièvre, perdent l'appétit et digèrent
moins bien; nous avons donc observé que quelques-uns
de ceux qui avaient une nature semblable, après
s'être abstenus du coït, sont devenus engourdis
et paresseux, que d'autres sont devenus bourrus sans
aucune raison, et découragés comme ceux
qui souffrent de la bile noire, et que tous ces accidents
cessent rapidement parle coït. En réfléchissant
à ce fait, il me paraît que la rétention
du sperme nuit considérablement aux individus
forts et jeunes, chez qui le sperme est naturellement
abondant et formé d'humeurs non entièrement
irréprochables, qui mènent une vie tant
soit peu oisive, qui usaient auparavant très
fréquemment du coït, et qui, tout d'un coup,
Page 539
gardent ensuite la continence; chez ces individus,
le changement qu'éprouve la complexion du corps
en se raréfiant prédomine sur celui qu'éprouvent
les forces en s'affaiblissant; aussi se restaurent-ils
par les moyens qui contractent et resserrent ; à
cette classe appartient l'exercice préparatoire.
Dans le cas où le coït amène du refroidissement,
il faut également avoir recours à l'exercice
préparatoire, car il excite la chaleur. Si la
saison le permet, il ne faut pas s'abstenir non plus
du bain froid. On donnera des aliments humides en petite
quantité, afin qu'on les digère bien et
qu'on guérisse la sécheresse causée
par le colt. Quant au tempérament de ces aliments,
ils ne doivent pas être trop froids non plus,
mais modérément chauds ;
Page 540
car, puisque le coït raréfie,
affaiblit, refroidit et dessèche à la
fois le corps, il faut, en effet, donner des aliments
qui condensent, réchauffent, humectent et renforcent,
et c'est là ce qu'il faut se proposer comme but
chez ces sujets.
38.
DU COÏT. T. 1. Livre 6
(Tiré de Rufus.
[Ce chapitre contient aussi le régime.]
Volume 1er, Livre
6, chap. 37 d'Oribase tiré de Rufus d'Ephèse.
En général le coït refroidit
le corps. Toutefois le coït avec une femme est
moins violent : voilà pourquoi il est aussi moins
pénible ; le coït avec un homme, au contraire,
est violent : il oblige à faire de plus grands
efforts. De même le coït qui se fait debout
est assez fatigant, ainsi que celui qu'on exerce après
un repas abondant ou un excès de boisson, tandis
que le coït avant le repas est le plus facile et
le plus rapide, mais il n'est pas très vigoureux.
Page 541
La rétention du sperme au milieu de
l'acte lui-même est très pernicieuse aux
reins et à la vessie. Le coït, en vérité,
n'est pas absolument mauvais sous tous les rapports,
pourvu qu'on fasse attention aussi bien au temps qu'a
la mesure; les avantages qu'il procure sont les suivants
: il évacue la pléthore, il rend le corps
léger, provoque la croissance et augmente la
virilité; en outre, il dissipe les idées
fixes de l'âme et adoucit les passions indomptables
: voilà pourquoi il n'existe aucun autre remède
aussi éminemment utile contre la mélancolie.
Il ramène aussi à un état d'esprit
plus sensé ceux qui délirent d'une autre
manière ; je sais qu'il a suspendu l'épilepsie
chez quelques sujets au moment de la puberté;
chez d'autres il a dissipé la
Page 542
pesanteur et les maux de tête. Hippocrate
a dit en un seul mot : « Le coït est excellent
contre les maladies qui tiennent à la pituite.
» Plusieurs individus, qui étaient émaciés
à la suite de maladies, se restaurèrent
aussi plus facilement (par le coït), d'autres acquirent
une respiration facile, tandis qu'elle était
auparavant gênée; chez eux l'appétit
succéda au dégoût pour les aliments,
d'autres enfin furent délivrés de pollutions
nocturnes continuelles ; on admet, il est vrai, que
ces pertes de semence sont moins pénibles, mais
je ne suis pas de cet avis, car les pollutions relâchent
encore davantage le corps, qui est déjà
relâché pendant le sommeil. Ce sont là
les points essentiels de mon sujet; quant aux natures
aptes au coït, ce sont les natures plus ou moins
chaudes et humides ; il en est de même pour le
régime, la saison, ainsi que pour l'âge
; pour la saison, c'est le printemps ; pour l'âge,
c'est la jeunesse; pour le régime plus ou moins
propre, celui qui s'y prête mieux que les autres
doit
Page 543
être un peu chaud et humide ; les circonstances
les moins favorables sont le régime desséchant
et refroidissant, la vieillesse et l'automne, ainsi
que les natures qui se rapprochent le plus des conditions
énumérées. Me voilà déjà
amené par la suite de mon raisonnement au point
où je voulais arriver dès le commencement;
car le régime approprié au coït,
et le traitement de ceux qui ne peuvent pas en user
se révèlent maintenant clairement à
nous; en effet, le régime dont il s'agit doit
être humide et chaud, et les éléments
de ce régime seront la modération dans
les exercices et l'abondance des aliments. C'est là,
en résumé, ce qui regarde le régime
; quant aux détails, les exercices consisteront
en promenades violentes à pied, en courses douces
et en promenades à cheval ni trop violentes ni
trop prolongées, car inévitablement les
lombes et les testicules se fatiguent considérablement
dans ce cas. Celui qui a une constitution froide ou
humide doit se livrer à tons ces exercices plus
fréquemment et plus rapidement, tandis qu'il
suffira,
Page 544
quand on a affaire à un individu d'une
constitution plutôt sèche, de le faire
reposer pour le mettre dans la disposition requise.
