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Oribase.
Collection médicale.
LIVRE VII
[ DES ÉMISSIONS SANGUINES
ET DES ÉVACUATIONS. ]
LIVRE VII.
[DES ÉMISSIONS SANGUINES
ET DES ÉVACUATIONS.]
1. Quelles sont les affections
qui réclament l'évacuation. De la saignée, TDM tiré de GALIEN (02)
(Gal. Comm. in
Hum. I, §
12, et II, § 22, t. XVI, p. 132 et 281; Aët.
III, 10 (03); Paul. VI, 40) TDM 2. Quels sont les états
qui exigent la saignée (Gal. Comm.
in Hum. I, §
12, et II, § 28, t. XVI, p. 132-134 et 307; Aët.
III, 10; Paul. VI, 4o;Act.
Meth. med. III,
1) 3. De la répétition
de la saignée
(Synops. I, 8; Aët. III, 17; Paul. VI, 40) 4. De la mesure de l'évacuation
du sang (Gal.
Comm. I in Hum. § 12, t. XVI, p. 140-141;
Synops. I, 9; Aët. III, 11, et
V, 71; Paul. VI, 40; Act. Meth.
med. III, 1)
5. Quelles sont les veines
qu'il faut inciser
(Gal. Comm. I
in Hum. §
12, t. XVI, p. 139-140 ; Synops. I, 10 ; Aët. III, 12 ;
Paul. VI, 40 ; Act.
Meth. med. III,
I) 6. Quel est le temps opportun
pour faire la saignée et pour la réitérer
(Gal. Comm. l in Hum. § 12 , t. XVI , p. 134
; Synops. I, 11; Aët. III, 16, et V, 71; Paul.
VI, 40) 7. Quels sont les vaisseaux
qu'on doit ouvrir dans les diverses parties du corps, tiré d'Antyllus (Gal. Comm.
l in Hum. §
12, t. XVI, p. I34-136; Paul. VI, 4o; Act. Meth med. III, 1) 8. Quel est le temps opportun
pour la saignée aux périodes partielles
[de la fièvre],
tiré d'Hérodote (Gal. Comm. I in Hum. § 12, t, XVI, p. 334) 9. Ce qu'il faut faire avant
la saignée,
tiré d'Antyllus (Paul. VI, 40) 10. Comment il faut exécuter
la saignée
(Aët. III, 13; Paul. VI, 40) 11. Quand il faut exécuter
la saignée, et quelle doit être la grandeur
et la forme de l'incision (Aët. III, 34 et 35; Paul. VI, 40)
12. Quelles manoeuvres il
faut employer pour faciliter l'écoulement du
sang, tiré
du même livre (Paul. VI, 40) TDM 13. De la saignée artérielle, tiré de Galien (Synops. I, 12 ; Aët. III, 18 et19 ; Paul. VI, 4; Act. Meth. med. III, 2) 14. De la saignée artérielle, tiré d'Antyllus
15. Des ventouses, tiré de Galien (Cels. II, 113 ; Gal. t. XI, p. 320-321;
Synops. I, 13 et 25 ; Aët. III, 20; Paul. VI, 41; Act. Meth. med. III, 4) 16. Des ventouses, tiré d'Antyllus (Hippocr. De
med. p. 20, l.
38 sqq. ed. Foës; Cels. II, 11 ; Synops.
I, 13; Aët. III, 20; Paul. VI, 41) 17. Des ventouses, tiré d'Hérodote
(Gal. t. XI, p. 321) 18. De la scarification, tiré d'Antyllus (Gal. t. XI, p. 321; Act. Meth. med.
III, 3) 19. De la scarification, tiré d'Apollonius (Gal.
Comm. I in Hum. § 9, t. XVI, p. 95; Gal.
t. XI, p. 322; Synops. I, 14; Aët. III, 21)
20. Que la scarification convient
aux femmes mal réglées, et dans plusieurs
autres affections
(Gal. t. XI, p. 321 ; Synops. 1, 14; ad Eun.
I, 9; Aët. III, 21) 21. Des sangsues, tiré d'Antyllus (Gal. t. XI, p. 3I7-319; Synops. 1, 15;Aët.
III, 22 ; Act. Meth. med. III, 3) 22. Des sangsues, tiré de Ménémaque
23. Quelles sont les gens
qu'il faut purger, à l'aide de quels moyens il
faut le faire, et dans quelles circonstances, tiré de Galien (Cels. II, 12; Gal. Com. I in Hum. §§.
1, 2 et 12, t. XVI, p. 55-56, 64 et 122-124; Gal. t.
XI, p. 343-354; Synops. I, 16; Aët. III. 23; Paul. VII, 4 ; Act. Meth. med.
III , 7 et 8, et V, 8) 24. De combien de manières
il peut se faire que le ventre n'expulse rien après
l'administration d'un purgatif (Gal. t. XI, p. 354-355 ; Aët. III, 118) 25. Des ingrédients
qu'on mêle aux médicaments purgatifs (Gal. Comm. I in Hum. §
12, t. XVI, p. 117; Gal. t. XI, p. 355-356; Synops.
I, I6; Act. Meth med. III, 8) 26. Des médicaments
purgatifs, TDM tiré de Rufus (Gal. Comm. I in Hum. § 12, t. XVI,
p. 117-119 et 126-130; Synops. 1,17; Aët. III, 23-57; Paul. VII, 4; Act. Meth. med.
III, 7 et 8, et V, 8 et 9)
(02) Voy. note 2 de la même
table. (03) Nous citons toujours l'édition
grecque pour les huit premiers livres d'Aëtius ; et nous avertissons ici que
la numération des chapitres n'est pas toujours
conforme à celle des éditions latines.
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1. QUELLES SONT LES AFFECTIONS QUI RÉCLAMENT L'ÉVACUATION.
— DE LA SAIGNÉE. TIRÉ DE GALIEN. TDM Volume 2, Livre
7, chap. 1 d'Oribase tiré de Galien.
La pléthore se produisant
de deux manières et se désignant par deux
noms différents, la pléthore eu égard
aux forces, la pléthore eu égard à
la capacité des vaisseaux qui contiennent les
humeurs, toutes deux exigent l'évacuation, que
cet état ait lieu chez un malade, ou chez un
individu en bonne santé : en effet, de même
que celui qui porte un fardeau ne s'affaisse ni ne succombe
sous sa charge dès qu'elle lui pèse et
qu'il
Page 2
commence à se fatiguer,
de même il peut arriver qu'un individu reste encore
exempt de maladie, lorsque la pléthore pèse
déjà sur ses forces. Si donc quelques
individus, qui se livrent encore à leurs occupations
habituelles, se plaignent d'être lourds, engourdis,
paresseux, et de se mouvoir difficilement, c'est justement
là la pléthore eu égard aux forces;
de même, s'ils éprouvent une sensation
tensitive semblable à celle qu'on éprouve
après les exercices, c'est là un signe
assez important de l'autre pléthore, appelée
par quelques-uns pléthore eu égard au
contenu, parce qu'elle est produite par les humeurs
contenues dans les vaisseaux et qu'on se la représente
comme existant dans ces humeurs. La sensation de plaie,
qui a lieu dans tout le corps, et surtout pendant les
mouvements, est un produit des humeurs mauvaises, et
on la voit aussi se manifester chez beaucoup de gens
qui se livrent encore à leurs occupations habituelles.
Quelquefois aussi il se révèle, non pas
dans tout le corps, mais dans quelques-unes de ses parties,
des signes qui nous montrent que ces parties sont dans
des états semblables à ceux dont nous
venons de parler comme
Page 3
existants dans tout le corps.
Ainsi, nous éprouvons quelquefois de la pesanteur
ou une sensation de plaie dans la tête, ou de
la tension aux muscles temporaux, et ces sensations
peuvent exister seules, ou être accompagnées
d'augmentation de chaleur ; de même, nous sentons
souvent aussi de la pesanteur au foie, à la rate,
à l'estomac, aux côtés ou au diaphragme
; enfin l'orifice de l'estomac devient quelquefois le
siège d'un sentiment de pesanteur, de picotement,
de nausée, d'aversion des aliments, ou d'appétits
déréglés ; ces sensations, aussi
bien que les douleurs fixées dans une partie
quelconque, que ces douleurs tiennent à une surabondance
d'humeurs qui se porte subitement vers une partie, ou
à un pneuma flatulent, indiquent l'évacuation
; il en est de même de celles que produit une
humeur âcre qui ronge et corrode la partie ; quelques
douleurs tiennent aussi à une mauvaise composition
élémentaire ; cette composition est quelquefois
simple, sans complication du côté des humeurs
; d'autres fois, elle existe avec cette complication.
Dans tous ces cas susdits, l'individu est, par conséquent,
délivré de ses souffrances par l'évacuation
des humeurs ou du pneuma qui l'incommodaient ; cependant
il
Page 4 n'est pas nécessaire,
en toute circonstance, de saigner ; il suffit aussi
de purger, de donner des bains, de frictionner, ou de faire des onctions
avec quelque médicament qui favorise la perspiration.
Nous allons expliquer dans quels états de l'économie
la saignée convient.
2. QUELS SONT LES ÉTATS
QUI EXIGENT LA SAIGNÉE. TDM
Volume
2, Livre 7, chap. 2 d'Oribase tiré de Galien.
L'évacuation est nécessaire
à ceux qui, tout en se livrant encore à
leurs occupations habituelles, sentent de la pesanteur
ou de la tension, soit dans un des organes essentiels,
soit dans tout le corps. Si les individus dont il s'agit
ne sont ni des enfants, ni des vieillards, il faut,
pour savoir si on doit saigner ou non, considérer
les points suivants comme les principaux : la quantité
et la qualité de la pléthore, l'intégrité
ou l'absence des forces, ensuite la complexion naturelle
de tout le corps, la saison, la localité, la
constitution actuelle de l'air, la vie que l'individu
a menée auparavant ; - on examinera, par exemple,
si, dans cette situation, il ingérait beaucoup
d'aliments et de boissons, et surtout des
Page 5 aliments qui nourrissent fortement
; s'il a pris quelque mouvement, soit contre son habitude,
soit en s'y conformant ; s'il a quelques excrétions
habituelles, ou si ces excrétions sont retenues
; il faut, en outre, examiner encore si l'individu est
maigre ou gras. Le degré de chaque espèce
de pléthore se reconnaîtra par l'intensité
des signes propres à chacune d'elles, car, cela
est évident, la pléthore eu égard
aux forces sera d'autant plus intense, que l'individu,
par le sentiment de pesanteur qu'il éprouve,
semblera s'écarter davantage de son état
normal; de même, l'autre espèce de pléthore,
appelée, comme je l'ai déjà dit,
par quelques-uns, pléthore eu égard au
contenu, s'aggrave en raison de l'intensité de
la sensation de tension, On reconnaîtra la qualité
des humeurs prédominantes dans chaque espèce
de pléthore, par la couleur, en se rappelant
quelle est la couleur des humeurs, lorsque tout le corps
se trouve, à l'extérieur, dans une condition
moyenne sous le rapport du chaud et du froid, et quels
sont les symptômes qui tiennent à la nature
de l'humeur [et à l'endroit du corps où
elle se trouve]; car une humeur plus ou moins froide
produira un sentiment de froid plus ou moins prononcé
Page 6 dans tout le corps, et une humeur
chaude, un sentiment de chaleur ; les humeurs accumulées
dans les vaisseaux en produiront la tuméfaction
et la distension, tandis que les humeurs accumulées
dans les chairs y donneront lieu à un sentiment
de pesanteur, ou de tension, ainsi qu'à un sentiment
de chaleur ou de froid. L'intégrité ou
la diminution des forces qui règlent notre économie
se distinguent au moyen des actions qui leur sont propres,
pour celle qui réside dans les nerfs et dans
le cerveau d'où ils tirent leur origine, par
les actions dépendantes de la volonté;
pour celle qui réside dans les artères
et dans le coeur, par le pouls, tandis que c'est par
la bonne ou mauvaise nutrition, et la bonne ou la mauvaise
coloration, que se reconnaît l'état de
la force nutritive, qui est la troisième, et
qui, ainsi que nous l'avons montré, a son point
de départ dans le foie. Si donc, lorsqu'il existe
des signes de pléthore, les forces sont intactes,
on saignera dans le cas de sensation tensitive sans
faire aucune autre distinc-
Page 7 tion ; on en fera encore moins,
à plus forte raison, s'il existe une sensation
d'inflammation ; mais, quand l'individu souffre de la
pléthore appesantissante, il ne faut pas tirer
de sang dans tous les cas, car il serait possible qu'il
y eût accumulation d'humeurs crues dans le corps,
et, alors, il faut examiner avec une attention scrupuleuse
jusqu'à quel point les forces sont intactes,
et jusqu'à quel degré l'humeur elle-même
est refroidie; en effet, dans une pareille situation,
les forces, déjà épuisées,
tombent ordinairement par la saignée au dernier
degré de faiblesse, de façon à
ne pouvoir plus être relevées ; dans ce
cas, le danger est assez grand, surtout s'il survient
une fièvre pendant que la constitution de l'air
est estivale, ou si le malade est naturellement mou
et d'un tempérament humide ; car de pareils sujets
s'épuisent par la perspiration et tombent très
facilement en défaillance, même quand la
fièvre qui les attaque n'est pas très
forte. Si, au contraire, il n'existe aucune de ces circonstances,
si on est en hiver, si le pays est naturellement froid
et si l'individu est d'une nature plus ou moins froide,
tout son corps sera considérablement refroidi
par la saignée, et il se présentera quelques-uns
des symptômes
Page 8 que produit un refroidissement
intense. Aux individus qui sont dans un pareil état
il faut procurer une évacuation, non pas par
la saignée, mais à l'aide de frictions, de liniments modérément réchauffants
et de boissons qui divisent les humeurs épaisses
et échauffent modérément; car tout
ce qui échauffe fortement abat les forces et
augmente la fièvre. Ceux qui ont été
guéris d'un crachement de sang dès le
début de cet accident, mais qui conservent dans
la poitrine et dans les poumons une conformation telle,
que, s'il s'accumule un peu plus de sang que de coutume,
un vaisseau s'ouvre, ou se déchire aussitôt
de nouveau, doivent être saignés au commencement
du printemps, même lorsqu'il n'existe encore aucun
symptôme morbide; il en est de même de ceux
qui sont sujets à tomber dans l'épilepsie
ou dans l'apoplexie. De même, si nous savons qu'un
individu a de la tendance à être attaqué
de quelques autres maladies, comme de la péripneumonie,
de la pleurésie, ou de l'angine, il vaut mieux
prévenir ces accidents par la saignée,
et ne pas attendre qu'il se présente quelque
Page 9 symptôme manifeste de pléthore
; cette règle s'applique également à
ceux dont les hémorroïdes ne fluent pas,
surtout si on voit qu'ils sont plus ou moins atrabilaires.
Il faut aussi saigner, au commencement du printemps,
ceux qui, chaque année, sont pris, en été,
de maladies tenant à la pléthore; il en
est encore de même pour ceux qui sont attaqués
par de pareils accidents pendant le printemps même,
car l'expérience a appris aux hommes, non seulement
pour eux-mêmes, mais aussi pour les bêtes
de somme, qu'il est utile de tirer du sang vers la fin
du printemps, avant le commencement de l'été,
parce que, s'il survient subitement un été
chaud, ils ont des retours des maladies qui les attaquent
habituellement; en effet, ce changement distend et liquéfie
le sang et y produit, pour ainsi dire, une espèce
d'ébullition, de façon que la quantité
qui, jusque-là, n'était ni en excès
ni en défaut, n'est plus contenue maintenant
dans les veines, mais les déchire ou les corrode.
Si cet excès de sang se porte vers une partit
déterminée, il y produit une inflammation,
un érésipèle, ou quelque maladie
semblable ; car, parmi les
Page 10 maladies qui dépendent
de la pléthore, les plus nombreuses et les plus
graves sont produites par la liquéfaction du
sang. Certaines personnes qui ont les yeux faibles,
ou qui sont prises facilement des maladies appelées
scotomatirques (c'est-à-dire accompagnées
de vertige), doivent être aussi soumises à
l'évacuation au commencement du printemps, après,
toutefois, qu'on aura déterminé préalablement
quelle est l'humeur en excès, car, chez quelques-uns,
il y a surabondance plutôt de bile amère
que des autres humeurs ; chez d'autres, c'est la bile
noire ou la pituite qui prédomine; chez d'autres
enfin, il y a surabondance égale de toutes, et
on dit, dans ce dernier cas, qu'il y a pléthore
sanguine. Vous soumettrez donc à l'évacuation,
au commencement du printemps, tous ces individus et
aussi ceux qui sont affectés de goutte ou de
rhumatisme; mais vous vous servirez tantôt d'un
médicament purgatif, et tantôt de la saignée.
Ce n'est pas seulement dans le cas de pléthore,
soit eu égard aux forces, soit eu égard
au contenu, que la saignée réussit parfaitement,
mais aussi lorsqu'il y a inflammation commençante
sans pléthore, que cet accident tienne à
une violence extérieure, à la douleur,
ou à la faiblesse des parties. On saignera encore,
en tout état de cause, s'il y a immi-
Page 11 nence d'une maladie grave, même
quand il n'existe aucun signe distinctif de pléthore,
en ayant égard toutefois à l'âge,
à la saison, au pays et aux forces; par conséquent,
on se détermine pour ou contre la saignée
d'après trois éléments : la gravité
de la maladie, soit présente, soit imminente;
l'intégrité des forces, et l'âge,
qui ne doit être ni celui des enfants, ni celui
des vieillards; en effet, ces trois moyens d'indication
suffisent à eux seuls pour nous déterminer
à saigner; en effet, lors même qu'il y
a une telle accumulation d'humeurs crues surabondantes,
qu'elle nous empêche de saigner, le raisonnement
ne se trouve pas en défaut, puisque, dans ce
cas, l'intégrité des forces n'existe pas;
or, c'est justement cela qui nous fait reconnaître
que ces sujets ne peuvent pas supporter la saignée,
lorsque la couleur de tout le corps est loin de celle
qui indique la pléthore sanguine, en même
temps que le pouls est inégal eu égard
à la force et à la grandeur, avec prédominance
des pulsations faibles et petites dans cette inégalité.
Examinons maintenant les signes distinctifs de chaque
espèce de pléthore [pour savoir] si, dès
que ces signes se
Page 12 présentent chez quelqu'un
qui se livre encore à ses occupations habituelles,
il faut avoir recours à la saignée, ou
si cela n'est pas nécessaire, quand il n'y a
aucune imminence de maladie grave. Vous savez quelle
est mon opinion à cet égard, car vous
m'avez souvent vu donner des avis à des gens
affectés de goutte ou de rhumatisme, à
des épileptiques, à des mélancoliques,
à des sujets qui avaient autrefois craché
du sang, ou dont les organes de la poitrine avaient
de la tendance à devenir le siège de quelque
maladie semblable, qui avaient du vertige, ou qui étaient
sujets à l'angine, à la péripneumonie,
à la pleurésie, à l'hépatite,
aux ophtalmies graves, ou, pour le dire en un mot, à
une maladie importante; en effet, je soutiens que, pour
tous ces individus, la saignée est un remède
indispensable qu'on doit administrer immédiatement,
après avoir toutefois constaté l'état
des forces et l'âge, car cela doit être
sous-entendu, même quand parfois je ne le dis
pas. Quant à ceux qui n'ont présenté
auparavant aucun symptôme semblable et dont toutes
les parties du corps
Page 13 ont une conformation irréprochable,
vous savez que je leur applique deux méthodes
d'évacuation, la saignée, quand ils mènent
une vie intempérante, et l'autre méthode,
s'ils sont tempérants; en effet, on peut rapidement
évacuer les humeurs surabondantes par une friction prolongée, par des bains,
par les promenades et par les autres exercices, ou bien
encore par des liniments qui favorisent la perspiration, à
moins qu'on ne juge parfois qu'il y a surabondance de
sang épais, lequel est le plus souvent de la
nature de la bile noire, dans quelques cas rares de
celle des humeurs appelées crues; mais, s'il
y a surabondance de bile noire, il vaut mieux saigner,
ou, du moins, administrer en tout cas un médicament
qui purge les matières noires ; si, au contraire,
les humeurs crues prédominent, on évacuera
avec précaution avant que les individus commencent
à être malades, et on s'abstiendra tout
à fait, comme je l'ai déjà dit,
quand ils ont la fièvre. Vous reconnaîtrez
ces gens à leur couleur, qui est d'une pâleur
jaunâtre, ou imitant, en quelque sorte, le plomb,
et se rapprochant de toute autre nuance plutôt
que du rouge, ainsi qu'à l'inégalité
du pouls. Si une pareille surabondance d'humeurs est
portée
Page 14 à un degré très
avancé, les malades sont pris de pesanteur du
corps, de paresse pour les mouvements, de torpeur de
l'intelligence et d'affaiblissement des sensations.