Ce ne sont pas seulement les exercices susdits qui conviennent,
mais il en est ainsi du coït lui-même ; car
il excite aux rapprochements sexuels, et il devient
un peu plus facile par l'habitude ; en effet, plusieurs
gens qui en avaient perdu la coutume devinrent, les
uns, tout à fait incapables de l'exercer, tandis
que d'autres ne s'y livrèrent de nouveau qu'en
se fatiguant beaucoup; seulement il faut ramener le
corps à son état propre et normal par
le régime qu'on suit après. La lutte et
les frictions répétées, la gesticulation
et le lancement du javelot sont des exercices moins
convenables dans le cas dont il s'agit; elles favorisent,
il est vrai, le développement des forces, mais
elles détournent le cours circulaire de la matière
nutritive, et on a besoin, avant tout, de matière
nutritive abondante. Voilà comment on se servira
avec avantage des exercices; quant aux aliments et aux
boissons, on prendra pour
Page 545
boisson des vins paillets, car ces vins-là
tiennent le plus exactement le milieu entre les autres
vins; ils ne passent pas trop vite par la vessie, comme
les vins blancs, et ils ne sont pas secs ou épais
non plus comme les vins noirs, tandis qu'ils sont très
bien supportés par la tête et digérés
très facilement; or ce sont justement là
des effets qu'on doit obtenir; quant aux aliments, on
prendra du pain exempt de son, cuit au four chauffé
de tous côtés, car ces pains-là
sont plus humides que les autres; pour mets secondaires
on prendra de la chair de jeune bouc, d'agneau, de jeune
porc, et, en fait de volailles, des poules, des coqs
de bruyère, des perdrix, des oies et des canards,
car toutes ces choses sont très nourrissantes.
On prendra, en fait de poissons, des poulpes (on admet
en effet que ces animaux ont de plus une vertu excitante)
et toutes les espèces de mollusques ; en fait
d'herbages, de l'ormin, de l'erysimum, de la roquette
et des navets, mets qui peuvent aussi servir comme mé-
Page 546
dicaments ; en fait de légumes secs,
des fèves, des pois chiches, des gesses à
fleurs jaunes, des haricots, des pois grecs, qui sont
utiles, non seulement parce qu'ils fournissent une nourriture
abondante, mais aussi parce qu'ils remplissent de flatuosités,
de même que la rue amortit les désirs vénériens,
en amenant les flatuosités à coction et
en les faisant disparaître. Je recommande fortement
aussi les raisins pour le régime dont il s'agit
maintenant, car ils sont abondamment remplis d'humidité
; comme, en outre, ils passent plus facilement par le
bas que la plupart des autres aliments, ils nourrissent
très bien aussi et remplissent le sang de flatuosités,
circonstance qui produit une excitation efficace. Pour
traiter complètement mon sujet, il convient de
considérer aussi le temps propre au coït
; dans toutes les circonstances le temps varie beaucoup,
il est vrai, selon la disposition où on se trouve,
mais, pour le cas actuel, le point principal, c'est
d'éviter les repas copieux et les excès
de boisson peu de temps auparavant, car, dans ces circonstances,
tout autre exer-
Page 547
cice ne convient pas. On évitera aussi
l'insuffisance d'alimentation ; on se débarrasse,
il est vrai, plus facilement de cet inconvénient
que de celui des repas copieux ; cependant cette insuffisance
est un peu affaiblissante. Il faut éviter aussi
les digestions incomplètes ; voilà pourquoi
le coït au milieu de la nuit est trompeur, parce
qu'alors les aliments ne sont pas encore élaborés
; il en est de même pour le coït qu'on exerce
de grand matin, parce qu'il pourrait se faire qu'il
y eût encore des aliments mal digérés
dans l'estomac, et parce que toutes les superfluités
n'ont pas encore été évacuées
par l'urine et par les selles, car il est mauvais d'exercer
le coït avec des superfluités dans le corps
; il est moins dangereux d'exercer le coït avant
les exercices et le bain, et celui qu'on accomplit avant
de se livrer à ses occupations habituelles est
peu vigoureux. Le mieux, par conséquent, c'est
d'exercer le coït après le repas, pourvu
qu'il n'ait pas été trop copieux, car
cela favorise le développement des forces, puis
le refroidissement qui vient habituellement après
est moindre; si donc
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on veut exercer le coït après
le déjeuner, il faut se reposer jusqu'à
ce qu'on ait entièrement réparé
les fatigues multipliées; si on veut le faire
après dîner, il est nécessaire d'aller
dormir, car c'est là le repos le plus complet.
Il semble ici que la nature est d'accord avec le raisonnement,
car d'abord c'est dans cette circonstance qu'elle excite
le plus fortement, et ensuite, quand elle a des matériaux
en abondance, elle opère plus facilement la sécrétion
que si elle n'a justement que ce qu'il lui faut. C'est
pour avoir pris cela en considération que les
médecins recommandent, quand on veut avoir des
enfants, que l'homme se livre aux rapprochements sexuels
après avoir mangé et bien bu, tandis que
la femme doit suivre un régime moins fortifiant,
parce qu'il faut que l'un donne et que l'autre reçoive.
Outre les circonstances dont nous venons de parler,
on doit faire attention aussi aux autres états
du corps, car il ne convient pas non plus de se livrer
au coït après les exercices, quoiqu'on admette
qu'il dissipe la fatigue, mais c'est à tort,
car la faiblesse ne
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guérit pas la fatigue, seulement la
fatigue excite certains désirs par la chaleur
des nerfs des lombes. Il faut, par conséquent,
éviter la fatigue et les vomissements, aussi
bien ceux qu'on prévoit que ceux qui viennent
d'avoir lieu; il en est de même pour les purgations
et pour la diarrhée qui survient subitement,
car le coït tarit la diarrhée chronique;
il en est encore de même pour les maladies de
la poitrine, qu'elles existent ou qu'on les attende,
et pour les affections des nerfs : voilà pourquoi
je n'approuve pas les désirs intenses, et que
je recommande de résister plus, dans ce cas que
dans tout autre, surtout à ceux qui ont une maladie
de la vessie ou des reins, ou qui sont sujets à
l'épilepsie ou à la manie, car, si les
maladies sont sur le point de venir, il survient des
désirs intenses. Le mieux est que l'homme s'adonne
aux rapprochements sexuels, quand il est pressé
en même temps par le désir de l'âme
et par le besoin
Page 550
du corps, mais le désir de l'âme
doit avoir le dessous et obéir au corps, car
ce ne sont pas là de pures chimères, mais
ce sont des préludes de la nature qui a besoin
d'évacuation, préludes tels que les autres
animaux en éprouvent de même habituellement.
Tel est, par conséquent le régime; il
est facile d'en déduire un traitement pour ceux
qui ne peuvent pas exercer le coït ; par exemple,
l'homme qui vint nous voir de Corinthe disait qu'il
désirait beaucoup exercer le coït, mais
que, quand il s'y adonnait, il n'éjaculait pas
de sperme, mais rendait [seulement] beaucoup de vent.
Je soupçonnai que son affection résidait
dans la sécheresse, ce qui fut confirmé
par la guérison, car, aussitôt qu'il fit
usage d'un régime humide, il éjacula du
sperme. Le jeune homme de Milet avait environ vingt-deux
ans ; il disait que, quand il se livrait au coït,
il ne pouvait éjaculer du sperme, tandis qu'il
en perdait beaucoup pendant le sommeil. Il me semblait
qu'a cause d'un fort refroidissement humide
Page 551
ce jeune homme n'était pas très
échauffé pendant le coït, tandis
qu'il était échauffé davantage
pendant le sommeil, car on sait que le sommeil a la
faculté de réchauffer l'intérieur
et de refroidir l'extérieur; aussi n'eut-il pas
besoin d'autre traitement, en fait d'exercice, que de
se promener à cheval, et, pour médicament,
de boire du castoréum, tandis que tout le reste
du régime était sec et chaud.
Fin du livre 6 et du 6ème livre page 551. Vient
ensuite les notes pour chaque Livre de la page 551 à
la 669, puis l'explication de planche présente
à droite en pleine page.
Entête du livre 6
Entête
du livre 5
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