Il faut, au contraire, saigner hardiment ceux qui ont
une accumulation de sang par suite de la rétention
des hémorroïdes, même lorsqu'ils n'ont
pas encore eu auparavant quelque maladie importante,
car il pourrait se faire qu'ils fussent prédisposés
à quelque maladie de cette nature, bien qu'ils
n'en eussent pas encore été attaqués
à cause de l'évacuation produite par les
hémorroïdes. S'ils paraissent, en outre,
avoir certaines parties mal conformées, et surtout
les organes de la poitrine, on se hâtera de les
saigner en tout état de cause. Vous savez que
je professe encore la même opinion par rapport
aux femmes dont les règles
Page 15 sont supprimées ; dans
ce cas, en effet, on ne différera pas non plus
l'évacuation du sang; cependant, il n'est pas
nécessaire d'inciser la veine, car les scarifications
des malléoles suffisent pour évacuer le
superflu; de plus, elles provoquent, jusqu'à
un certain point, l'écoulement des règles;
il en est de même des saignées aux malléoles,
ou à la fosse poplitée. C'est donc toujours
aux jambes qu'on pratiquera l'émission sanguine
chez les femmes dont les règles sont supprimées,
soit qu'il faille inciser une veine, ou faire des scarifications,
car la saignée du pli du bras exerce ordinairement
une action révulsive sur les règles. Les
femmes blondes amassent plutôt du sang ténu;
pour cette raison, ce sont surtout les mouchetures aux
malléoles qui leur font du bien; mais il faut
traiter les femmes brunes par la saignée, parce
que, chez elles, il y a plutôt surabondance de
sang épais et atrabilaire, surtout si on voit
qu'elles ont de grandes veines ; cette ampleur des veines
se rencontre ordinairement chez les femmes qui sont
plutôt maigres et brunes; de même, la petitesse
des veines s'observe chez celles qui ont de l'embonpoint
et dont le teint est clair; chez ces dernières,
il vaut mieux scarifier les malléoles que de
faire une saignée, car les veines de leurs jambes
sont si petites, qu'il ne s'écoule pas même
une quantité suffisante, quoiqu'on les ait incisées
Page 16
comme il faut. Beaucoup de femmes
ont une pléthore assez considérable, quoiqu'elles
soient extrêmement maigres ; de même, d'autres
sont grasses, quoiqu'elles aient peu de sang. J'ai ramené
en très peu de temps à son état
normal une femme dont les règles étaient
supprimées depuis huit mois et qui était
très maigre, en lui enlevant une quantité
assez considérable de sang; le premier jour je
lui en tirai environ une livre et demie; le second,
une livre, et le troisième, un peu plus d'une
demi-livre ; je fus amené à ce traitement,
en voyant que ses veines étaient turgescentes
et se montraient pleines d'un sang livide. Ne rejetez
pas la saignée comme dépourvue d'action
révulsive, car vous m'avez vu souvent employer
ce traitement dans les cas de fortes hémorragies
nasales et arrêter ainsi immédiatement
l'écoulement. Cependant, il ne faut pas attendre
que les forces soient parvenues au dernier degré
d'abattement, mais inciser la veine du pli du bras,
quand il semble qu'une quantité suffisante a
été évacuée et que le jet
du sang est encore vigoureux.
Page 17
3. DE LA RÉPÉTITION
DE LA SAIGNÉE. Volume 2, Livre 7, chap. 3 d'Oribase
tiré de Galien.
Chez un sujet qui a besoin d'évacuation
abondante, mais dont les forces ne sont pas intactes,
il faut diviser l'évacuation; après avoir
fait une première saignée qui soit plus
ou moins insuffisante, on la répétera
encore une fois, et même, si l'on veut, une troisième,
comme vous m'avez, du reste, vu faire chez les gens
qui avaient une surabondance
Page 18
d'humeurs plus ou moins crues;
dans ce cas, après avoir tiré un peu de
sang, je donne immédiatement de l'eau miellée
bien cuite avec quelque médicament atténuant,
comme l'hysope, l'origan, quelquefois aussi la menthe
sauvage, ou le pouliot; ou bien j'ajoute à l'eau
miellée du vinaigre miellé, ou de l'eau
de rayons de miel ; je répète ensuite
la saignée quelquefois le même jour, quelquefois
le lendemain, et ce jour-là je saigne de nouveau,
après avoir donné encore une fois quelqu'un
des médicaments susdits; le troisième
jour, j'agis de la même manière, après
avoir donné la même boisson. Mais, quand
il y a une surabondance de sang en effervescence, qui
allume une fièvre suraiguë, une évacuation
abondante et subite est nécessaire, et on tâchera
de pousser l'évacuation jusqu'à la défaillance,
en ayant égard à l'état des forces;
ainsi je me rappelle avoir tiré d'un seul coup
à quelques malades six cotyles de sang, soit
le second, soit le troisième, soit le quatrième
jour, quelquefois même le premier, quand l'invasion
de la fièvre avait eu lieu au commencement, ou
au milieu de la nuit, et que les aliments de la veille
étaient bien digérés. Je me rappelle
encore avoir tiré du sang vers la fin du premier
jour, chez certains malades qui avaient accusé,
la veille, un sentiment de malaise, ou bien de la pesanteur,
ou de la douleur, soit de la tête, soit de quelque
autre partie, qui, pour cette raison, avaient observé
un régime frugal, et qui avaient commencé
à avoir de la fièvre à une époque
déjà avancée de la nuit; en effet,
chez les sujets qui présentent une surabondance
de sang en effervescence, tâchez de l'évacuer
aussi vite que possible, avant qu'il ne tombe sur quelque
partie importante ;
Page 19
quelquefois donc vous ne craindrez
pas de saigner même pendant la nuit. De tels malades
doivent, comme je l'ai déjà dit, être
amenés à une défaillance je me
souviens en effet que quelques-uns d'entre eux furent
refroidis par la défaillance, comme cela est
inévitable; mais ils furent rapidement délivrés
de leur maladie lorsqu'il survint de la moiteur sur
tout le corps, ou une déjection alvine abondante.
Dans les inflammations très intenses, ainsi que
dans les douleurs très fortes, je ne connais
pas de remède plus efficace que l'évacuation
poussée jusqu'à la défaillance,
après qu'on a déterminé toutefois
s'il faut saigner, ou purger. Cependant, on ne prendra
pas pour terme de l'évacuation toute espèce
de défaillance; par exemple, celle qui tient
à la frayeur des malades ne remplit pas plus
ce but que s'ils ont à l'orifice de l'estomac
certaines humeurs qui y causent des picotements; dans
ce dernier cas, en effet, ils ont aussi des défaillances,
mais celles-là ne sauraient nous fournir un moyen
suffisant de mesurer l'évacuation, puisqu'elles
ont quelquefois lieu plus tôt qu'il ne le faut;
de même il arrive souvent que certains fébricitants
tombent en défaillance uniquement pour s'être
levés, ou
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pour s'être mis sur leur
séant. C'est donc la défaillance tenant
à l'évacuation elle-même qui doit
servir de mesure dans les maladies susdites. Cependant
il est bon de faire attention à l'affaiblissement
du pouls, en le tâtant pendant que le sang coule
encore, comme j'ai également l'habitude de le
pratiquer chez les autres malades que je saigne, afin
que, sans s'en douter, on ne donne pas lieu à
la mort au lieu de produire une défaillance.
4. DE LA MESURE DE L'ÉVACUATION
DU SANG.
Volume
2, Livre 7, chap. 4 d'Oribase tiré de Galien.
Sachez que les indications de
l'évacuation, qui ont été énumérées
plus haut, exigent, si elles croissent en intensité,
une augmentation dans l'évacuation, tandis que,
si elles sont moins prononcées, on diminuera
en proportion la quantité de l'évacuation
; or les principales indications de la saignée
étaient la gravité de la maladie et l'intégrité
des forces. Si donc ces deux indications existent, il
est clair, comme je l'ai déjà dit, qu'il
ne saurait exister une accumulation d'humeurs crues
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assez forte, assez caractérisée
pour mettre obstacle à l'évacuation. Il
convient, après cela, d'examiner quel est le
tempérament naturel de l'individu; car on peut,
sans beaucoup de réserve, saigner ceux qui ont
de grosses veines, qui sont modérément
maigres, et qui n'ont ni le teint clair, ni la chair
molle, tandis qu'on doit être prudent pour ceux
qui ont une disposition contraire, puisqu'ils ont peu
de sang et que leur chair se dissipe facilement par
la perspiration. Pour la même raison, on ne saignera
pas non plus les enfants jusqu'à leur quatorzième
année; mais, après cette époque,
on tirera du sang, si parfois il y a une pléthore
très considérable, si l'on est au printemps,
si le pays est naturellement tempéré,
et si l'enfant a naturellement beaucoup de sang, à
plus forte raison s'il est menacé de péripneumonie,
d'angine, ou de pleurésie, ou, en général,
de quelque autre maladie aiguë grave. D'abord on
ne tirera pas plus d'un cotyle de sang; si, plus tard,
l'examen du malade semble montrer que les forces
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sont restées intactes,
vous augmenterez la seconde saignée de la moitié.
Vous savez qu'on peut toujours se fier à un pouls
fort avec régularité, et, si cela ne vous
suffit pas, à un pouls grand, comme à
un signe infaillible de l'intégrité des
forces. Vous saignerez donc aussi les septuagénaires,
s'ils présentent le pouls dont nous avons parlé,
et si leur état exige la saignée; car,
même à cet âge, il y a des gens qui
ont encore beaucoup de sang et dont les forces sont
intactes, comme il y en a d'autres qui sont secs, qui
ont peu de sang, et chez lesquels toute partie blessée
a de la tendance à se noircir. Vous ne ferez
donc pas seulement attention au nombre des années,
mais aussi à la complexion du corps : en effet,
il y a des sexagénaires qui ne supportent pas
la saignée, tandis que des septuagénaires
la supportent; mais il faut, bien entendu, tirer moins
de sang, lors même que les sujets seraient dans
le même état qu'un adulte. Le mieux est
de prendre en considération toutes ces choses
avant d'inciser la veine, surtout quand des hémorroïdes
ou les règles sont supprimées. Quand la
veine est incisée et que le sang coule, on fera
attention aux changements
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que présente ce fluide,
surtout s'il y a déjà quelque inflammation,
et on examinera si le jet perd de sa vigueur; on fera
surtout attention au changement du pouls, comme à
un signe infaillible, et on s'arrêtera aussitôt
que le pouls présente un changement sous le rapport
de la grandeur, ou d'une inégalité quelconque;
est-il nécessaire de parler encore du changement
par lequel le pouls devient faible ? en effet, vous
avez appris que le pouls de cette espèce offre
un moyen sûr de reconnaître l'anéantissement
ou l'intégrité des forces. Quand il existe
quelque inflammation grave dans le voisinage de la veine
incisée, le mieux est d'attendre un changement
dans le sang, sous le rapport de la couleur et de la
consistance; car le sang de la partie enflammée
est d'une autre espèce que le sang naturel; échauffé
à l'excès, il devient rougeâtre
ou jaunâtre, s'il était auparavant plus
ou moins cru, tandis que, s'il était déjà
rouge ou jaune, il tournera au noir par l'effet de la
torréfaction : en effet, un changement qui se
montre dans le sang est le signe qu'une partie de celui
qui était contenu
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dans la région enflammée
a été transportée dans la veine
incisée. Cependant il ne faut pas, dans tous
les cas, attendre le changement; on s'arrêtera,
au contraire, quelquefois avant qu'il ne se produise,
soit à cause de l'abattement des forces, soit
à cause de la malignité de l'inflammation;
car, dans certains cas, la partie enflammée ne
laisse rien s'échapper, mais retient tout dans
une forte étreinte. Cependant, si les forces
ne paraissent pas s'épuiser par l'effet de l'évacuation
(on saura cela en tâtant le pouls), et si celui
qu'on saigne est un adulte, il faut attendre le changement;
principalement si l'atmosphère est tempérée
; car il y a surtout deux causes qui nous empêchent
de déterminer la quantité de l'évacuation,
quand il s'agit d'émission sanguine : c'est l'impossibilité
où nous sommes de reconnaître exactement
quelle est la nature du malade, et de savoir quelle
sera la température de l'atmosphère après
la saignée; en effet, si la chaleur fébrile
a enlevé une grande partie du sang, si le malade
mène une vie frugale, les matériaux nutritifs
qu'il retire du sang lui feront bien vite défaut,
cela est inévitable, et c'est justement par là
que
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les forces s'épuisent;
or ces matériaux nutritifs sont consumés
par l'effet d'un tempérament humide et chaud,
tel qu'est celui des enfants, et par l'atmosphère
d'un pays chaud et d'une saison estivale. Pour cette
raison donc, les motifs qui nous font tirer moins de
sang que la maladie ne le réclame sont, par rapport
à l'âge, celui des enfants; par rapport
à la complexion du corps, une chair molle et
un teint clair; par rapport aux saisons, les approches
de la canicule : il en est de même pour le pays
et pour la constitution atmosphérique. Pour une
autre raison, comme je l'ai également dit auparavant,
on évitera une évacuation abondante dans
les conditions opposées, c'est-à-dire
dans les saisons froides et les pays froids, à
cause du refroidissement qui en est la suite. Il n'est
donc pas possible de préciser dans un livre la
mesure de l'évacuation pour chaque cas particulier
dont il vient d'être question; car, je m'en souviens,
chez quelques-uns, je n'ai pas dépassé
la mesure en tirant six livres, et j'ai éteint
immédiatement la lièvre, sans qu'il s'ensuivît
le moindre dommage pour les forces; chez d'autres, au
contraire, je n'ai pu tirer une livre et
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demie sans que les forces en
souffrissent un peu, et, si on en eût tiré
deux livres à ces malades, on aurait causé
le plus grand dommage; je me rappelle que, pour cette
raison, j'ai quelquefois réussi en tirant une
livre de sang, et parfois même encore moins.
5. QUELLES SONT LES VEINES
QU'IL FAUT INCISER. Volume 2, Livre 7, chap. 5 d'Oribase
tiré de Galien.
Lorsqu'on saigne pour opérer
une révulsion, on verra se produire rapidement
un soulagement manifeste, si l'on ouvre les veines du
côté où se produit l'hémorragie
; tandis que, si l'on agit de la manière opposée,
on n'en recueillera aucun avantage. Ainsi donc, quand
la rate est affectée, l'ouverture de la veine
du doigt annulaire de la main gauche est utile; quelques-uns
incisent la veine qui se trouve entre le doigt du milieu
et le doigt annulaire, et laissent couler le sang jusqu'à
ce qu'il s'arrête de lui-même ; ils disent
que cela est tout aussi profitable à la rate
que si l'on saignait la veine intérieure du pli
du bras; en effet, tirer
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du sang du bras gauche soulage
considérablement quand la rate est en mauvais
état; le mieux cependant est de ne pas évacuer
d'un seul coup toute la quantité de sang requise,
mais de tirer cette quantité en deux jours. Dans
la pleurésie, la saignée du même
côté que la partie affectée produit
souvent aussi un soulagement très-manifeste,
tandis que celle du côté opposé
ne donne que des résultats extrêmement
faibles, ou qui se font attendre longtemps ; l'incision
de la veine du côté de la partie affectée
arrête souvent aussi, en moins d'une heure, de
très-fortes douleurs des yeux. Ainsi, en cas
d'affection des yeux, la saignée de la veine
appelée scapulaire, ainsi que celle du rameau
qui s'en détache au pli du bras, produisent rapidement
un soulagement manifeste ; si le côté,
le poumon, le diaphragme, la rate, le foie ou l'estomac,
sont affectés, la saignée de la veine
qui se rend à l'articulation du coude en passant
par l'aisselle a le même résultat. S'il
s'agit de cette veine, on incisera de préférence
le tronc même qui se trouve du côté
intérieur, sinon le rameau qui s'en détache
pour se rendre au pli du coude, et qui, ainsi que vous
le savez très bien, se réunit avec le
rameau qui se détache de la veine scapulaire
;
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car il y a trois régions
du pli du coude où l'on peut faire la saignée
: la première est du côté interne,
la seconde à l'extérieur, et la troisième
au milieu. La saignée du côté interne
convient quand les organes placés au-dessous
du cou sont malades, et celle du côté extérieur
en cas d'affection des organes du cou lui-même,
de la face ou de la tête. Dans la région
moyenne, on voit quelquefois les deux rameaux se rendre
à la partie antérieure du bras, pour se
réunir ensuite ; d'autres fois, ils se réunissent
promptement au pli de l'articulation ; d'autres fois
enfin, l'un est apparent, tandis que l'autre ne l'est
pas. Si la veine qui convient à la partie affectée
est peu apparente, et si vous avez recours à
l'un des rameaux du milieu, tâchez d'inciser de
préférence celui qui se détache
de la veine qu'on aurait dû saigner; quelquefois
aussi on peut saigner les veines de l'avant-bras au-dessous
de l'articulation du coude; en effet, rien n'empêche
de les inciser, si celles du pli du coude ne sont pas
visibles; mais, dans ce cas aussi, on prendra les veines
du même côté que la partie affectée.
Si la saignée du bras est faite convenablement,
ce n'est
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pas une opération bien
importante; mais on peut commettre trois fautes: diviser
un petit nerf, si on saigne la veine médiane;
piquer la tête d'un muscle tendineux, si c'est
la veine scapulaire ; couper l'artère située
au-dessous de la veine, si l'on saigne au côté
interne, ou enfin couper une artère, quand on
saigne dans un autre endroit que celui-là. On
évitera surtout d'inciser la veine interne; si
quelque motif vous y oblige, vous ferez attention aux
deux points suivants : entourer le bras d'une bande
à l'endroit où l'on distingue le mieux
les pulsations de l'artère, et, après
avoir appliqué la bande, examiner s'il se montre
quelque part du gonflement; s'il en existe, on desserrera
la bande; on réprimera le gonflement, et on appliquera
une nouvelle bande en plaçant l'un des chefs
sur l'endroit où est située l'artère
qui se trouve sous le condyle interne de l'humérus;
ensuite on tâchera d'inciser la veine au-dessous,
puisque c'est là qu'elle s'éloigne de
l'artère. Sous la veine médiane, il ne
se trouve aucune artère; mais, comme je l'ai
déjà dit, il existe, au mi-
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lieu du pli du coude un petit
nerf important, qu'on doit éviter même
de toucher. La veine scapulaire ne présente aucun
danger, de quelque manière qu'on l'incise; cependant
on a vu quelques individus, après la saignée
de cette veine, éprouver des douleurs au muscle
qui couvre le radius; chez d'autres, il s'en est même
suivi de l'inflammation, et les douleurs persistèrent
pendant longtemps; chez aucun de ces sujets, le vaisseau
n'avait été incisé du premier coup,
mais, après avoir manqué une première
fois la saignée, on s'était repris une
seconde, une troisième, quelquefois même
une quatrième fois, de manière à
produire des affections consécutives par la piqûre
répétée de la tête du muscle;
mais, quand on a fait du premier coup une très
large ouverture, il ne s'est jamais manifesté
ni inflammation, ni douleur; on incisera donc cette
veine sans crainte; pour la veine du côté
interne, au contraire, on usera de beaucoup de prudence
et de circonspection ; pour celle du milieu, on tâchera
d'éloigner l'incision du point où elle
est placée sur le nerf. Toutes les parties énumérées
plus haut étant soulagées par les saignées
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au pli du bras, faites comme
je viens de le décrire, les organes situés
plus bas le sont par celles de la fosse poplitée,
ou des malléoles : or les organes situés
plus bas sont la hanche, la vessie et la matrice. Les
reins tiennent de la nature des uns et des autres organes;
car ils sont situés plus bas que les organes
énumérés en premier lieu, et plus
haut que ceux que nous avons nommés ensuite :
pour cette raison, les maladies des reins cèdent
quelquefois aux saignées du pli du bras, si l'inflammation
est récente et s'il y a surabondance de sang;
mais, chez les malades qui sont atteints de l'affection
appelée proprement néphrite (gravelle),
on incisera la veine de la fosse poplitée, ou,
du moins, celles des malléoles. Les inflammations
de la matrice se trouvent encore mieux que celles des
reins de la saignée aux jambes; car, pour la
matrice, les évacuations au pli du coude ont
encore un autre inconvénient particulier, celui
de supprimer les règles, en attirant, par leur
action révulsive. le sang vers les parties supérieures
du corps, tandis que les saignées aux jambes
ont même la propriété de provoquer
les règles. Je sais aussi que des sciatiques,
qui ne tenaient pas au refroidisse-
Page 32
ment, mais à la réplétion
par le sang des veines de la hanche, ont été
guéries en un jour par une émission sanguine
pratiquée aux jambes; c'est aussi à cause
de cette réplétion des veines que la saignée
à la fosse poplitée est plus utile dans
ce cas que celle qu'on pratique aux malléoles,
tandis que la scarification ne produit aucun effet appréciable.
Pour le dire en un mot, on pratiquera une émission
sanguine révulsive au début d'une inflammation
; mais, si l'inflammation dure déjà depuis
longtemps, on saignera, s'il est possible, les organes
affectés eux-mêmes, ou, du moins, les parties
qui en sont les plus rapprochées : en effet,
dans les inflammations commençantes, il faut
dériver ce qui afflue, tandis que, dans les inflammations
chroniques, il s'agit uniquement d'évacuer ce
qui est fortement enclavé dans la partie affectée;
et cela se fait le mieux par la voie des veines qui
s'abouchent avec celles de la partie elle-même.
L'expérience confirme ce raisonnement; c'est
pour ce motif que toutes les inflammations de la gorge
et de la trachée artère sont, au début,
notablement amendées par la saignée du
pli du bras; mais, après cette opération,
la saignée à la langue est un remède
très efficace, si on ouvre
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à la fois les deux veines
qui se trouvent sous cet organe. De même, ouvrir
la veine du grand angle de l'oeil convient dans les
engorgements squirreux qui restent après les
ophtalmies ; de même encore, ouvrir la veine du
front soulage habituellement d'une manière notable
la pesanteur et les douleurs chroniques de la tête
qui tiennent à la pléthore ; tandis que,
si ces affections sont à leur début, ou
à leur acmé, c'est la révulsion
vers l'occiput qui les guérit; on la pratique
à l'aide de ventouses sèches, ou scarifiées
; cependant, il faut qu'auparavant on ait évacué
tout le corps. De la même manière, l'incision
de la veine du front soulage les douleurs de la partie
postérieure de la tête, quand elles sont
à leur début, ou à leur acmé.
Quand aucune partie du corps n'est le siège d'une
affection quel-conque, mais que nous voulons faire une
médecine préventive par une déplétion
au commencement du printemps, aucune des parties dont
on peut tirer du sang ne mérite la préférence
sur les autres, s'il s'agit, bien entendu, d'un individu
qui est habituellement attaqué en été
de maladies fébriles, et chez lequel nous voulons
évacuer les matières qui les produisent;
il en est de même pour un goutteux, dont toutes
les articulations
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sont sujettes à être
prises; si, au contraire, il s'agit d'un individu dont
une partie déterminée sera affectée
de préférence, si l'on n'a pas fait préalablement
de déplétion, on ne saignera pas sans
discernement une partie quelconque, mais on suivra la
même règle que chez ceux qui commencent
déjà à être affectés;
pour cette raison on pratiquera la saignée au
pli du coude
Page 35
chez les individus sujets à
la podagre, et aux jambes chez ceux qui sont menacés
d'épilepsie ou de vertige. Si l'on a recours
à la saignée pour remédier aux
hémorroïdes supprimées, on doit,
si l'on veut les supprimer [pour toujours], saigner
au bras; si, au contraire, on veut les provoquer, on
saignera aux jambes ; mais, quand les règles
sont supprimées, on incisera toujours les veines
des jambes, car on doit toujours provoquer cet écoulement.
Cependant il arrive quelquefois qu'il se fait une hémorragie
utérine par érosion; dans ce cas, le traitement
n'a plus le même but, puisqu'alors nous ne désirons
plus que le sang coule comme lorsqu'il s'agissait des
règles, niais qu'il s'arrête complètement.
J'ai vu un jour, en disséquant un singe, qu'un
petit nerf croisait la veine placée du côté
interne du pli du coude; une autre fois, chez un autre
singe, j'ai vu la même chose pour la veine qui
forme une paire avec celle-là. Cette observation
constitue un cas rare ; elle me fut utile lorsqu'on
reprocha à certains médecins d'avoir coupé
un nerf, les malades ayant éprouvé, immédiatement
après la saignée, un engourdissement dans
toute la longueur du bras, accident qui persista ensuite
durant tout le reste de leur vie. Ayant montré
aux gens qui faisaient ces reproches qu'une pareille
structure particulière du corps se rencontrait
quelquefois, je mis les médecins à l'abri
du blâme.
6. QUEL EST LE TEMPS OPPORTUN POUR FAIRE LA SAIGNÉE
ET POUR LA RÉITÉRER. Volume 2, Livre
7, chap. 6 d'Oribase tiré de Galien.
Quand une déplétion
est nécessaire, il faut se hâter de la
faire, à moins qu'il n'y ait dans l'estomac quelque
corruption des aliments qui s'y digèrent, que
la digestion ne se fasse lentement, ou que cet organe
ne contienne des aliments. Mais, comme souvent le malade
est déjà arrivé au cinquième
ou au sixième jour de la maladie quand nous sommes
Page 36
appelés pour le traiter,
il conviendra de faire une saignée mémé
à cette époque, lorsque la première
occasion pour administrer ce moyen de traitement aura
été négligée; car on doit
se servir de cet agent thérapeutique, quand on
reconnaît chez les malades les indications qui
l'exigent, quel que soit le jour où ces indications
se présentent, même si le malade en était,
par exemple, au vingtième jour. Or quelles étaient
ces indications? la gravité de la maladie et
l'intégrité des forces, en faisant une
exception pour l'enfance et pour une chaleur excessive
de l'air ambiant; mais, comme, par la longueur du temps,
les forces s'abattent dans la plupart des maladies avant
qu'on ait fait une saignée, le nombre des jours
détruit l'opportunité pour la saignée,
non pas directement, mais indirectement, par suite de
l'abattement des forces; si donc on trouve, au deuxième
jour de la maladie, que les forces sont abattues, on
s'abstiendra de saigner. On saignera à toute
heure du jour ou de la nuit, en prenant pour indication,
chez les fébricitants, le déclin des accès
partiels, et,
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quand la saignée est réclamée
par une ophtalmie, ou par quelque autre maladie semblable
non fébrile, on prendra pour indication la gravité
de la douleur, de l'inflammation, ou de toute la maladie
pour laquelle on a besoin de saigner. Si l'on n'est
ni pressé, ni empêché par quelque
circonstance semblable, le mieux est de saigner le matin,.
non pas aussitôt qu'on s'éveille, mais
à peu près une heure après; il
est bon aussi de donner un bain à certains individus,
et, s'il en est ainsi, il n'est pas moins avantageux
de leur faire faire auparavant une promenade. Quant
aux individus chez lesquels nous avons recours à
une saignée au commencement du printemps, parce
que nous soupçonnons l'approche d'une fièvre,
ou de quelque autre maladie, je me rappelle en avoir
saigné quelques-uns même après qu'ils
s'étaient livrés à une partie de
leurs occupations habituelles. Pour réitérer
la saignée, le temps opportun est le jour même
[on l'on a fait la première], si l'on veut simplement
opérer une déplétion; tandis que,
s'il s'agit d'une révulsion, il vaut mieux que
la seconde saignée ait lieu l'un des deux jours
suivants.
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7. QUELS SONT LES VAISSEAUX
QU'ON DOIT OUVRIR
DANS LES DIVERSES PARTIES DU CORPS. - TIRÉ D'ANTYLLUS,
DU SECOND LIVRE, CELUI QUI TRAITE DES MOYENS ÉVACUANTS.
Volume
2, Livre 7, chap. 7 d'Oribase tiré de Galien.
Si nous faisons la saignée
au front, nous incisons la veine droite de cette région,
le plus souvent vers la partie supérieure du
front près du bregma, là ou la veine se
bifurque ; on fera l'incision près de la bifurcation
elle-même à sa partie inférieure
; on incisera les veines du grand angle de l'oeil, près
de la paupière, beaucoup au-dessus de l'angle
lui-même. Derrière les oreilles, on ouvrira
la veine qui est opposée au cartilage de cette
partie. Si nous saignons sous la langue et sans couper
les deux veines à la fois, nous prendrons celle
qui est plus volumineuse que l'autre, c'est-à-dire
la droite; à la main nous divisons celle de la
face dorsale qui se trouve placée entre le doigt
du milieu et le doigt annulaire ; on prend, à
la fosse poplitée, celle qui se rapproche le
plus du mi-lieu ; à la malléole, celles
du côté intérieur; et, si quelques-unes
sont
Page 39
situées devant la malléole
et d'autres derrière, on préfère
les antérieures; mais le plus souvent la petitesse
des vaisseaux nous empêche de choisir ceux que
nous voulons. Quant à la saignée du pli
du bras, les vaisseaux qu'on incise dans cette région
ont besoin d'une distinction plus détaillée.
Là, en effet, s'il n'est pas en notre pouvoir
de choisir, soit qu'un seul vaisseau proémine,
soit que les autres étant également apparents,
un seul d'entre eux convienne mieux pour le cas donné,
nous prendrons nécessairement ce vaisseau pour
faire la déplétion. Si, au contraire,
comme cela est naturel et comme cela a lieu sur la plupart
des sujets, les trois vaisseaux sont tous apparents
et se prêtent également bien à l'opération,
le vaisseau supérieur qui est placé sur
le muscle, le vaisseau moyen et celui qui est placé
près de l'apophyse de l'humérus, vaisseau
qui est, en outre, de la nature des artères,
nous déterminerons quel est le vaisseau qu'il
faut inciser dans chaque cas particulier. Chez les individus
sujets aux défaillances, ou dont l'orifice de
l'estomac est malade, ou chez lesquels nous nous défions
de l'état des forces, nous piquerons
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le vaisseau supérieur;
chez ceux qui ont besoin d'une déplétion
abondante et subite, et d'une évacuation considérable,
nous prendrons celui du milieu, et le vaisseau inférieur
chez ceux qui ont besoin de rénovation et de
transformation, comme les épileptiques, les maniaques
et les gens sujets au vertige. On se gardera de la veine
supérieure, quand les muscles sont ramassés
et bien circonscrits ; quand la convexité des
muscles tombe sur le vaisseau, on fera l'incision un
peu au-dessus du pli du bras. On doit éviter
de saigner la veine inférieure chez les gens
très-maigres et chez ceux où elle est
développée et très-saillante; car,
si, dans ce cas, nous faisons une grande incision, il
y aura à craindre pour les forces, et, si, pour
éviter cet inconvénient, nous faisons
une petite incision, il se formera des thrombus et des
dilatations qui persisteront pendant longtemps pour
cesser plus tard. Chez les individus très-gras,
et qu'on saigne, en quelque sorte, en devinant [la place
de la veine], on piquera le vaisseau qui est en haut;
car le muscle, étant [chez ces individus] pétri
d'humidité, s'écarte en haut beaucoup
de la veine; les nerfs en sont aussi très éloignés
à la région supérieure, de façon
que, même
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si on fait à dessein une
incision très profonde; on ne les atteindra pas;
mais la veine, pour le dire en peu de mots, est toujours
à découvert, dé-pourvue de graisse,
aisée à couper et procure un écoulement
facile. La veine médiane est aussi très-éloignée
des nerfs placés sous elle; mais souvent elle
se divise en plusieurs rameaux avant d'arriver au pli
du bras, ou bien en deux, dont l'un se dirige en haut
et l'autre en bas ; c'est là le motif pour lequel,
dans les saignées qu'on nomme saignées
au tact, mais qui se font en devinant, on commet des
erreurs, en enfonçant l'instrument à plusieurs
reprises, car, les veines étant très-petites
et devenant très-peu apparentes là où
elles se bifurquent, on tombe sur des endroits impropres
à la saignée. On ne doit donc pas inciser
cette veine, car elle donne encore lieu à une
autre erreur, qui tient à l'appareil qu'on applique
avant la saignée; en effet, la peau, qui se tend
fortement au mi-lieu du pli du coude, présente
souvent l'aspect d'une veine parce qu'elle est attirée
vers le muscle du bras ; il faut éviter cela.
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8. QUEL EST LE TEMPS OPPORTUN POUR LA SAIGNÉE AUX
PÉRIODES PARTIELLES [DE LA FIÈVRE]. -
TIRÉ D'HÉRODOTE, DU LIVRE DES MOYENS ÉVACUANTS.
Volume
2, Livre 7, chap. 8 d'Oribase tiré d'Érodote.
Eu égard aux périodes
partielles de la fièvre, le commencement de l'accès
ne se prête pas à la saignée, à
moins qu'il n'y ait quelque accident grave qui fasse
invasion en même temps que la fièvre, comme
un étouffement, des convulsions, une douleur
qui met le malade hors de lui-même ; mais, si
aucun accident étranger à la fièvre
ne nous presse, nous attendrons l'époque de la
rémission, et, si les intervalles entre les accès
sont longs, nous saignerons quand la rémission
sera complète, parce que les forces, étant
en bon état à cette époque, résistent
mieux aux moyens déplétifs, leur prêtent
un puissant secours et leur tendent, en quelque sorte,
la main ; l'essentiel donc, dans le traitement, consiste
[alors] à produire un grand changement; pendant
les accès, au contraire, les forces sont abattues
et n'exigent, pour cette raison, qu'un moyen sédatif.
Si la
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durée de la rémission
est courte, on agira avant qu'elle ne soit complète,
et on saignera les malades quand la fièvre commence
à baisser; nous aurons ainsi le temps de les
nourrir pendant la rémission, en mettant quelque
intervalle entre l'alimentation et la saignée;
car on peut quelquefois user avec succès, pendant
la fièvre, des moyens déplétifs,
mais jamais des moyens réplétifs ; il
n'est donc pas raisonnable de prendre, pour saigner,
le temps destiné à nourrir les malades.
Si une exacerbation intercurrente cause du trouble,
mais qu'on ignore le temps où elle reprendra,
il faut, à cause de cette exacerbation, saigner
quand la rémission n'est pas encore tout à
fait déclarée; en effet, l'indication
deviendra complète, car, ou l'exacerbation baisse,
et cela équivaut à une rémission,
ou elle persiste, et alors on doit la précipiter,
surtout par la saignée. Dans une fièvre
continue, sans intermission ou rémission, le
temps pour la saignée est le même que celui
pour donner de la nourriture, car il faut tirer du sang
un peu de temps avant de s'occuper à restaurer
le corps. Si les fièvres sont continues, mais
en présentant une exacerbation manifeste, et
qu'après avoir augmenté en intensité
par cette exacerbation, elles
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persistent dans cette même
intensité, avec des accès réguliers
ou irréguliers, on s'efforcera, autant que possible,
d'administrer les déplétions, non à
l'époque de l'augmentation amenée par
l'accès, mais à celle où l'intensité
persiste au même degré; car c'est là
aussi le temps pour donner de la nourriture.
9. CE QU'IL FAUT FAIRE AVANT
LA SAIGNE.
— TIRÉ D'ANTYLLUS, DU SECOND LIVRE, CELUI QUI
TRAITE DES MOYENS ÉVACUANTS. Volume 2, Livre
7, chap. 9 d'Oribase tiré d'Antyllus.
Avant la saignée, on entourera
le bras d'une bande solide de la largeur d'environ deux
doigts, ou un peu plus. Quand les muscles du bras sont
saillants et ont des contours bien dessinés,
on appliquera la bande au-dessous d'eux, surtout si
ceux qu'on saigne sont d'une taille élancée
; dans ce cas, en effet, la distance qui existe entre
le pli du coude et le muscle est suffisante ; chez les
gens très petits et qui ont également
des
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muscles saillants, il est inutile
d'appliquer la bande au-dessus, mais on placera la ligature
un peu au-dessous du milieu du muscle, en passant la
bande sur son extrémité. Chez les femmes
et chez les individus qui ont les muscles pétris
d'humidité, rien n'empêche de faire la
ligature sur le milieu du muscle ; si on applique l'appareil
tout à fait au-dessous du muscle, ou sur sa partie
inférieure, on pourra serrer très fortement,
sans que les parties sur lesquelles on agit y mettent
obstacle ; seulement cela ne sert à rien, car
la ligature rend les vaisseaux moins apparents, engourdit
et endolorit le bras. Si on applique l'appareil sur
le milieu du muscle, il ne faut pas serrer du tout,
principalement chez les femmes et chez les sujets délicats,
car, si le ventre du muscle est froissé, il se
forme souvent une ecchymose au bras ; chez quelques
individus cette compression donne lieu à un érésipèle,
ou à un abcès. On tâchera d'éviter
aussi que la bande dont on entoure le bras ne plisse
la peau du pli du coude; elle doit, au contraire, lui
conserver sa position naturelle, afin que la peau, quand
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on défait la bande, en
reprenant sa position propre, n'intercepte pas l'écoulement
du sang, en détruisant le parallélisme
de l'incision de la peau et de celle du vaisseau. Dans
le cas où les vaisseaux ne sont pas apparents,
si on applique une bande au-dessous du pli du coude,
on n'agit pas comme il faut, car jamais, dans aucune
partie, une bande ne fait gonfler les vaisseaux qui
sont placés au-dessus d'elle ; faire préalablement
des fomentations avec des éponges au pli du bras,
ne produit non plus aucun effet, car les vaisseaux ne
se gonfleront par aucun autre moyen que par l'application
d'une bande. Après avoir appliqué l'appareil,
on frottera les mains l'une contre l'autre
et on y tiendra quelque chose. Quand on saigne au front,
à l'angle de l'oeil, à la langue, ou près
des oreilles, on entourera le cou d'une bande, et on
ordonnera au malade de placer sa main gauche, ou sa
main droite sous le menton, soit tout entière,
soit le pouce seulement; ensuite on serrera la bande
sur les doigts ; de cette manière, la trachée
artère ne sera pas interceptée, et les
vaisseaux qui, de chaque côté, se rendent
à la tête, se gonfleront à leur
partie
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supérieure par l'effet
de la pression. Chez les individus faibles, ou paralytiques,
il faut qu'un aide, placé près du malade,
mette sa main au-dessous du menton. Si on fait une saignée
à la main, et s'il est nécessaire de bassiner
préalablement cette partie, on la placera dans
de l'eau chaude, sans négliger pour cela l'application
de l'appareil; si on saigne à la fosse poplitée,
on appliquera la bande à la cuisse, au-dessus
du genou, et, si cela est possible, on doit saigner
dans un bain, ou après avoir fait des fomentations.
Après l'application de l'appareil, le malade
se promènera; quand on est sur le point de faire
l'incision, il se tiendra droit, en s'appuyant uniquement
sur la jambe. On agira de même quand on saigne
aux malléoles, en appliquant toutefois la bande
un peu au-dessus de ces parties.
10. COMMENT IL FAUT EXÉCUTER
LA SAIGNÉE.
- TIRÉ DU MÊME LIVRE. Volume 2, Livre
7, chap. 10 d'Oribase tiré d'Antyllus.
On saigne, tantôt en enfonçant
l'instrument, tantôt en le relevant,
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en l'enfonçant, quand
les vaisseaux ne sont pas apparents, et en le relevant,
quand ils sont très près de la surface.
Il ne faut pas diviser entièrement le vaisseau,
car, dans ce cas, les deux extrémités
se retirent et le sang ne sort pas en jet; on ne doit
pas piquer non plus la partie inférieure du vaisseau,
mais la partie supérieure ; or j'appelle inférieure
celle qui se trouve du côté de l'apophyse
de l'humérus et qui est tournée vers l'extrémité
inférieure du membre, et supérieure celle
qui est du côté du radius ; en effet, si
on pique la partie supérieure, le sang jaillit
avec élégance, mais, si on coupe l'inférieure,
il ne jaillit pas du tout.
11. QUAND IL FAUT EXÉCUTER
LA SAIGNÉE,
ET QUELLE DOIT ÊTRE LA GRANDEUR ET LA FORME DE
L'INCISION. - TIRÉ DU MÊME LIVRE. Volume 2, Livre
7, chap. 11 d'Oribase tiré d'Antyllus.
Quand une déplétion
abondante et subite est nécessaire, on fera une
grande incision ; mais elle doit être très-petite,
quand il s'agit de détourner et de dériver
l'afflux du sang, comme chez les individus qui crachent
du sang, ou qui ont une hémorragie, que le sang
vienne du nez, ou de quelque autre partie; en effet,
ces malades n'ont pas besoin d'évacuation,
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puisque la maladie en produit
une, mais de révulsion; on laissera donc, dans
ce cas, le sang couler longtemps de la veine. Nous pratiquons
encore une petite incision, quand les vaisseaux sont
petits, et une grande, quand ils sont grands, car, si
on fait une petite incision à un grand vaisseau,
on ne saurait éviter qu'un thrombus n'intercepte
le cours du sang. L'incision peut avoir trois directions
: la transversale, la droite, qui ne coupe pas le vaisseau
en travers, niais le fend en long, et l'oblique, qui
est intermédiaire entre ces deux. Nous pratiquons
l'incision transversale, quand nous n'avons nulle intention
de réitérer la saignée, parce que,
le bras une fois fléchi, la plaie s'agglutine
de suite. L'incision oblique convient quand on désire
réitérer la saignée, car, pendant
la flexion du bras, les lèvres de la plaie ne
se touchent pas exactement. L'incision droite convient
aussi lorsqu'on doit avoir de nouveau recours è
la saignée, non-seulement le même jour,
ruais aussi le troisième ou le quatrième,
car, en fléchissant le bras, les lèvres
de la plaie restent notablement écartées
l'une de l'autre.
12. QUELLES MANOEUVRES IL
FAUT EMPLOYER
POUR FACILITER L'ÉCOULEMENT DU SANG. - TIRE DU
MÊME LIVRE. TDM
Volume
2, Livre 7, chap. 12 d'Oribase tiré d'Antyllus.
Si l'écoulement s'arrête
parce qu'on a trop serré la bande, on la relâchera.
Si, par l'effet d'un appareil mal appliqué, la
peau a été déplacée et recouvre
l'ouverture de la veine, on changera la position du
coude de toutes les façons, le portant tantôt
dans la pronation, tantôt dans la supination,
tantôt dans l'extension, tantôt dans la
flexion, jusqu'à ce qu'il se trouve dans une
position qui facilite l'écoulement, en rétablissant
la correspondance directe de l'ouverture de la veine
avec celle de la peau. Quand on fait une incision trop
petite, on doit l'agrandir. Quand c'est la peur qui
arrête l'écoulement, on fera en sorte que
le sang coule sans faire de bruit, car les malades cessent
d'avoir peur quand ils pensent que l'écoulement
est arrêté. Si c'est une défaillance
qui gêne le succès de l'opération,
il faut saigner en couchant les malades, leur irriter
l'oesophage par des vomissements et par l'intromission
des doigts, les rappeler à eux
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par des médicaments qu'on
leur fait respirer, et serrer leurs extrémités
avec des bandes, quand ils sont fortement incommodés.
Si c'est un thrombus qui fait obstacle et qui arrête
l'écoulement, on écrasera ce thrombus
avec les doigts indicateurs des deux mains, on le fera
disparaître par la compression et on versera dessus
de l'huile, ou mieux encore du vinaigre, car ce liquide
dissout les caillots. Si l'écoulement est entravé
par un refroidissement, que cela tienne au froid de
l'air, ou à une affection froide, comme l'épilepsie,
l'apoplexie et les autres affections semblables, on
fera des fomentations, des affusions, des frictions et des onctions sur la partie; en un mot, on
la ramènera à un état contraire.
La graisse et la chair s'échappent à travers
la plaie, chez les malades très gras et très
charnus, et interceptent l'écoulement; ce qu'il
faut faire dans ce cas est bien simple; il suffit d'enlever
ou de refouler ce qui s'échappe.
13. DE LA SAIGNÉE ARTÉRIELLE. - TIRÉ DE GALIEN. Volume 2, Livre 7, chap. 13
d'Oribase tiré d'e Galien
Les médecins ont l'habitude
d'inciser aussi les artères ; celles des tempes,
dans les fluxions chaudes des yeux compliquées
de pneumatose, et celles qui sont situées derrière
les oreilles, surtout chez les malades attaqués
de vertige, ou chez ceux qui ont un mal de tête
chronique chaud avec pneumatose. On incise aussi les
artères derrière les oreilles pour d'autres
maladies chroniques qui se forment à la tête,
mais on n'a pas encore eu recours à ce moyen
de traitement, dans une affection de quelque autre partie,
quoique la plupart d'entre elles aient plutôt
besoin de ce remède que d'une saignée
veineuse, car, si l'on est incommodé par une
accumulation de sang chaud et mêlé d'air
dans les artères, il est utile d'ouvrir les artères
qui communiquent avec la partie affectée; mais,
à cause de la difficulté d'arrêter
l'écoulement du sang, les médecins n'osent
pas saigner les artères, et aussi parce qu'à
l'époque de la cicatrisation il peut se former
un anévrisme. Pour ces raisons, les médecins
respectent les artères d'un grand calibre; ils
négligent les petites, croyant que la saignée
de ces petits vaisseaux ne saurait produire un très
grand effet, bien que nous ayons vu souvent que la saignée
de ces artères procurait un avantage assez notable;
ajoutez à cela que la cicatrisation a lieu sans
anévrisme. Cependant, quand une artère
est plus volumineuse, elle se cicatrise aussi sans anévrisme,
si on la coupe en entier, et souvent cette manière
d'agir a remédié en même temps au
danger qu'amène l'écoulement du sang;
en effet, quand une artère est complètement
divisée transversalement, on voit manifestement
que chacune des deux extrémités éprouve
de son côté une rétraction, et qu'une
partie de l'artère est placée en haut
et l'autre en bas. Moi-même, engagé par
certains songes qui m'apparurent clairement, j'ai divisé
l'artère située entre l'indicateur et
le pouce de la main droite et je laissai couler le sang
jusqu'à ce qu'il s'arrêtât de lui-même,
le songe me l'ayant ainsi prescrit. Il s'écoula
un peu moins d'une livre de sang, ce qui fit cesser
aussitôt la douleur chronique fixée surtout
à la région où le foie touche au
diaphragme. Chez un autre malade, où l'on avait
fait une incision aux malléoles et coupé
l'artère, l'écoulement du sang ne s'arrêta
pas avant qu'on m'eût appelé et que j'eusse
complètement divisé le vaisseau, et employé
ensuite le médicament fait avec de l'aloès,
de la poussière d'encens et du blanc d'oeuf,
que j'appliquai sur des poils fins de lièvre;
la plaie se guérit sans anévrisme, l'ouverture
de l'artère ayant été obstruée
de tous côtés par de la chair. Cet homme,
qui éprouvait déjà depuis quatre
ans, à des intervalles assez rapprochés,
des douleurs à la hanche, fut guéri complètement.
Ce fait m'engagea à ouvrir souvent les artères
aux extrémités des membres, aussi bien
qu'à la tête, pour toutes les douleurs
qui me semblaient provenir d'une substance chaude, ou
mêlée d'air, surtout quand ces douleurs
avaient leur siège dans les membranes, cas dans
lequel elles sont pungitives et s'étendent lentement;
le sentiment de piqûre offre alors le caractère
d'une pointe fixée au centre de la partie affectée,
tandis que toute la région qui environne cette
pointe est le siège d'un sentiment de tension.
14. DE LA SAIGNÉE ARTÉRIELLE. - TIRÉ D'ANTYLLUS, DU SECOND LIVRE, CELUI QUI
TRAITE DES MOYENS ÉVACUANTS. Volume 2, Livre
7, chap. 14 d'Oribase tiré d'Antyllus.
Nous divisons, s'il est possible,
l'artère qui se trouve à la nuque, derrière,
le sommet de la tête, entre les grands tendons;
si cela ne se peut pas, nous prenons celle qui est placée
derrière les oreilles, ou celles qui sont placées
des deux côtés du sommet de la tête,
au niveau du bregma, lesquelles se réunissent
aux sutures coronaire et moyenne. On évitera
celles qui se rendent des tempes au front, parce qu'elles
sont situées sur un muscle; il est facile en
effet de les couper sans danger, en recommandant à
celui qui subit l'opération de mouvoir et de
serrer la mâchoire; car, pendant cette manoeuvre,
les muscles temporaux sont manifestement mis en mouvement
dans leur totalité ; on peut donc, en s'écartant
de la partie mobile, faire l'incision, sans être
gêné par le mouvement, à la partie
du front qui est en repos; mais le sang ne s'écoule
ni en grande quantité, ni beaucoup à la
fois, à cause de la petitesse du vaisseau, et
ce sang n'est pas non plus mélangé de
beaucoup d'air, car ces artères se rapprochent
de la nature des veines; d'où il résulte
donc que la déplétion à cet endroit
ne vaudra pas beaucoup mieux qu'une saignée ordinaire.
Les artères placées au-devant des oreilles,
à l'origine des muscles masséters, sont
très volumineuses, il est vrai, mais on ne les
incise que rarement, et non sans danger, à cause
de la proximité des muscles et de l'intrication
des membranes dans cette région. On doit inciser
les artères de l'occiput en allant jusque sur
l'os et en le raclant de manière que la surface
de cet os engendre de la chair; on saisira ensuite les
orifices de l'artère [entre les mors d'une pince],
et on les serrera. Il est plus convenable encore d'isoler
l'artère comme une varice, en plaçant
dessous, soit une sonde à deux boutons, soit
quelque autre instrument analogue, et de faire au vaisseau
une incision petite et partielle; quand il s'est écoulé
assez de sang, on attirera légèrement
le vaisseau à l'extérieur, à l'aide
de la sonde à deux boutons, qu'on a placée
dessous, et on excisera la partie moyenne ; de cette
manière, l'artère ne se réunira
pas, et il n'y a pas de danger d'hémorragie,
parce qu'il y a rétraction des orifices du vaisseau
dans la chair.
15. DES VENTOUSES. - TIRÉ DE GALIEN. Volume 2, Livre 7, chap. 15
d'Oribase tiré d'e Galien
Les ventouses sont utiles après
qu'on a fait, préalablement une déplétion,
car, si le corps est surchargé d'humeurs, on
n'emploiera pas de ventouses. Pour la même raison,
on n'y recourra non plus ni dans les inflammations du
cerveau et des méninges, ni dans les inflammations
d'aucune autre partie, au début de la maladie,
mais quand il n'y a plus aucun afflux, qu'on a pratiqué
d'abord une déplétion de tout le corps,
et qu'il est nécessaire de mettre en mouvement
et de soutirer quelque matière de la partie enflammée,
ou de l'attirer vers l'extérieur. Quand, au contraire,
les maladies sont encore en voie de formation, on n'appliquera
pas les ventouses aux organes eux-mêmes qui commencent
à être malades, mais aux parties qui communiquent
avec eux, afin d'opérer une révulsion;
au début, on emploiera les médicaments
répercussifs.
16. DES VENTOUSES. - TIRÉ D'ANTYLLUS, DU SECOND LIVRE, CELUI QUI
TRAITE DES MOYENS EVACUANTS. Volume 2, Livre 7, chap. 16
d'Oribase tiré d'Antyllus.
Lorsqu'il existe une douleur
modérée, ou quelque autre affection semblable,
on emploie des ventouses légèrement appliquées,
sans scarifier; mais, quand on veut tonifier, on applique
fortement les ventouses ; nous scarifions, quand il
y a des parties obstruées de matières,
ou quand les malades sont incommodés par une
humeur corrompue. Avant d'appliquer les ventouses, on
doit relâcher le ventre, ou tout au moins avoir
des raisons de croire à l'absence de toutes superfluités
nuisibles ; le malade doit aussi observer préalablement
une abstinence absolue, ou boire de l'eau après
avoir pris des aliments légers et qui se sont
bien distribués. Si l'on veut tirer du sang,
on emploiera surtout peu de feu à la première
application des ventouses; ensuite, quand la ventouse
a donné lieu à une rougeur et à
un gonflement suffisants de la partie, on scarifiera;
dans le cas contraire, on appliquera la ventouse pour
la troisième fois, jusqu'à ce que la partie
se gonfle et rougisse; s'il y a absence totale de gonflement
et de rougeur, on fomentera les parties avec des éponges,
jusqu'à ce qu'elles rougissent; on pratiquera
ensuite les scarifications. Si on sait d'avance que
les parties ne rougiront pas, comme cela a lieu quand
les téguments du ventre sont surchargés
de graisse, ou chez les malades refroidis, et chez les
femmes qui viennent d'accoucher, on mettra des cataplasmes
avant d'appliquer les ventouses. Quelquefois les ventouses
sèches donnent lieu à un gonflement très
prononcé, mais d'une couleur plus ou moins livide
; aussi, lorsqu'on scarifie, il s'écoule peu
ou point de sang, parce que la partie de ce sang qui
est en avant est plus ou moins épaisse et charnue;
dans ce cas, on fomentera donc également avant
tout avec des éponges, et on rendra le sang ténu
et propre à couler facilement. On évitera
d'appliquer des ventouses au voisinage des seins, car
ces organes tombent quelquefois dans les ventouses,
et rendent fort difficile, en se gonflant, l'enlèvement
de ces instruments. Après l'application des ventouses,
on versera de l'huile dessus........... On applique
les ventouses en n'employant pas trop de feu; car, si
on les appliqué fortement, elles n'attirent presque
rien, attendu que la vapeur augmente l'inflammation
des parties et les met dans un état de tension.
C'est un fait généralement reçu,
qu'il faut mettre les parties dans une position telle,
que le sang ne se fixe pas sur elles, et ne devienne
pas, en s'épaississant, un obstacle à
l'écoulement, mais dans une situation où
ce liquide s'écoule vers la partie déclive.
Si, après avoir enlevé les ventouses,
le sang tiré est en quantité suffisante,
on soumettra les parties à un traitement secondaire;
dans le cas contraire, on applique de nouveau les ventouses.
Quand on pose des ventouses à la tête,
on n'emploiera pas beaucoup de feu, car elles tireraient
très fort et seraient difficiles à enlever;
tandis que des ventouses modérément appliquées
produiront l'effet désiré. Lorsque les
ventouses sont difficiles à enlever, on les entoure
d'éponges trempées dans de l'eau chaude,
car ainsi les parties se relâchent; et, si, même
avec ces moyens, elles ne se relâchent pas, il
faut percer la ventouse. -Il y a trois espèces
de ventouses, eu égard à la matière
:les ventouses en verre, en corne et en bronze; car
les ventouses en argent doivent être rejetées,
attendu qu'elles développent une chaleur démesurée;
l'usage des ventouses en bronze est le plus répandu.
On peut employer les ventouses en verre chez les malades
où il faut observer l'écoulement du sang,
et les ventouses en corne pour la tête, lorsqu'on
a constaté que les ventouses en bronze s'enlèvent
difficilement, ou encore chez les malades peureux qui
s'effraient à la vue de la flamme. C'est surtout
pour les ventouses en bronze qu'il existe des différences
dans la forme : les ventouses hautes tirent plus fortement
que celles qui sont basses; les ventouses basses s'appliquent
mieux à la tête, parce qu'elles ne tirent
pas très fort; les ventouses à bords plats
conviennent mieux pour les parties étendues en
largeur, celles à bords concaves pour les parties
à surface courbe ou étroites, celles à
bords minces quand on veut non pas scarifier, mais appliquer
des ventouses sèches et tirer fortement, car
l'exiguïté des bords contribue à
la force de l'attraction ; enfin on applique les ventouses
à bords épais principalement à
la tête, quoiqu'on les emploie aussi sur d'autres
parties. Le tirage des ventouses en bronze se fait à
l'aide du feu; il en est de même pour les ventouses
en verre; mais celui des ventouses en corne se fait
sans feu ; car elles sont percées à leur
partie supérieure, et, en les appliquant, on
aspire fortement à travers l'ouverture pour les
faire tirer ; puis on bouche immédiatement cette
ouverture avec le doigt, ou avec de la cire.
17. DES VENTOUSES. - TIRÉ D'HÉRODOTE,
DU TRAITÉ SUR LES MOYENS DE DÉPLÉTION.
Volume
2, Livre 7, chap. 17 d'Oribase tiré d'Hérodote.
Les ventouses peuvent évacuer
les matières de la tête, supprimer la douleur,
diminuer l'inflammation, dissiper les accumulations
de gaz, rappeler l'appétit, renforcer l'orifice
de l'estomac, quand il est relâché, ou
affaibli, faire cesser la défaillance, transporter
les matières de la profondeur du corps vers la
surface, dessécher les fluxions, arrêter
les écoulements de sang, rappeler le retour des
règles, attirer les substances délétères,
chasser les frissons, résoudre les maladies périodiques,
réveiller les malades plongés clans le
cataphora, produire du sommeil, soulager la lourdeur
: tels sont les effets des ventouses, auxquels il faut
ajouter tous ceux qui leur sont analogues.
18. DE LA SCARIFICATION. - TIRÉ D'ANTYLLUS, DU LIVRE SUR LES MOYENS
DE DÉPLÉTION. Volume 2, Livre 7, chap. 18
d'Oribase tiré d'Antyllus.
Nous scarifions les parties qui
sont enflammées, endurcies, distendues et frappées
de douleurs, ou qui sont le siège de fluxions,
lorsque la fluxion a déjà trouvé
un point d'arrêt, ou lorsqu'il y existe une matière
âcre. On prescrira, s'il est possible, un bain
avant la scarification; si cela ne se peut pas, des
affusions d'eau chaude, jusqu'à ce que la partie
rougisse ; ou bien on fomentera avec des éponges,
ou on exposera au soleil, ou au feu la partie qu'on
va scarifier. Les scarifications seront faites aux jambes
et au ventre, ainsi qu'à la poitrine, au dos
et au cou, en ligne droite, à la tête,
selon la direction des cheveux, et au front, transversalement.
Les incisions auront toutes la même grandeur et
seront placées à une distance égale
les unes des autres. On commencera la scarification
sur les parties inférieures; car, de cette manière,
le sang, en s'écoulant en bas, ne cachera pas
la partie qu'un va scarifier; on disposera aussi les
mouchetures sur des lignes parallèles. La scarification
doit se faire, non en enfonçant, mais en tirant
horizontalement la lame devant soi; car, de cette manière,
l'opération sera exempte de douleur.
19. DE LA SCARIFICATION. - TIRÉ D'APOLLONIUS.
Volume
2, Livre 7, chap. 19 d'Oribase tiré d'Apollonius.
Sachant, d'une part, que c'est
le sang qui exerce la plus grande influence sur la tonicité
et aussi pour préserver d'un état [morbide]
quelconque, et, d'une autre, que ce fluide est ordinairement
en quantité surabondante, et quelquefois détérioré
sous le rapport de la qualité, je jugeai qu'il
fallait opérer une diminution en cas de surabondance,
et un changement en cas de corruption. Je pensai cependant
qu'il ne conviendrait pas d'ouvrir la veine plusieurs
fois par an, car je savais qu'avec le sang il s'échappe
une grande quantité d'air vital; que, par l'épuisement
de cet air, tout le corps se refroidit plus aisément,
et que toutes les fonctions naturelles s'accomplissent
alors moins bien. Je m'avisai donc de faire la déplétion
à l'aide d'une scarification, aux parties les
moins importantes, comme, par exemple, aux jambes, en
proportionnant la quantité du sang évacué
à la complexion et au besoin de l'individu. C'est
là un excellent moyen pour conserver la santé,
ou pour la rétablir, quand elle a été
déviée par quelque cause de ce genre.
Que personne cependant n'aille croire que je rejette
la saignée; mais je la réserve pour les
maladies les plus graves et les plus périlleuses,
où il faut évacuer beaucoup des humeurs
à la fois, car c'est contre les maladies violentes
que conviennent les déplétions qui enlèvent
du premier coup une grande quantité de sang;
mais, quand il s'agit d'une pléthore modérée
qui va produire quelque effet nuisible ou (lui a déjà
commencé à faire tomber dans quelque état
morbide, des scarifications pratiquées à
la jambe font disparaître cette prédisposition,
en enlevant sans inconvénient et dans la proportion
qu'on désire la surabondance du sang; de cette
opération il ne résultera pas même
un trouble notable dans le corps. Souvent il s'accumule
plus de sang qu'il n'en faut; on ne doit donc pas, toutes
les fois qu'il se présentera des signes de pléthore,
négliger de détruire cet état de
la manière indiquée plus haut; car les
viscères, aussi bien que les vaisseaux qui se
trouvent dans tout le corps, ne doivent pas être
dans un état de turgescence ou de distension;
ils doivent, au contraire, se trouver plutôt dans
un relâchement modéré, afin que
le pneuma naturel chemine facilement.
20. QUE LA SCARIFICATION CONVIENT AUX FEMMES MAL RÉGLÉES,
ET DANS PLUSIEURS AUTRES AFFECTIONS. Volume 2, Livre
7, chap. 20 d'Oribase tiré de Galien
La scarification soulage admirablement
les femmes mal réglées; car le sang que
les règles n'enlèvent pas, cette opération
l'évacue; mais on doit attendre l'époque
des règles, et alors, quand le sang ne paraît
pas, ou paraît peu, on appliquera le traitement
déplétif dans la mesure que le cas exige.
Chez quelques femmes, ce traitement contribue aussi
à rappeler l'habitude de l'écoulement
mensuel; car l'appel continuel du sang vers les parties
inférieures lui imprime une tendance à
couler dans cette direction. Cependant je soulage aussi
par ce traitement les femmes qui sont déjà
parvenues à un âge très-avancé,
et chez lesquelles la menstruation a cessé depuis
longtemps, quand elles éprouvent quelque incommodité
corporelle; car ce moyen est spécialement d'une
grande efficacité chez les femmes, attendu qu'il
imite l'évacuation naturelle. J'ai l'habitude
de faire la déplétion quelquefois à
l'aide d'un petit couteau, et d'autres fois en appliquant
des sangsues. Un individu, dont les yeux étaient
depuis longtemps gravement lésés par une
fluxion qui ne tarissait pas, fui, guéri à
l'aide de ce moyen de traitement, auquel fut joint l'autre
traitement, c'est-à-dire les topiques pour les
yeux et le régime de tout le corps. Un vieillard
incommodé par un resserrement du poumon accompagné
de suffocation à des intervalles d'abord éloignés,
puis plus rapprochés, fut guéri de la
même manière. On continue à tirer
du sang aussi longtemps que l'évacuation produit
un effet évidemment salutaire; on évitera
le refroidissement et on donnera pendant trois ou quatre
jours des aliments en quantité modérée.
Une peste grave, qui fit mourir beaucoup de monde, ayant
envahi l'Asie, je fus attaqué moi-même
de la maladie; je profitai d'une rémission qui
se présenta le deuxième jour pour me scarifier
la jambe, de manière à enlever environ
deux livres de sang : ce fut là ce qui me fit
échapper au danger. Plusieurs autres malades
furent également sauvés en employant le
même moyen, car il y avait des signes de pléthore,
et ce furent surtout les malades auxquels on tira abondamment
du sang qui réchappèrent. La scarification
[aux jambes] guérit encore les douleurs de tête
de gravité moyenne, les inflammations des amygdales
et les fortes douleurs de côté; mais, quand
ces accidents ont déjà duré quelque
temps, on les fait disparaître à l'aide
des scarifications locales. Enfin, rien, en vérité,
ne rend aussi facilement un embonpoint convenable aux
convalescents qui reprennent difficilement leur complexion
naturelle, que l'évacuation du sang à
l'aide de la scarification.
21. DES SANGSUES. - TIRE D`ANTYLLUS, DU LIVRE SUR LES MOYENS
DE DÉPLÉTION. Volume 2, Livre 7, chap. 21
d'Oribase tiré d'Antyllus.
Quelques personnes vont à
la pêche des sangsues et les mettent en réserve
pour qu'elles servent plusieurs fois; car ces sangsues
prennent facilement, attendu qu'elles sont exercées,
tandis que les autres sont quelquefois désorientées.
On appliquera immédiatement les sangsues exercées,
mais on conservera pendant un jour celles qu'on vient
de pêcher, en leur jetant un peu de sang pour
se nourrir en attendant ; de cette manière leur
venin s'évaporera. Quand on veut s'en servir,
on frottera préalablement la partie
sur laquelle on veut les appliquer avec de la soude
brute, et on l'enduira du sang de quelque animal, ou
de terre glaise humide, ou bien on fera des fomentations,
ou on la grattera avec les ongles ; grâce à
ces préparatifs, elles prendront plus prompte-ment.
On doit les jeter dans un vase grand et large, contenant
de l'eau pure et tiède, afin qu'elles perdent
leur venin par le mouvement; on les saisit ensuite avec
une éponge, on essuie ce qu'elles ont de visqueux
et on les applique avec les mains; quand toutes ont
pris, on verse de l'huile . tiède sur la partie,
afin qu'elle ne se refroidisse pas. S'il s'agit des
bras ou des jambes, on place la partie dans l'eau où
se trouvent les sangsues. Si l'on est obligé
de les employer encore quand elles se sont déjà
rem-plies, ou si on n'en a qu'un petit nombre, ou si
quelques-unes seulement ont pris, on leur coupera la
queue avec des ciseaux dès qu'elles seront pleines;
de cette manière, le sang s'écoule et
elles ne cessent de tirer, jusqu'à ce qu'on leur
saupoudre le suçoir avec du sel, de la soude
brute, ou de la cendre. Quand elles sont tombées,
on doit, si la partie se prête à l'application
d'une ventouse, attirer le venin à l'aide de
cet instrument, en l'appliquant fortement et en l'enlevant
rapidement; mais, si cela ne se peut pas, on fera des
fomentations avec des éponges. Si les piqûres
faites par les sangsues laissent suinter un peu de sang,
on les saupoudrera de poussière d'encens, de
cumin, ou de farine, et ensuite on les enveloppera de
laine trempée d'huile. S'il y a une hémorragie,
on appliquera des linges, ou des toiles d'araignée
trempées dans du vinaigre, ou la noix de galle
torréfiée, ou une éponge neuve
imbibée de goudron et brûlée ensuite,
on mettra par-dessus du papyrus trempé dans du
vinaigre et on l'assujettira avec un bandage. C'est
là ce qu'il faut faire quand il s'agit des parties
centrales du corps; car, sur les membres, le bandage
seul suffit pour arrêter le sang. Le lendemain
on défera le bandage, et, si le sang s'est arrêté,
on lavera la partie; sinon, on aura recours aux moyens
susdits. On doit savoir que les sangsues ne tirent pas
le sang de la profondeur du corps, mais qu'elles sucent
seulement celui qui se trouve dans les chairs mêmes.
On emploie les sangsues chez les individus qui ont peur
des scarifications, ou sur les parties qui n'admettent
pas l'application d'une ventouse, à cause de
leur petitesse, de leur courbure, ou de leur inégalité.
Nous enlevons les sangsues quand nous supposons qu'elles
ont tiré la moitié du sang que nous avions
jugé devoir être évacué;
nous laissons ensuite couler le sang, jusqu'à
ce qu'une quantité suffisante se soit écoulée.
Comme la partie se refroidit aussi bien par le froid
naturel des sangsues que par l'effet de l'air ambiant,
il faut la fomenter, la réchauffer et arrêter
le sang, non avec des réfrigérants, mais
à l'aide de moyens astringents et qui bouchent
les pores, comme nous l'avons déjà dit.
22. DES SANGSUES. - TIRÉ DE MÉNÉMAQUE.
Volume
2, Livre 7, chap. 22 d'Oribase tiré de Ménémaque.
On applique les sangsues aux
parties malades elles-mêmes, ou à des parties
voisines exemptes de graisse, car la graisse leur ôte
l'appétit; à cet effet, on les place dans
une plume étroite qui n'est pas percée
aux deux extrémités, ou dans le couvercle
d'un tuyau, ou dans quelque instrument semblable. Le
nombre doit être proportionné à
deux circonstances, le volume de la partie affectée
et la gravité de la maladie. On les enlèvera,
en laissant couler goutte à goutte de l'huile
chaude sur leurs suçoirs, car il faut éviter
d'appliquer du sel sur les plaies à cause de
ses qualités mordantes. Le sang, qui continué
à couler après qu'on les a ôtées,
s'arrête, si on met le doigt sur la piqûre.
On évalue la quantité du sang évacué,
en les effilant, mais on l'évalue encore mieux,
quand on ras-semble le sang qu'elles vomissent après
avoir été détachées des
parties. Si elles tardent à prendre, on scarifiera
superficiellement les parties, car, lorsqu'elles ont
goûté du sang, elles le recherchent plus
avidement.
23. QUELLES SONT LES GENS
QU'IL FAUT PURGER,
À L'AIDE DESQUELS MOYENS IL FAUT LE FAIRE, ET
DANS QUELLES CIRCONSTANCES. - TIRÉ DE GALIEN. Volume 2, Livre 7, chap. 23
d'Oribase tiré de Galien.
C'est une chose fâcheuse
que de purger les gens qui ont le corps sain, car ils
sont pris de vertige et de coliques, et la purgation
marche difficilement chez eux; ils sont, en outre, sujets
à s'affaiblir rapidement; et tout cela arrive,
parce que le médicament purgatif tâche
d'attirer l'humeur . avec laquelle il a de l'affinité
et qu'à défaut de cette humeur il fond
le sang et les chairs pour l'en tirer. Quant aux gens
qui sont encore bien portants, mais qui tomberaient
malades si l'on n'opérait chez eux une déplétion,
on se hâtera d'en pratiquer une, au commencement
du printemps, soit à l'aide de la saignée,
quand ils sont habituellement pris de maladies tenant
à la pléthore, soit à l'aide d'une
purgation, quand ces maladies tiennent à la corruption
des humeurs. Pendant plusieurs années j'ai empêché,
à l'aide d'une pareille déplétion,
le développement de la podagre, ou d'une goutte
commençante, quand ces maladies n'avaient pas
encore produit des tophi autour des articulations. J'ai
arrêté, de la même manière,
chez plusieurs individus, l'épilepsie, l'apoplexie,
la mélancolie et d'autres maladies chroniques
semblables, à l'aide de la déplétion
dont nous venons de parler. Chez quelques-uns, il est
utile d'évacuer les humeurs pituiteuses; chez
d'autres, la bile amère; chez d'autres encore,
l'atrabile ; chez d'autres enfin, les superfluités
séreuses selon la nature des maladies dont ils
souffrent habituellement. Je con-nais, par exemple,
un homme qui est pris, chaque année, de mélancolie,
à moins qu'on ne le purge, et je le purge non
seulement au printemps, mais aussi en automne. De même,
j'opère, chaque année, au commencement
du printemps, une déplétion chez une femme
qui a une affection cancéreuse au sein; je l'ai
guérie, en pratiquant une forte déplétion
à l'aide d'un médicament qui purge les
humeurs noires, et, si parfois on oublie la purgation,
elle est prise d'une douleur profonde. Chez un autre
malade, je guéris un éléphantiasis
commençant, d'abord à l'aide de la saignée
et de la purgation; maintenant, il lui suffit d'être
purgé une fois chaque année, et, si on
l'oublie, la maladie reprend immédiatement. Ces
maladies-là réclament donc une purgation
qui chasse les humeurs noires, tandis que l'épilepsie,
l'apoplexie et l'asthme demandent l'évacuation
des humeurs pituiteuses; la goutte exige, lorsqu'elle
est accompagnée d'une forte chaleur, qu'on expulse
la bile amère, tandis qu'elle réclame
l'évacuation des humeurs pituiteuses, si elle
est accompagnée de tumeurs froides. Un autre
malade souffrait toujours l'été d'une
fièvre tierce, mais, depuis plusieurs années
déjà, il n'en a plus été
repris, parce que nous prévenons les accès
en purgeant la bile pâle vers la fin du printemps
car, chez ces malades, il vaut mieux faire la déplétion
à cette époque, tandis qu'il est préférable
de la faire au commencement du printemps, chez les épileptiques,
les goutteux, les mélancoliques, et chez tous
ceux dont les maladies tiennent à des humeurs
épaisses. On exercera préalablement une
action atténuante et incisive sur les humeurs
épaisses et visqueuses, et on ouvrira les conduits
à travers lesquels les médicaments purgatifs
les transportent et les attirent, si l'on veut que la
purgation soit irréprochable sous tous les rapports;
cela doit se pratiquer surtout chez ceux qui prennent
de l'ellébore, car l'intensité des tiraillements,
qui chasse les humeurs enclavées dans les parties
malades de manière à en être détachées
difficilement, et qui, par ce moyen-là, soulage
les maladies chroniques, produira plus facilement ce
résultat, si on a d'abord atténué
les humeurs. Ceux qui négligent cette précaution
verront la purgation s'opérer difficilement et
s'accompagner quelquefois de coliques, de vertige, d'une
grande anxiété, de dérangement
du pouls, d'affaiblissement et de malaise. On expérimentera
d'abord la nature du malade qui va prendre de l'ellébore,
et on verra comment il se comporte à l'égard
des purgations par le haut, c'est-à-dire de celles
qui se font par le vomissement. Cette expérimentation
se fait à l'aide des émétiques
doux, car, si l'on voit que la purgation ne s'opère
pas facilement, on ne sou-mettra pas un pareil malade
à l'ellébore sans l'y préparer
auparavant; or cette préparation se fera d'abord
par les vomissements continuels, qui habituent celui
qui va prendre de l'ellébore à vomir promptement
; mais elle se fera mieux encore, si avant on humecte
aussi le corps; or on l'humecte par une nourriture abondante
et par le repos. Pour le repos, la chose est évidente,
car, de même que les exercices dessèchent
naturellement, le repos, c'est-à-dire la vie
sédentaire et le défaut d'exercice, conserve
l'humidité; quant aux aliments, ce n'est pas
simplement leur abondance qui est de nature à
humecter, mais il en est ainsi de toute nourriture destituée
de propriétés efficaces, c'est-à-dire
qui n'est ni âpre, ni âcre, ni salée,
ni amère. Nous avons donné quelquefois
des raiforts dans du vinaigre miellé, dans lesquels
nous avons enfoncé des rameaux d'ellébore
blanc, que nous y laissions pendant un jour et une nuit;
cette préparation peut tenir lieu d'une purgation
faible par l'ellébore. Ceux qui ont la poitrine
étroite, et, par conséquent, le poumon
comprimé, se prêtent très mal aux
purgations par les vomitifs, quels qu'ils soient, mais
surtout à celle qui se fait par l'ellébore
blanc, car on voit alors se rompre quelqu'un des vaisseaux
qui se trouvent dans les organes de la respiration.
On évacuera, de préférence, par
le haut la bile amère, et par le bas la pituite;
cependant, quelquefois on fera le contraire, quand l'humeur
pituiteuse est accumulée dans l'estomac, ou quand
la bile amère l'est dans les intestins; mais
l'humeur atrabilaire doit toujours être chassée
par le bas. Hippocrate a écrit dans les Aphorismes (IV, 4) par rapport aux saisons
: « En été, on purgera le ventre
supérieur, et, en hiver, le ventre inférieur.
Les divers pays, en les distinguant d'après le
chaud et le froid, se prêtent aux mêmes
considérations que les saisons il en est encore
de même pour les âges. En vérité,
l'habitude nous fournira encore un élément
assez important pour trouver les indications de la déplétion,
car ceux qui sont habitués à vomir supportent,
sans trop d'inconvénient, les purgations par
le ventre supérieur, tandis que ceux qui ne le
sont pas ne les su-bissent pas sans danger, surtout
s'il s'agit de l'ellébore. On doit encore considérer
l'espèce de la maladie, car, dans l'hydropisie
dite leucophlegmatie, on aura recours à un médicament
qui chasse la pituite, d'abord par le ventre inférieur,
ensuite par les vomissements, et, en dernier lieu, par
les masticatoires; en effet, quand l'humeur surabondante
est dispersée par tout le corps, on emploiera
des déplétions de toute espèce.
Au contraire, on donnera quelqu'un des médicaments
qui évacuent l'eau, s'il existe une hydropisie
ascite, et, contre la jaunisse, un médicament
qui expulse la bile; car, dans ce dernier cas, il faut
purger la bile de plusieurs façons, par le haut,
par le bas, par les urines, par le palais et par le
nez. De même, s'il y a excès d'humeur atrabilaire,
comme dans la mélancolie, le cancer et l'éléphantiasis,
on donne un médicament qui chasse la bile noire,
tandis qu'on purge les épileptiques avec des
médicaments qui chassent la pituite : d'où
il résulte que l'état de la maladie indique
aussi bien l'humeur qu'il faut évacuer que la
voie par laquelle il faut le faire. Par exemple, les
humeurs qui causent une inflammation au foie, lorsqu'elles
sont arrivées à coction, nous les purgeons
par le bas-ventre, si la maladie a son siège
à la surface concave de ce viscère, et
par les urines, si c'est à la surface convexe.
Dans les autres cas, on considérera de même
l'humeur qui est en excès et la partie affectée
d'où la maladie prend son point de départ
comme d'un foyer; en effet, ces circonstances indiqueront
l'humeur qu'il faut évacuer, la manière
dont il faut s'y prendre, la voie par où on doit
la faire passer, et, en outre, le temps opportun, car,
au commencement, on évacuera les humeurs séreuses
et ténues, tandis qu'on attendra l'époque
de la coction pour les humeurs épaisses et visqueuses,
genre d'humeurs auquel appartiennent la pituite et la
bile noire. Les accès de la maladie sont encore
un moyen d'indication pour reconnaître la manière
dont il faut opérer la déplétion,
car on purge par le haut pendant les accès et
par le bas pendant ce qu'on appelle les rémissions;
en effet, c'est aussi dans cet ordre que les évacuations
spontanées profitent aux malades, car, pendant
les accès, beaucoup vomissent, ou saignent du
nez; pendant les rémissions, au contraire, il
se fait des excrétions par les urines et par
les selles. On évitera surtout les jours d'exacerbation
et de crise, quand on veut faire une purgation abondante
par le bas, car l'action du médicament purgatif
sera contrariée par cette circonstance que les
humeurs tendent vers le haut. Pour les sujets déjà
malades, on attendra toujours l'époque de la
maturité, dans le cas d'affections chroniques,
tandis que, dans les maladies aiguës, il est possible
de faire une purgation au début, lorsque les
humeurs sont turgescentes; cependant, dans ce cas même,
il faut mettre beaucoup de prudence et de circonspection,
car, dans une maladie aiguë, il y a grand danger
de purger mal à propos, attendu que tous les
médicaments purgatifs ont des propriétés
chaudes, et que la fièvre, en tant que fièvre,
bien loin de réclamer l'emploi des desséchants
et des échauffants, exige par elle-même
tout ce qu'il y a de plus contraire, c'est-à-dire
l'administration des humectants et des refroidissants.
Aussi n'est-ce pas à cause de la chaleur brûlante
que nous administrons la purgation (car on sait que,
considérée en elle-même, cette chaleur
en éprouve du dommage), mais à cause des
humeurs qui la produisent; l'avantage retiré
de l'évacuation des humeurs nuisibles doit donc
être plus grand que le tort qu'on fait inévitablement
au corps, en donnant des médicaments purgatifs;
or cet avantage primera, si toute l'humeur nuisible
est évacuée sans causer des incommodités
; pour que cela puisse arriver, on examinera d'abord
si le malade est dans un état qui favorise une
pareille purgation; car ceux qui viennent d'éprouver
plusieurs indigestions, ou de prendre des aliments visqueux
ou épais, et aussi ceux qui ont les hypocondres
tendus et gonflés, ou démesurément
chauds et brûlants, ou chez lesquels il y a quelque
inflammation des viscères dans cette région,
ne se prêtent pas aux purgations. Il importe donc
que ces circonstances n'existent pas et que les humeurs
soient aussi coulantes que possible, c'est-à-dire
ténues et arrivées au plus faible degré
possible de viscosité; en outre, les conduits
par lesquels la purgation doit s'opérer doivent
être béants, car c'est justement cet état
que nous tâchons de produire par la préparation,
quand nous voulons purger. Mais, lorsque, dans les maladies
aiguës, nous voulons employer dès le début
un médicament purgatif, soit le premier jour,
soit à une époque qui ne dépasse
pas le second, lorsque les humeurs sont en turgescence,
il n'est pas possible de soumettre le malade à
une pareille préparation, à moins qu'on
n'ait le temps de donner à boire de l'eau miellée,
dans laquelle on a fait bouillir un peu d'hysope, d'origan,
d'origan de bouc, de thym, de pouliot, ou de quelque
médicament qui atténue de cette manière;
il est donc probable que nous aurons rarement besoin
de purger au début des maladies aiguës,
parce que les humeurs qui incommodent ne sont pas sou-vent
en turgescence au commencement, et que, même s'il
en était ainsi, le malade non-seulement se prêterait
mal à l'emploi de la purgation, mais ne nous
fournirait pas même un temps opportun pour l'y
préparer. Or, on dit que les humeurs sont turgescentes,
quand elles se trouvent dans un état de mouvement
plus ou moins violent, qu'elles sont en voie de transport
d'une partie à une autre, et qu'ainsi elles incommodent
le malade, en lui causant des agacements et des chatouillements
et en ne lui permettant pas de se tenir tranquille.
On évacuera donc ces humeurs, c'est-à-dire
celles qui sont en mouvement, en fluxion, en voie de
transport, tandis qu'on ne doit ni purger, ni mettre
en mouvement par quelque autre remède, celles
qui sont fixées dans une partie déterminée,
avant qu'elles ne soient arrivées à coction,
car c'est alors seulement que nous aurons la nature
pour auxiliaire, en opérant la déplétion;
en effet, on voit qu'après la coction elle sépare
les humeurs et repousse ce qu'il y a de superflu, et
c'est justement à celte époque que se
font les crises; mais, si la nature opère un
mouvement complet, nous n'avons nul besoin de médicaments
purgatifs, tandis que, si elle agit d'une manière
plus restreinte et plus faible, nous devons suppléer
nous-mêmes, à l'aide de ces médicaments,
à ce que son mouvement a d'incomplet. On doit
savoir que les transports des humeurs, tantôt
vers telle partie, tantôt vers telle autre, n'ont
lieu que rarement, et que le plus souvent elles restent
immobiles pendant tout le cours de la maladie, jusqu'à
sa solution, dans une seule partie, où elles
subissent aussi la coction. Si donc la maladie n'est
pas seulement aiguë, mais aussi accompagnée
d'une fièvre très violente, on doit craindre
de donner un médicament purgatif, surtout quand
on ne connaît pas la nature du malade, car quelques-uns
sont naturellement difficiles à purger, tandis
que d'autres éprouvent une purgation abondante
après avoir bu une petite quantité du
médicament. Si donc la fièvre n'est pas
forte et si vous connaissez par expérience la
nature du malade, vous aurez recours au médicament
purgatif et vous emploierez l'ellébore noir,
ou quelque autre médicament du même genre
: tel est, par exemple, celui qu'on prépare avec
la coloquinte et qu'on appelle habituellement sacré.
On le prépare de différentes manières;
mais celui où on a mis de l'ellébore,
sans qu'il y entre de la scammonée, est un excellent
médicament pour ceux qui, du reste, se trouvent
dans des conditions telles, qu'ils peuvent prendre un
purgatif. Après qu'on a pris le purgatif, il
est bon de boire la ptisane, comme Hippocrate le prescrit;
car le purgatif descend, il est vrai, immédiatement
au fond de l'estomac, parce qu'il est d'un petit volume,
cependant l'oesophage et toute la partie supérieure
de l'estomac en éprouvent un dommage assez considérable,
attendu que, pendant le passage, ces parties sont exposées
à l'action non seulement des qualités
du purgatif, mais aussi à celle de sa substance
qui s'y attache, pendant que le médicament les
traverse. Il est donc utile de prendre de la ptisane
passée après le purgatif, parce que cette
préparation a la propriété de déterger
et d'entraîner avec elle, vers le bas, ce qui
s'était attaché aux parties pendant le
passage, et qu'elle peut, en même temps, tempérer
et changer les propriétés du médicament
purgatif qui avaient pénétré dans
la substance même des parties. Pour cette raison
donc Hippocrate recommande de prendre la ptisane après
qu'on a bu le purgatif; mais, quand la purgation a déjà
commencé à s'effectuer, il ne veut plus
qu'on en donne, dans la crainte d'affaiblir l'activité
du purgatif.
24. DE COMBIEN DE MANIÈRES IL PEUT SE FAIRE QUE LE VENTRE
N'EXPULSE RIEN APRÈS L'ADMINISTRATION D'UN PURGATIF.
Volume
2, Livre 7, chap. 24 d'Oribase tiré de Galien.
Quelquefois le ventre n'expulse
rien après l'administration d'un purgatif, soit
à cause d'une disposition spéciale de
la nature du malade, soit parce que le purgatif a été
administré en trop petite quantité; souvent
aussi ce qui empêche la déplétion
de se produire, ce sont des matières fécales
dures, enclavées dans quelque partie de l'intestin
et qui auraient eu besoin d'être évacuées
à l'aide d'un lavement avant qu'on donnât
le médicament purgatif. Il peut arriver aussi
que le purgatif ne produit aucun effet, parce que la
nature a son activité tournée du côté
des urines. Si les médicaments purgatifs échouent,
quelques-uns, non-seulement ne causent aucun dommage,
niais se changent en nourriture, tandis que d'autres
se convertissent en agents de corruption et de mort.
25. DES INGRÉDIENTS
QU'ON
MÊLE AUX MÉDICAMENTS PURGATIFS. Volume 2, Livre
7, chap. 25 d'Oribase tiré de Galien
Comme tous les médicaments
purgatifs lèsent l'estomac, et surtout son orifice,
attendu qu'il est très abondamment pourvu de
nerfs et qu'il est doué d'une sensibilité
très-exquise, on a inventé d'y mêler
des substances odoriférantes, afin que le médicament
ne frappe pas tout seul et sans mélange l'orifice
de l'estomac. Les graines qu'on y ajoute doivent être
de telle sorte qu'elles soient capables d'amortir les
propriétés malfaisantes de ces médicaments
sans mettre obstacle à leur activité,
étant douées de vertus atténuantes
et incisives; elles doivent donc diviser les humeurs
épaisses, et ouvrir et aplanir les voies par
lesquelles ces humeurs sont évacuées.
Les médicaments purgatifs qu'on mêle ensemble
doivent aussi s'accorder entre eux et ne pas être
en antagonisme; or cet antagonisme a lieu, non pas lorsque,
par exemple, l'un d'eux évacue la bile tandis
que l'autre évacue la pituite (car ces deux humeurs
peuvent être évacuées simultanément),
mais lorsque l'un d'eux est de nature à opérer
immédiatement la déplétion, tandis
que l'autre ne donne lieu à la purgation que
longtemps après qu'il a été administré
: de cette manière, la déplétion
devient inégale, si on donne les deux médicaments
à la fois; or j'appelle une déplétion
inégale, quand une autre purgation commence à
l'instant où la première semble s'arrêter.
26. DES MÉDICAMENTS
PURGATIFS.
- TIRÉ DE RUFUS. TDM Volume 2, Livre 7, chap. 23 d'Oribase
tiré de Rufus.
Ne purgez pas tout individu dans
quelque état qu'il se trouve, ni dans toute saison,
ni par telle voie qui plaira le mieux; par exemple ne
purgez pas les gens sains et qui n'ont aucune superfluité
dans le corps ; quel avantage y a-t-il, en effet, à
détacher quelque chose qui a de l'affinité
avec l'économie ? mais, de plus, vous produirez
une évacuation accompagnée de souffrances
; car on tiraille nécessairement en sens contraire,
la matière étant naturellement bonne et
le médicament voulant agir. Les évacuations
seront donc peu considérables, et, malgré
cela, donneront lieu à des défaillances,
à des affaiblissements, ou à d'autres
incommodités ; car, quelque petite que soit l'évacuation,
vous enlèverez toujours quelque chose qui a de
l'affinité avec l'économie. Si, au contraire,
l'individu a un peu de pituite, ou de bile, ou quelque
autre humeur en surabondance, il est facile de le purger,
car l'expulsion se fait par les deux mobiles à
la fois, la nature et le médicament; et celui
qu'on purge se sent de plus en plus à son aise,
attendu que les matières expulsées le
gênaient. On évitera aussi de purger ceux
qui ont de l'embonpoint ou une complexion phtisique;
car, chez les premiers, l'embonpoint se fond rapidement,
et chez les seconds toute purgation, quelque petite
qu'elle soit, est nuisible à cause de la maigreur.
On se gardera encore des transitions subites des saisons,
ainsi que du coucher et du lever des constellations,
qui causent de grands changements ; je veux parler d'Arcture,
des Pléiades, des solstices, des équinoxes
et de la Canicule; en effet, avant que tout soit revenu
à son état habituel, il ne convient pas
de mettre en mouvement les matières. On prendra
aussi des précautions pour les purgations par
le bas, en cas d'hémorroïdes, ou de flux
sanguin chez les femmes, ainsi que chez les individus
affectés de ténesme, de diarrhée,
d'ulcères aux intestins, ou qui ont habituellement
le ventre très resserré. S'il y a quelque
nécessité de purger ces derniers, faites-le
après avoir donné un lavement. Telles
sont les circonstances qu'on doit éviter pour
les purgations par le bas; pour les purgations par le
haut, on se gardera, eu égard aux maladies, de
la toux, de l'asthme et des ulcères internes,
qui sont la phtisie du poumon, ou la fonte du foie ;
on, prendra aussi des pré-cautions pour ceux
qui ont craché autrefois du sang, quoiqu'ils
semblent se porter mieux pour le moment (car il y a
danger de rupture d'un vaisseau), pour ceux qui sont
habituellement incommodés de quelque maladie
de la luette, de la gorge, ou du cou; car toutes ces
circonstances sont des obstacles pour les purgations
par le haut, et surtout pour l'ellébore; enfin
on se défiera encore des cardialgies et de l'état
de ceux qui ne peuvent ni retenir leurs aliments, ni
les rejeter par le vomissement. Quant à la forme
extérieure du corps, on prendra, pour les purgations
par le haut, des précautions pour ceux qui ont
le cou long et effilé et le dos resserré,
à cause de sa voussure; car, en général,
ces gens-là sont enclins aux abcès de
la poitrine, à la dyspnée, à la
toux, en sorte qu'il survient, pendant les vomissements
intenses, des suffocations et du crachement de sang.
Ni les gens qui ont beaucoup d'embonpoint, ni ceux qui
sont très-pâles, ou très-fortement
colorés, ni les gens peureux ou pusillanimes,
ne supportent facilement non plus les purgations par
le haut; car, avant tout, il faut une âme forte;
pour cette raison donc, les femmes, les enfants et les
vieillards ne se prêtent pas très bien
aux purgations par le haut; en effet tous ces gens sont
peureux. En outre, les femmes courent aussi le risque
d'être prises de spasme de l'utérus, et
par là de privation de la voix et du sentiment.
Purgez les pituiteux par le haut et les bilieux par
le bas, surtout ceux chez qui il faut évacuer
la bile noire; dans l'automne et au printemps; on purge
par la voie qui semble devoir être la plus avantageuse;
mais, si, en hiver ou en été, il est nécessaire
de produire quelque évacuation, on purgera par
le bas en hiver, et par le haut en' été;
purgez les uns dans la direction opposée à
celle où les humeurs se portent d'elles-mêmes
; car souvent il n'est pas trop mauvais d'opérer
une révulsion; les autres, au contraire, dans
la même direction, surtout si le transport des
humeurs s'opère par une voie avantageuse et s'il
est modéré; dans les autres cas, on suivra
la méthode contraire. La meilleure saison pour
les purgations est le printemps, ensuite l'automne;
en effet, vers le coucher des Pléiades, cette
saison prend souvent un caractère semblable à
celui du printemps ; il s'ensuit que certaines gens
ne sont pas difficiles à purger à cette
époque et expulsent comme il faut les superfluités
de l'été, avant que l'hiver ne survienne
pour les coaguler. En effet la raison pour laquelle
les purgations du printemps sont les meilleures, c'est
qu'elles chassent les superfluités qui se sont
formées peu à peu en hiver, avant que
la chaleur ne s'en empare pour les mettre en mouvement
et les troubler. Les signes suivants indiquent la nécessité
d'une purgation : vertige, pesanteur et douleurs subites
de la tête, tintements d'oreilles continuels ;
obscurcissement de la vue, dureté de l'ouïe,
engourdissement d'un des autres sens, tendance au sommeil,
défaut d'appétit, goût amer ou autre
goût quelconque désagréable après
avoir bu quelque chose de bon, ennui sans aucune raison,
affaiblissement de la mémoire quand on l'avait
bonne jusque-là, palpitations se manifestant
çà et là dans le corps, rêves
fréquents qui effrayent et troublent, un certain
sentiment de frisson à la peau, pesanteur aux
lombes, coliques, n'avoir point d'appétence pour
les aliments, ou, si on en a, ne pas digérer
ceux qu'on a pris, ou, si on les digère, ne tirer
aucun profit des substances qu'on a désirées;
évacuations alvines hors de proportion avec les
aliments qu'on a pris, diminution de l'urine, nausées,
humidité de la bouche, couleur bilieuse chez
les uns, pituiteuse chez les autres, noirâtre
chez d'autres encore, en opposition avec la constitution
habituelle de l'individu ; affaiblissement, gêne
de la respiration et difficulté de se mouvoir,
quoique le corps semble dans un état irréprochable;
enfin tous les petits abcès, les ulcères
spontanés, les rugosités et les taches
de rousseur qui surgissent à la peau. Tous ces
signes et les autres indices qu'on pourrait encore découvrir
et qui décèlent la surabondance ou le
mauvais état des humeurs, engagent à provoquer
une purgation; si on la diffère, on aura à
traiter, non pas une maladie qui n'est pas encore tout
à fait sur le point de se déclarer, mais
une maladie déjà formée; or il
vaut en vérité beaucoup mieux pré-venir,
si l'on peut, les incommodités par tous les moyens
possibles. Nous dirons, à propos de chaque médicament,
dans quelle maladie il convient. On fera observer un
régime frugal à ceux qu'on veut purger
par le bas; ce régime ne doit cependant pas être
trop rigoureux, mais tel, qu'on digère rapidement
les aliments accordés, et qu'il ne se forme pas
beaucoup de matières fécales dans les
intestins, car cette circonstance produit des douleurs
au ventre et des vomissements, quand le médicament
empêche ces matières de passer, en les
attirant à lui : pour ce motif, il n'est pas
hors de saison, avant de donner le purgatif, de relâcher
le ventre à l'aide de la mauve, de la bette,
de la patience, du bouillon de coquillages, ou de quelque
autre moyen analogue du genre de ceux que chacun, suivant
sa convenance, a inventés en grand nombre pour
cet usage, sinon on provoque une évacuation à
l'aide d'un lavement doux. Il convient aussi, chez certains
sujets qui sont plus ou moins pituiteux, d'évacuer
complètement les aliments qui ont été
pris la veille; il n'est pas mauvais non plus qu'ils
vomissent avant la purgation; car il n'y a rien qui
soit un obstacle plus réel à la liberté
du ventre qu'un excès de pituite; pour cette
raison, je ne loue pas non plus sans restriction les
purgations par le bas chez les pituiteux; cependant,
il y a des circonstances où la maladie exige
qu'on agisse ainsi : en effet, les purgations par le
bas réussissent contre la pesanteur de tête,
les douleurs des yeux, dans certaines épilepsies,
et dans certaines espèces de vertiges, dans la
plupart des cas d'hydropisie ou de goutte, ainsi que
dans d'autre maladies; enfin, la purgation par le bas
est nécessaire chez les individus qui auraient
besoin d'être purgés par le haut, mais
qui ne peuvent l'être, à cause des circonstances
énumérées plus haut, même
quand ils sont pituiteux; seulement il faut les y pré-parer
par le régime; je nommerai [plus bas] les médicaments
qui con-viennent aux pituiteux, qui ont besoin d'une
purgation par le bas. Mais, comme le passage des aliments
est plus ou moins facile, en raison de la disposition
du canal intestinal, il convient que le médecin
qui veut purger comme il faut par le haut et par le
bas, soit au courant de ces détails; en effet,
si l'estomac de l'homme est naturellement conformé,
il a son orifice tourné en bas, du côté
droit, vers l'épine du dos, et plus large que
chez les autres animaux; à partir de ce point,
l'intestin devient plus étroit, après
cela il se cache sous le mésentère jusqu'au
commencement du colon. Quand cette conformation existe,
on se débarrasse facilement des aliments; mais,
quand l'orifice de l'estomac est tourné vers
le haut, ou plus étroit qu'il ne le faut, que
cette disposition soit congéniale, ou qu'elle
tienne à une inflammation, ou à la pression
exercée par des tumeurs dures qui ne suppurent
pas, ou enfin à quelque autre cause d'obstruction,
les aliments descendent difficilement, et rejaillissent
facilement. Les sujets chez lesquels cette conformation
est congéniale présentent les symptômes
suivants : ils sont toujours prompts à vomir,
mais le passage à travers les intestins est pénible,
et ils sentent que les aliments restent longtemps dans
l'estomac ; les flatuosités s'échappent
plu-tôt par le haut que par le bas, et les parties
situées au-dessus du nombril sont beaucoup plus
saillantes que dans l'état normal : on se gardera
donc de les purger par le bas. Ceux qui ont l'orifice
de l'estomac étroit par suite de maladie, présentent,
il est vrai, les mêmes symptômes, mais,
quand les maladies se résolvent par l'effet du
temps, les symptômes disparaissent aussi ; les
malades ne présentent donc pas toujours les mêmes
phénomènes par rapport à la digestion,
aux éructations et aux selles, et ne se trouvent
pas non plus en tout temps dans la même dis-position
par rapport aux purgations par le bas. Ce que nous avons
dit de l'intestin supérieur s'applique également
à l'intestin inférieur; en effet, si l'intestin
inférieur est naturellement conformé,
il est large à son origine, mais il se rétrécit
à sa terminaison, surtout au côté
gauche, à l'endroit où il est appliqué
contre la rate. Là où cet intestin commence,
s'adapte l'appendice qu'on appelle caecum; cet appendice
est situé dans le flanc droit; à son origine
il est large, mais il se rétrécit toujours
de plus en plus, et à son extrémité
il est borgne. S'il arrive aussi à cet appendice
d'être moins largement ouvert qu'il ne convient,
que ce soit congénialement, ou par l'effet d'une
maladie, les aliments descendent nécessairement,
il est vrai, assez rapidement des parties supérieures,
mais, arrivés au caecum, ils s'arrêtent
et causent des coliques, des flatuosité,, des
borborygmes et de la pesanteur, jusqu'à ce qu'ils
tombent peu à peu dans le colon; à partir
de ce point, ils s'acheminent déjà avec
plus de facilité pour être expulsés
par les selles. Dans ce cas, comme pour l'intestin supérieur,
la conformation congéniale produit toujours les
mêmes symptômes, tandis que celle qui tient
à une maladie présente une gravité
proportionnelle à l'accroissement ou à
la résolution de cette maladie; on se tiendra
donc toujours en garde contre la conformation congéniale;
mais, pour celle qui tient à une maladie, on
proportionnera ses précautions au degré
d'obstacle qu'elle cause; en effet, chez les gens dont
nous venons de parler, le danger est plus grand que
chez ceux dont l'orifice [inférieur] de l'estomac
ne laisse pas passer comme il faut les superfluités
; car elles doivent, en rebroussant chemin, parcourir
un plus grand espace et traverser des parties qui ne
sont pas habituées au vomissement. Quand l'orifice
du colon ne laisse pas passer les aliments, on éprouve
les douleurs lés plus fortes au flanc droit;
car c'est à partir de ce point que le colon se
tourne vers le côté gauche, en passant
au-dessus du nombril; au côté gauche, il
se retourne vers le bas et se cache sous les intestins
grêles : il est donc naturel que les douleurs
se révèlent surtout au point indiqué.
Nous parlerons spécialement des purgations par
le haut, surtout de celle par l'ellébore, ainsi
que du régime et de tout le reste. Avant tout,
le médecin s'enquerra de la localité d'où
il peut tirer les médicaments de qualité
supérieure, car les meilleurs ne croissent pas
indifféremment partout; ainsi la scammonée
la plus renommée croît à Colophon
dans l'Ionie, et sous l'Olympe de Mysie; la meilleure
thapsie en Sicile et en Libye; le meilleur elaterium,
c'est-à-dire le suc de la concombre [sauvage],
vient de Cyrène; la meilleure agourre, d'Athènes
et de l'Isthme; les meilleures baies de garou croissent
[à Gnide,] aux environs de la Carie, circonstance
à laquelle ce médicament doit aussi son
nom de baies de Gnide, parce que les Asclépiades
de Gnide l'employaient surtout en grande quantité
; les deux espèces d'ellébore croissent,
en qualité supérieure, sur l'Oeta et à
Anticyre ; le noir n'est pas trop mauvais non pins dans
le pays de Lynceste et au delà du lac Ascanien,
ainsi que sur le Parnasse et dans l'Etolie; mais le
blanc est très-mauvais, de quelque autre endroit
qu'il vienne; or il croît aussi dans l'Arménie
et près du fleuve Sangarius, là où
demeurent actuellement les Galates. On doit prendre
en considération et l'endroit où croissent
les médicaments de qualité supérieure,
et la manière de les couper; car c'est aussi
un point important que de les couper en temps opportun
et de les bien préparer; mais ce sujet est traité
à part dans les livres sur l'art du rhizotome;
pour le marnent, il suffit d'exhorter le médecin
à ne rien négliger de ce qui a rapport
à l'application. Il m'est impossible d'indiquer
pour les purgatifs une dose qui soit également
bonne pour moi, pour vous, ainsi que pour un autre;
car il n'existe nulle part une telle mesure, mais on
doit connaître la dose pour chacun en particulier;
car tout, le corps, le régime, la saison, la
nature du canal intestinal, la force du médicament,
la puissance des humeurs, produisent une grande différence
par rapport à la facilité ou à
la difficulté de la purgation, et peuvent faire
aussi qu'une dose égale ou supérieure
du médicament ne produise aucune purgation, tandis
qu'une dose plus petite suffit chez certains individus
pour en provoquer une. On indiquera donc, pour ainsi
dire, la dose [moyenne] pour le plus grand nombre; de
cette manière, je pense, on ne restera pas en
deçà de ce qui est nécessaire,
et on ne dépassera pas non plus cette mesure;
si parfois on observe une grande différence,
la faute n'en sera pas à moi, mais c'est la nature
propre de l'individu qui sera en désaccord. Nous
avons donc exposé ce qu'il con-venait de dire
préalablement sur l'art des médicaments
purgatifs en général; nous ferons connaître
plus tard par quelle voie chaque médicament purge,
et quelles sont les matières qu'il évacue;
dans ce cas, il suffira encore, pour chaque médicament,
de dire ce qui a lieu habituellement; car toutes ces
choses ne se rapportent qu'à un très-petit
nombre de gens, puisque l'ellébore même,
qui passe pour purger le plus manifestement par le haut,
provoque, en outre, chez quelques-uns, un mouvement
par le bas; car les médicaments qui purgent par
le bas produisent même des vomissements chez un
très grand nombre d'individus, surtout chez ceux
dont le pylore ne permet pas un écoulement facile.
Une quantité trop grande, ou trop petite du médicament
tend aussi à produire le vomissement; dans le
premier cas, en effet, le médicament, en attirant
une grande quantité de matières à
la fois, en laisse déborder une partie par le
haut, et, dans le second, il ne saurait pénétrer
jusqu'en bas, à cause de la faiblesse de la dose.
La faiblesse de l'orifice [supérieur] de l'estomac,
l'habitude de vomir, l'accumulation de la pituite, la
circonstance qu'il se détache un rameau de la
vésicule biliaire vers l'estomac, toutes ces
circonstances, dis-je, produisent des vomissements,
quand on a donné un médicament purgatif
: il suffit, pour cette raison, de dire, à propos
de purgatifs, ce qui a lieu le plus souvent. Les médicaments
suivants purgent par le bas: l'ellébore noir,
aussi bien les racines que la graine, la baie de Gnide,
l'euphorbe à feuilles de genévrier, le
sureau, la mercuriale, la fougerole, l'iris, le concombre
sauvage, la frankénie poudreuse, appelée
aussi empetron; le péplion, appelé encore
pourpier; l'omblette, que d'autres nomment figuier,
d'autres encore pavot écumeux; l'aloès,
l'euphorbe épineux, le cirsion étoilé,
la clématite, la scabieuse ambrosioïde,
la vigne sauvage et la vigne de Chiron, appelée
aussi bryone; le thym, l'agourre, la marjolaine, l'origan
ou conile, le pavot des côtes, lequel est muni
de cornes; le pavot à massue, la racine de concombre
sauvage, le tournesol, le sésamoide blanc, le
tithymalle réveille-matin, le tithymalle petit
cyprès et le petit tithymalle, qu'on appelle
aussi tithymalle des côtes, l'olivier nain, le
chou marin, l'épurge, l'agaric, l'euphorbe, la
lampette, le carthame et la scammonée : outre
ces médicaments, il y a encore la battiture de
cuivre et les fleurs de cuivre. Les médicaments
suivants purgent par le haut : l'ellébore blanc,
le grand sésamoide, que les habitants d'Anticyre
appellent ellébore d'Anticyre; il se rapproche
beaucoup du séneçon par la forme; la staphisaigre,
le narcisse, le genêt d'Espagne, l'oignon d'ornithogale
penché, le chardon argenté, la racine,
la graine et l'écorce du concombre cultivé,
la graine de raifort, les feuilles de laurier, et en
outre le vert-de-gris et le vitriol bleu. Les médicaments
suivants ont une action douteuse : le daphné
des Alpes, que d'autres appellent eupétale; la
thapsie, le suc de concombre sauvage, le ricin, que
quelques-uns appellent séseli de Chypre, et les
Égyptiens kiki, les grandes espèces de
tithymalle, c'est-à-dire le tithymalle des haies,
qui s'appelle, dans le langage des herboristes, tithymalle
mâle, tandis qu'on donne le nom de tithymalle
femelle à une autre espèce, appelée
aussi tithymalle myrte cette dernière porte un
fruit ressemblant à la noix; puis le tithymalle
à larges feuilles : ces tithymalles purgent par
le haut et par le bas; il en est de même encore
pour le tithymalle poire, dont le port est semblable
à celui du tithymalle réveille-matin,
seulement sa racine ressemble au fruit du poirier. Nous
allons parler maintenant de tous ces médicaments
et dire quelles sont les matières que chacun
expulse, dans quelles maladies il convient, et quelle
est la dose qu'on peut déterminer avec un degré
suffisant d'exactitude.
- L'ellébore noir purge
par le bas des matières bilieuses et pituiteuses;
il faut en donner à ceux qui ont les nerfs malades,
ainsi qu'aux aliénés. On dit que Mélampus,
le fils d'Amythaon, s'en servit pour purger les filles
de Proetus, qui étaient aliénées,
circonstance à laquelle ce médicament
doit aussi son nom de mélampodion. Hippocrate
donnait aussi l'ellébore, quelquefois seul, d'autres
fois uni au péplion, aux pleurétiques,
dont les douleurs avaient une tendance vers le bas,
et il s'en louait beaucoup. On peut aussi provoquer
une purgation convenable, en le mêlant au suc
de scammonée. On donnera l'ellébore seul,
toutes les fois qu'on désire purger doucement,
car son efficacité n'est pas en rapport avec
son nom. Il suffit de piler les racines desséchées
et de mettre deux drachmes de la poudre dans du vin
d'un goût sucré, ou dans de l'oxymel; on
les prend aussi cuites dans de la bouillie de lentilles,
ou dans la ptisane, ou dans du bouillon de poulet; on
mêlera trois oboles de scammonée à
chaque drachme d'ellébore. La graine de cette
plante ressemble à celle du carthame; on l'appelle
aussi sésamoïde; elle expulse les mêmes
matières que les racines, mais plus fortement.
La dose des graines ne doit pas non plus rester beaucoup
au-dessous de deux drachmes; on les donne dans de l'eau
miellée. Il est préférable de mêler,
aussi bien aux racines qu'à la graine, de l'anis,
du persil, du daucus, ou un autre ingrédient
analogue, comme assaisonnement.
- La baie de Cnide purge par
le bas la pituite, la bile et beaucoup de matières
aqueuses; ce médicament est brûlant et
purge très-rapidement à la dose de trente
baies; si l'on veut purger plus doucement, on en donne
vingt. On ôtera l'enveloppe des baies, et on donnera
l'intérieur, après l'avoir broyé
avec du miel et de l'alphiton; on en boit aussi dans
de l'eau miellée ; il vaut mieux cependant les
prendre avec du vin. Après en avoir bu, on avalera
un peu d'huile, afin que le pharynx ne soit pas brûlé.
On prendra aussi des baies pilées pétries
avec du miel bouilli. Il semble que ce médicament
est plus profitable aux femmes qu'aux hommes; car, outre
son action purgative, il pousse aussi quelquefois vers
la matrice. Il fait aussi, d'une autre manière,
du bien à la nature; pour cette raison, on le
donne non sans avantage aux hydropiques. à ceux
qui ont le ventre plus ou moins froid, aux épileptiques,
aux paralytiques et aux goutteux; il dessèche
encore les fluxions de la tête : c'est la semence
du enéoron; on donne encore à cet arbrisseau
les noms de cnestron (garou), de lin et de thymelée.
Ses feuilles produisent le même effet à
un degré plus faible; on les donne sèches
à la dose d'un oxybaphe avec du miel; elles expulsent
plus spécialement encore les matières
aqueuses. L'autre enéoron, que les Athéniens
emploient dans les mystères, ne ressemble, ni
par son fruit, ni sous aucun autre rapport, à
celui dont nous venons de parler, mais il relâche
doucement.
- L'euphorbe à feuilles
de genévrier purge la pituite et la bile, quelquefois
aussi les matières aqueuses; il convient aux
mêmes maladies que la baie de Guide et en général
quand on veut évacuer la surabondance des humeurs
par le bas. La partie la plus active de cette plante
est le suc, vient ensuite la graine; la racine occupe
le troisième rang. Il suffit de boire trois oboles
du suc dans de l'eau miellée, ou une drachme
de la graine, ou de la racine la quantité double
de celle de la graine.
-Il y a deux espèces de
sureau, l'une arborescente, l'autre peu élevée;
toutes les deux purgent par le bas les matières
pituiteuses et aqueuses. Leur vertu médicinale
n'est pas chaude comme celle de la plupart des médicaments
purgatifs, mais plutôt légèrement
froide. On donnera, à plusieurs reprises, la
racine cuite dans du vin aux hydropiques; car elle relâche.
Si l'on mange les jeunes tiges bouillies en guise de
légumes, on sera légèrement purgé,
mais elles ne sont pas du tout agréables à
manger. Les feuilles et les jeunes pousses de cette
plante, bouillies et appliquées en cataplasme
sur tout le ventre, produisent des évacuations.
- La mercuriale mâle aussi
bien que la mercuriale femelle se rapprochent beaucoup
du sureau par leur manière de purger; mais elles
agissent plutôt sur les matières bilieuses;
si donc on mange les jeunes feuilles bouillies, elles
chassent suffisamment les excréments, et attirent
en même temps un peu les matières qui étaient
dans le voisinage. La décoction mêlée
à du vin agit plus efficacement. Ce médicament
convient aux gens qui ont besoin d'être purgés
tous les jours et qui ont encore la fièvre, mais
chez lesquels les aliments ne passent pas, ainsi qu'aux
vieillards, aux enfants et aux femmes, et sur-tout aux
femmes; car, outre que la mercuriale provoque doucement
des selles, elle semble être favorable aussi à
la fécondité.
- La fougerole expulse la pituite,
la bile et les matières aqueuses; on donnera
deux drachmes de la racine râpée dans de
l'eau miellée, ou dans de l'eau pure. Il n'est
pas du tout mauvais non plus de la râper sur du
poisson salé, qu'on mange ensuite avant le déjeuner.
La racine cuite dans de la ptisane, ou dans du bouillon
de poulet, purge aussi sans incommoder, et ce sera une
purgation très-convenable, qui est, avant tout,
suffisante pour les jeunes gens; mais, contre les maladies,
il ne sert pas à grand chose de purger de cette
façon.
- L'iris expulse les matières
pituiteuses, celles qui sont légèrement
muqueuses et les bilieuses; si l'on en donne plus qu'il
n'en faut, il chasse aussi des matières sanguinolentes
et noires : il suffit donc d'en prendre une cyathe pour
produire une purgation modérée, mais il
est très difficilement supporté par l'orifice
de l'estomac. On donnera trois drachmes de la racine
dans de l'eau miellée à ceux qui souffrent
de la rate, qui ont une fièvre quotidienne, ou
quarte, qui respirent difficilement, ou qui toussent,
ainsi que dans les affections du colon.
- Le concombre sauvage purge
la pituite et la bile pure; on donnera une drachme de
la pulpe dans de l'eau miellée; si l'on veut
provoquer une purgation plus douce, on ôtera les
graines du concombre, on versera dans l'écorce
du vin d'un goût sucré, ensuite on fera
cuire le tout sur de la cendre molle, jusqu'à
ce que la préparation soit suffisamment chaude.
On donnera cette préparation à boire à
ceux qu'on ne doit pas purger trop fortement, ainsi
qu'aux gens chez lesquels il paraît des efflorescences
livides sur la peau. En général, le concombre
sauvage convient contre l'asthme, les douleurs de côté,
les maux dé tête de longue durée,
le vertige et l'obscurcissement de la vue. Il est très
amer, il est vrai, mais, par son action secondaire,
il aiguise l'appétit. - La frankénic poudreuse
expulse des matières aqueuses, pituiteuses et
bilieuses; il suffit de boire deux drachmes de poudre
dans de l'eau miellée.
- L'omblette et le péplium
se ressemblent beaucoup sous le rapport de la forme.
La graine, prise à la dose d'un oxybaphe dans
de l'eau miellée, purge par le bas la pituite
et la bile, et en même temps les flatuosités:
les feuilles, lorsquelles sont desséchées,
purgent doucement aussi.
- L'aloès ne purge pas
rapidement, mais il agit d'une manière très-favorable
sur l'orifice de l'estomac au même degré
que l'absinthe; il suffit d'en boire deux drachmes avec
de l'eau miellée. II chasse la pituite et la
bile. Il est bon aussi d'en prendre chaque jour après
le repas; car il traverse les intestins sans entraîner
les aliments; en outre il n'excite pas de soif non plus
et aiguise l'appétit. On le broie dans du suc
de chou, ou de patience, et on en fait des pilules,
de la grandeur d'un pois chiche, ou de celle d'une fève;
on en prendra deux ou trois, quand on aura besoin d'une
évacuation. Il convient aussi d'en faire des
pilules avec de la résine ou du miel cuit, surtout
à l'usage de ceux qui ont l'amertume en horreur.
On agira bien encore, en le mêlant à la
scammonée, ou à quelque autre des médicaments
qui nuisent à l'orifice de l'estomac. En fait
de maladies, il est utile contre la fièvre quotidienne,
la jaunisse, les douleurs du foie, le dégoût
des aliments, la mauvaise digestion; il n'est pas moins
profitable aux femmes qu'aux hommes. S'il n'avait pas
une amertume aussi prononcée, il conviendrait
également très-bien aux enfants; mais
les enfants ne veulent pas prendre des substances aussi
amères.
- L'euphorbe épineux et
le cirsium étoilé purgent la pituite,
la bile et l'eau; mais le dernier expulse surtout les
matières aqueuses. On en donnera dans l'épilepsie,
dans la paralysie des bras ou des jambes, dans l'affaiblissement
de la mémoire, quand la respiration est embarrassée,
dans l'orthopnée, et aussi quand diverses parties
du corps sont continuellement le siège de palpitations;
si l'on veut produire une purgation assez forte, on
donnera, dans de l'eau miellée, trois oboles
du suc préparé seul, et une drachme, si
l'on veut se servir de celui qu'on prépare avec
de l'ers. Les feuilles et la racine desséchées
et pilées purgent moins fortement; cependant
elles purgent aussi prises à la dose de deux
drachmes dans de l'eau miellée. Sous tous les
rapports, le cirsium est plus efficace que l'euphorbe
épineux; pour cette raison, on en donnera moins.
- La clématite purge la
pituite et la bile; on administrera une drachme du fruit
dans de l'eau miellée.
- La scabieuse ambrosioïde
expulse les matières bilieuses ; on donnera la
racine à manger, car il n'y a que cette partie
qui purge; elle est ronde et ressemble beaucoup à
une petite pomme.
- Les vignes purgent par le bas
les matières bilieuses et aqueuses; il suffit
d'en prendre deux drachmes. La meilleure manière
de s'en servir, c'est de donner la vigne de Chiron contre
l'épilepsie et l'aliénation mentale, et
la vigne sauvage contre l'hydropisie.
- Le thym, l'agourre, la marjolaine
et l'origan ou conile purgent les matières noires
et les matières pituiteuses; mais, sous tous
les rapports, l'agourre l'emporte de beaucoup sur les
autres médicaments; on la pile et on la crible
pour en donner six drachmes, ou plus encore, avec du
vin d'un goût sucré; car elle purge avantageusement;
et, si l'on veut prendre son dîner après,
cela n'empêche en aucune façon qu'on ne
soit modérément purgé. On prépare
les purgations du matin avec de l'oxymel, en y mêlant
du sel. L'agourre convient à ceux qui sont incommodés
par les flatuosités, aux hypocondriaques, à
ceux qui digèrent mal, qui ont de la pesanteur
au foie, ainsi qu'aux individus qui respirent difficilement.
Un oxybaphe de la feuille de thym avec du miel expulse
aussi, il est vrai, les matières noires, niais
cette dose chasse en plus grande quantité les
matières pituiteuses; on donnera le thym aux
asthmatiques, à ceux qui toussent depuis longtemps
et aux gens qui ont des matières épaisses
dans le ventre. Quatre drachmes de marjolaine sèche
en poudre dans de l'oxymel, et administrées avec
du sel, produisent le même effet; il en est de
même encore pour l'origan ; mais il faut le dessécher
et en donner un oxybaphe dans de l'eau miellée.
- Les pavots purgent doucement
par le bas; il suffit de prendre, dans de l'eau miellée,
un oxybaphe de la graine de l'un ou de l'autre.
- La racine de concombre (sauvage]
prise en boisson convient aux hydropiques; elle purge
la pituite et la bile; trois oboles du suc de la racine,
une dose triple du suc de l'écorce, suffisent;
quant au suc du concombre lui-même, j'en déterminerai
un peu plus tard la dose.
- Le tournesol purge la pituite
et la bile; il suffit d'en faire bouillir une botte
de moyenne grandeur, et de boire cette eau mêlée
à du vin.
- Le sésamoïde blanc
chasse aussi la pituite et la bile; la dose de la graine
est d'un demi-oxybaphe.
- Le tithymalle réveille-matin
est le plus faible des tithymalles ; cependant il chasse
aussi par le bas les matières bilieuses et pituiteuses,
qu'on en donne le suc, ou la graine, ou les feuilles
; mais, dans tous les tithymalles, le suc est la partie
la plus efficace ; vient ensuite la graine, et en troisième
lieu la feuille Il suffit donc de donner une drachme
du suc, et de proportionner la dose des autres parties
à leur efficacité. Le tithymalle petit
cyprès purge aussi les matières semblables,
mais d'une manière plus active; en sorte qu'il
suffit d'en administrer une dose faible. Le petit tithymalle
est la meilleure espèce; si on en laisse tomber
goutte à goutte le suc sur une figue sèche
et qu'on donne cette figue, elle purge convenablement;
les feuilles desséchées, réduites
en poudre par la trituration, et jetées dans
de l'eau miellée à la dose d'un demi-oxybaphe,
sont également efficaces.
- L'olivier nain purge la pituite
et la bile; on prendra les feuilles pour les triturer
et les donner pétries avec du miel cuit, car
elles excitent des picotements très prononcés.
Quelques médecins y mêlent de l'absinthe
et en forment des pilules : deux drachmes constituent
une dose suffisante.
- On mange le chou marin bouilli
et assaisonné comme tout autre légume;
mais il est très nuisible à l'orifice
de l'estomac et cause facilement des évacuations
déréglées.
- Dix graines de l'épurge
suffisent pour purger; elles ont un goût sucré
et évacuent des matières bilieuses et
aqueuses en abondance. Trois oboles du suc fondu dans
de l'eau miellée sont une dose convenable; les
feuilles, bouillies avec du bouillon de poulet, évacuent
aussi les mêmes matières, mais à
un degré moins prononcé.
- L'agaric purge la pituite et
la bile, mais pas très violemment; il est très
bon pour le foie, la rate, le pou-mon et contre ha difficulté
de la respiration, les éructations acides, la
goutte, ha pesanteur de tête, le vertige et l'épilepsie,
ainsi que contre les accidents hystériques des
femmes : dans tous ces cas, l'agaric est éminemment
utile. On le donne en pondre, à la dose de deux
drachmes, dans de l'eau miellée, ou de l'oxymel.
- L'euphorbe purge des matières
aqueuses et bilieuses en abondance; il est le plus violent
et le plus brûlant des médicaments purgatifs
que je connaisse; pour cette raison, il convient dans
l'hydropisie et dans les maladies du colon et aussi
à ceux qui ont le ventre plus ou moins froid;
chez les autres, il produit des évacuations très
déréglées et il cause de la soif.
On y mêlera des graines de persil, de daucus,
d'anis, de céleri et de tordylium; car ces ingrédients
adoucissent ce qu'il a de désagréable,
et combattent en partie sa violence trop exagérée,
en le détournant vers la vessie. Dans l'orthopnée
et la dyspnée, on retire un certain avantage
de l'euphorbe pris en boisson. On en boit trois oboles
dans de l'eau miellée, en y mêlant une
quantité égale de quelqu'une des graines
susdites.
- La lampette purge la pituite
et la bile; on donne deux drachmes de la graine. D'autres
donnent le suc des feuilles dans de l'eau miellée.
- Le carthame purge la pituite
et la bile, mais pas à un degré très
prononcé. On triture la graine, afin d'en exprimer
le suc, qu'on mêle à du bouillon de poulet
pour le faire avaler. D'autres y mêlent de l'anis,
du miel, ou des amandes, et en font des pilules qui
conviennent aux malades affectés de jaunisse.
Quatre drachmes constituent une dose suffisante. II
est à ma connaissance que les médecins
de la Carie préparent avec le carthame un petit
lait destiné à purger; mais nous traiterons
à part de tout ce qu'il y a à dire sur
le lait.
- La scammonée ne le cède
à aucun des autres médicaments purgatifs,
ni sous le rapport de la rapidité, ni sous celui
de l'activité; mais il pro-duit de la cardialgie,
a une mauvaise odeur, est désagréable
et cause une soif très-vive : ce n'est donc pas
à tort que quelques médecins, avant de
le donner, y mêlent de l'aloès, d'autres
du thym et du sel, d'autres encore des graines odoriférantes.
Ce médicament ne conviendra donc pas à
ceux qui ont le ventre fortement échauffé,
ou l'orifice de l'estomac faible, ni à ceux qui
sont menacés de colliquation, ni même aux
hydropiques; car l'hydropisie est aussi une maladie
caractérisée par une colliquation; mais
la scammonée est plutôt utile à
ceux qui sont affectés de jaunisse, de maux de
tête, de léthargus, de fièvre quarte
ou quotidienne, et aussi quand il s'élève
sous la peau des furoncles crus; enfin contre les douleurs
des yeux et les douleurs de côté plus ou
moins prolongées. Elle chasse très-activement
la pituite et la bile pure, si on la donne à
la dose d'une drachme tout au plus ; si l'on veut évacuer
plus doucement, on diminuera d'autant la dose qu'on
voudra amoindrir l'évacuation, et on se servira
surtout de la racine, car cette partie est beaucoup
plus faible que le suc : si donc on en donne deux drachmes,
ce sera une dose modérée.
- La battiture de cuivre chasse
les matières aqueuses; il semble [donc] qu'elle
convient contre l'hydropisie. Il suffit d'en prendre
deux drachmes, dont on forme des pilules avec du miel
cuit, ou de la donner à boire avec de l'eau miellée.
Les fleurs de cuivre chassent les matières épaisses
et pituiteuses; quatre oboles avec de l'eau miellée
sont une dose suffisante.
Tels sont donc les médicaments
purgatifs que je connais ; cependant je me plais à
croire qu'il en existe encore beaucoup d'autres ; mais
ceux dont je viens de parler conviennent contre un grand
nombre de maladies, et à diverses natures, selon
qu'on peut se procurer facilement chacun d'eux, et pourvu
qu'on le récolte dans la meilleure saison. On
augmenterait encore le nombre de ces médicaments,
si on voulait les mêler ensemble; cependant chacun
d'eux ne s'allie pas bien à tous les autres :
les uns, parce que, ayant une action très rapide
et très brûlante, ces qualités s'augmenteraient
encore si on les mêlait ensemble, comme les baies
de Gnide, les tithymalles, le concombre sauvage et l'euphorbe;
on aurait donc tort de mêler ensemble soit ces
médicaments, soit d'autres semblables, si l'on
ne veut pas accroître encore les inconvénients
de la purgation par la prédominance des vomissements,
par les douleurs du ventre, par une soif inextinguible,
par la colliquation, ou en général par
la tendance de la purgation à dépasser
facilement la mesure. C'est là une des espèces
de mélange qu'on ne peut pas opérer; un
autre consiste à mêler des médicaments
très faibles avec d'autres qui le sont également
: en effet, quel avantage en faveur de la purgation
l'un retirera-t-il de l'autre, si tous deux sont faibles?
Il ne convient donc pas de mêler ces médicaments
ensemble; mais on ne doit pas non plus mêler les
médicaments qui purgent par le haut à
ceux qui purgent par le bas, à moins qu'on ne
veuille préparer des médicaments douteux;
enfin il ne convient pas de mêler ensemble les
médicaments qui nuisent à l'orifice de
l'estomac, comme la scammonée, le sureau et le
chou marin, car ils ont besoin d'autres adjuvants. Comme
nous donnons certains purgatifs, soit bouillis, soit
réduits en poudre, en les râpant, ou en
les pilant à l'état sec, et qu'il y a
certains médicaments dont nous administrons le
suc, d'autres dont nous employons les racines; il ne
serait pas extrêmement aisé non plus de
mêler les ingrédients cuits aux ingrédients
crus, et les racines aux sucs. Par rapport aux maladies,
la meilleure doctrine à professer, quand il s'agit
de purgatifs, c'est de connaître la nature de
chacune d'elle et de savoir en quoi l'une diffère
principalement de l'autre, et après qu'on aura
appris cela, de vérifier, en outre, à
quelle maladie appartient chaque médicament;
car on ne voudra pas mêler ensemble les médicaments
qui conviennent à des maladies complètement
opposées. Ce qui nous reste donc à faire,
c'est de donner les médicaments en tempérant
les échauffants par les refroidissants, les énergiques
par les faibles, et ceux qui ont d'autres inconvénients
par les correctifs, comme la feuille de pouliot, de
calaminthe, de thym, la graine de persil, de daucus,
d'anis, le sel, le poivre et d'autres ingrédients.
Quelques-unes de ces substances sont des auxiliaires
pour la purgation, comme le poivre et le sel : d'autres
empêchent la superpurgation, comme les graines
qui passent par les urines ; d'autres enfin conduisent
le médicament vers les matières qui ont
besoin d'être évacuées. Si, par
exemple, aux médicaments contre la jaunisse on
mêle des ingrédients diurétiques,
et surtout la calaminthe, ou l'absinthe, ils purgeront
plus promptement le foie. De même si, pour un
sujet qui a des maux de tête, ou dont la vue est
affaiblie, on mêle au médicament purgatif
du sagapène, ou de l'opopanax, ce mélange
chassera plus promptement les matières de la
tête [que si on donnait le purgatif seul, quoique
ces médicaments soient très rebutants
; mais il n'est pas possible d'attirer convenablement
les matière; d'en haut sans eux. Les médecins,
qui, en faveur d'un malade affecte de léthargus,
combinent le castoréum avec la scammonée,
purgent comme il faut, et ont, du reste, inventé
en même temps un mélange plus approprié
à la maladie que tout autre. De même il
est utile de donner à une femme dont les règles
sont supprimées, le purgatif uni à la
décoction d'armoise, de sauge, ou de quelque
autre ingrédient qui provoque les règles;
car il est arrivé souvent qu'outre la purgation,
l'évacuation utérine a reparu en même
temps. On prendra le même soin pour les malades
affectés de pleurésie, ou de péripneumonie,
si ces malades ont aussi besoin d'une purgation; car
le concombre sauvage, la scammonée et l'ellébore
chasseront mieux les matières de la poitrine,
si l'on y ajoute de l'agaric, que si l'on donne seul
quelqu'un de ces médicaments. Ils produiront
le même effet, si l'on y ajoute de la gomme ammoniaque;
car ce médicament est très-propice à
la poitrine et au poumon. Contre les vers, on mêle
avec avantage au médicament purgatif, s'il s'agit
du ver large (tænia), du pouliot, du petit tournesol,
de l'hysope, de l'origan, ou bien un peu de bitume de
Judée; car ces médicaments tuent le ver,
et le purgatif l'expulse ; s'il s'agit de vers ronds
(lombrics), on y mêlera une décoction de
bugrane, ou de l'absinthe, de la graine d'ortie, du
cumin d'Éthiopie, de la racine, ou de l'écorce
de chou; car ces médicaments tuent aussi les
vers, et le purgatif les expulse. Tels sont les soins
que le médecin doit prendre par rapport à
la mixtion, quand il administre des purgatifs; car,
eût-il beaucoup appris, soit par sa propre expérience,
soit par celle des autres, s'il ne songe pas aux précautions
que nous venons d'exposer, ainsi qu'aux autres qui pourraient
encore devenir nécessaires, ce médecin,
à mon avis, ne serait pas plus compétent
qu'un homme étranger à la médecine,
pour porter un jugement sur les purgatifs. On doit encore
prendre en considération ce qui suit : quelques
individus, après avoir bu un médicament
pour se purger, n'ont pas de purgation du tout; d'autres
éprouvent une purgation exagérée
et pénible: on doit être en mesure de porter
remède à ces accidents. On a déjà
exposé le régime qu'il faut observer avant
de prendre un purgatif, et la plupart de ceux qui observèrent
ce régime n'eurent besoin d'aucune autre précaution.
Mais si, après qu'on a bu le médicament,
des vomissements viennent à la traverse, comme
cela arrive aussi après l'ingestion de substances
indifférentes, à cause de leur goût
désagréable, de quelque soupçon
de la part du malade, du défaut d'habitude, ou
de la langueur de l'orifice de l'estomac, on donnera
à mâcher, tantôt du céleri
trempé dans du vinaigre, tantôt une olive
blanche salée, tantôt enfin on mettra un
grain de sel dans la bouche, surtout quand le médicament
est amer, car ces précautions empêchent
les vomissements; la coriandre, le pouliot, ou la calaminthe,
ont le même effet, si on les fait respirer. Ce
qui vaut mieux encore, c'est de se reposer un peu dans
le lit, en tenant le ventre et les pieds chauds; car
une promenade faite immédiatement après
excite souvent des vomissements, de la cardialgie et
des vertiges. C'est seulement lorsque les malades peuvent
agir librement, qu'il faut les mener à la promenade,
en leur prescrivant de se mouvoir doucement; car cette
façon d'agir provoque plutôt [les purgations]
que si on marche vite; en effet, une promenade prolongée
et rapide, lors même qu'elle ne cause pas de fatigue,
arrête souvent complètement l'effet de
la purgation. Quand la purgation va avoir lieu, on se
couche et on se repose sans dormir; car, de cette façon,
les matières se détachent plus facilement.
Il faut alors, dans les intervalles, avaler par petites
gorgées de l'eau chaude; cela apaise les pincements
et provoque les évacuations. Si la purgation
n'a pas lieu, on boira de l'eau miellée et de
la soude brute fondue dans de l'eau; il vaut mieux appliquer
aussi un suppositoire fait avec du sel, de la soude
brute, de la pierre de Magnésie, de l'alun, du
pain de cochon, des baies de Cnide, du fiel de boeuf,
ou de la racine de bryone, appelée aussi épilatoire;
ce suppositoire convient surtout aux gens qui sont incommodés
par la pituite, tandis que l'absinthe est plus utile
quand la bile prédomine. Si beaucoup de vents,
se formant peu à peu, distendent l'intestin de
manière à ne laisser rien sortir, on mêlera
de la rue, du cumin, de la menthe, ou de la résine
à du miel cuit : quand les vents se sont précipités
par le bas, la purgation suit immédiatement.
Quant à l'emploi des lavements pour provoquer
les évacuations, il faut avouer que ce moyen
est bien trouvé contre les étouffements
produits par l'ellébore ; mais il ne sert pas
à grand chose dans le cas où la purgation
ne chasse pas les matières par le bas, peut-être
même est-il nuisible; en effet, l'intestin étant
plein, il y a danger que le lavement injecté
ne déborde vers le haut, et ne provoque des douleurs
de la même manière que si, après
avoir donné un premier lavement, on en administre
immédiatement après un second, avant que
le premier n'ait été rendu. C'est surtout
pour les médicaments violents qu'il faut redouter
les rétentions, car, s'ils ne passent pas, ils
entraînent bientôt l'hydropisie. Il pourra
se produire encore d'autres accidents fâcheux
du côté de l'orifice de l'estomac, de l'estomac
lui-même, du foie, ou de la rate; chez quelques-uns
aussi, toute l'habitude du corps se décolore
plus ou moins. Quant aux médicaments plus doux,
il n'y a aucun danger, s'ils ne purgent pas, surtout
ceux que nous administrons sous forme de décoction,
comme la mercuriale et les feuilles de sureau. Il n'y
a rien non plus à appréhender si l'aloès,
l'agourre, l'agaric, ou les rameaux de couleuvrée
ne purgent pas : c'est même quelque chose de spécial
à ces rameaux de produire une purgation insuffisante,
car la racine est la partie la plus efficace de la plante.
Si donc vous administrez un purgatif, observez, en outre,
s'il ne survient aucun accident fâcheux, afin
que, dans chaque cas particulier, vous puissiez avoir
con-fiance, ou craindre comme un homme d'expérience.
On examinera encore s'il n'y a pas quelque autre évacuation
qui empêche la purgation; ainsi beaucoup de malades
n'évacuent rien par le bas, parce qu'ils avaient
transpiré, ou uriné, ou vomi; dans ce
cas l'inconvénient est moindre, puisque, en réalité,
ils sont purgés d'une autre façon. On
fera aussi attention à la qualité et à
la quantité des matières expulsées,
surtout à la qualité, car c'est là
un point plus important que la quantité; en effet,
plusieurs malades ont pu supporter avec facilité
des évacuations qui semblaient dépasser
la mesure; il vaut mieux, pour cette raison, regarder
la tolérance comme une preuve qu'on est resté
dans la juste mesure. Si les malades s'affaiblissent
ou pâlissent, si leurs extrémités
se refroidissent, ou s'ils sont pris de convulsions,
on arrêtera la purgation ; si le médicament
donne des signes de sa présence, circonstance
qui est indiquée par les éructations,
on fera boire de l'eau chaude et on excitera aux vomissements
; dans le cas contraire, on administrera de l'eau, à
moins que cela ne soit désagréable d'une
autre façon au malade, mais on ne fera pas vomir;
souvent, en effet, une grande quantité d'eau
prise d'un seul coup a suffi pour arrêter les
selles, tandis que, si on en boit à petites gorgées,
cela favorise plutôt les évacuations. On
n'agira pas trop mal non plus, en pratiquant sur les
mains et sur les pieds des malades des onctions avec
de l'huile chaude; mais, s'ils éprouvent un refroidissement
plus prononcé, on appliquera des bandes aux extrémités,
et, en général, on fera successivement
tout ce qu'on fait habituellement dans le choléra,
car, dans ce dernier cas, comme dans une purgation artificielle,
il y a danger que l'évacuation ne dépasse
la mesure. Le sommeil et un bain modérément
chaud arrêtent aussi efficacement que tout autre
moyen la purgation; chez la plupart des malades les
bains sont utiles après la purgation; au contraire,
ceux qui n'ont pas été suffisamment purgés
doivent s'en abstenir, car, pendant la nuit, ils éprouvent
une purgation supplémentaire. Après la
purgation on suivra un régime rigoureux composé
de mets farineux et d'assaisonnements, puis on prendra
du vin d'une âpreté assez prononcée,
et après cela de la ptisane passée, ou
quelque autre bouillie farineuse ; si le malade a de
l'appétit, on donnera des oeufs, de l'alica,
ou de la bouillie, et du vin d'un goût sucré,
lequel adoucit l'intestin qui a été raclé
pendant la purgation. Le lendemain il convient de boire
du lait, auquel on ajoute du miel, ou du vin d'un goût
sucré, car, en emportant ainsi par le lavage
les matières provenant de la fonte du corps,
et qui affluent vers l'intestin, on rendra la purgation
complète. On restaurera ensuite petit à
petit le malade par des promenades, des frictions, des bains, des aliments, ainsi que par
les autres moyens diététiques, jusqu'à
ce qu'on ait ramené le corps à son état
primitif et naturel, car c'est là l'état
le plus convenable pour celui dont la santé est
bien confirmée. Voilà ce que nous avions
à dire sur les médicaments qui purgent
par le bas; puis nous avons énuméré
dans la première partie ceux qui purgent par
le haut; il faut donc aussi faire connaître ce
qu'il convient de dire sur ces médicaments. Le
plus actif de tous est l'ellébore blanc; le sésamoïde
est le second, la staphisaigre le troisième;
les fleurs et les fruits du genêt d'Espagne le
quatrième; les autres ont une action moindre.
On pourra tomber aussi sur un médicament qui
ne semble pas très efficace, et qui cependant
pourra produire une purgation abondante; dans ce cas,
c'est quelque aliment, quelque boisson, quelque nouvelle,
ou quelque autre circonstance qui a rendu les selles
et les vomissements désordonnés; mais,
en général, les médicaments susdits
méritent la préférence, quand il
s'agit de purger par le haut. L'ellébore semble
être le médicament le plus redoutable par
les accidents qu'il cause : voilà pourquoi la
plupart des malades et des médecins le redoutent;
mais, s'il est donné par quelqu'un qui connaît
très-bien l'art de l'administrer, on verra qu'aucun
autre n'est plus commode, et par la sûreté
des purgations qu'il produit, et par l'absence complète
de tout accident fâcheux. Il convient contre la
folie, la mélancolie, la podagre, les douleurs
chroniques de la hanche, la goutte, l'épilepsie,
la paralysie, les vertiges par influence divine, les
maux de tête de longue durée, la stupeur
de l'intelligence, l'alphus, la lèpre et toutes
les autres maladies de la peau qui produisent des efflorescences
et la chute des cheveux et des poils de la barbe; il
convient encore à ceux qui sont étouffés
pendant la nuit par le cauchemar et aussi contre l'hydrophobie,
soit que les malades aient déjà réellement
peur de l'eau, ou qu'il s'agisse de prévenir
cette peur, en administrant une potion dans l'intervalle.
Il y a déjà longtemps que les paysans
ont reconnu cela; ils purgent les chiens avec de l'ellébore,
quand ils sont malades; ce n'est que beaucoup plus tard
que les médecins se sont avisés de donner
ce médicament à l'homme affecté
d'une maladie semblable. Hippocrate, qui a constitué
notre art, ordonnait aussi de l'ellébore le jour
même, ou le lendemain, après la luxation
d'une grande articulation avec plaie, et dans le cas
de fracture avec saillie des os, pensant que les malades
pourraient peut-être échapper à
la gangrène et aux convulsions par l'effet du
médicament, bien qu'ils fussent, du reste, dans
un état fâcheux; il n'est pas facile de
refuser sa confiance à ces conseils, puisqu'ils
sont donnés, comme on voit, par le meilleur des
médecins; cependant ils sont difficiles à
mettre en pratique, puisqu'ils causent de l'embarras
à celui qui les emploie; si quelqu'un était
d'avis qu'Hippocrate recommande ici l'ellébore
noir, nous répondrons d'abord que l'administration
de cette espèce donne lieu aussi à des
difficultés, quand le malade veut aller à
la selle, ou quand il est pris de quelque autre symptôme
fatigant sous l'influence du médicament; et,
en second lieu, son activité n'est pas proportionnelle
à l'effet qu'il doit produire, mais beaucoup
trop faible pour sauver d'un état aussi grave;
il vaudra donc mieux peut-être ne pas donner l'ellébore
à ceux qui sont dans cet état, attendu
qu'il y a du doute. Ce médicament peut s'employer
aussi dans certains cas de fièvre quarte, mais
jamais dans aucune autre fièvre. L'ellébore
convient encore contre les calculs des reins, les indigestions
habituelles, la leucophlegmatie, les maladies de la
rate et les affections carcinomateuses occultes, bien
qu'il ne semble pas convenir du tout pour les ulcères
; toutefois j'ai connu une femme qui fut délivrée
d'un ulcère pareil après avoir été
purgée par un des médecins de Cos qui,
du reste, n'était pas très renommé,
mais qui avait une grande expérience de l'ellébore.
Telles sont les maladies pour lesquelles on peut administrer
l'ellébore; cependant il ne suffit pas que la
maladie se prête à l'emploi du médicament,
si les autres circonstances ne concordent pas également;
nous avons traité plus haut ce sujet, et nous
avons indiqué les circonstances dont l'absence
permet les purgations par le haut, et la saison de l'année
où on peut les prescrire; il s'agit maintenant
de dire quels sont les temps opportuns par rapport à
la maladie; ils sont au nombre de deux : l'un se rapporte
à l'ensemble de la maladie, et l'autre aux accès
et à leurs intervalles. Par rapport à
l'ensemble de la maladie, il faut admettre la règle
suivante : si la maladie est du nombre de celles qui
sont naturellement chroniques, il vaut beaucoup mieux
donner le médicament au commencement, puisqu'il
aura l'utilité la plus prononcée, quand
la maladie est encore faible. On donnera donc immédiatement
l'ellébore dans l'aliénation mentale,
la goutte, la psore, l'engourdissement des nerfs, avant
que la maladie ne soit devenue trop forte, même
pour ce médicament; car, en général
ces maladies ne deviennent incurables que par l'effet
de l'habitude et du temps, tandis qu'elles sont très-facilement
guéries, si elles rencontrent un malade docile
et un médecin hardi. S'il s'agit d'une de ces
maladies douteuses qui peuvent se décider rapidement,
ou après un long intervalle, on ne donnera pas
le médicament de suite, mais quand la maladie
aura passé à l'état chronique.
C'est là ce qu'il faut observer pour la maladie
prise dans son ensemble; quant aux accès, on
prescrira le médicament longtemps avant leur
invasion, lorsque les intervalles sont longs et réguliers;
mais, quand ils sont courts et irréguliers, on
le donnera immédiatement après leur terminaison,
surtout dans l'épilepsie car, si cette affection,
qui prive les malades de la voix, du sentiment et du
libre emploi de tous leurs organes, coïncidait
avec l'action du médi cament, on aurait à
redouter quelque accident terrible. Dans les maladies
continues, le temps opportun se déduit en partie
de la saison de l'année, et en partie du désir
et de la disposition d'esprit du malade, circonstances
qui dépendent de l'état actuel et des
forces du corps, ainsi que de l'emploi des moyens préparatoires
nécessaires. Ce sont là les choses qu'il
faut considérer en premier lieu, mais, quand
on a résolu de donner de l'ellébore, on
doit soumettre le malade à un certain régime;
il consiste à habituer aux vomissements ceux
qui vomissent difficilement et à renforcer toute
l'habitude du corps, car c'est avant tout la force qui
est indispensable pour ce médicament. On fera
vomir aussi bien après le dîner qu'à
jeun, et après l'administration de l'origan,
de l'hysope, du raifort, ou de la roquette ; on n'amaigrira
pas le corps trop longtemps d'avance par les vomissements.
Si on vomit assez facilement, il suffit de vomir trois
fois, la première fois après dîner,
la seconde à jeun et la troisième après
l'emploi du raifort, ou de quelqu'une des autres substances
susdites; c'est surtout de cette manière qu'on
traitera les gens pituiteux, tandis que les vomissements
à la suite du dîner conviennent à
ceux qui sont plutôt bilieux; après le
vomissement, on attendra deux ou trois jours. Celui
qui vomit difficilement doit y être habitué
pendant un plus long espace de temps, et les vomissements
successifs doivent être séparés
par un espace de plusieurs jours; quand le malade est
convenablement exercé et que le temps de donner
le médicament s'approche, les vomissements doivent
se suivre de plus près; enfin, après le
dernier vomissement, on attendra un jour, pendant lequel
on provoquera une évacuation à l'aide
d'un lavement; on donnera ensuite un bain au malade
et on lui fera manger une petite quantité de
quelque mets farineux pour lui administrer le lendemain
l'ellébore, après l'avoir frictionné doucement avec de l'huile. On donne l'ellébore de plusieurs
manières : on peut le macérer pendant
un jour et une nuit dans de l'eau, y mêler de
l'origan, de l'absinthe, ou de la soude brute, puis
faire bouillir la macération avec du miel et
donner cette préparation à boire; ou bien
faire macérer l'ellébore, tantôt
avec de l'eau, tantôt avec du vin d'un goût
sucré, tantôt avec du vin ordinaire ; il
semble que l'ellébore, préparé
avec du vin, a plus spécialement la propriété
d'expulser les matières noires. Quelques-uns
y mêlent. de la thapsie, d'autres du sésamoïde,
d'autres encore de la staphisaigre, dans le but de provoquer
plus fortement les vomissements; mais on a la faculté
de purger comme il faut en augmentant la dose de l'ellébore.
Si on a le temps, on pourra inventer un très
grand nombre de préparations pour l'ellébore
; ainsi, passant sous silence les mélanges très
variés, je dirai que les anciens ont essayé
de faire vomir en employant l'ellébore comme
suppositoire, et en le faisant respirer; de ce nombre
est Plistonicus : il faisait quelquefois des suppositoires
avec l'ellébore, les introduisait dans l'anus,
et provoquait ainsi des vomissements ; d'autres fois
il mêlait du vin d'un goût sucré
à l'ellébore, et prescrivait de le respirer
avec du fiel de boeuf, sans se moucher et sans cracher,
autant que possible; si on fait cela, dit-il, il surviendra
facilement des vomissements, surtout si on continue
cette façon d'agir pendant un certain espace
de temps. Dioclès préparait aussi avec
l'ellébore un pessaire qu'il appliquait contre
l'utérus pour provoquer des vomissements. Dieuchès
administrait l'ellébore en cataplasme sur le
pubis ; actuellement on fait aussi des affusions sur
les pieds avec l'ellébore, bouilli dans de l'eau
de mer, en y ajoutant de l'huile d'alcanna et de la
soude brute: ce traitement est suivi de vomissements
pituiteux, qui semblent utiles contre le podagra et
contre la goutte. C'est ainsi que les médecins
ont inventé mille manières d'administrer
ce médicament chez différents malades
; il est encore à ma con-naissance que Philotime,
quand il avait surtout besoin d'une purgation douce,
n'administrait pas l'ellébore après dîner,
mais faisait la prescription suivante : transpercez
des raiforts avec de l'ellébore, et donnez le
lendemain [matin] ces raiforts à manger ; de
cette manière, le malade aura des vomissements
très-intenses, mais moins forts que s'il avait
pris de l'ellébore. La manière la plus
efficace et la meilleure d'employer l'ellébore,
c'est de le couper en morceaux aussi grands que de l'alphiton
écrasé. Qu'on le coupe avec ou sans la
moelle, cela ne fait aucune différence, car la
moelle ne cause aucun bien, ni aucun mal; seulement
il faut le couper en morceaux de même grandeur,
et si on veut plutôt purger doucement, on coupera
les morceaux un peu plus grands que d'ordinaire; si,
au contraire, on veut purger plus fortement, on les
coupera plus menus ; cependant la différence
ne doit pas être très-grande. Il vaut mieux
aussi prendre des morceaux qui proviennent tous de la
même racine, et qui ont la même épaisseur,
afin qu'ils conservent cette même épaisseur,
quand on les coupe; si cela ne se peut pas, on écrasera
perpendiculairement les morceaux les plus épais
pour leur donner la même épaisseur que
les morceaux les plus minces. Celui qui ne tient aucun
compte de ces préceptes se montre très-ignorant,
et, s'il administre des morceaux coupés très-menus,
il s'expose à voir la purgation se prolonger
et s'accompagner soit d'étouffements, soit d'autres
accidents.
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